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libéralisme - Page 16

  • Défier le récit des puissants !...

    « L'art peut servir de détonateur, être l'étincelle qui met le feu aux poudres.»

    Les éditions Indigène viennent de publier un court livre de Ken Loach intitulé Défier le récit des puissants et consacré à sa pratique du cinéma. Cinéaste engagé, Ken Loach est l'auteur , notamment, de films marquant comme Hidden Agenda (1990), Raining stones (1993), Land and Freedom (1995), Sweet sixteen (2002), Le vent se lève (2006), Looking for Eric (2009).

     

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    " Nous voici au coeur de la résistance et de la création tout à la fois.
    Défier le récit des puissants, c’est défier ces films « parfaits » formatés par Hollywood, faisant de nous des citoyens passifs, dociles, sans esprit critique. Car il y a bel et bien une esthétique de la soumission. En revanche, y a-t-il une esthétique de la résistance ? Ken Loach répond « oui ».
    Mais soyons clairs. S’il est un des rares aujourd’hui à assurer que la lutte des classes est toujours aussi vivante, il ne cède jamais pour autant à la propagande. Il dit : « Je ne filme jamais un visage en gros plan ; car c’est une image ostile, elle réduit l’acteur, le personnage à un objet. » Or on peut faire ce qu’on veut d’un objet, l’exclure, l’expulser… Mais si la caméra est comme un œil humain, alors elle capte toutes les présences, les émotions, les lumières, les fragilités. Et nous devenons tous des « film makers ». "

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  • La trahison des élites...

    Les éditions de Paris - Max Chaleil viennent de publier La trahison des élites - Banquiers contre politiques , un court essai de Donato Pelayo.

     

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    " La crise est devenue le terme dominant des médias. Or, elle n'est que la répétition, quatre-vingts ans après, de celle de 1929, dans une configuration géopolitique différente. La mondialisation des échanges a progressivement éradiqué l'affrontement entre le monde libéral et communiste, accouchant de synthèses inattendues : ainsi la Chine, qui a produit un bourgeon né du greffon du libéralisme le plus sauvage sur le porte-greffe du communisme le plus conservateur, est désormais l'archétype des sociétés futures. Les politiques qui tiennent des discours, en apparence contradictoires, ont en réalité un comportement identique. Les idéologies sont fatiguées. Et, dans les interstices de leur dépérissement, a émergé le pouvoir bancaire. Il a investi le pouvoir politique, glissant peu à peu d'un rôle de conseil vers un rôle décisionnel. Désormais, les banquiers dominent le monde et ses centres névralgiques. Eux et leurs épigones régentent les cabinets ministériels, règlent les enjeux et indiquent le cap à suivre. La machinerie politico-bancaire américaine est mue par la noria des managers qui opèrent des va-et-vient entre leurs entreprises d'origine et les cercles du pouvoir. Ces mêmes managers ont réussi, en un demi-siècle, à gommer les spécificités des démocraties européennes et des Etats-Unis. Aujourd'hui, la rentabilité à court terme des capitaux investis rogne les conquêtes sociales. Et les hommes politiques, de droite comme de gauche, s'agitent sur le devant de la scène, tels des pantins impuissants. Les démocraties ne pourront se reconstituer qu'en muselant les banques au niveau planétaire. "

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  • La fin de la mondialisation et le retour des identités...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Hervé Juvin, cueilli sur le site du Figaro et consacré à son dernier essai intitulé La Grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Un ouvrage que nous ne pouvons que recommander à ceux qui ne l'ont pas encore lu !...

     

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    La fin de la mondialisation et le retour des identités

    Figarovox: Votre livre s'intitule La grande séparation. Qu'est-ce que cette grande séparation? De quoi nous séparons nous?

    Hervé Juvin : La condition politique repose sur la séparation des groupes humains qui assure leur diversité. Jusqu'ici cette séparation entre les hommes provenait de la langue, des mœurs, des lois et des cultures, et se traduisait par le phénomène universel de la frontière: on traçait des séparations matérielles entre «nous» et les «autres». Il s'agissait d'une séparation géographique, matérielle, et horizontale. La Nation était la traduction politique de cette séparation. Depuis une trentaine d'années, on assiste à un phénomène nouveau, une forme de transgression qui se traduit par le «tout est possible» ou «le monde est à nous». Tout cela est en train de faire naitre une nouvelle séparation qui bouleverse radicalement tout ce qui faisait le vivre-ensemble et le faire société. Ce que j'appelle «grande séparation», c'est cet espoir un peu fou, très largement dominant aux Etats-Unis, notamment à travers le transhumanisme, de s'affranchir totalement de la condition humaine. L'ultra-libéralisme, l'hypertrophie du capitalisme financier, le retour du scientisme sont l'une des faces d'un visage dont le transhumanisme, la transexualité, le transfrontiérisme sont l'autre face. Il faut en finir avec toutes les limites, toutes les déterminations de la nature. Ainsi Google a pour objectif affiché de lutter contre la mort à travers sa filiale Calico. L'idéologie transgenre veut que chaque homme et chaque femme puisse choisir leur sexe. Des entreprises très «humanistes» comme Goldman Sachs remboursent les opérations de changement de sexe de leurs employés!

    Cette idéologie des «trans» vise à construire un homme hors-sol, délié de toute origine, et déterminé uniquement par sa propre volonté. C'est le retour du mythe de l'homme nouveau appuyé sur un délire scientiste qui voudrait que chacun soit à lui-même son petit Dieu autocréateur, pur produit de son désir, de ses intérêts ou de sa volonté propre. C'est cela, la grande séparation: la fabrique d'un homme sans origines, sans liens et sans foi, mais qui a chaque instant se choisit lui-même et choisit qui il est.

    «Plus rien ne nous est étranger», tel est le résultat de la mondialisation. Pourtant à mesure que l'on cherche à détruire le même, l'autre revient toujours plus fort. L'uniformisation a pour conséquence un retour des particularismes. Comment expliquez-vous ce paradoxe?

    On peut considérer qu'à bien des égards la mondialisation est achevée. J'ai la chance de voyager beaucoup dans le monde: il n'y a plus de jungles, de mangroves, de déserts, aussi perdus soient-ils où vous n'avez pas des gens qui sortent un téléphone portable de leur poche. La mondialisation des outils techniques - pour la plupart conçus en Occident- est à peu près aboutie. Le phénomène auquel on ne s'attendait pas, ce que j'appelle dans mon livre «l'aventure inattendue», c'est que l'uniformisation du monde est en train de réveiller les différences. L'exemple le plus frappant est celui de l'islam radical. Malraux parlait de «l'invincible sommeil de l'islam»: il y a trente ou quarante ans, l'islam était quelque chose d'endormi, d'immobile et d'assez pacifique. On peut dire ce qu'on veut sur les dérives extrémistes de l'islam, mais une chose est sûre: le retour (et dans certains cas l'invention) d'un fondamentalisme musulman (pratiques, cultes et doctrines rigoureux et agressifs) est généralement le produit direct d'une confrontation avec la modernité occidentale. Ceux qui vont combattre le djihad, en Syrie ou ailleurs, ceux qui ont commis des attentats en Occident, notamment le 11 septembre n'étaient pas des pauvres sans boulot ni éducation, mais des ingénieurs, des gens diplômés, parfaitement intégrés à la civilisation moderne. Il est intéressant de voir qu'une partie des mouvements fondamentalistes en Afrique - je pense notamment à Boko Haram- sont directement l'effet de l'agression de sociétés traditionnelles par les évangélistes et les missionnaires financés souvent par les fondations américaines. La mondialisation, dans laquelle on a voulu voir une homogénéisation du monde est en train de déboucher sur son contraire: le retour des particularismes identitaires, des singularités, et plus généralement un retour du «nous».

    L'illusion du multiculturalisme du «village monde» a-t-elle vécu?

    Depuis 40 ans on avait assisté à la proclamation de l'individu absolu, sans aucune appartenance, seul face au monde. On a aujourd'hui un retour de bâton de la réalité: on ne vit pas riche et seul dans un océan de ruines, on ne vit bien que quand on sent qu'on appartient à un ensemble, à un groupe, quand on est dans le faire-société avec d'autres, et c'est probablement ce que cette phase très déroutante de la mondialisation est en train de nous révéler.

    Est-ce à dire que chacun va retourner chez soi et se confiner dans le séparatisme ethnique?

    Quelle forme la séparation politique va-t-elle prendre en réaction à cette grande séparation? Difficile de le dire. Mais ce qu'il est important de comprendre c'est qu'on ne peut dire «nous» que lorsqu'on a déterminé qui sont les «autres». Il y a quelque chose de profondément mensonger et dangereux dans la grande séparation qui fait de tous les hommes sont les mêmes - les hommes réduits à l'idiot utile des économistes! Si tous les hommes sont les mêmes, je suis absolument isolé, seul et incapable de dire «nous». Dans la plupart des pays occidentaux, on assiste à cet isolement croissant des individus, qui n'ont plus de repères, plus de structures, plus de capacité à dire «nous». Pour dire «nous», il faut qu'il existe des «autres» qui ne sont pas appelés à devenir les mêmes. Nos amis américains disent volontiers: tout homme ou femme sur cette terre n'aspire qu'à une chose: devenir un américain comme les autres. C'est la négation absolue de l'altérité. C'est aussi l'inverse du respect pour l'Autre, celui qui ne sera jamais le même, celui qui à ce titre m'aide à sentir mon identité. La paix dans le monde repose sur l'idée inverse: indépendance et différence. j'ai trop longtemps vécu et travaillé à Madagascar, eu des amis marocains, fréquenté l'Inde, je respecte trop les Malgaches, les Marocains, les Indiens, pour vouloir qu'ils deviennent des Français comme les autres. Ils ont leurs identités, leurs coutumes religieuses, leurs mœurs, qui sont éminemment respectables: au nom de quoi puis-je dire que je suis supérieur à eux? Quel droit m'autorise à dire que l'avenir d'un malgache, d'un marocain ou d'un hindou est de devenir un Français comme moi?

    C'est quelque part le crime de l'universel: de penser que ce qui est bon pour moi est bon pour le reste de l'humanité.

    Oui, mais nier l'universel, n'est-ce pas nier le propre de la culture européenne?

    C'est le grand débat des Lumières et de la prétention au règne universel de la raison. L'idée que nous, Occidentaux, Européens, Français, Américains, aurions mis en place depuis les Lumières un modèle idéal de vie pour l'humanité, entre la croissance économique et la révolution industrielle, la démocratie et les droits de l'homme. Je ne le crois absolument pas. Je crois que d'autres sociétés qui vivent avec d'autres lois, d'autres mœurs, selon d'autres règles, ont su offrir les conditions du bonheur à leurs habitants. Je ne souscris pas à l'idée selon laquelle notre régime politique, notre musique, notre art, notre culture seraient le point d'aboutissement de l'humanité vers lequel tous les autres peuples devraient converger. Il y a une voie chinoise, une voie hindoue, des voies africaines, qui feront des sociétés équilibrées et heureuses, sûres de leurs identités, différentes de la voie américaine ou de la voie européenne.

    Toutes les civilisations se valent, alors? Il n'y a pas de valeurs transcendantes, pas de droits de l'homme, pas d'universel… L'excision et le mariage forcée des petites filles est de même valeur que la quasi égalité hommes-femmes en Occident?

    On a le droit de défendre un système de valeurs qu'on croit universel. Vous n'allez pas me faire dire que je suis pour la lapidation! Personne évidement ne peut souhaiter être mis en détention sans jugements, être torturé, etc… Mais on ne peut pas ne pas constater les désastres que produit l'imposition par le haut du modèle occidental dans les sociétés traditionnelles. L'universalisme européen et américain n'a abouti qu'à des champs de ruines: en Afrique, en Afghanistan, en Irak, en Libye… Et la folle course en avant du développement menace la survie de l'humanité ; au nom de quoi arracher ces millions d'hommes qui vivaient hors de l'économie du capitalisme, de l'accumulation, dans un équilibre avec la nature, pour les précipiter dans un système qui détruit les biens vitaux et les services gratuits de la nature?

    Les motifs humanitaires masquent souvent des ingérences guerrières. Le «droit au développement» masque l'agression impitoyable de l'obligation de se développer, qui a fait des ravages en Asie et en Afrique. Les limites à l'universel ne sont pas seulement morales, mais physiques. La pénétration sans limites d'internet répand dans des populations entières des rêves qu'elles n'auront aucun moyen de satisfaire, à moins de faire exploser la planète. Il est impossible que 9 milliards d'humains vivent comme un Américain moyen. Ne pas se rendre compte de cela, c'est créer les conditions d'une humanité frustrée. Non seulement cet universalisme sème les graines du malheur, mais il est contre-productif: plus il essaie de s'imposer, plus il réveille des particularismes de plus en plus agressifs.

    C'est là un point essentiel en géopolitique aujourd'hui: l'agression des modèles universels réveille les logiques de la différence politique. Je cite dans mon livre celui que je considère comme le plus grand ethnologue du XXème siècle Elwin Verrier, pasteur britannique marié avec une fille de la tribu des Muria: au bout de quarante ans passés à côtoyer les tribus indiennes, il a abouti à la conclusion suivante: laissons les vivre comme ils sont, hors du développement économique. Mêlons-nous de ce qui nous regarde: sagesse qui nous éviterait bien des bêtises!

    Hervé Juvin (Figarovox, 4 juillet 2014)

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  • L'alibi de la compétitivité...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la question de la compétitivité et à ce qu'elle masque...

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    La compétitivité ? L’alibi des mesures antisociales…

    La compétitivité est devenue mantra de notre époque. Tout doit être compétitif : le sport et l’économie, bien sûr ; les hommes, également. La compétitivité serait-elle une valeur en soi ?

    C’est Raymond Barre qui, en 1976, avait le premier parlé de « compétitivité »pour caractériser la politique économique à la fois concurrentielle et tournée vers l’extérieur qu’il entendait mener. Tous ses successeurs ont suivi son exemple. Aujourd’hui, les hommes politiques de droite comme de gauche n’ont que le mot de « compétitivité » à la bouche parce qu’ils sont obnubilés par la« croissance » : être plus compétitifs aiderait à gagner des « points de croissance ». Mais au-delà de ces affirmations somme toute convenues, on s’aperçoit vite que la compétitivité est un mythe. Et que ce mythe n’est pas anodin.

    Dans le discours des hommes politiques, ce ne sont pas seulement les entreprises ou les secteurs industriels qui doivent être « compétitifs », mais aussi les nations. Cette idée sort tout droit des théories du management développées dans les écoles de commerce américaines. Or, on ne peut étendre aux nations ce qui, sous certaines conditions, peut être vrai des entreprises – d’autant que les intérêts des entreprises nationales ne coïncident pas nécessairement avec ceux des populations. Les nations ne sont pas des entreprises, contrairement à ce que prétendent les tenants de la « gouvernance » qui voudraient gouverner les hommes comme on administre les choses et priver les États de leur souveraineté politique. Les territoires ne peuvent pas « se vendre », et c’est pourquoi on ne peut les comparer et les classer comme des entreprises en milieu concurrentiel, dont le succès se mesure finalement en monnaie.

    Pour le dire autrement, une notion micro-économique ne peut être transposée purement et simplement dans la sphère politique. « Un territoire, écrit Gilles Ardinat, chercheur en sciences humaines, conseiller de Nicolas Dupont-Aignan et collaborateur du Monde diplomatiqueoffre à un peuple son support physique ainsi qu’une bonne part de ses références culturelles et politiques […] Contrairement à une entreprise, il ne cherche pas à dégager des profits. Son action s’inscrit dans le temps long de l’histoire, pas dans l’immédiateté des marchés. » C’était aussi l’opinion du célèbre économiste Paul Krugman, Prix Nobel en 2008 : « La compétitivité est un mot vide de sens lors qu’il est appliqué aux économies nationales ».

    Cela dit, la concurrence existe bel et bien, et Fillon comme Montebourg, Copé comme Moscovici sont d’accord pour estimer que la compétitivité n’est jamais que le meilleur moyen d’y faire face…

    Il est évident que si l’on veut vendre un produit, on a tout intérêt à être compétitif, c’est-à-dire à fabriquer des produits de meilleure qualité que ses concurrents ou, à qualité égale, des produits moins chers. Mais pour baisser les prix, il faut aussi diminuer le prix de revient des produits fabriqués. De quelle façon ? En régime capitaliste, la réponse la plus classique est connue : non pas en favorisant l’innovation, en taillant dans les coûts du capital et les dividendes des actionnaires (50 milliards d’euros en 2013, soit 2,6 fois de plus que les dépenses d’investissement), mais en faisant stagner les salaires, en diminuant les charges sociales et le « coût du travail », en ramenant les services publics à la portion congrue. C’est l’argument favori du MEDEF, qui agite constamment le spectre de la « perte de compétitivité » pour obtenir de substantielles subventions.

    La Chine est aujourd’hui très compétitive parce que les salaires dignes deGerminal qu’elle pratique lui permettent de conquérir toujours plus de parts de marché. Il est certain que si l’on parvenait à convaincre les travailleurs français de toucher les mêmes salaires que ceux du Bangladesh, nos entreprises gagneraient beaucoup en compétitivité ! Mais en même temps, il deviendrait difficile de vendre toujours plus à des consommateurs qu’on aurait préalablement rendus plus pauvres ! Comment augmenter la consommation quand on fait baisser le pouvoir d’achat ? C’est tout le paradoxe des politiques d’austérité, qui espèrent combler les déficits et faire repartir la croissance en rendant toujours plus précaires les conditions d’existence des classes moyennes et des classes populaires. C’est pour cela que la concurrence généralisée entre les pays n’est pas compatible avec le maintien ou l’amélioration du niveau de vie : elle revient seulement à mettre en concurrence les produits marchands et les produits non marchands, comme les services publics et la protection sociale.

    À l’époque de la mondialisation, cela ne peut aboutir qu’à une désagrégation sociale et à un nivellement par le bas. Dans cette optique, l’impératif de« compétitivité » est seulement une façon élégante de persuader les travailleurs de renoncer à leurs acquis sociaux. C’est d’ailleurs au nom de la compétitivité que l’Union européenne et le FMI ont exigé la réduction des salaires en Grèce et ailleurs. Lorsqu’elle ne prend en compte ni les exigences de la justice sociale ni celles de l’écologie, la compétitivité devient l’alibi d’un dumping social généralisé, qui permet de prendre des mesures antisociales tout en se mettant à l’abri des critiques.

    Déclinée dans les registres les plus intimes de nos vies, la compétitivité peut aussi devenir mortifère. Après tout, échanger sa femme de cinquante ans contre deux de vingt-cinq pourrait aussi bien se justifier au motif que la première n’est plus « compétitive » ! L’ambiance de compétitivité permanente ne contribue-t-elle pas à faire de notre société de plus en plus anxiogène ?

    On peut certes estimer que la rivalité amoureuse en matière de stratégies de séduction implique de la « compétitivité ». Mais ce n’est là qu’un jeu de vocabulaire : la compétition est une chose, la compétitivité en est une autre. En dehors de l’industrie et du commerce, quand on les applique par exemple à la santé, à l’éducation ou à la culture, la compétitivité et la productivité, ça signifie quoi ? Paul Krugman, déjà cité, dit aussi que « l’obsession de la compétitivité est à la fois fausse et dangereuse ». Elle ne se comprend en fait qu’en rapport avec la concurrence, que le libéralisme conçoit sous l’angle du darwinisme social : elle est censée révéler les plus performants et les plus forts, donc les meilleurs. L’idée sous-jacente est qu’une société ne se compose que d’individus étrangers les uns aux autres, qui s’affrontent au travers de stratégies d’intérêt régulées par la seule autorité du marché. Une société de rivaux, par conséquent (la « guerre de tous contre tous »), non de concitoyens.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 20 juin 2014)

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  • L'enfant marchandise...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Tony Anatrella, cueilli sur Valeurs actuelles et consacré à la question du droit à l'enfant pour les couples de lesbiennes... Tony Anatrella est psychanalyste, spécialiste en psychiatrie sociale et est l'auteur de plusieurs essais marquants comme Non à la société dépressive (Flammarion, 1997) ou La différence interdite - Sexualité, éducation, violence trente ans après 1968 (Flammarion, 1998) ou, plus récemmen,t Mariages en tous genres (L'échelle de Jacob, 2014).

     

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    L'enfant marchandise

    Le tribunal de grande instance de Versailles a refusé, en avril dernier, à deux duos de femmes l’adoption de l’enfant par la partenaire respective de la mère dite biologique. Les juges ont rejeté ces demandes en considérant qu’une PMA réalisée à l’étranger constituait une « fraude à la loi » puisque, en France, elle est uniquement réservée au couple formé par un homme et une femme souffrant d’infertilité. La loi du “mariage pour tous” ne change rien à l’affaire. La filiation reste ainsi en lien avec un couple générationnel fondé sur l’altérité sexuelle et sur le lien de cohérence et de vérité entre l’exercice de la sexualité d’un homme et d’une femme et l’engendrement.

    Les associations LGBT ont repris leurs slogans habituels, qui empêchent toute réflexion salutaire, en taxant les juges « d’homophobes ». Évidemment, à chaque fois, ce sont des arguments larmoyants qui sont invoqués pour veiller au prétendu intérêt de l’enfant en cas de séparation de ces femmes ou du décès de l’une d’elles. Les émotions sont exploitées contre une raison éclairée, alors que l’intérêt de l’enfant est de naître et de se développer entre père et mère.

    Depuis quelques années, des femmes tentent de contourner la loi en allant à l’étranger pour obtenir un enfant puis, de retour en France, de faire légitimer leur manipulation en trompant la société, et surtout l’enfant, qui, lui, est sans père et sans origine. Cette manœuvre perverse en dit long sur la façon d’instrumentaliser l’enfant et de le concevoir dans la transgression et la non-transmission. Les juges ont ici appliqué la loi malgré les avocats, qui en appellent à la justice européenne. Les États de l’Union doivent se faire de plus en plus vigilants à l’égard des décisions des juges de la Cour européenne des droits de l’homme, qui, passant outre les lois des pays membres, se donnent le droit de les revisiter au nom de “l’égalité”. Mais de quelle égalité s’agit-il ? Certainement pas celle de la Déclaration de 1948. Si nous sommes tous égaux en dignité, toutes les situations ne sont pas égales. Comment peut-on établir une égalité de filiation entre un enfant conçu par un homme et une femme, et un enfant “fabriqué” de façon contestable pour être ensuite partagé sans père dans le miroir du même et du semblable ?

    La loi du “mariage pour tous” a créé dans la société une fracture sociale et une confusion psychique sur le sens du couple générationnel et de la filiation. Parler ici de “couples” de femmes, “d’épouses” et de “mères” montre que l’on ne sait plus de quoi l’on parle en attribuant à un duo de même sexe les caractéristiques empruntées par mimétisme au couple formé par un homme et une femme. Ces derniers étant les seuls à former un couple et une famille, même si la loi civile ose dire le contraire. L’un comme l’autre sont de structures différentes, et voler le vocabulaire de l’un pour l’adapter à l’autre est une duperie psychologique et sémantique. J’ai souvent repris la formule de Camus à ce sujet qui affirme que « mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde ». La loi civile est ainsi un facteur de pathologies sociales qui nous conduisent à la violence.

    En réalité nous assistons à une manigance qui consiste à valider l’idée que l’enfant peut se “faire” sans sexe, puisque deux personnes de même sexe en sont incapables. En effet, on ne conçoit un autre qu’avec un autre et non pas avec du même. Il faut donc forcer la réalité pour montrer qu’il y a d’autres voies possibles et qu’il revient à chacun, selon les concepts du genre, de se construire soi-même et d’inventer la famille. De cette façon, à l’image des tribus anciennes qui, faute d’avoir une progéniture pour se survivre, pratiquaient le rapt des enfants, nous réactualisons le même phénomène par la “prise” de produits biologiques masculins pour se donner une filiation narcissique. On s’étonnera par la suite que, dans cette confusion psychologique et sémantique, des adultes s’engagent dans la recherche de leur origine à travers la généalogie et tentent de résoudre leurs troubles de la filiation. Le rapt des enfants au nom de l’unisexualité nous plonge au cœur du déni de ce qui nous humanise.

    Tony Anatrella (Valeurs actuelles, 10 juin 2014)

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  • Tour d'horizon... (71)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur Metamag, Michel Lhomme nous rappelle que, du fait des flux migratoires, l'Europe n'est pas à l'abri du virus Ebola...

    Ebola, retour du vieux temps

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    - sur Marianne, Régis Soubrouillard fait un point éclairant sur un traité international de libéralisation des services qui devrait entrer en vigueur en 2015...

    Vous avez aimé le traité transatlantique, vous adorerez TISA !

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    - sur Hérodote.net, Emmanuel Todd valide la thèse d'un réveil démographique russe...

    « La Russie nous surprendra toujours »

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