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europe - Page 137

  • Plutôt le Monomotapa que Louis XIV ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de l'africaniste Bernard Lugan, cueilli sur son blog, à propos des nouveaux programmes d'histoire au collège.

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    L’histoire de l’Afrique doit-elle être enseignée dans le secondaire aux dépens des fondamentaux de l’histoire de France ?

    L’histoire des mondes non européens a toujours figuré dans les programmes scolaires, cependant, elle n’était pas enseignée aux dépens de l’histoire de France. De plus, cette nécessaire ouverture ne se faisait qu’à partir du moment où les fondamentaux de notre histoire étaient acquis par les élèves. Aujourd’hui, il en va tout autrement avec la réforme Darcos qui prépare le délitement de l’imaginaire historique national, ce précieux socle auquel les Français sont encore arrimés.
    Les ravages commencent désormais dès la classe de 5° qui a subi des amputations insensées et même proprement « ubuesques » de son programme d’histoire. Or, ces amputations ont été rendues nécessaires afin de dégager autant de plages horaires destinées à l’étude des civilisations non européennes, qu’elles soient africaines, asiatiques ou autres. Pour ce qui concerne l’Afrique, seront ainsi étudiés plusieurs royaumes avec un point central, celui du Mali. Pour leur « faire de la place », Louis XIV a donc été relégué en toute fin de programme et il ne sera donc « survolé » que si le Monomotapa (!!!) a été vu. De même que les crédits de l’armée constituent la variable d’ajustement des déficits de l’Etat, l’histoire de France devient quant à elle la variable d’ajustement des apprentis sorciers du ministère de l’Education nationale.
    Toute éducation supposant l’acquisition de fondamentaux et de connaissances de base sans lesquelles il est impossible ou vain de vouloir aller plus loin, il est donc insensé de vouloir faire apprendre l’histoire du Mali à des enfants qui ne savent pas si Napoléon a vécu avant ou après Louis XIV…Les « docteurs Folamour » du pédagogisme ne l’ignorent pas. Ils en sont même parfaitement conscients, mais ce sont d’abord des militants dont le but est de casser tous les enracinements européens considérés par eux comme susceptibles de déclencher des réactions identitaires.
    Ne nous cachons pas derrière notre pouce et disons les choses clairement : le premier but de cette aberrante réforme de l’enseignement de l’histoire est de toucher le public de ces établissements mosaïques dans lesquels 30 à 40% d’élèves possédant moins de 350 mots de vocabulaire, ne sachant ni lire, ni écrire, ni même raisonner et encore moins comparer, pourrissent littéralement l’apprentissage de classes entières. Les assassins de notre mémoire espèrent, grâce à cette réforme, capter l’attention de ces auditoires « difficiles » et avant tout peu intéressés par l’histoire de France, en leur proposant une histoire sur mesure, une histoire à la carte, une histoire ethno sectorielle en quelque sorte.
    Les élèves d’origine mandé-malinké de Tremblay en France seront peut-être attentifs à l’histoire de l’empire du Mali qui fut constitué par leurs ancêtres, mais il risque de ne pas en être de même avec les petits soninké de Garges les Gonesse, héritiers, eux, du royaume de Ghana qui fut détruit par les premiers…De plus, comment vont réagir les rejetons des nombreux autres peuples africains ? N’y a-t-il pas une forme de discrimination à leur égard ? En effet, pourquoi privilégier le Mali ou le Ghana et passer sous silence l’empire Luba et le royaume zulu ?
    Un autre but de ce programme qui fait naturellement de continuelles références à la traite des esclaves vue comme une sorte de fil conducteur de la matière, est de tenter de faire croire aux élèves que l’histoire du monde est d’abord celle de la confrontation entre les méchants, lire les Européens, et les bons, lire les autres. L’ethno culpabilité est décidément sans limites !
    De plus, et là est peut-être le plus important, l’histoire de l’Afrique a son propre temps long qui n’est pas celui de l’Europe. Elle s’appréhende avec une méthodologie particulière impliquant une maîtrise de la critique des sources orales, une connaissance approfondie de l’anthropologie, de l’archéologie, de la linguistique, etc., Or, les professeurs qui vont devoir enseigner cette histoire à leurs jeunes élèves n’ont pas été formés pour cela.
    Un exemple : la connaissance que nous avons de Philippe le Bel repose sur des dizaines de milliers d’études, de thèses, de documents d’archives, de mémoires, de correspondances, de traités etc. Son contemporain, Abu Bakr II empereur du Mali (+- 1310-1312), dont l’existence n’est même pas certaine, n’est connu que par des traditions orales tronquées, des sources arabes de seconde ou même de troisième main et par une chronologie totalement erronée établie par Maurice Delafosse en 1912. L’histoire de son bref règne, s’il a véritablement eu lieu, est pourtant largement enseignée en Afrique où ce souverain est présenté comme une sorte d’explorateur conquistador parti à la tête de 2000 ou même 3000 pirogues pour découvrir les Amériques.  
    Les professeurs des classes de 5° qui vont devoir parler du Mali, cœur du nouveau programme, devront évidemment étudier cet empereur. Or, sont-ils formés pour expliquer à leurs élèves que l’histoire scientifique ne se construit pas sur des légendes? De plus, le seul fait, dans un cours, de consacrer le même temps d’étude à un personnage historique attesté d’une part, et à un autre, largement légendaire d’autre part, conduira automatiquement les élèves à prendre le virtuel pour la réalité, ce qu’ils sont déjà largement enclins à faire avec les jeux électroniques.   
    Mais allons encore au-delà et abordons l’essence même de la question. Face à ces élèves « en difficulté» (traduction en langage politiquement incorrect : enfants dont la langue maternelle n’est pas le français), les enseignants oseront-ils, sans risquer un hourvari, expliquer qu’un tel voyage n’a jamais eu lieu?  En effet, si tout est faux dans cette légende c’est parce que les Africains de l’Ouest -à la différence de ceux de l’Est-, ne pouvaient affronter la haute mer car ils ignoraient l’usage de la voile ainsi que celui de la rame et parce que leurs pirogues étaient sans quille. 
    Les mêmes enseignants sont-ils armés pour faire comprendre à leurs classes que pour atteindre l’Amérique, les hommes d’Abu Bakr II auraient été contraints de pagayer durant plus de mille kilomètres à travers l’océan atlantique avant de rencontrer enfin le courant des Canaries, seul susceptible de leur permettre de dériver ensuite vers l’Ouest… et cela sur 6000 km ? Enfin, seront-ils en mesure de mettre en évidence l’incohérence majeure de cette légende que certains considèrent comme une histoire vraie, à travers un exemple clair : comment l’expédition de l’empereur malien aurait-elle pu atteindre l’Amérique alors que les Africains ignoraient l’existence de l’archipel du Cap-Vert situé à 500 km « à peine » de la péninsule du Cap-Vert, point le plus occidental du littoral ouest africain contrôlé par l’Empire du Mali et qui leur barrait la voie du grand large ? En effet, cet archipel était vierge et vide d’habitants en 1450,  au moment de sa découverte par le Génois Antonio Noli qui était au service du Portugal...[1]
    L’enseignement de l’histoire africaine ne s’improvise pas !
    Hier la méthode d’apprentissage de la lecture dite « globale » fabriqua des générations d’illettrés et de dyslexiques; la réforme des programmes d’histoire donnera quant à elle naissance à des générations de zombies incapables de rattacher des évènements ou des personnages à une chronologie et ayant pour toute culture historique celle du volapük mondialisé.
     
    Bernard Lugan (Blog de Bernard Lugan, vendredi 23 septembre 2011)
     
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  • Les faux calculs de l'ingérence...

    Nous reproduisons ci-dessous un article du géopolitologue Aymeric Chauprade, publié dans Valeurs actuelles et consacré à la "victoire" en Libye... 

     

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    Les faux calculs de l'ingérence

    Une nouvelle fois, l’incantation à la religion des droits de l’homme a fait pleuvoir les bombes de l’Otan. Comme toutes les guerres de l’“Empire” auxquelles la France apporte son tribut, l’intervention en Libye a été menée au nom du devoir humanitaire de protection des populations civiles. Tous les ingrédients classiques de la guerre d’ingérence rêvée par Kouchner et ses amis furent au rendez-vous ... : les don­neurs de leçons indignés (hier Glucks­mann, aujourd’hui BHL), le conte pour “enfants de la télé” qui fait fi de toute réalité géopolitique (“un peuple entier dressé contre son dictateur”, alors qu’il s’agit d’une guerre civile Cyrénaïque contre Tripo­litai­ne), l’absence d’esprit critique de la presse occidentale face à la propagande de l’Otan (diffusion de ­fausses scènes de liesse à Tripoli tournées au Qatar alors que les rebelles ne sont pas encore dans la capitale ; chronique de la cruauté du Guide), la contradiction permanente avec les principes affichés (quid de la chasse aux Noirs pratiquée par les rebelles et plus largement de l’épuration massive en cours contre les tribus restées fidèles à Kadhafi ?).

    Et la realpolitik dans tout cela ? Si, en effet, le masque de l’hypocrisie servait un but géopolitique tangible, nous pourrions parler de realpolitik et accepter celle-ci au nom de l’intérieur supérieur du pays. Mais, pour au moins trois raisons géopolitiques fondamentales, l’ingérence en Libye (comme le furent celles en Yougoslavie, en Afghanistan et en Côte d’Ivoire) est l’ennemie des intérêts géopolitiques français.

    La première raison est que l’opposition que nous soulevons n’est plus celle d’un tiers-monde impuissant. Le monde est devenu multipolaire ; les pays émergents n’ont qu’une envie, arracher à l’Occident ce masque humanitaire qui dissimule sa politique de terreur contre la souveraineté des peuples. Russes, Chinois, Indiens, Brésiliens, Sud-Africains : ces gens n’ont aucune illusion quant au but réel de guerres que leurs médias qualifient de néocoloniales et prédatrices (pétrole, gaz). En s’alignant sur les États-Unis, la France détruit son capital principal en politique étrangère : sa position d’équi­libre, qui était respectée et demandée. Le monde change aussi chez nous, en Europe. Avec un double “non” (Irak, Libye), l’Allemagne s’est écartée de la géopolitique états-unienne comme elle rompra demain avec le capitalisme financier anglo-saxon. C’est elle qui demain ajoutera à son prestige industriel international une position d’équilibre qu’elle nous aura ravie.

    La deuxième raison est que la chute de Kadhafi aggrave le chaos dans le Sahel. Le pillage des dépôts de l’armée libyenne dès le début de la guerre civile (comme en Irak en 2003), augmenté de nos parachutages d’armes et de munitions, transforme de fait le territoire libyen en une poudrière. Les tribus sont surarmées, à l’image des Touaregs pro-Kadhafi repliés vers leurs bases arrière nigériennes et maliennes et qui préparent déjà la revanche. Le Tchad ne sera pas épargné. Les trafics en tout genre (drogue, cigarettes, immigration), jusque-là endigués par les régimes autoritaires de Kadhafi et Ben Ali, vont exploser. Quant à nos “amis” rebelles, ce sont presque tous des islamistes radicaux ; les plus aguerris (les chefs) ont gagné leurs “lettres de noblesse” dans le djihad irakien… contre l’armée américaine (ce qui ne veut pas dire contre la CIA). L’assassinat, en juillet dernier, du ministre de l’Intérieur de Kadhafi rallié aux rebelles de l’Est ne s’explique que par la vengeance des islamistes contre leur ancien tortionnaire.

    En favorisant l’effondrement des régimes autori­taires qui formaient le dernier écran protecteur de l’Europe face à la misère africaine, nous avons libéré des énergies qui vont travailler au service de trois buts : davantage d’immigration vers l’Europe, davantage de trafics, davantage d’islamistes.

    Enfin, il existe une troisième raison pour laquelle un éventuel calcul stratégique français était par avance voué à l’échec. L’État libyen était déjà faible sous Kadhafi (lorsque les esprits seront apaisés, il faudra un jour mieux comprendre la nature du rapport entre le Guide de la révolution et son peuple), mais désormais et pour plusieurs années, il faudra parier sur l’absence quasi totale d’État libyen. Malheureusement, les Français, à la différence des Britanniques, n’excellent guère dans la manœuvre politico-économique (obtention des mar­chés) lorsqu’ils ne disposent pas de partenaire étatique clairement identifié. Les clés des marchés libyens se trouveront sans doute davantage au cœur des tribus que dans l’exécutif officiel. Si le président et son entourage voient dans les chefs rebelles auxquels ils ont déroulé le tapis rouge à l’Élysée l’incarnation de l’État libyen de demain, la désillusion risque d’être forte. Car il se pourrait bien que, cette fois, les Américains ne fassent pas l’erreur qu’ils ont faite en Irak en détruisant l’État baasiste et qu’ils cherchent au contraire à s’appuyer sur les anciens de Kadhafi plutôt que sur cette étrange “variété modérée de djihadistes démocrates” (!) dont l’entourage de Sarkozy nous vante les mérites.   

    Aymeric Chauprade, géopolitologue (Valeurs actuelles, 15 septembre 2011)

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  • L'agonie de l'Euro ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un article de Jacques Sapir, cueilli sur le site de L'Observatoire de l'Europe et particulièrement pessimiste quant à l'avenir de l'Euro. Jacques Sapir a publié en début d'année, aux éditions du Seuil, un essai percutant intitulé La démondialisation, qui a permis d'ouvrir le débat sur la possiblité d'une autre politique économique...

     

    L’agonie de l’Euro

     

    L'agonie de l'Euro

    La crise de l’Euro est désormais entrée dans sa phase terminale, comme cela a été prévu à la fin de 2010. La crise actuelle est appelée à s’aggraver, rythmée par le défaut de la Grèce (octobre ou novembre), le déclenchement de la crise Espagnole et une crise bancaire généralisée dans les pays de la Zone Euro. Le temps de la crise s’impose désormais aux politiques. Les conditions de gouvernance de la zone Euro sont clairement inadaptées, mais les conditions de réformes de cette dernière sont incompatibles avec la temporalité de la crise. Nous sommes donc face à l’agonie de l’Euro.

     
     
    I - La crise de la zone Euro connaît depuis ces dernières semaines une accélération dramatique.
     
    Celle-ci apporte le démenti le plus cinglant aux attitudes de déni de réalité dans lesquelles les responsables français, de la majorité comme de l’opposition, se sont pour la plupart enfermés. Désormais nous sommes en présence de la situation suivante :
       
    1. La crise grecque a pris une tournure clairement incontrôlable.Un défaut de ce dernier pays ne peut plus être évité. Il peut seulement être retardé. Il peut survenir à partir du mois d’octobre 2011, même s’il est encore probable qu’il se produira entre novembre et décembre 2011. Ce défaut ne fait sens que si la Grèce sort de la zone Euro, ce qui pourrait survenir soit immédiatement soit dans un délai de 6 à 8 semaines après le défaut. Les conséquences sont alors les suivantes :
      1. La crise Grecque impose de fournir de 2012 à 2019 de 340 à 380 milliards d’Euros à ce pays, et ceci sans tenir compte d’une possible aggravation de son déficit et des besoins d’autres pays qui sont estimés à plus de 1000 milliards.
      2. Ce défaut est déjà clairement anticipé par les principales banques européennes. Mais le processus de transmission des « mauvaises dettes » à la BCE est loin d’être achevé.
      3. L’Allemagne a d’une certaine manière déjà « acté » de la sortie de l’Euro par la Grèce comme le montre le plan de soutien pour ses propres banques.
      4. Il est clair désormais que dans un certain nombre d’établissements bancaires européens on se prépare à la fin de la zone Euro. Les positions qui seront prises dans les jours qui suivent pourraient avoir des effets cumulatifs.
    2. Avec le défaut et avant la sortie de la Grèce de la zone Euro, la spéculation se déchaînera contre le Portugal, l’Irlande, l’Espagne et l’Italie (et peut-être la Belgique). Elle se combinera avec une crise sociale grave en Espagne liée à l’interruption des allocations chômage pour une partie des chômeurs arrivant en fin de droit. Cette crise obligera l’Espagne à demander l’aide du Fond Européen de Stabilisation Financière (FESF) pour des montants excédant largement ce qui est pour l’instant prévu.
      1. Hors la Grèce, les besoins à court terme (2014) peuvent être estimés à 90 milliards pour le Portugal, 50 milliards pour l’Irlande, de 250 à 300 milliards pour l’Espagne. C’est donc un total de 390 à 440 milliards d’Euros qu’il faudra fournir pour les pays déjà en difficulté.
      2. Ce calcul laisse dans l’ombre le fait qu’avec l’aggravation de la spéculation, l’Italie et la Belgique devraient dès le début de 2012 demander une aide supplémentaire.
      3. Par ailleurs le rythme de la crise en Espagne est aujourd’hui imprévisible. Si une accélération se produit, les sommes nécessaires augmenteront en conséquences.
    3. La combinaison de (1) et (2) a déjà été partiellement anticipée par les marchés depuis début août et a entraîné une chute dramatique et spectaculaire de la capitalisation des banques européennes. La chute de la capitalisation des banques européennes aura des conséquences importantes à court terme :
      1. La nécessité d’une recapitalisation de ces banques va se faire jour à très court terme. Elle sera massivement impopulaire dans tous les pays en raison du précédent de 2008.
      2. La crise mettra en évidence le caractère largement factice des « stress-tests » conduits au printemps dernier et qui excluait tout défaut sur la dette souveraine d’un État membre. Les sommes nécessaires, en dépit des dénégations des ministres, pourraient bien être supérieures à 200 milliards d’Euros.
      3. En France, il faut s’attendre à une dégradation de la note des banques qui précèdera celle de l’Etat.
      4. Le risque d’un run bancaire ne peut plus être totalement écarté. Il pourrait nécessiter une nationalisation de l’ensemble du secteur bancaire.
    4. On assiste désormais à un phénomène de fatigue de l’Euro, qui se caractérise par :
      1. Une incapacité des gouvernements à trouver des solutions qui soient à la fois communes et efficaces.
      2. Un sentiment qui gagne l’opinion et les gouvernants, en dépit du déni de réalité qui prévaut encore, comme quoi la bataille est perdue.
      3. Une opposition croissante entre les pays de la zone Euro sur les solutions tant présentes que futures.
     
     
    II - Cette situation va conduire à un enchaînement rapide dans les mois qui viennent, enchaînement qui va rendre obsolète un bon nombre de positions politiques.
     
    Le véritable défi qui est posé à la classe politique consiste à être capable d’anticiper les événements et de réagir en conséquence.
     
    1. L’Euro, dans sa forme actuelle est condamnée. Les moyens évoqués pour stabiliser puis résorber les déséquilibres tant conjoncturels (comme la hausse rapide du poids des dettes souveraines) que structurels (le déficit de croissance avec le reste du monde développé, le phénomène d’euro-divergence entre les pays) sont aujourd’hui soit insuffisants soit politiquement impossibles.
      1. Les Eurobonds. Cette idée est désormais dépassée. L’émission de titres de dettes englobant les pays à risques et les pays réputés « sains » aurait un taux d’intérêt prohibitif.
      2. La monétisation des dettes. Une monétisation des dettes pourrait être faite par la BCE directement en faveur des États et non comme aujourd’hui en rachetant aux banques des titres publics. Mais un certain nombre de pays de la zone Euro s’y opposent.
      3. Une stabilisation volontariste de la dette. Outre qu’elle semble largement impossible dans de nombreux pays, si cette politique était appliquée, elle plongerait la zone Euro dans une profonde dépression que recréerait de la dette par disparition des ressources fiscales.
    2. La poursuite de la politique actuelle tentant de sauver l’Euro va provoquer d’ici quelques mois une grave crise dans les relations franco-allemandes. L’opposition entre les deux pays est désormais systématique. La Chancelière, Mme Merkel, est aujourd’hui politiquement affaiblie et ne peut, sans se suicider électoralement, faire accepter à l’Allemagne l’ampleur de la contribution nécessaire. Cette dernière est estimée à 2% du PIB par an pendant 7 ans en transferts fiscaux et 4% du PIB par an et sur la même période en charge d’emprunts supplémentaires. Il faut donc décider aujourd’hui ce qui est le principal, la « survie » de l’Euro au prix d’un affrontement permanent entre les deux pays, qui risque in fine de compromettre son objectif, ou de bonnes relations entre les deux pays.
    3. Les conséquences sur la France de cette politique risquent d’être dramatiques.Non seulement la contribution que notre pays devra verser, directement ou indirectement, sera lourde, mais les conséquences combinées sur la croissance d’une politique d’austérité draconienne et d’un taux de change surévalué nous condamneront à une longue période de récession et à une accélération du processus de désindustrialisation que nous connaissons déjà.
    4. L’Euro importe moins que le principe de coordination monétaire.Plus que l’Euro, c’est le principe d’une coordination des politiques monétaires qu’il faut sauver. Si des dévaluations sont inévitables, il faut les accepter mais faire en sorte qu’elles ne sortent pas d’un cadre pré-établi. Pour cela, il importe de limiter les espaces de spéculations en contrôlant les mouvements de capitaux et en interdisant un certain nombre d’opérations sur les marchés. Ces mesures auraient du être prises dès le début de la crise en 2008. Il faut tirer les leçons de pourquoi il n’en fut rien et comprendre qu’une gouvernance active n’est pas possible avec un grand nombre de pays. C’est pourquoi il faut accepter de passer du principe de coopération (dont le meilleur exemple est la monnaie unique) au principe de coordination et à terme soit faire évoluer l’Euro, soit le recréer comme une monnaie commune.
     
    L’agonie de l’Euro peut durer de six à dix-huit mois.
    Ses conséquences politiques peuvent être dramatiques tant à l’intérieur de chaque pays (et des élections sont prévues dans de nombreux de ces derniers en 2012 et 2013) qu’au sein de l’Europe.
    Dans la situation actuelle, la meilleure des solutions consisterait en une dissolution de la zone qui permettrait de mettre en avant immédiatement les institutions nécessaires à une transition ordonnée. À défaut d’une telle solution, il convient de se prémunir contre les effets les plus néfastes de cette agonie en prenant les mesures unilatérales de sauvegarde qui ont été détaillées dans des documents ultérieurs et, le cas échéant, en sortant de l’Euro.
     
    Jacques Sapir (Observatoire de l'Europe, lundi 12 Septembre 2011)
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  • Sauver la Grèce ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, publié sur son blog, Regards sur le renversement du monde,  consacré à la Grèce... Faut-il laisser choir ce pays ? le soutenir ?... Une chose est certaine, comme le souligne au final l'auteur, il y a un choix politique à faire : il faut décider ! On recherche d'urgence des hommes (ou des femmes) d'Etat...

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    Grèce

    Sauver la Grèce ou sauver l’Europe ?…

    Vous venez de payer 500 euros pour les Grecs !…

    Pas du tout, c’est 15 milliards d’euro que la France donne aux Grecs – soit la quasi-totalité de l’augmentation d’impôts et de taxes votée le 8 septembre dernier….

    … puisque moins d’un ménage sur deux paie l’impôt, c’est juste 1.000 euros que chaque ménage imposé vient de donner aux Grecs !

    … et d’ailleurs, les avoirs de Grecs en Suisse s’élèveraient à 200 milliards d’euro, soit exactement le montant des aides ( fons structurels, etc.) versés par l’Union à la Grèce depuis vingt ans !

    … les chiffres courent, vérifiables ou non, l’opinion s’agite, la défiance monte.

    Pourquoi ne pas dire la vérité sur les chiffres, sur les scénarios, et pourquoi refuser que les Français, et les Européens avec eux, en débattent ?

    Les montants qui circulent représentent, ou veulent représenter, la contribution des Français aux prêts ( sous un nom ou sous un autre ) que l’Union européenne accorde à la Grèce. Un prêt se rembourse, il rapporte un intérêt, et cet intérêt peut être profitable au créancier ; contrairement à ce qui est généralement dit ou sous-entendu, les prêts accordés aux banques françaises lors du gel du marché interbancaire de 2008 ont été remboursés, la plupart de manière anticipée, avec des vrais euros, et ont rapporté de l’argent à l’Etat !

    La question semble évidente ; la Grèce va-t-elle rembourser

    J’ai récemment fait part de ma conviction ; non. Non sans nouveaux prêts, non sans nouvelles aides, et pour parler clair, non sans nouveaux dons. Il n’existe aucune chance que même une austérité appliquée, des impôts recouvrés et une croissance robuste permettent à la Grèce de rembourser plus de… 20 % ou 30 % de sa dette – risquons un chiffre. Et j’ai aussi écrit que les Grecs n’avaient rien fait pour mériter ces aides et notre solidarité. Que les Grecs commencent par s’aider eux-mêmes, c’est-à-dire lever l’impôt, reconstruire une économie, bâtir une Nation, et on verra.

    Le seul problème est la Grèce pourrait bien sauver l’Europe ! Tout simplement parce que si la Grèce, faute de soutien fait défaut, chacun sait déjà que les acteurs du marché en tireront pour première conséquence que l’Italie aussi, que l’Espagne aussi, et pourquoi pas la France aussi, vont faire défaut, ou peuvent faire défaut, et vont engager toutes leurs forces pour que l’un après l’autre les mâillons de la chaîne sautent. Le scénario est écrit, et il suffit de regarder le marché des CDS pour constater qu’il se met en place. Et c’est un scénario… à combien de milliards de dollars la prime pour ceux qui auront abattu l’euro ?

    C’est un argument du soutien inconditionnel et illimité à la Grèce qui se résume ainsi ; il ne sera jamais trop coûteux d’aider un pays qui représente moins de 2 % de l’Union, si le défaut de la Grèce entraînait une menace de défaut, donc un besoin d’aide inconditionnel, sur des pays qui représentent 8 %, 10 %, 15 % de l’Union !

    Entre la décision par la morale et la décision par l’intérêt bien compris, le débat n’est pas, ne peut pas être technique. La question est simple ; est-ce à la BCE, est-ce au Conseil des Ministres, est-ce aux Européens de trancher ?

    Le dossier n’est pas si complexe qu’il ne puisse être partagé, expliqué, mis en débat. Et le débat n’est pas si obscur qu’il ne puisse faire l’objet d’un choix des Européens. Nous en sommes au point où les décisions techniques, dans l’obscurité des cabinets ou des institutions, de toute façon manqueront leur objet parce que la volonté collective ne les porte pas, parce que le projet européen n’y est pas, ce projet qui sera celui des peuples d’Europe ou ne sera pas.

    De toute manière, l’Union européenne n’échappera pas au débat populaire quand elle comprendra que pour se construire, elle doit d’abord se séparer de ce qui n’est pas elle. La question de la frontière, de la séparation et du lien, avec la Turquie comme avec Israël, avec le Maghreb comme avec l’Afrique subsaharienne, avec la Russie comme avec l’île britannique, est de celles qui ne s’évitent pas. Elle n’évitera pas non plus le débat sur l’unité interne entre ceux qui en sont, et l’écart avec ceux qui n’en sont pas. Le cadeau de la Grèce à l’Europe pourrait bien être de rapprocher l’échéance d’un débat dont seuls les peuples d’Europe diront le dernier mot. Comme savent le dire les (bons ) conseillers en gestion à leurs clients: « votre choix sera le meilleur, puisque c’est le vôtre. Il n’en est pas de pire que de ne pas choisir».

    Hervé Juvin (Regards sur le renversement du monde, 12 septembre)

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  • Vers une redistribution du pouvoir ?...

    Dans cette chronique, mise en ligne sur Realpolitik.tv,  Hervé Juvin souligne l'urgence de la mise en place d'une politique de protection des actifs stratégiques des champions nationaux et européens, sous peine d'une redistribution des pouvoirs au niveau mondial...

     


    Hervé Juvin : valse du prix des actifs, vers une... par realpolitiktv

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  • Quelles guerres après Oussama ben Laden ?...

    Les éditions Plon viennent de publier un court essai de Xavier Raufer intitulé Quelles guerres après Oussama ben Laden ?. Criminologue réputé, l'auteur appelle les Européens à prendre conscience des vraies menaces que sont le crime organisé et la multiplication des zones grises propices à l'hybridation politico-mafieuse... Un ouvrage percutant et rapide à lire.

     

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    "Voilà Oussama Ben Laden éliminé. Depuis deux ans d'ailleurs, son courant islamiste jihadi, naguère encore capable des pires attentats, était discrédité dans tout le monde musulman. En matière de sécurité globale, quelles menaces, quels conflits désormais ? Le problème est grave, car l'Europe identifie mal ses ennemis. Or les combattre suppose de les connaître : comment préparer la défense de demain si l'on ignore tout de ceux qu'il faudra affronter ? Alors que, aujourd'hui, l'ennemi ne va plus de soi et que bandits et terroristes mutent et s'hybrident toujours plus, à l'heure où s'accroît la mondialisation criminelle, ce livre répond précisément à ces questions, grâce à l'apport croisé de la géopolitique et de l'expertise criminologique."

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