Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mondialisme - Page 10

  • Un plaidoyer pour la France !...

    Collaborateur régulier de la revue Éléments et auteur d'un article sur le Risorgimento paru dans le dernier numéro de Nouvelle ÉcoleYves Branca a eu l'amabilité de nous communiquer une note de lecture sur l'essai de Marine Le Pen, Pour que vive la France, dont nous avions signalé la parution. 


    Pour que vive la France.gif


     

    Le plaidoyer de Marine pour la France

    Le manifeste d’une très singulière candidate à la présidence de la République Française était attendu depuis le 15 janvier 2012. Paru enfin le premier février, il est en tout point étonnant, dans ce qu’il a de meilleur ; il a aussi des parties plus faibles - mais le meilleur domine, et je vais dire pourquoi c’est justement dans celles-ci que l’on peut voir le plus grand signe de force. 

    La forme même de ce livre l’éclaire. Quand elle a dû choisir une profession, Marine Le Pen a voulu devenir avocate, tout court, et non pas « avocate d’affaires », comme bien des politiciens; avocate, elle l’est restée, en grand, et son livre est précisément un plaidoyer « pour que vive la France ». Marine est excellente oratrice, et de discours en discours, à chaque étape de sa campagne, elle s’élève un peu plus vers les sommets de l’éloquence. Son langage est simple, clair, et moderne en ce sens qu’il est celui du meilleur usage d’aujourd’hui, mais elle sait construire une longue période; et si l’on étudiait encore la rhétorique, on pourrait trouver dans ses discours d’excellents exemples de tropes par fiction, par réflexion, et surtout par opposition: elle excelle singulièrement dans la prétérition, et l’ironie. La forme seule de son livre suffirait donc à prouver qu’il est entièrement et le fruit d’une réflexion personnelle de plusieurs années, et de sa plume, en un temps où la plupart des innombrables livres de politiciens sont commis aux soins de petits grimauds. Or, des deux cents cinquante pages de son livre, on peut dire que les deux tiers, cent soixante-dix, soit toute la première partie et l’introduction à la seconde, sont très belles, et que, hormis dans certains passages techniques chiffrés et documentés, on y retrouve les meilleures qualités de son art oratoire ; mais que dernier tiers paraît écrit rapidement, voire par endroits hâtivement, (sauf les dix pages d’une brève troisième partie, excellent appendice sur « la refonte de l’école »). Plusieurs allusions à des faits et documents très récents montrent certes qu’elle y a travaillé jusqu’en janvier, dans les retailles du temps d’une extraordinaire activité. Mais là n’est pas l’explication. 

    La première partie caractérise le mondialisme, et décrit ses effets sur la France: « démonter les rouages d’une machine à broyer les peuples, c’est le premier pas nécessaire d’un vrai changement, et, j’ose le dire, d’une révolution ». La seconde partie donne en soixante pages les principes et esquisse les grandes lignes d’un projet national, d’un Etat « régalien, protecteur, et stratège », autrement dit, d’un Etat social, et, dans un bref paragraphe au titre d’ailleurs excellent (« L’Etat influent »), en cinq pages à peine, son projet européen et international. Voilà qui paraît un peu bref. Mais après son discours du 19 février à la Convention du F.N. de Lille, et la présentation le 21 février de son projet pour l’Europe des nations, tout s’éclaire: « Décrire nos souffrances, c’est certainement le plus simple de la réflexion qui a conduit à rédiger ce livre. Trouver les remèdes aux difficultés de notre pays, c’est encore relativement aisé. On pourrait se dire qu’à partir de là, il n’y a plus qu’à convaincre et à reconstruire. Reste que (…), parce qu’ils symbolisent le meurtre de la parole donnée en politique, Nicolas Sarkozy ou Jacques Chirac ont porté à l’attachement de notre peuple à la chose publique un coup dur, que d’aucuns craignent fatal » - avait écrit Marine dans l’introduction à cette deuxième partie. L’essentiel du livre est donc cette critique de la « métaphysique ultra-libérale » mondialiste, de la « financiarisation organisée de l’économie », et de leurs effets destructeurs sur la nation et le peuple par l’imposture « consubstantielle » d’une caste politique qui n’est plus qu’un appendice de l’«hyperclasse mondialisée »; et l’on trouve bel et bien dans cette réflexion la « synthèse de l’axe justice sociale-sécurité qui tend à supplanter l’axe gauche-droite », par quoi Robert de Herte caractérisait en 2004, dans le n° 112 d’Eléments, le populisme, auquel il voyait « d’autant plus d’avenir, que la politique institutionnelle en a de moins en moins »; sans d’ailleurs que ce terme de « populisme » n’apparaisse dans le livre de Marine. 

    Mais le 19 février, l’imposteur ayant déclaré qu’il prétendait à un second mandat, Marine a hautement revendiqué le populisme, et identifié comme « la seule forme actuelle de fascisme » le projet mondialiste d’écraser la démocratie sous les faux-semblants d’une alternance: sait-elle qu’elle retrouvait par là les prophéties sur le mondialisme de Pier Paolo Pasolini dans les Ecrits corsaires de 1972-74 ? (voir surtout les articles de juin et juillet 1974 sur Le fascisme des antifascistes); et le 21 février, plaidant pour l’Europe des nations, elle a attaqué en dénonçant, dans le nouveau MES (Mécanisme Européen de Stabilité), subrepticement approuvé le même jour par le Parlement français, l’établissement d’une « dictature de la finance », d’une « prison des peuples », et d’un « assujettissement des Etats par la dette ». 

    Si l’imposteur singe, parodie, simule, pour détruire, Marine, l’adversaire une fois caractérisé et désigné, « improvise » désormais, selon son projet de reconstruire. Cette métaphore est de Benedetto Croce, à propos de ce qu’il appelle le « sens de l’improvisation de l’histoire » des grands hommes. La grande politique consiste non pas en discours généraux, mais, comme en amour, à dire et faire ce qui convient, au bon moment, soutenu par des visions et des rêves magnifiques. 

    Ainsi prend corps ce que le manifeste de Marine annonçait si succinctement: elle a vraiment renoué avec le général de Gaulle, et ceux qui ont lu les Mémoires de guerre se souviendront de ce passage : « Ce dénuement même me traçait ma ligne de conduite. C’est en épousant, sans ménager rien, la cause du salut national que je pourrais trouver l’autorité (…). Tout limité et solitaire que je fusse, et justement parce que je l’étais, il me fallait gagner des sommets, et n’en descendre jamais plus ». 

    Yves Branca (2 mars 2012)

     

    POUR QUE VIVE LA FRANCE , par Marine Le Pen, Grancher, 252 pages, 15 Euros.

    Lien permanent Catégories : Livres, Points de vue 1 commentaire Pin it!
  • Election de François Hollande : Pierre Le Vigan analyse les résultats...

    Pierre Le Vigan, essayiste et collaborateur de la revue Éléments, tire un premier bilan, pour Métapo infos, de l'élection de François Hollande à la présidence de la République et dresse quelques perspectives...

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Pour qui voter ? Le point de vue de Pierre Le Vigan...

    Pierre Le Vigan, essayiste et collaborateur habituel de la revue Eléments, donne à Métapo infos son choix pour le deuxième tour de l'élection présidentielle...

    Lien permanent Catégories : Multimédia, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Pour que vive la France !...

    Publié aux éditions Grancher, Pour que vive la France nous livre la vision du monde qui sous-tend le programme présidentiel de Marine Le Pen. C'est bien fait, et il est intéressant de trouver au fil des pages des citations de Christopher Lasch, de Serge Halimi, de Maurice Allais, de Jean-Claude Michéa ou de Marie-France Garaud...

     

    Pour que vive la France.gif

    "Je ferai donc ici une analyse du projet mondialiste, du rôle joué dans sa réalisation par nos élites politiques, médiatiques et financières, de la guerre qu'elles mènent au peuple, à la République et à la Nation, et de la violence contre la démocratie à laquelle elles sont résolues pour se maintenir en place.
    Qui parle et pourquoi ? D'où parlent-ils, de quels intérêts dépendent-ils ? Qui dirige vraiment la France, et avec quels objectifs ? Démonter les rouages d'une machine à broyer les peuples, c'est le premier pas nécessaire d'un vrai changement et, j'ose le dire, d'une révolution, de la vraie révolution pacifique et démocratique que notre pays est en droit d'attendre".

     

    Lien permanent Catégories : Livres 3 commentaires Pin it!
  • Des médias en servitude ?...

    La fondation Polémia poursuit son travail d’analyse du phénomène médiatique. Après La tyrannie médiatique, le Dictionnaire de novlangue et le Dictionnaire de la réinformation, elle vient de publier Les médias en servitude. Il s’agit d’une étude serrée de la médiaklatura, cette centaine d’hommes et de femmes qui donnent le la à l’opinion, cette sainte alliance du trotskysme de salles de rédaction et du capitalisme financier.

    L'ouvrage est disponible gratuitement à la lecture ou au téléchargement (format PDF - cliquer ici). Il peut aussi être commandé en version papier (15 € franco de port) à :

    Polémia, 60 ter rue Jean-Jacques Rousseau, 92500 Rueil-Malmaison

     

     

    medias en servitude.jpg

     

    "En principe la France est une démocratie.

    Le suffrage y est libre. Le suffrage, sans doute, mais en est-il de même de l’information des électeurs?

    Assurément non ! Les médias asservissent et ils sont eux-mêmes asservis aux grandes puissances financières.

    Derrière une façade de diversité, les grands médias scénarisent l’actualité selon la même grille de lecture, celle de l’idéologie unique qu’ils partagent : laisser-fairisme et libre-échangisme économique, cosmopolitisme et sans-frontiérisme, rupture de la tradition et révolution des mœurs. C’est la sainte alliance du trotskysme de salles de rédaction et du capitalisme financier. L’union des milliardaires et de la médiaklatura.

    Le propos peut paraître polémique. Mais les faits accumulés dans cette étude, réalisée avec la collaboration de Claude Lorne, montrent, hélas, comment un tout petit nombre d’hommes a accaparé le contrôle des grands médias français.

    Voici quels sont les acteurs majeurs de cette prise de pouvoir sur les esprits :

    • – les banques : cinq d’entre elles siègent au conseil d’administration de Bouygues, propriétaire de TF1 ; Rothschild contrôle Libération ; Lazard siège au Monde ; et le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel se partagent la Presse quotidienne régionale (la PQR) à l’est d’une ligne Amiens/Marseille ;
    • l’industrie du luxe et les grandes fortunes : Bernard Arnault, Serge Dassault, François Pinault, Martin Bouygues, Vincent Bolloré, Arnaud Lagardère, Claude Bébéar sont omniprésents;
    • – les grandes agences de communication et de publicité : Euro RSCG de Stéphane Fouks et Publicis de Maurice Lévy sont au cœur des stratégies d’influence adossées à de puissants budgets ;
    • les paladins de « l’antiracisme » : Louis Schweitzer (la Halde), Pierre Bergé (SOS-Racisme), Bernard-Henri Lévy donnent le ton ;
    • – les grands éditocrates : Erik Israelewicz, Laurent Joffrin, Nicolas Demorand, Denis Olivennes ont un rôle clé, celui d’assurer la cohérence entre les bailleurs de fonds et les soutiers de l’information.

    En tout une centaine d’hommes dirige la machinerie qui règne sur les esprits. Il n’y a pas de chef d’orchestre clandestin. Mais tous ou presque participent au lieu de pouvoir le plus sélect de la classe dirigeante française : le Club Le Siècle. Cette classe dirigeante française n’a plus aujourd’hui ni vision nationale ni conscience européenne et n’est plus que la section française de la Superclasse mondiale (SCM).

    Notre société est de plus en plus exigeante en matière de transparence. Cette transparence doit aussi s’appliquer aux médias : leurs auditeurs et leurs lecteurs, qui sont aussi des électeurs, doivent savoir d’où ils parlent pour connaître les arrière-plans financiers, commerciaux, idéologiques ou communautaires qui structurent leurs prises de position et qui expliquent la disparition de tout véritable esprit critique.

    Ecartant toute polémique inutile, Polémia se borne à rassembler des faits. Des faits qui éclairent d’une lumière vive la médiaklatura."

     

    Au sommaire :

    1 Les médias tyranniques… mais eux-mêmes asservis


    2 M comme Milliardaires… et comme Médiaklatura


    3 Lagardère ou les missiles de l’information-désinformation


    4 OPA bancaire sur la presse régionale


    5 Libération, de l’anarchisme à… la banque


    6 Avec le « trio BNP », la fin du Monde ?


    7 Un très mauvais Bergé


    8 Xavier Niel, ou quand le porno mène à tout


    9 Pour Matthieu Pigasse, Le Monde, tremplin vers l’Elysée ?


    10 Louis Schweitzer, paladin de l’antiracisme et roi des cumuls


    11 La face cachée de BHL


    12 « Pure Players » ou purs désinformateurs ?


    13 Gros argent et corruption de mineurs : la preuve par Gulli et Skyrock


    14 TF1 ou comment rendre les cerveaux disponibles


    15 La publicité au service de la « diversité »


    16 Publicité et politique : la chute de DSK, une catastrophe industrielle


    17 L’opinion manipulée par les sondages


    18 Les hommes du Siècle au coeur du pouvoir


    19 Qui dirige l’information ? L’oligarchie mondiale et ses mercenaires hexagonaux

    Lien permanent Catégories : Décryptage, Livres, Manipulation et influence 0 commentaire Pin it!
  • Vertus et illusions du volontarisme de gauche...

    Nous reproduisons ci-dessous l'analyse par Pierre Le Vigan du court essai de Jacques Généreux, intitulé Nous on peut ! , récemment publié au Seuil et préfacé par Jean-Luc Mélenchon. Economiste, Jacques Généreux est sécrétaire national à l'économie du Front de gauche.

    Mélenchon.jpg

     

    Vertus et illusions du volontarisme de gauche

    Voilà un ouvrage sympathique dans son principe et agaçant par son contenu. La perspective de redonner enfin ses droits à la politique ne peut que plaire. L’idée qu’il n’y a pas une seule politique possible ne peut que convaincre. Mais Jacques Généreux, économiste proche de Jean-Luc Mélenchon qui préface son livre, pêche par optimisme. Il donne l’impression qu’une autre politique est non seulement possible mais facile. C’est sous-estimer l’ampleur des mutations à mener.

    Jacques Généreux croit pouvoir vraiment changer la France mais pour cela il lui faudrait abandonner un certain optimisme sociétal hérité des Lumières. Non, les hommes ne sont pas tous identiques, non on ne fait pas une révolution citoyenne avec des gens à qui on n’a rien appris des luttes sociales. Pour changer vraiment il faut revenir sur terre. La terre des hommes complexes et divers. Remettre en cause la libre circulation des capitaux oui mais il faut revoir aussi celle des hommes, ce que ne fait pas Jacques Généreux. La France ne peut pas être un hôtel, ou alors c’est la France qu’aime le grand capital : un simple segment du marché mondial.

    Pourquoi et comment notre auteur se trompe ? Explications. Le diagnostic porté par Jacques Généreux est pourtant juste. Nos gouvernants, dit-il, ont une idéologie : « une société de marché dans laquelle chacun est seul responsable de son sort et ne doit compter que sur sa capacité à s’engager dans la libre compétition avec tous les autres. » Nos gouvernants ont aussi un projet. Celui-ci n’est pas tant l’Etat minimal, qui serait conforme à leur doctrine. C’est bien plutôt la démocratie minimale. « Il s’agit de mettre l’Etat à l’abri des revendications populaires et d’exploiter au contraire sa puissance au service d’intérêts privés. » Le néo-libéralisme colonise ainsi l’Etat pour en faire sa chose.

    La mondialisation du capitalisme va avec sa financiarisation croissante : 98 % des transactions financières portent sur des produits financiers et non sur des biens économiques réels. L’argent n’est plus un moyen d’échange mais un but en soi. Les actionnaires exigent un taux de rendement de plus en plus élevé. L’élargissement de l’Europe (27 Etats et bientôt 28 avec la Croatie) a été conçue comme le moyen d’un dumping social. La thèse de Jacques Généreux est que ce qu’a fait une politique, une autre politique peut le défaire. On peut faire autrement que les néo-libéraux. « On » ? L’Etat contrôlé par des forces politiques nouvelles. Ni les libéraux ni les sociaux-libéraux mais la vraie gauche. Comment faire autrement ? En rompant avec le libéralisme. Jacques Généreux propose ainsi de refonder le système bancaire en séparant banques de dépôt d’une part, banques d’affaire et d’investissement d’autre part. Il faut aussi plafonner le rendement des actions. On doit encore monétiser une partie de la dette c’est à dire la transformer en création monétaire de la banque centrale. En ce qui concerne l’euro, Généreux préconise d’imposer sa réorientation et de n’en sortir qu’en dernier ressort. Il est selon lui possible de réorienter l’euro dans la mesure où seule l’Allemagne aurait intérêt à un euro fort. Un bloc européen pour un autre euro, ou éventuellement pour un euro zone sud, pourrait ainsi peser de manière décisive pour en finir avec l’euro « austéritaire ». Au minimum l’euro sera sauvé comme monnaie commune. Mais contrairement à Dupont-Aignan, Marine Le Pen et d’autres politiques y compris à gauche Jacques Généreux défend l’idée que l’euro pourrait aussi être sauvé comme monnaie unique, sous la forme d’un euro nouveau qui serait moins surévalué et donc meilleur pour la compétitivité de l’industrie française. Comment ? En restant dans la zone euro mais en sortant du traité de Lisbonne et en imposant une solidarité budgétaire européenne, une nouvelle politique de la Banque Centrale Européenne, une harmonisation fiscale et sociale par le haut, et le contrôle des mouvements de capitaux. Cela représente beaucoup de conditions. Ce qui est plus grave est que cela sous-estime la force de la logique du capital. Explications. Si les Européens réalisent encore entre eux les 2/3 de leur commerce, la part de celui-ci faite avec des pays, notamment la Chine, dotés d’autres normes économiques, sociales et environnementales, est suffisamment importante pour peser de manière décisive dans le sens de la désindustrialisation de l’Europe, particulièrement en France où la part de l’emploi industriel n’est plus que de 12 %. Le poids de l’industrie ne peut que se réduire encore sans une politique radicale de réindustrialisation. Or, Jacques Généreux en refuse les moyens. La délocalisation de notre économie pourra selon lui être arrêtée par des mesures essentiellement fiscales, le plafonnement du taux de rentabilité. On aimerait le croire. Le protectionnisme, même européen, n’est envisagé qu’en dernier recours, et il s’agirait si possible d’un « protectionnisme international », notion contradictoire. On comprend qu’il s’agit en fait d’espaces régionaux autocentrés. Pourquoi Jacques Généreux ne l’explique-t-il pas sous cette forme ? Parce qu’il lui faut à tout prix sauver un internationalisme de principe. Et si les autres pays du monde ne souhaitent pas des espaces autocentrés ? On ne ferait rien pour ne pas aller vers un protectionnisme unilatéral, fut-il européen ?

    La question de la dette et du déficit public est aussi complétement minimisée. Il peut y avoir une bonne dette pour des investissements utiles, affirme l’auteur. Mais peut-on sérieusement ne pas s’inquiéter d’une dette servant à payer des dépenses de fonctionnement ? Il y a surtout une philosophie générale du projet de l’économiste du Parti de Gauche qui est d’une navrante faiblesse. Nous avons bien compris qu’il ne s’agit pas de chercher, nous dit-il, « une croissance indifférenciée ». Nous voulons bien « changer de gauche » mais nous aimerions surtout savoir ce que cela changera vraiment. Or, Jacques Généreux croit comme les gouvernants qui nous ont amené là où nous sommes au progrès indéfini. Il ne parait pas croire aux bienfaits de la libre circulation des capitaux mais continue de croire aux bienfaits de la libre circulation des hommes, en tout cas à l’impossibilité morale d’y mettre de quelconque bornes. Il est donc partisan de l’immigration, pensant sans doute que l’on peut, par du volontarisme politique, à la fois mettre au pas le capital qui n’a qu’à bien se tenir, et faire des citoyens français et européens de n’importe quels arrivants venus des quatre coins du monde. Sans doute les immigrés se rendront-ils compte en arrivant qu’ils vivaient dans l’obscurantisme et qu’il n’y a rien de mieux à aimer dans le monde que la France des Lumières et rien de plus urgent que de se débarrasser de leurs mœurs et coutumes, à moins que, séduits par le spectacle quotidien de fierté et d’affirmation nationale de notre pays, ils ne décident qu’il n’y a rien de plus normal que d’être fier d’être français – ce qui reviendra au même. C’est là un stupéfiant irénisme qui ne tient pas le moindre compte des leçons de l’histoire. Mais il n’y a cela rien d’étonnant. A aucun moment dans son analyse des dérives de la gauche s’abandonnant à la séduction du mondialisme, Jacques Généreux ne s’interroge sur la conjonction libérale-libertaire qui est née en son sein et qui a gagné la droite si facilement parce que l’une et l’autre se sont ralliées au libéralisme mondialisateur. A aucun moment Jacques Généreux ne remarque que plus la gauche est devenue libérale au plan économique plus elle a développé une idéologie de substitution : un pseudo « antiracisme » aboutissant à nier les problèmes posés par l’immigration de masse, une préconisation de la légalisation du mariage homosexuel qui, comme chacun sait, est un souci majeur du peuple français, les hommes y pensant tous les matins en se rasant, des positions d’ « ouverture » (sic) face aux drogues, une complaisance pour toutes les remises en cause des valeurs traditionnelles, et en l’occurrence celles du peuple : le respect du travail, de l’argent gagné proprement, de l’art qui ne se moque pas du public, et même, l’amour raisonnable de la patrie. Il n’est pas étonnant qu’avec une telle myopie intellectuelle sur ce qui a amené la gauche à être une solution de secours parfaitement praticable pour le nouvel ordre mondial et le turbocapitalisme, les solutions préconisées par Jacques Généreux, même quand elles vont dans le bon sens – et c’est le cas –, témoignent d’un optimisme indécrottable, il est vrai assez caractéristique de la gauche dépourvue du sens du tragique de l’histoire (on pense à Léon Blum, si perspicace, expliquant en 1932 que « la route du pouvoir est fermée devant Hitler »).

    Voilà donc où en est l’ « autre gauche », celle qui se prétend une alternative aux sociaux-libéraux. Or il ne faut pas seulement changer de politique, et bien entendu changer les politiques au pouvoir. Il faut changer de paradigme, sortir de l’idée d’une civilisation universelle, bonne pour tous et partout, qui ne peut mener qu’à l’exact contraire de la « révolution citoyenne » à laquelle se réfère Jacques Généreux. La civilisation universelle de l’économie productiviste mondialisée, de la délocalisation généralisée ne peut être que la fin de toute République. Ce ne peut être que la démocratie réduite au procédural, ce ne peut être que la parodie de l’idée même de citoyen. Ce n’est peut-être pas ce que veut Jacques Généreux mais c’est très exactement ce à quoi nous mènent ses idées internationalistes. Dès lors, à quoi bon son « autre gauche » ? Si le but est d’homogénéiser le monde, qui a mieux montré son savoir-faire que le capitalisme ?

    Pierre Le Vigan 

    Jacques Généreux, Nous on peut !, pourquoi et comment un pays peut toujours faire ce qu’il veut face aux marchés, face aux banques, face aux crises, face à la BCE, face au FMI, …, Seuil, 140 pages, 11 euros.

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!