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ukraine - Page 12

  • Tour d'horizon... (228)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur La Voie de l'épée, Michel Goya nous livre une première analyse de la guerre russo-ukrainienne...

    L’infanterie, les chars et la guerre en Ukraine (1ère partie - Du design de l'acier)

    L’infanterie, les chars et la guerre en Ukraine (2e partie- Routes, bastions et corrosion)

    L’infanterie, les chars et la guerre en Ukraine (3e partie-Théorie de la ligne)

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    - le laboratoire d'idée Fondapol traduit une étude américaine de Lorenzo Vidino sur le développement d'un islamisme qui s'appuie sur le wokisme...

    La montée en puissance de l'islamisme woke dans le monde occidental

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  • L'Amérique dans la guerre Russie-Ukraine...

    Dans cette émission du Plus d’Éléments, diffusée par TV Libertés, une partie de l'équipe de la revue, autour d'Olivier François, revient, à l'occasion de la sortie du dernier numéro, sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, sur fond d’offensive américaine en Europe de l’Est, d’encerclement de l’ex-empire des tsars et de déferlante médiatique contre Poutine. Au menu également, la façon dont le "wokisme" s’attaque à la gourmandise et à l’art de vivre français, la dernière présidentielle avec Jérôme Sainte-Marie, les conséquences du vote musulman en faveur de Jean-Luc Mélenchon, la folie sanitaire avec les docteurs Knock de la vaccination et la naissance du capitalisme dans le luxe des cours de la Renaissance... On trouvera sur le plateau, François Bousquet, rédacteur en chef, Patrick Lusinchi, directeur artistique, Christophe A. Maxime et Rodolphe Cart...

          

                                             

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  • Guerre en Ukraine : quelle voie de sortie ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Renaud Girard cueilli sur Geopragma et consacré aux perspectives, encore lointaines, de sortie dans le conflit ukrainien. Grand reporter au Figaro, Renaud Girard est membre du comité d'orientation stratégique de Geopragma.

     

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    Guerre en Ukraine : quelle voie de sortie ?

    Comment arrêter la guerre fratricide d’Ukraine, déclenchée il y a trois mois par la Russie ? Il faut se rendre compte que ce conflit a déjà fait au minimum 20000 morts chez les Russes et un chiffre approchant chez les Ukrainiens. Les destructions sont gigantesques et pas seulement à Marioupol. Plus de six millions d’Ukrainiens, principalement des femmes, des enfants et des vieillards, ont quitté leur pays.

    Le bilan humain est donc déjà très lourd. On en n’est pas encore aux 100000 morts provoqués par l’invasion de l’Irak par les anglo-saxons il y a dix-neuf ans. Mais c’est un chiffre qu’on pourrait très bien atteindre un jour si le conflit se poursuivait à l’intensité actuelle. 

    Économiquement, les perspectives sont également sombres. Elles le sont pour les belligérants, mais aussi pour de nombreuses nations, en Europe et en dehors, qui sont pénalisées par l’interruption de leur commerce avec eux.

    L’Ukraine était devenue une superpuissance agricole, capable de nourrir quatre cents millions de personnes à travers le monde. Aujourd’hui elle a beaucoup de mal à exporter ses céréales. Ses débouchés sur la Mer Noire, les ports d’Odessa et de Mykolaev, subissent le blocus de la flotte russe de Sébastopol. Les exportations se font actuellement, au compte-goutte, par voie ferrée, via la Pologne, ce qui oblige à un pénible transbordement de wagon à wagon. L’écartement des rails n’est pas le même dans l’ancien empire russe qu’en Europe occidentale. 

    De nombreux pays d’Afrique (Egypte, Algérie, etc.) nourrissaient leurs populations grâce aux céréales ukrainiennes. Ce n’est plus possible. Le renchérissement des produits agricoles va créer des phénomènes de famine sur le Continent Noir.

    Une catastrophe économique se profile également pour la Russie. Elle a perdu des centaines de milliers d’ingénieurs du secteur de la high-tech, qui ont fui le pays dès le début de l’« opération militaire spéciale » de Poutine. Elle ne peut plus importer, depuis l’Occident, ou depuis les nations asiatiques alliées des Américains, les puces électroniques et les pièces détachées indispensables au fonctionnement de son industrie. Elle ne peut plus exporter une grande partie de son gaz et de son pétrole à ses clients européens habituels.

    En raison des sanctions qu’ils ont adoptées, les pays européens, obligés d’acheter du gaz de schiste américain liquéfié, vont payer des factures énergétiques astronomiques. Ils vont perdre aussi leurs débouchés commerciaux en Russie. Le marché russe représentait le quart des ventes de véhicules Renault. 

    Avec ses sanctions, l’Union européenne (UE) se tire une balle dans le pied, tout en avantageant commercialement les Américains, qui n’ont jamais entretenu de liens commerciaux importants avec le marché russe. Si les sanctions étaient politiquement efficaces contre les autocraties, cela aurait un sens. Mais l’histoire a prouvé qu’elles ne l’étaient pas. Les sanctions internationales n’ont nullement affaibli les régimes de Castro, Saddam Hussein, Khamenei, ou Kim Jong-un. Elles les ont renforcés. Il n’y a hélas aucune chance aujourd’hui pour que les sanctions fassent plier la Russie.

    Comme, en Occident, l’UE est la première pénalisée par cette guerre, elle devrait tout faire pour trouver une voie de sortie. Elle ne pourra pas compter sur ses alliés anglo-saxons. Ils sont indifférents à ce que le conflit se prolonge : il a permis à Boris Johnson de sauver son poste de premier ministre et à Joe Biden d’accroître la vassalisation politique et militaire de ses alliés européens.

    L’UE ne pourra pas compter sur la Russie non plus. La seule chose qui importe à Poutine est de sauver son régime. Peu importe que les Russes souffrent, l’important est que l’autocratie survive. Le président russe joue la montre, attendant la lassitude des pays européens et le retour des Trumpistes à Washington.

    Les Ukrainiens ne prendront pas non plus d’initiative de paix, car ils refusent, de manière compréhensible, de faire des concessions territoriales à l’agresseur, estimant qu’elles ne feraient que renforcer, dans le futur, son appétit.

    Il reste une étroite voie de sortie, qui est celle de l’Onu. Elle a été utile dans l’évacuation des soldats ukrainiens piégés dans l’usine Azovstal de Marioupol. La France pourrait saisir le Conseil de sécurité pour qu’un corridor naval strictement civil soit institué, depuis Odessa jusqu’au Bosphore. Asseoir à la même table les Ukrainiens et les Russes pour refaire de la Mer Noire un lac de paix est un défi relevable. Lever les sanctions empêchant les Russes d’utiliser les ports européens pour vendre leurs propres céréales ne représente pas un coût politique exorbitant. 

    Le jour où Russes et Ukrainiens accepteront de parlementer sur des dossiers techniques d’intérêt commun (exportations céréalières, gazoducs, etc.), une lumière apparaîtra au bout du tunnel.

    Renaud Girard (Geopragma, 2 juin 2022)

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  • Les nouveaux puritains contre la gourmandise...

    Le nouveau numéro de la revue Éléments (n°196, juin - juillet 2022) est en kiosque!

    A côté du dossier consacré aux attaques des néo-puritains contre la gourmandise, on découvrira l'éditorial d'Alain de Benoist, les rubriques «Cartouches», «Le combat des idées» et «Panorama» , un choix d'articles variés, des entretiens, notamment avec l'écrivain et exécuteur testamentaire de Céline, François Gibault, le politologue Jérôme Sainte-Marie, l'historien des idées Olivier Dard, le penseur eurasiste Alexandre Douguine, l'universitaire canadien Eric Kaufman, les écrivains Patrice Jean et Jean-Pierre Montal et le critique rock Patrice Eudeline...

    Et on retrouvera également les chroniques de Xavier Eman, d'Olivier François, de Laurent Schang, d'Hervé Juvin, de Nicolas Gauthier, de Bruno Lafourcade, de Guillaume Travers, d'Yves Christen, de Bastien O'Danieli, de Slobodan Despot et d'Ego Non ainsi que le reportage de Daoud Boughezala...

     

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    Au sommaire :

    Éditorial

    Le retour du rideau de fer. Par Alain de Benoist

    Agenda, actualités

    L’entretien

    François Gibault, voyage au bout de la liberté

    Cartouches

    L’objet politique : la révolution VHS

    Une fin du monde sans importance : la fracture. Par Xavier Eman

    Cinéma : Dérive sociale, de la crise à la fracture. Par Nicolas Gauthier

    Champs de bataille : Gustave II Adolphe de Suède. Par Laurent Schang

    L’albatroce. Par Bruno Lafourcade

    Économie. Par Guillaume Travers

    De quel avortement Fabrice Luchini est-il le fœtus ? Le regard d’Olivier François

    Bestiaire : Les chimpanzés aiment le rock et les cochons Pavarotti. Par Yves Christen

    Sciences. Par Bastien O’Danieli

    Le combat des idées

    Présidentielles : le vote de classe a bien eu lieu par Jérôme Sainte-Marie. Propos recueillis par François Bousquet et Pascal Eysseric

    Olivier Dard : le progrès a son dictionnaire. Propos recueillis par Olivier François

    Laurent Schang : comment l’armée russe poursuit sa mission. Propos recueillis par Pascal Eysseric

    L’OTAN se battra jusqu’au dernier Ukrainien. Par Hervé Juvin

    Les vérités d’Alexandre Douguine sur la guerre en Ukraine. Propos recueillis par Pascal Eysseric et Alain de Benoist

    Au Grand Palais éphémère : lumière sur quatre coups de cœur. Par Alix Marmin

    Entretien avec Patrick Eudeline : « Je suis païen ». Propos recueillis par Nicolas Gauthier

    Île de France : du rock identitaire à la chanson française. Par Nicolas Gauthier

    Patrice Jean et Jean-Pierre Montal : Pourquoi faut-il lire les classiques ? Propos recueillis par Thomas Hennetier

    Entretien avec Eric Kaufmann : quel avenir pour les Blancs en Occident ? Propos recueillis par Ethan Rundell et Thomas Hennetier

    L’éclairage de Guillaume Travers sur Werner Sombart. Propos recueillis par François Bousquet

    Amour, luxe et capitalisme : cherchez la femme ! Par François Bousquet

    Max Havelaar, le grand roman de la prédation capitaliste. Par Gérard Landry

    Le triomphe de Knock : la victoire posthume de Jules Romains. Par Christophe A. Maxime

    Julien Freund, le maître du politique. Par Gilles Banderier

    Dossier

    L’esprit gourmand

    Les nouveaux puritains contre la gourmandise. Par Pascal Eysseric

    Gauche ascétique contre gauche gourmande : le procès de la gourmandise. Par David L’Épée

    Pourquoi les Européens mangent-ils de plus en plus de viande ? Par Guillaume Travers

    Des racines et des algues : les Roellinger ou le goût de la Bretagne. Par Alain Lefebvre

    Pampille, Caroline Haedens et Marie Delcourt, trois bibles de la cuisine. Par Françoise Monestier

    Panorama

    L’œil de Slobodan Despot

    Reconquête : les ciels d’avant. Par Slobodan Despot

    La leçon de philo politique : Dante. Par Ego Non

    Du vague à l’âme russe : Est-Ouest, le point de rupture. Un reportage de Daoud Boughezala

    Un païen dans l’Église : le saint Phallus bourguignon à Fontaine-les-Sèches. Par Bernard Rio

    C’était dans Éléments : Russie, l’histoire ouverte. Par Alain de Benoist

    Éphémérides

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  • Le Radeau de la Méduse...

    Nous vous signalons la parution récente du numéro 91 (équinoxe de printemps) de la revue Terre & Peuple, dirigée par Pierre Vial, dont le dossier est consacré aux apprentis-sorciers...

    Vous pouvez commander cette revue sur le site de Terre & Peuple.

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    Au sommaire du dossier :

    Ceux qui jouent avec le feu, par Pierre Vial

    Pour en finir avec le grand remplacement, par Alain Cagnat

    Dossier Ukraine - Les origines de la guerre, par Alain Cagnat

    Dossier Ukraine - Les caractéristiques de la guerre, par Alain Cagnat

    Dossier Ukraine - Les conséquences de la guerre, par Alain Cagnat

    Le projet rouge et noir, par Georges Feltin-Tracol
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  • Rester humble face au cours de la guerre...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexis Feertchak, cueilli sur Geopragma et consacré aux évolutions possibles du conflit russo-ukrainien. Alexis Feertchak est journaliste au Figaro et membre fondateur de Geopragma.

     

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    Rester humble face au cours de la guerre

    La guerre fait partie de ces objets que l’on nomme complexes, non au sens prosaïque de « compliqué », mais au sens technique de « ce qui ne peut être réduit à plus simple que lui-même ». Le seul moyen de savoir sur quelle face un dé tombera est… de lancer le dé. Il en va largement de même pour la guerre : en prédire le cours n’est pas chose aisée, même quand tout semble déjà écrit. En 2003, l’invasion américaine de l’Irak commence le 23 mars et se termine dès le 1er mai. « Mission accomplished », ose alors le président George W. Bush. Une victoire américaine n’était-elle pas inéluctable étant donné le rapport de force ? Et pourtant, ce n’est que le début de la guerre. Elle se termine piteusement en 2011 par le retrait des forces américaines. Le 9 juin 2014, la ville de Mossoul est conquise par l’Etat islamique : rétrospectivement, le doute n’est plus possible, l’aventure américaine en Irak s’est bien soldée par une défaite. Le cours de la guerre obéit au règne de l’indétermination contre lequel tous les raisonnements déterministes achoppent un jour ou l’autre brutalement. La prudence doit être de mise pour un chef d’Etat quand il se fixe des buts de guerre ou quand il choisit l’usage de la force, dans le cas où il ne verrait pas d’autre solution pour sortir d’une impasse politique. Ce n’est pas pour rien que Napoléon demandait à ses généraux s’ils avaient de la chance. Non que certains auraient été choyés par la fortune, mais la chance, ça se travaille : savoir agir dans l’indétermination et commencer par la reconnaître est une vertu.

    En Ukraine en 2022, les mêmes impairs ont été commis, des deux côtés. Qu’ils soient à Washington ou à Moscou, les « faucons » ont pour des raisons symétriques toujours surestimé la puissance de l’armée russe : les chars marqués de l’étoile rouge seraient à Kiev en quelques jours, pouvait-on entendre sur les plateaux télévisés, dans certaines chancelleries occidentales et probablement au Kremlin si on avait eu des oreilles jusque-là. Il n’en a rien été pourtant. Et il ne fait plus de doute aujourd’hui que l’Acte I de l’invasion russe de l’Ukraine a été un cuisant échec pour l’envahisseur. Ayant sous-estimé la volonté de se battre des Ukrainiens autant que leur solide préparation au combat organisée depuis 2014 par les Américains, les Russes ont connu dans la région de Kiev une déroute. Au-delà de leurs piètres qualités tactiques et opératiques, les Russes ont attaqué avec moins de 200.000 hommes un pays plus grand que la France sur trois fronts. C’était stratégiquement osé, voire présomptueux. Et l’évocation d’une guerre entre David contre Goliath était donc excessive quand on observe les principaux ordres de grandeur. L’avantage est certes du côté de Moscou, surtout en comptant les pièces d’artillerie, les avions et les blindés, mais les dernières estimations font état de 145.000 Ukrainiens au combat contre 160.000 Russes. On est bien dans le cadre d’un combat relativement symétrique, les Ukrainiens compensant en partie leurs faiblesses notamment par l’atout précieux du renseignement américain et aujourd’hui par la fourniture occidentale d’armes lourdes.

    Les rebondissements dans la guerre font que les opinions publiques oscillent déraisonnablement. Au commencement, la victoire russe apparaissait inéluctable. Puis le mythe de David contre Goliath a fait son œuvre : archaïque, corrompue, alcoolisée, désordonnée, démoralisée, décontenancée, désarmée, déshonorée, l’armée russe allait s’incliner face à une armée ukrainienne soudée, héroïque, agile, coordonnée, soutenue par ses alliés et portée par la providence. Vladimir Poutine allait voir son régime emporté par une défaite militaire prochaine. Et si cela ne suffisait pas, les sanctions feraient leur œuvre. Isolée et mise au ban de la communauté internationale, la Russie ne résisterait pas à cette tentation mortifère de restaurer l’Empire russe dans ses frontières historiques les plus étendues.

    De tout cela, il n’a rien été. Les sondages de l’institut Levada – classé comme agent de l’étranger à Moscou – révèlent que la population russe fait globalement bloc autour de Vladimir Poutine et de l’«opération militaire spéciale» – même si c’est pour partie peut-être plus par fatalisme que par enthousiasme. Soutenu par les achats occidentaux de gaz et de pétrole, le rouble s’est redressé, au point d’atteindre un niveau jamais atteint depuis 2015. Cela ne signifie évidemment pas que l’économie russe ne traversera pas une zone de profondes turbulences dans les prochains mois, mais force est de constater que le grand effondrement n’a pas encore eu lieu. De même, seule la communauté occidentale se détourne de Moscou : le reste du monde, qui représente bien plus de la moitié de la population mondiale, observe en spectateur une guerre qui ne le concerne pas. 

    Sur le terrain militaire, l’Acte II de la guerre en Ukraine, qui se déroule essentiellement dans le Donbass, tourne pour l’instant à l’avantage de Moscou : aidées par la puissance de feu de leur artillerie et par leur dominance – certes incomplète – dans les airs, les troupes russes ont percé en plusieurs points les fortifications ukrainiennes établies depuis 2014 et réduisent lentement mais sûrement les Ukrainiens dans des poches. La tenaille qui se forme au nord depuis Izium et au sud depuis Popasna place Kiev dans une situation inextricable : battre la retraite tant qu’il est encore temps ou recréer à Sieverodonetsk, à Lisichansk, à Lyman voire à Bakhmut des petits Marioupol. D’ici la fin de l’été, le même dilemme pourrait se présenter à Kramatorsk et à Sloviansk. Rien de tout cela n’est inéluctable : une contre-offensive ukrainienne – aujourd’hui arrêtée – par l’oblast de Kharkiv pourrait contraindre par le nord la manœuvre d’enveloppement russe si celle-ci voit ses lignes logistiques menacées. De même, l’on ne peut exclure non plus une contre-offensive sur le front du Sud à Kherson : si les Ukrainiens réalisaient une percée à travers la seule capitale régionale que contrôle Moscou, ils s’approcheraient de la Crimée et menaceraient le seul gain stratégique obtenu aujourd’hui par la Russie, à savoir la création d’un corridor terrestre entre la péninsule criméenne et les deux territoires séparatistes de Donetsk et Lougansk.

    Et si – et seulement si – Moscou parvenait d’ici la fin de l’été à ses fins dans le Donbass, quid de la suite ? Russes et Ukrainiens seront-ils prêts à une paix négociée qui aboutirait de facto à des gains russes équivalents à 120.000 km2 (en comptant les oblasts de Lougansk, de Donetsk, de Kherson, la moitié de celui de Zaporijjia, ainsi que l’ensemble de la Crimée) ? Cela représente quatre fois la taille de la Belgique, une fois et demi l’Autriche, trois fois le Danemark ou la moitié du Royaume-Uni. Ou est-ce que Vladimir Poutine disposera des forces pour consolider ses positions et se fixer de nouveaux objectifs militaires ? On peut en imaginer plusieurs : les Russes pourraient tenter de pousser plus à l’Ouest vers Odessa – en passant par Mikolaïv – de sorte à rejoindre la Transnistrie – territoire séparatiste prorusse de Moldavie, ce qui reviendrait à priver l’Ukraine de tout accès à la mer en recréant la Novorossia, province de l’Empire russe constituée au 19ème siècle des territoires conquis à l’Empire ottoman ? Et/ou chercheront-ils à remonter le long du Dniepr en attaquant les capitales régionales de Zaporijjia puis de Dniepro ? Ou tenteront-ils une nouvelle fois de prendre Kharkiv, deuxième ville d’Ukraine par sa population ?

    Tous ces scénarios de prospective nous projettent en réalité déjà à l’hiver 2022, voire en 2023. D’ici-là, quelle sera la situation énergétique en Europe ? À combien les prix à la pompe et les factures d’électricité et de gaz s’élèveront-ils ? Le sentiment pro-ukrainien des opinions publiques occidentales sera-t-il toujours aussi puissant ou s’émoussera-t-il ? L’unité politique des Etats occidentaux se maintiendra-t-elle ou des divisions surgiront-elles sur l’étendue des sanctions, que l’on entraperçoit déjà ? À combien le nombre de réfugiés ukrainiens en Europe se chiffrera-t-il ? Joe Biden remportera-t-il les « midterms » aux Etats-Unis ? Volodymyr Zelensky sera-t-il toujours auréolé, en Ukraine et en Occident, de la même couronne d’épine qui lui offre la gloire dans la douleur ? Et que diront les Russes si la guerre s’installe dans la longue durée ? Toutes ces questions se posent déjà, mais aucune réponse ne peut rationnellement être apportée aujourd’hui. C’est à travers cette myriade de questions, toutes intriquées, que se forme un brouillard d’incertitude et que se déploie la complexité d’une guerre dont le cours n’est pas prévisible. Ce serait pécher par orgueil que de répondre trop tôt à ces questions, mais les ignorer serait inconséquent. Par-delà les passions politiques, même vertueuses, rester humble face à la guerre est un moindre mal sans doute insuffisant, mais au moins nécessaire. 

    Alexis Feertchak (Geopragma, 24 mai 2022)

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