Sur Tocsin, Nicolas Vidal recevait le 14 juin 2024 Jean-Pierre Colombiès, ex-officier de police, pour évoquer avec lui le risque d'installation d'un chaos sécuritaire en France dans les prochaines semaines...
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Sur Tocsin, Nicolas Vidal recevait le 14 juin 2024 Jean-Pierre Colombiès, ex-officier de police, pour évoquer avec lui le risque d'installation d'un chaos sécuritaire en France dans les prochaines semaines...
Pour cette nouvelle édition de Cette année-là, sur TV Libertés, Patrick Lusinchi, avec François Bousquet, rédacteur en chef d’Éléments et Christophe A. Maxime, remonte au printemps 1982, quand l’Europe se demandait s’il fallait secourir la Pologne, comme elle se demande aujourd’hui s’il faut envoyer des soldats au sol en Ukraine. Fallait-il mourir pour Gdansk dans les années 1980 ? Assurément non ! Faut-il aujourd’hui mourir Kiev ? Macron semble prêt à courir le risque, multipliant les déclarations bellicistes à l’encontre de la Russie, au risque d’une déflagration mondiale...
Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, et Lucas Chancerelle.
Au sommaire cette semaine :
L'image de la semaine : le dîner de Joe Biden à l’Elysée avec les grands patrons de presse français.
Dossier du jour : le traitement médiatique des élections européennes et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron.
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Pastilles de l’info :
1) Le média “indépendant” StreetPress financé par Soros
2) Mort subite de Christophe Deloire, le censeur de Cnews
3) Carton rouge : Grossophobie de Laurent Joffrin contre Sarah Knafo ?
4) Gabriel Attal rend ses fonctions, préservatif à la main !
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Portrait piquant (en partenariat avec l’OJIM) : Nicolas de Tavernost, l’ancien roi de M6.
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Christophe Boutin, cueilli sur le Figaro Vox et consacré à la décision d'Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée Nationale.
Christophe Boutin est docteur en sciences politiques et professeur de droit public à l’université de Caen. Avec Frédéric Rouvillois, il a notamment publié Quinquennat ou septennat (Flammarion, 2000), Les parrainages ou comment les peuples se donnent des maîtres (La Nouvelle Librairie, 2022), La proportionnelle ou comment rendre la parole au peuple (La Nouvelle Librairie, 2022) et Le référendum ou comment redonner le pouvoir au peuple (La Nouvelle Librairie, 2023).
Dissolution : « Emmanuel Macron devrait engager sa responsabilité et démissionner en cas de défaite »
Alors que le président de la République vient d'annoncer la dissolution de l'Assemblée nationale, quels sont les types de dissolution engagés sous la Ve République ? Pourquoi celle de 2024 ne s'inscrit-elle pas nécessairement dans la continuité des dissolutions gaulliennes, demandant un arbitrage au peuple, mais plus dans la continuité de celle de Jacques Chirac en 1997, relevant de la manœuvre politique ?
Écartons de suite les dissolutions de 1981 et 1988. Dans les deux cas, le président nouvellement élu, François Mitterrand, demande aux Français de lui donner une majorité parlementaire qui lui permette de mettre en œuvre son programme. Avec cette volonté de concilier majorités présidentielle et parlementaire, ce n'est qu'un vote de confirmation qui est demandé aux Français.
Les dissolutions gaulliennes sont différentes, car il s'agit dans les deux cas de demander aux Français de trancher un conflit entre le président de la République et d'autres pouvoirs. En 1962, c'est une réponse à la motion de censure votée par l'Assemblée nationale contre le gouvernement Pompidou, et qui, au-delà du gouvernement, vise le chef de l'État, car il s'agit de sanctionner son choix d'appeler les Français à voter par référendum sur la question de l'élection du président au suffrage universel direct. Une question essentielle pour Charles de Gaulle, qui souhaite contourner le blocage du Sénat et utilise pour réviser la Constitution l'article 11 en lieu et place de l'article 89, une «forfaiture» selon le président du Sénat, Gaston Monnerville, qui entraîne la censure de l'Assemblée nationale. De Gaulle choisit alors de faire trancher la question par le peuple qui, en lui accordant une majorité législative, confirme sa légitimité et désavoue les parlementaires. La dissolution de 1968 vise là encore à demander aux Français un arbitrage, non entre deux institutions cette fois, mais entre le pouvoir en place et la contestation de la rue qui, soutenue par une partie de la gauche qui se dit prête à assumer le pouvoir, est devenue un véritable contre-pouvoir. De Gaulle l'emportera une nouvelle fois.
Le cas de Jacques Chirac est bien différent. En 1997, le président souhaite pousser plus avant les réformes engagées et craint que la prochaine élection législative ne tourne à son désavantage. Il décide alors de prendre les devants et, alors qu'il dispose d'une majorité à la chambre, demande aux Français de le faire bénéficier d'une nouvelle légitimité pour qu'il ait les mains libres dans la durée. Ces derniers ne lui apporteront pas leur confiance, ce qui conduira à la cohabitation avec Lionel Jospin.
Et c'est ici toute la différence entre les arbitrages gaulliens et l'approche chiraquienne, comme ce qui rapproche cette dernière de ce que vient de faire le président Macron : lorsque De Gaulle sollicite les Français il met en jeu sa responsabilité politique. Chacun sait en effet que s'ils lui refusent leur confiance il quittera le pouvoir - ce qu'il fera en 1969. Mais par la suite les présidents de la République ont cessé de considérer que les désaveux des Français, que ce soit par l'élection d'une majorité parlementaire contraire, comme François Mitterrand en 1986 et en 1993, ou par un échec à un référendum, comme Jacques Chirac en 2005, engageaient leur responsabilité politique et devaient les conduire à démissionner.
En 2024, Emmanuel Macron semble demander par cette dissolution un arbitrage aux Français, pour savoir s'il ne s'agit que d'une crise passagère ou d'une profonde volonté de changement. Pour autant, en se refusant à engager sa responsabilité politique, le président obère la possibilité de ce changement.
Soit, en effet, le programme qu'il va annoncer, comme la peur de l'inconnu, fédère une nouvelle majorité élargie et, vainqueur, il peut continuer à mener ses politiques comme il l'entend jusqu'en 2027 - ouvrant même la possibilité à cette majorité élargie de conserver le pouvoir après les prochaines élections présidentielles. Soit c'est le Rassemblement national qui arrive en tête, et une série de questions se posent : d'abord, celle de la nomination du premier ministre, qui peut être choisi par le président en dehors du parti arrivé en tête ; ensuite, celle de la majorité, absolue ou relative, du RN à l'Assemblée nationale, et donc des alliances qui pourraient se révéler nécessaires.
Mais même dans l'hypothèse d'une majorité absolue obtenue par le Rassemblement national, on a vu dans les périodes de cohabitation conflictuelles, et notamment entre François Mitterrand et Jacques Chirac de 1986 à 1988, que le chef de l'État dispose d'armes non négligeables, y compris sur la scène internationale, pour mettre à mal certains choix gouvernementaux. Si on ajoute à cela, sur un certain nombre de thématiques particulièrement importantes pour les électeurs du RN, comme l'immigration ou l'insécurité, le poids des jurisprudences nationales et internationales, qui, toutes, visent - et on l'a vu ces derniers temps - à limiter les capacités d'action des gouvernements, il est permis de penser que le Rassemblement national, pris en étau entre le président et les juges, se trouvera très largement en incapacité. Ajoutons que ses gouvernements pourraient faire l'objet de motions de censure sans que les députés ne craignent de dissolution en retour. Ses électeurs, déçus, pourraient alors en 2027 se reporter sur d'autres formations qui n'engageraient pas des épreuves de force avec les pouvoirs de l'Union européenne et des juges, ou s'abstenir.
On a pu reprocher aux choix gaulliens un caractère «plébiscitaire», mais la formule «moi ou le chaos» posait une claire alternative, quand «moi, quoi qu'il arrive» n'en laisse aucune, et ce alors même que le président aurait pourtant perdu en cas de défaite la substance de sa légitimité politique. Il ne pourrait la retrouver qu'en étant réélu après avoir démissionné – après tout, les Français peuvent avoir envie de cohabitation -, mais l'interdiction du troisième mandat le rend ici impossible.
Cette absence de responsabilité politique interdit en tout cas de confondre les arbitrages gaulliens, permettant au peuple de sanctionner celui qui est plus que jamais la chef de voûte des institutions, des jeux politiques actuels.
Christophe Boutin (Figaro Vox, 11 juin 2024)
Vous pouvez découvrir ci-dessous Le samedi politique de TV Libertés, diffusé le 8 juin 2024 et présenté par Élise Blaise, qui recevait Caroline Galactéros pour évoquer avec elle les dangereuses gesticulations guerrières des Européens, et en particulier du président Macron, dans un conflit russo-krainien où leur seul intérêt réel serait de rétablir la paix...
Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et de Vers un nouveau Yalta (Sigest, 2019). Elle a créé en 2017 Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.
En contrepoint des rodomontades guerrières d'Emmanuel Macron, la revue Éléments dresse un tableau alarmant, mais malheureusement réaliste, de l'état de l'armée française...
La France, combien de divisions ?
Guerre, embrasement, risques d’escalade, menace nucléaire… Autant de mots et de concepts qui sont aujourd’hui rabâchés en continu. La question de la guerre ne sort pourtant pas de nulle part. L’annexion russe de la Crimée en 2014 et la révolution « populaire » du Maïdan en ont fait ressurgir le spectre. De leur côté, François Hollande et Angela Merkel se félicitaient des accords de Minsk alors que, de leur propre aveu, il ne s’agissait ni plus ni moins que de gagner du temps pour préparer la guerre. De même, Emmanuel Macron, appliquant la stratégie des faibles, n’hésitait pas à abuser de termes guerriers (contre les Gilets jaunes, les incendies de forêt, la COVID, la dénatalité, etc.), à s’exposer en uniforme et avec des symboles militaires ou encore à se prendre en photo en plein entraînement de boxe, les muscles gonflés non pas par l’effort voire les protéines, mais uniquement par Photoshop.
Cette posture belliqueuse et martiale incarnée par le chef des Armées ne s’est pourtant pas arrêtée à de simples clichés musclés. Ainsi le 26 février 2024, il annonce au sujet de l’envoi de troupes occidentales en Ukraine, qu’« en dynamique, rien ne doit être exclu ». Cet engagement certes ferme, mais rejeté quasi unanimement par tous les gouvernements européens, par le gouvernement américain et même par le premier concerné, Volodymyr Zelensky, a été réitéré le 16 mars par le chef de l’État, puis relayé dans les médias par deux de ses lieutenants, le général d’armée Burkhard et le général d’armée Schill, respectivement chef d’état-major des armées et chef d’état-major de l’armée de Terre. Cette posture a été une nouvelle fois « assumée » à la Sorbonne, le 26 avril dernier, dans un discours imprégné de folie européiste et en totale rupture avec l’idée de nation développée par Ernest Renan, 142 ans plus tôt…
Si la division des Européens et la prudence américaine en disent long sur la perspective dont cette guerre entre peuples frères est envisagée, les positions du président de la République appellent une question : les Français iront-ils mourir pour Kiev ? Leur sacrifice sera-t-il réellement de nature à empêcher les T-72 russes de défiler sur les Champs Élysées ? Sacrifice physique mais aussi financier, Bruno Lemaire ayant effectivement réussi à mettre une économie à genoux, celle de la France.
La France ? Un CDD
Ce n’est pas un secret, la France peine à recruter. Chaque année, le ministère des Armées se débat, en vain, pour essayer de tenir ses objectifs de recrutement. En 2023, ce ne sont pas moins de 3 000 jeunes qui n’ont pas rejoint ses rangs. C’est sans compter la dernière lubie politique de vouloir doubler la réserve, dans le but de (re)constituer une force apte au combat et rappelable sur court préavis. Fort heureusement ce n’est qu’une bagatelle. Juste 25 000 hommes de plus et uniquement pour l’armée de Terre. Le corps des officiers lui ne peine pas à recruter, confirmant qu’il existe encore dans le pays des volontaires pour se dévouer à la nation. Mais bon, une fois que nous avons dit cela, qu’en est-il réellement de cette ressource humaine, censée être le « ferment de nos futures moissons » ?
Les deux questions fondamentales à se poser quand on parle de recrutement dans les forces armées est « Pourquoi se bat-on ? » et « Pourquoi meurt-on ? » Jadis, le service militaire, malgré ses défauts, donnait des clés de réponse. Mais aujourd’hui, aucun homme politique ne sait y répondre. Gageons que McKinsey non plus… Pas plus que le peuple. Dans une société fluide, multiculturelle, hédoniste et individualiste, difficile d’avoir envie de se battre et de mourir, si ce n’est pour son petit profit personnel.
Le recrutement en pâtit lourdement et les Armées embauchent majoritairement ceux qui trouvent un intérêt individuel à servir sous les drapeaux, selon l’expression consacrée. La plupart des jeunes s’engagent, comme s’ils s’engageaient chez McDonalds, Carrefour ou Midas. Faire carrière ? Quelle idée ! Servir la France est temporaire et doit déboucher sur mieux. L’effort de fidélisation, qui s’accompagne de l’assouplissement de toutes les règles (dont la discipline), est là pour le montrer, autant que les travaux de la Task Force Résilience (un anglicisme adopté à force d’américanisation), qui doivent permettre de déterminer, à l’aide d’une comitologie stalinienne, comment inciter la population à s’engager.
Parmi ces jeunes, le nombre de Français « de souche » ne cesse de diminuer. Les régiments se métissent avec tous les problèmes que cela implique : quand nos militaires partaient encore en Afghanistan ou au Mali, de nombreux jeunes soldats ne voulaient pas partir « tuer des frères ». Aujourd’hui, ces mêmes jeunes, prompts à rouler des mécaniques et à se prendre en photo les armes au poing, montrent un courage toujours plus fluctuant : la frégate Alsace, sous le feu des drones houthis en mer Rouge, a ainsi déploré l’abandon de postes de jeunes marins qui ne voulaient pas mourir. Mourir pour la France ? Cela, l’histoire ne le dit pas mais on connaît déjà la réponse…
Cette situation a été et est assez critique pour que des mesures fortes aient été prises. Le 4e régiment de Dragons, à Carpiagne (Bouches-du-Rhône), héritier des plus belles traditions de la cavalerie lourde, a ainsi été dissous en raison d’une radicalisation grandissante. Difficile de commander quand des mosquées clandestines sont installées sous les toits des compagnies. Aujourd’hui, d’autres régiments sont dans le viseur, dont le 121e régiment du train de Montlhéry qui recrute en grande partie dans le 93. Il est évident que nous pourrons avoir une confiance aveugle en ses soldats le jour où « ça camphrera ». Sans compter les bases dans lesquelles prospèrent les trafics en tout genre, en particulier les trafics de drogue. Le plateau de Canjuers, proche du hub des stupéfiants de Draguignan, est ainsi connu de triste réputation.
Des officiers pas vraiment supérieurs
Ce tableau sombre est à nuancer et les Armées disposent d’unités de valeur telles que les forces spéciales, la Légion étrangère, les troupes de Marine, les chasseurs alpins ou les parachutistes. En un mot des unités d’élite, où l’on n’entre pas sans effort ni sacrifice et où le service de la France a encore du sens. Néanmoins, nous sommes quand même bien loin de la grande majorité des cas.
Qu’en est-il des officiers ? La situation est très différente, ceux-ci bénéficiant à la fois d’une meilleure éducation et « souffrant », dit-on au plus haut niveau, de l’atavisme d’une aristocratie qui ne s’accomplit que dans le service de la France par le métier des armes. Évidemment, là aussi, il est nécessaire de nuancer : les Armées étant le reflet de la société, tout le monde ne s’engage pas avec la grande flamme de l’idéal ou avec de vraies valeurs morales. Certains vont les acquérir pendant la formation, mais des brebis galeuses se retrouvent au milieu du troupeau. Les derniers scandales relatifs à des problèmes de mœurs ou de discrimination sont là pour le prouver, même si souvent, il s’agit, comme il convient au sein de notre société moderne, de camoufler sa médiocrité derrière une pseudo menace systémique.
Le vrai problème du corps des officiers apparaît assez tardivement, après le temps de commandant de compagnie, au moment de passer le concours de l’École de Guerre. Il y a alors trois écoles : tout d’abord, l’école de ceux qui ont réussi le concours et qui se verraient bien arborer des étoiles sur les épaules. Ceux-ci sont alors prêts à tous les parjures et à toutes les trahisons pour atteindre leurs fins. Parmi eux, on retrouve généralement ceux qui ont servi aux États-Unis, soit en école, soit au sein du « Grand Temple », c’est-à-dire parmi les Young Leaders, et qui suivent les traces de nos trois derniers Présidents de la République. Le millésime 2024 de l’École de Guerre n’y a pas échappé, deux d’entre eux y sont passés, l’un immédiatement affecté au cabinet du ministre, et l’autre se préparant à voyager dans l’espace, confirmant ainsi leur « très haut potentiel »… Potentiel de calcul et de soumission ou potentiel intellectuel et moral, on est en droit de se poser la question. Bien évidemment, la franc-maçonnerie y fait aussi ses moissons et vient prestement à l’aide de ceux qui portent le tablier. Beaucoup rejoignent cette catégorie d’officiers quand ils atteignent le grade de colonel. Tous les coups sont alors permis pour accéder au généralat, la règle du jeu étant de féliciter ses chefs, de critiquer ses pairs et d’écraser ses subordonnés. Leur carrière se termine généralement sur les plateaux de télévision où nous assistons à un remake du film « Le bon, la brute et le truand » avec l’idiot (le général Trinquand), le traître (le général Yakovleff) et l’opportuniste (le général Desportes).
La deuxième école est celle de ceux qui ont ou qui n’ont pas réussi le concours de l’École de Guerre et qui voient les Armées uniquement comme une vache à lait dont ils peuvent tirer un maximum d’avantages avec le minimum d’effort. Ces officiers se reconnaissent assez facilement par leurs réseaux, leurs petits calculs et par leur capacité à se faire muter régulièrement à l’étranger. On en dénombre malheureusement beaucoup chez les troupes de Marine et dans des organismes en lien avec les relations internationales, la DCSD (Direction de la coopération de sécurité et de défense) en particulier. Pour ces officiers, il n’y aucune autre ambition que de gagner de l’argent, de vivre des « séjours » sympas, et de finir de payer la piscine ou la deuxième maison. En revanche, l’intérêt de la France n’est pas la priorité… sauf si c’est pour mettre un autre officier en difficulté et trouver des avantages matériels pour soi-même.
Une police militaire politique
La troisième école, quant à elle, est rejetée par les deux précédentes. Manquant d’ambition pour les uns, trop altruiste pour les autres, elle est tout simplement composée de cette race d’officiers qui se sacrifie pour le bien commun et les intérêts de la France. Qu’ils aient réussi ou non le concours de l’École de Guerre, qu’ils aient ou non des chances de monter en grade voire d’accéder au généralat, ceux-ci se distinguent par leur amour du pays et par leur attachement à « ce vieux mot de langage militaire : servir ». Beaucoup parmi eux pensent « mal » car attachés à la France, admirant ce qu’elle a été et craignant ce qu’elle sera, ils nourrissent souvent des idées dites « nauséabonde »s. Si la plupart de ces chefs progressent sans difficulté, d’autres sont traqués pour leurs idées par la DRSD (Direction du renseignement de sécurité et de défense) qui veille sur le temple. Digne du politburo, ce service a bien compris que la plus grande menace en France n’est pas l’islamisme grandissant et les risques que ce dernier fait encourir au sein même des Armées, mais bien l’extrême droite. De l’aveu même de son chef, lors d’une conférence à l’École de Guerre au premier semestre 2023, il n’y a rien de pire que cette chienlit. Reste maintenant à définir où commence et où finit l’extrême droite, où commence et où finit la liberté de pensée, un sujet que ne manquera pas d’étudier le « quarteron de généraux en charentaises ».
Ce constat général sur les ressources humaines des Armées ne serait pas complet sans aborder le corps des sous-officiers (officiers mariniers pour la Marine). Corps technique, celui-ci comprend dans ses rangs un peu des deux corps précédent (d’un côté les petites frappes sorties du lot, d’un autre côté les officiers manqués) ainsi qu’une masse de jeunes qui veulent composer la colonne vertébrale des Armées. Si les raisons de s’engager sont diverses, les sous-officiers montrent un engagement généralement plus sain, loin des luttes de pouvoir et au-delà du simple fait de se servir. Ayant enfin effacé leur réputation d’alcooliques héritée de la guerre froide, ces hommes et ces femmes montrent le visage d’une France qui veut donner du sens à son engagement. Malheureusement, il n’est pas rare de voir ces sous-officiers tomber dans une lutte de classe digne des plus grands combats marxistes mais qui reste pour le moins stérile.
Moyens capacitaires
Qu’en est-il du matériel ? Les promesses de l’économie de guerre, de la réindustrialisation de la France et la redynamisation des industries de défense semblent ouvrir le champ à de belles perspectives. Cependant, la réalité est bien plus contrastée.
Les Armées sortent enfin d’une longue période de disette héritée des dividendes de la paix et de la fameuse fin de l’Histoire fantasmée par Francis Fukuyama. Au cours de cette période, comme le faisait remarquer à juste titre le général d’armée Pierre de Villiers (une des premières victimes de la macronie), la France faisait preuve de dissonance cognitive : les militaires affirmaient que le monde était de plus en plus dangereux, ce à quoi les chefs politiques répondaient qu’il fallait en conséquence réduire de plus en plus les forces armées. Néanmoins, plusieurs douloureux sursauts eurent lieu : après l’embuscade d’Uzbin, en Afghanistan, en 2008 qui permit aux militaires de bénéficier d’équipements de combat de qualité ; après les attentats de 2015 qui virent la mise en place de la mission Sentinelle ; et l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 qui remit l’église au centre du village et les Armées au cœur de la défense de la nation. À noter que ce concept de défense avait été oublié, comme en témoigne le passage ahurissant du ministère de la Défense au ministère des Armées.
Aujourd’hui, les Armées récoltent les fruits des programmes d’armement débuté dans la fin des années 90. Mais là encore la conjoncture budgétaire n’aide pas à s’équiper. L’armée de l’Air et de l’Espace peut se vanter d’avoir des Rafales de dernière génération, mais elle en a peu. Sans parler de ses avions de transport, en nombre insuffisant pour assurer ses missions logistiques autant qu’opérationnelles (les parachutistes peuvent difficilement réaliser leurs six sauts réglementaires par an par exemple). La Marine nationale, fleuron d’un royaume aujourd’hui disparu, a des navires de tout type particulièrement performants, mais là aussi cruellement insuffisants. L’armée de Terre perçoit quant à elle ses nouveaux matériels SCORPION, censés mettre en œuvre « la polyvalence et l’infovalorisation ». Problème : ils sont distillés au compte-gouttes et ne sont pas destinés au combat moderne mais à la contre-insurrection. Face à un adversaire tel que la Russie, ça risque de piquer !
Nous pouvons toutefois nous réjouir : le matériel sort des usines ! Voilà enfin une victoire, dira le quidam. Mais c’était sans compter sur l’Ukraine, véritable tonneau des Danaïdes. Certains rétorqueront que ce ne sont que les vieux matériels qui sont sacrifiés. Néanmoins, ceux-ci étaient censés équiper certaines unités, notamment la réserve, éternel parent pauvre du ministère. D’autres diront que ces dons permettent de relancer les industries d’armement. C’est vrai mais uniquement en partie : l’état est tel que des formations ne peuvent quasiment plus s’entraîner et ne sont plus aptes au combat : ainsi en 2023, le général commandant l’artillerie affirmait que si un de ses CAESAR tombaient en panne, une partie de l’armée de Terre ne serait plus formée. Inquiétant quand on projette de faire trembler l’ours russe.
Le cocu de l’histoire
À cela, il faut ajouter quelques revers cuisants : il y a tout d’abord le pillage de pans entiers de notre souveraineté par les Américains, notamment grâce à la vente par Emmanuel Macron de la branche nucléaire d’Alstom ou encore des systèmes informatiques sensibles d’Athos. Une prise de conscience tardive et le rachat de tout ou partie de ces services n’auront pourtant pas empêché la récupération technologique et la divulgation des secrets, mettant ainsi davantage la France en position de faiblesse. Ensuite, il y a les sacrifices réalisés au profit des Allemands, dans la continuité de l’industrie automobile ou de l’électricité, et qui touchent autant l’armement petit calibre (remplacement du FAMAS par le HK 416) que le char et l’avion du futur (le MGCS et le SCAF). Nos camarades d’outre-Rhin ont ainsi rapidement compris que dans ce fameux couple franco-allemand, il fallait rapidement plumer le mari cocu. Enfin, il y a les autres renoncements tels que la production des munitions. Les militaires se souviennent notamment des munitions de 5.56 mm, abandonnées par la France pour être achetées moins chères au Brésil ou en Afrique du Sud et qui se sont révélées défectueuses ou complètement inadaptées aux canons des armes françaises. Aujourd’hui, se pose la question des poudres à canon, un autre secteur national liquidé au profit de la Suède. Celle-ci ayant ses propres besoins et l’État français s’étant engagé à céder encore plus d’obus à l’Ukraine, Sébastien Lecornu s’est finalement décidé à recréer une (et une seule) usine sur le territoire national.
Mais au final, le constat est cinglant : les Armées ont de bons programmes d’armement mais ne disposent pas aujourd’hui des moyens de faire la guerre. Le général d’armée Lecointre, ancien chef d’état-major des armées rappelait dernièrement dans une de ses actions de communication dont il a le secret depuis les combats de Vrbanja, que les Armées ne peuvent plus se battre sans être dans une coalition ou accompagnées de ses alliés (au premier rang desquels les USA, bien évidemment). La RAND corporation, think tank américain de renom, publiait un rapport le 16 juin 2021 intitulé « A Strong Ally Streched Thin : An Overview of France’s Defense Capabilites from a Burdensharing Perspective » et qui se résumait par « France is ready for war, but not a long war ». Cela n’a malheureusement pas changé et nos forces ne disposent pas des moyens de faire la guerre à un pays comme la Russie. De son côté, la Russie n’a ni l’ambition ni les moyens d’attaquer l’OTAN et le glacis que représente l’Europe de l’Est pour la France fait que jamais les hommes sojas sur leur trottinette électrique avec leur thé détox, ne se confronteront aux hordes mécano-soudées des steppes de l’Oural imbibées de vodka.
La rédaction (Éléments, 7 juin 2024)