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démocratie - Page 9

  • « Redonner la parole au peuple est toujours une bonne chose»...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la démocratie et à son exercice... 

     

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    Plus une démocratie est représentative, moins elle est démocratique !

    Le peuple suisse a voté récemment à propos de l’immigration de masse. Du coup, certains s’indignent qu’on ait demandé au peuple de trancher. Mais le peuple a-t-il toujours raison ?

    Le peuple n’est évidemment pas infaillible (les élites le sont encore moins), mais ce n’est pas dans ces termes que se pose le problème. Pour décréter que le peuple a « tort » ou « raison », il faut pouvoir se référer à des critères surplombants qui n’existent tout simplement pas : de tels critères renvoient toujours à une opinion personnelle ou à une idéologie qui, telle l’idéologie des droits de l’homme, cherche à placer l’exercice de la démocratie sous conditions. Comme tout autre vote, un référendum n’a pas pour but de dire où est la vérité, mais de révéler ce que pensent les gens. On ne fait pas voter les citoyens pour se prononcer sur la valeur de vérité de la théorie de Darwin ou des décisions du concile de Trente, mais pour savoir ce qu’ils pensent politiquement !

    La démocratie est un régime qui se fonde sur la souveraineté du peuple, ce qui signifie qu’un pouvoir, pour être légitime, doit pouvoir recueillir l’approbation ou le consentement des citoyens. Mais la démocratie est aussi, et surtout, le seul régime politique qui permet à tous les citoyens d’exprimer leur sentiment sur les questions qui les concernent. C’est donc une erreur de n’y voir qu’un régime fondé sur la « loi du nombre ». Le suffrage universel n’est en réalité qu’une technique permettant de révéler des préférences. La notion-clef en démocratie n’est pas le suffrage, mais la participation.

    En France, pareillement, le Front national – pour ne citer que lui – assure vouloir redonner la parole au peuple. Et ces jours-ci, on manifestait à Paris pour exiger un référendum sur l’immigration. Est-ce forcément une bonne idée ?

    Redonner la parole au peuple est toujours une bonne chose. Surtout lorsque l’on sait qu’il n’a jamais été appelé à s’exprimer sur la plupart des transformations de société qui ont le plus affecté son existence quotidienne, qu’il s’agisse de l’immigration, de la construction européenne, du « mariage pour tous », etc. Le référendum est en outre une procédure relevant de la démocratie directe, c’est-à-dire de cette démocratie participative qui est aujourd’hui la seule susceptible de corriger les défauts d’une démocratie représentative qui ne représente plus rien. Plus une démocratie est représentative, moins elle est démocratique, disait très justement Carl Schmitt : dans une démocratie représentative, le peuple abandonne en effet sa souveraineté à ses représentants. C’est ce qu’avait également observé Rousseau. Surtout quand il est issu de l’initiative populaire, comme en Suisse, le référendum est de nature à corriger une crise de la représentation née de la confiscation de la décision par la Nouvelle Classe politico-médiatique. Cela dit, le référendum n’est pas une panacée : quand le peuple s’est exprimé par voie de référendum, ce qui compte, c’est ce qui vient après, en l’occurrence la façon dont l’opinion révélée par le vote se transpose ou non dans la réalité. C’est là en général que les difficultés commencent.

    Il faut aussi que la question soumise au référendum soit bien formulée. Pour porter un jugement sur la démarche de ceux qui déclarent « vouloir un référendum sur l’immigration », j’attendrai de connaître le libellé de la question qu’ils voudraient voir posée.

    Pour expliquer son opposition à la demande de la Crimée d’obtenir son rattachement à la Russie, Laurent Fabius a doctement déclaré « qu’en droit international, on ne peut pas faire un référendum pour modifier des frontières ». « Imaginez un département de France qui demande son indépendance ! », a-t-il ajouté. Qu’en pensez-vous ?

    Laurent Fabius n’a jamais brillé par ses compétences juridiques. La déclaration que vous citez se contente de répéter ce qu’a déclaré Barack Obama, ce qui ne saurait surprendre, le gouvernement de François Hollande prenant ses ordres à la Maison-Blanche. L’actuel ministre des Affaires étrangères ignore sans doute qu’en septembre prochain, les Écossais se prononceront par référendum sur leur éventuelle indépendance. Pourquoi les habitants de la Crimée se verraient-ils interdire de s’exprimer à la façon des Écossais ? La phrase : « Imaginez un département de la France qui demande son indépendance ! » est encore plus grotesque. Laurent Fabius a apparemment oublié qu’en 1962, trois départements français (Alger, Oran et Constantine) se sont proclamés indépendants pour devenir la République algérienne, et que cette indépendance a été formellement consacrée par un référendum qui s’est déroulé en Algérie le 1er juillet 1962 (99,72 % de « oui »), lui-même précédé en France, le 8 janvier 1961, par un référendum sur l’autodétermination de l’Algérie (74,99 % de « oui »).

    Alain de Benoist , propos recueillis par Nicolas Gauthier(Boulevard Voltaire, 10 mars 2014)

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  • Quelle idée saugrenue de vouloir rester suisse !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 14 février 2014 et consacrée aux résultats du référendum suisse contre l'immigration massive ...

     


    Ah, quelle idée saugrenue que de rester suisse ! par rtl-fr

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  • La démocratie suisse n’est pas un virus mais un antidote !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David L'Epée, cueilli sur le sit Les Observateurs et consacré au référendum suisse contre l'immigration de masse. Journaliste indépendant, David L'Epée collabore à la revue Éléments.

     

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    La démocratie suisse n’est pas un virus mais un  antidote !

    Lorsqu’on lui montre la lune, l’imbécile regarde le doigt, dit l’adage populaire. Je dois faire partie de la catégorie des imbéciles parce que quand on me montre le problème migratoire tel qu’il a été mis en lumière par le scrutin du 9 février dernier, j’ai tendance à regarder la démocratie directe qui a permis de le désigner. Cette dernière, pourtant, ne semble pas peser bien lourd dans les considérations dont la presse nous abreuve depuis quelques jours, considérations marquées très majoritairement par le dépit, à l’image d’un milieu – les médias, l’intelligentsia, la classe politique – massivement opposé à cette initiative. « L’aveuglement anti-européen qui domine le pays l’a emporté » nous explique le socialiste Roger Nordmann, tandis que Pascal Couchepin, depuis l’autre face de la même pièce libérale, assombrit le tableau et parle d’ « économie de guerre ». Cette fracture entre électorat et “experts” est une constante dans l’histoire politique suisse de ces dernières années, mais elle prend aujourd’hui une autre dimension du fait, comme l’écrivait Le Temps du 10 février, que cette fois « le tremblement de terre est continental ». Les médias de notre pays ne sont plus les seuls à stigmatiser l’électeur suisse, ils sont rejoints dans ce travail de réprimande morale par de nombreux médias européens, à commencer par Libération qui titrait sa une d’il y a quelques jours « Le virus suisse ». A la condamnation des grands fait écho le soutien des petits : les peuples membres de l’UE sont nombreux ces jours-ci à envier la souveraineté populaire helvétique et à se demander ce qu’ils auraient fait à notre place si on leur avait donné la parole, ce que leurs gouvernants s’abstiennent bien de faire, et pour cause ! En France, deux sondages, effectués respectivement par Le Point et par Le Figaro, révèlent que les Français auraient été entre 88 et 92% à soutenir une initiative semblable à celle qui nous a été soumise.

    M. Fabius se rend-il bien compte de cette fracture lorsqu’il appelle l’UE à pénaliser la Suisse ? Et M. Cohn-Bendit, qui, invité par l’émission Forum du 10 février, comparait la situation actuelle de notre pays à celle de 1933 ? Lors de cette même émission, la députée européenne Astrid Lulling se montrait encore plus explicite. Se réjouissant que son pays à elle ne soit pas perverti par l’infâme institution du référendum populaire, elle s’est écriée : « C’est à désespérer du droit de vote si les citoyens sont aussi bêtes ! »

    Ces réactions à chaud ont le mérite de faire tomber quelques masques et de révéler que ce n’est pas uniquement la nouvelle politique migratoire de la Suisse qui est remise en cause par ce qu’il faut bien appeler les technocrates européens mais bien le principe même de la démocratie directe ! Un discours menaçant aux accents autocratiques qui se trouve soutenu et relayé par un certain nombre de nos politiciens, à la défaite amère, pour qui la souveraineté populaire n’a de valeur que lorsqu’elle valide leurs propositions. Le politologue Antoine Chollet l’explique bien dans son livre Défendre la démocratie directe (collection Le Savoir Suisse, 2011) : « Les élites suisses, dans leur grande majorité, nourrissent à l’égard de la démocratie des sentiments pour le moins mitigés et se font bien souvent les avocates de positions anti-démocratiques plus ou moins savamment camouflées. » Le camouflage a tendance ces derniers jours à s’effriter on découvre alors des figures franchement inquiétantes.

    Alors que les “commissaires politiques” cités plus haut appellent ouvertement à des mesures de rétorsion de l’UE à notre encontre, quelques-uns parmi nos compatriotes semblent s’en réjouir. Lorsque des citoyens attendent d’un pouvoir étranger qu’il punisse leurs propres concitoyens, il n’est pas exagéré de parler de collaboration, au sens le plus méprisable que ce terme a pu prendre à travers l’histoire. Qu’importent qu’ils le fassent au nom d’une morale transcendante mais ô combien relative, la leur, qui leur donne l’assurance d’avoir raison contre tous ! Avoir raison contre la majorité est une prétention indéfendable dans un Etat démocratique puisque la démocratie est à elle-même sa propre mesure. Elle ne reconnaît pas les notions de tort ou de raison en soi, elle ne reconnaît que la légitimité d’une décision populaire, légitimité acquise par la majorité des votes.

    Libération ne s’est pas trompé en parlant de virus suisse. L’épidémie risque, ces prochaines années, de surprendre et de bousculer de nombreux gouvernements parmi nos voisins européens. La maison Bruxelles se fragilise un peu plus chaque jour tandis que l’aspiration souverainiste, un peu partout, se fait jour et tente de s’exprimer, dans les urnes lorsque c’est possible, sinon dans la rue. Comme le disait Victor Hugo, il n’est rien au monde d’aussi puissant qu’une idée dont l’heure est venue, et cette idée-là pourrait bien être celle de la démocratie directe. Nous nous apercevrons peut-être alors qu’il ne s’agissait pas d’un virus mais bien d’un antidote.

    David L’Epée (Les Observateurs, 15 février 2014)

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  • Les démocrates contre le populisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Pierre Pélaez, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré au populisme, objet de détestation des "élites"...

     

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    Les démocrates contre le populisme

    Inquiets de voir fondre leurs ouailles, plusieurs syndicats ont lancé récemment une grande action contre le populisme, avec promenades rituelles dans les rues. Peu de gens s’en doutaient en effet, mais il y aurait en France un peuple populiste, qui n’est pas le même que le peuple démocrate.

    Pourtant, considérons les deux étymologies : demos, en grec, veut dire le peuple ; populus, en latin, veut dire exactement la même chose. La démocratie, pourrait-on dire — avec une étymologie latine —, la populopotence, c’est le pouvoir du peuple. Elle est donc le populisme par excellence. Mais, pour ces lanceurs d’actions, il y aurait un peuple d’origine grecque demos, un autre d’origine latine populus. Allez comprendre quelque chose à cette subtile sémantique par laquelle les tyranno-potentats (terme latin et grec) du politiquement correct font deux peuples avec un seul !

    À moins qu’ils ne distinguent celui – démocrate – qui vote pour eux et les reconduit à l’infini, et l’autre – populiste – qui ne les supporte plus et n’a qu’une envie, c’est qu’ils dégagent !

    Ainsi le premier, le peuple démocrate, est un bon peuple, constitué par des citoyens responsables. Il vote tantôt pour la droite, tantôt pour la gauche, car il croit que la gauche molle sortira le pays des difficultés où l’a mis la droite-fric, puis que la droite blabla sortira ce même pays des difficultés où l’a mis la gauche bête. Différenciant les partis dits de gouvernement, le libéral/menteur et le social/tartuffe, il s’enflamme tous les cinq ans pour l’un ou pour l’autre et condamne le tous pourris. Il accepte avec fatalisme d’être taxé et tondu, il s’en réjouit même parfois, car l’impôt est l’apanage du citoyen. Il prend au sérieux des discours politiques vides de sens. Syndiqué ou non, il manifeste dans le calme sa légitime revendication, puis se disperse à l’appel des responsables des syndicats qui iront décider à sa place avec les ministres. Il appelle France Inter pour poser des questions convenues et filtrées et remercie les journalistes de ce moment de libre expression et de la qualité des émissions.

    Le second, le peuple populiste, est un mauvais peuple, dangereux, constitué d’irresponsables, quelquefois appelés gens en colère. Il s’abstient de voter, vote blanc, ou pour ce qu’on nomme les extrêmes, Front national, Front de gauche et autres. Il critique les hommes politiques, de droite comme de gauche, qu’il voit se succéder pour faire la même chose et qu’il ose traiter de guignols et de rigolos. Il considère que ni les uns ni les autres ne s’attaquent depuis trente ans aux vrais problèmes d’un pays qu’il voit s’enfoncer chaque jour davantage. Il est présenté par les journalistes démocrates du Monde Libéré comme vivant dans les cafés du commerce, et considéré comme primaire, simpliste, veule, raciste, xénophobe, franchouillard et pétainiste. Souvent pauvre, quelquefois aisé, le peuple populiste véhicule un discours nauséabond ; il vitupère contre les impôts, qu’il trouve trop lourds, et lorsque la coupe déborde, il descend dans la rue pour tout casser et refuse de se disperser. Il peut mettre un bonnet rouge et se livrer à des jacqueries d’un autre temps, il ose dire que les politiques sont tous des pourris et, horreur suprême, il penserait presque, comme en son temps le général de Gaulle, que « la droite financière et l’intelligentsia de gauche s’entendent comme larrons en foire sur le dos du populo » !

     
    Jean-Pierre Pélaez (Boulevard Voltaire, 9 décembre 2013)
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  • Pour le référendum d'initiative populaire !...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Bruno Guillard, cueilli sur Polémia et consacré à la question du référendum d'initiative populaire...

     

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    Le référendum d'initiative populaire : un objectif essentiel

    Au cours du discours qu’elle prononça lors de la clôture de l’université d’été de son parti, le 15 septembre dernier, Marine Le Pen a annoncé que lorsqu’elle accédera au pouvoir, elle gouvernera de manière référendaire de façon à n’entériner que des décisions validées par une majorité du peuple.

    Un approfondissement considérable de la démocratie

    Cette manière de gouverner constituerait un approfondissement considérable de notre démocratie sans commune mesure avec les projets de démocratie participative des socialistes qui permettraient surtout d’octroyer aux « associations », dont nous connaissons bien la nature et la filiation idéologique, une surreprésentation dans le débat public.

    Sans commune mesure non plus avec le « référendum d’initiative partagée » que N. Sarkozy a introduit dans l’article 11 de la constitution en 2008 et qui nous a été présenté comme étant un référendum d’initiative populaire, ce qu’il n’est nullement puisqu’en fait les parlementaires détiennent la prérogative de l’initiative en cette matière (une demande de référendum doit être faite par un minimum d’un cinquième des membres du Parlement soutenus par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ; autant dire que cette disposition ne suscitera aucune initiative puisque les parlementaires, dans leur grande majorité, ne souhaitent nullement s’en remettre à un peuple dont l’opinion est opposée à la leur de manière très majoritaire sur tous les sujets importants ; de plus la condition supplémentaire imposant un soutien des parlementaires par 10% des électeurs inscrits est quasiment inaccessible. (Un projet de loi constitutionnelle, rédigé par Yvan Blot et défendu par Christian Vanneste en 2011, prévoyant l’organisation de référendums à la demande de 500.000 citoyens inscrits sur les listes électorales, n’a recueilli que 77 signatures de députés.)

    Une pétition de 500.000 citoyens

    Cette orientation prise par la présidente du Front national n’est certes pas tout à fait nouvelle puisque son parti a inclus depuis longtemps (1985) le référendum d’initiative populaire dans son programme et envisage un allégement des conditions permettant son exercice mais sans préciser l’ampleur de cet allégement. Pour que le référendum d’initiative populaire puisse devenir une institution allant dans le sens de la démocratie directe et nous permettre de sortir du carcan oligarchique qui nous est imposé par le système représentatif, il faudrait donner l’initiative au peuple en permettant à 500.000 citoyens de déclencher une procédure référendaire comme c’est le cas en Italie. L’introduction d’une telle loi devrait faire elle-même l’objet d’un référendum dont le résultat positif ne fait aucun doute (un sondage a montré que 70% de nos compatriotes sont favorables à la pratique du référendum).

    Comme l’a montré Yvan Blot dans un excellent ouvrage intitulé La Démocratie directe: une chance pour la France (Economica, 2012), le général De Gaulle considérait que le référendum était la seule vraie pratique démocratique et que la représentation déformait considérablement l’opinion populaire. Il considérait que la seule façon de mettre un terme au régime des partis politiques, qui sont des oligarchies (lire à ce sujet le livre de Robert Michels : Les partis politiques, Editions de l’Université de Bruxelles, 2009), résidait dans le vote populaire direct.

    Eloge du populisme

    Beaucoup de critiques négatives ont été portées à l’encontre de la démocratie directe, en particulier celles d’inconstance et de médiocrité de l’opinion populaire ; certains politistes ont pensé ou pensent encore que le peuple dans son ensemble est capricieux, immature et même déraisonnable et immodéré. Les longues expériences des Suisses, des Italiens, des Allemands et de certains Nord-Américains montrent au contraire que le peuple fait preuve de beaucoup de modération et de constance dans ses choix (voir l’ouvrage d’Yvan Blot cité plus haut). Aristote, déjà, avait remarqué que l’opinion de l’ensemble du peuple valait mieux que celle de n’importe quelle fraction du peuple. Remarquons également que le peuple dans son ensemble est beaucoup plus conservateur que ses élites, aussi éclairées soient-elles ; ces dernières ont une fâcheuse tendance récurrente à s’enticher des idées les plus absurdes et les plus nocives. Le conservatisme du peuple a été remarqué par le philosophe Vincent Coussedière, auteur d’un essai passionnant intitulé Eloge du populisme (Elya Editions, 2012) dans lequel il montre que ce qu’il appelle la « réaction populiste » est une réaction profondément conservatrice qui s’oppose aux lubies révolutionnaires des libéraux–libertaires (immigrationnisme, mariage pour tous, dissolution des communautés enracinées, mondialisme…).

    L’initiative populaire, seule garante de lois conformes à la volonté populaire

    Pour conclure, disons que plus que le triomphe d’un parti politique, ce qui importe c’est l’adoption du référendum d’initiative populaire parce qu’il semble que ce soit la seule institution susceptible de permettre l’abrogation légitime et difficilement contestable de toutes les lois néfastes qu’on nous a imposées au cours des quarante dernières années et leur remplacement par des lois conformes à la volonté populaire majoritaire (sur tous les sujets essentiels l’opinion majoritaire est à l’opposé de celles des partis dits de gouvernement).

    A la limite, peu importe le parti qui osera prendre une telle décision pourvu qu’il nous permette, enfin, d’en terminer avec le règne des oligarchies tyranniques et liberticides.


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  • Quelques idées remises à l'endroit (1)...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Alain de Benoist à Nicolas Gauthier et publié sur Boulevard Voltaire. Alain de Benoist y évoque la démocratie, le mariage et la violence...

     

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    Démocratie sans électeurs ? On nous assène les « valeurs démocratiques ». Mais quelles sont-elles, sachant qu’en démocratie, on a raison à 50,01 % et tort à 49,99 % des suffrages ? Alors que ce sont les mêmes journalistes qui boudent les institutions suisses à base référendaire, pour s’indigner ensuite de l’opinion du peuple. Comment sortir de ce dilemme ?

    Les procédures démocratiques n’ont pas but de déterminer qui a « raison » et qui a « tort ». Elles ne visent pas à statuer sur la vérité. Leur seule raison d’être est de montrer où vont les préférences des citoyens. Le suffrage universel n’est qu’une technique parmi d’autres pour connaître ces préférences. Il est loin de résumer la démocratie, qui elle-même ne se résume pas à de « libres élections ». (Au passage, rappelons aussi qu’en matière de suffrage, le principe démocratique n’a jamais été « un homme, une voix », contrairement à ce que l’on répète partout, mais « un citoyen, une voix », ce qui est tout différent.) Jean-Jacques Rousseau disait très justement que, dans une démocratie représentative de type parlementaire, les citoyens ne sont libres que le jour de l’élection. Dès le lendemain, leur souveraineté se retrouve captée par leurs représentants qui, en l’absence de mandat impératif, décident en fait à leur guise. Le parlementarisme ne correspond lui-même qu’à la conception libérale de la démocratie, ce qui conduisait Carl Schmitt à affirmer qu’une démocratie est d’autant moins démocratique qu’elle est plus libérale.

    La crise actuelle de la démocratie est fondamentalement celle de la représentation. Elle s’articule en deux volets. D’un côté, le peuple se détourne de la classe politique parce qu’il n’a plus confiance en elle, qu’elle est « trop corrompue », qu’elle ne s’occupe pas des « vrais problèmes », qu’elle ne répond pas aux attentes des gens, etc. De l’autre, les élites se détournent du peuple parce qu’il « pense mal », qu’il a des « instincts grossiers », qu’il se rebelle instinctivement contre les mots d’ordre de l’idéologie dominante. La « gouvernance » et l’expertocratie sont aujourd’hui les deux derniers moyens de gouverner contre le peuple, et surtout sans lui. Seule une démocratie participative, une démocratie directe, s’exerçant en permanence (et pas seulement à l’occasion des élections ou des référendums) peut corriger les défauts de la démocratie représentative. Mais cela exige de redonner du sens à la notion de citoyenneté. En clair : de remédier à la dé-liaison sociale en recréant un espace public ordonné à un grand projet collectif, au lieu d’inciter les gens à jouir sans mélange de leur repli sur la sphère privée.

    Mariage sans mariés ? Comment faire l’apologie de cette institution pour les seuls hommes n’y ayant pas droit, prêtres et homosexuels, alors que dans le même temps la défense des valeurs familiales fait rigoler tout le monde sur les plateaux de télévision ?

    La France est le pays d’Europe où le taux de nuptialité est le plus bas. La plupart des gens ne se marient plus : depuis 2007, dans les grandes villes, deux enfants sur trois naissent hors mariage. À l’origine, le mariage avait été institué principalement au bénéfice des femmes (le mot vient du latin matrimonium, dérivé de mater) pour deux raisons principales : clarifier les filiations et déterminer pour les hommes les conditions de l’accès aux femmes. L’Église n’a fait du mariage un sacrement qu’au début du XIIIe siècle, en 1215, époque à laquelle elle l’a strictement encadré afin de mieux contrôler les rapports entre les lignées. Le mariage homosexuel n’a évidemment rien à voir avec l’accès aux femmes, et le moins qu’on puisse dire est qu’il ne va pas clarifier les filiations. Le mariage, dans cette perspective, n’est plus perçu comme une institution, mais comme un contrat entre deux individus dont le sexe est indifférent. Le désir de mariage chez les homosexuels relève à mon sens moins d’une volonté de « subversion » qu’il n’est l’indice d’un prodigieux conformisme bourgeois, qui aurait fait s’étrangler de rire Jean Cocteau, Roger Peyrefitte ou Guy Hocquenghem. Il n’est le fait que d’une petite minorité de minorité. En Espagne, où le mariage gay a été légalisé en 2006, il ne représente que 2 % du total des mariages (et ce sont principalement des femmes qui le contractent).

    Puisque nous parlons de définitions, j’aimerais rappeler aussi que l’« homophobie », dont on parle tant aujourd’hui, n’a au sens strict rien à voir avec l’homosexualité, dans la mesure où les deux premières syllabes de ce terme ne renvoient pas au latin homo (« homme ») mais au grec homoios (« le même »). En toute rigueur, l’« homophobie » n’est que la phobie du Même. Il y en a de pires.

    Violence sans coupables ? Le père qui met une fessée à son fils est un assassin potentiel. Mais le voyou qui tue un passant pour une cigarette refusée ne sera que victime d’une autre violence ; sociale, il va de soi. Au-delà du cliché, cette « violence sociale » existe néanmoins, même si les médias peinent ou refusent de la mieux définir.

    Le mot de « violence » est fortement polysémique. Il l’est d’autant plus que la violence peut être aussi bien destructrice que créatrice, voire fondatrice, comme l’a maintes fois rappelé Michel Maffesoli. La violence privée est celle qui suscite les plus fortes réactions, mais la violence publique a souvent des conséquences plus graves. La violence sociale, liée aux contraintes de structure et à toutes sortes d’aliénations individuelles ou collectives, est encore une autre affaire. L’État s’est traditionnellement présenté comme seul détenteur de la violence légitime, prétention difficilement soutenable. Georges Sorel faisait l’éloge de la violence populaire par opposition à la force étatique, parce qu’il assimilait la première à la légitimité et la seconde à la simple légalité. L’expérience historique montre enfin que ceux qui dénoncent le plus la violence dans certaines situations l’admettent sans difficulté dans d’autres circonstances. Les deux exemples que vous citez, tout différents qu’ils sont, relèvent d’une même idéologie, celle qui conduit à faire bénéficier de la « culture de l’excuse » le voyou qui tue un passant pour une cigarette refusée, et d’autre part à condamner la fessée comme un acte d’autorité. Le dénominateur commun, c’est l’idée qu’il ne faut jamais sanctionner – sauf ceux qui sanctionnent, bien entendu. C’est dans le même esprit que les pacifistes appellent à faire la guerre à la guerre, c’est-à-dire la guerre au nom de la paix.


    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 5 août 2013)

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