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Points de vue - Page 249

  • Justice, la descente aux abîmes...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du criminologue Xavier Raufer, cueilli sur Le nouvel Économiste et consacré aux dernières trouvailles de la politique d'"humanisme pénal" développée par la ministre de la justice Christiane Taubira...

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    Justice, la descente aux abîmes

    Majesté médiatique tenant l’Élysée d’une poigne de fer, la garde des Sceaux magnifie son “humanisme pénal”. Dernier avatar dudit “humanisme” : le tribunal de Bobigny “va proposer une thérapie aux délinquants souffrant d’addiction”. Traduisons en français la novlangue-Taubira : on soignera des criminels toxicomanes. Hors de prison bien sûr, car inlassablement, tout est fait pour les vider. Concernant des récidivistes qui “bénéficieront d’un programme thérapeutique intensif”, l’initiative visera à “éviter la récidive”.

     

    Un “projet pilote”, vraiment ? Pas du tout. Le fort libertaire entourage de la garde des Sceaux a même récupéré ce projet dans les poubelles du California Department of Corrections (CDC), institution du “Golden State” chargé des affaires pénitentiaires [www.cdcr.ca.gov.].

     

    Et pas dans des poubelles d’hier – plutôt dans leurs tréfonds des années 1950-60, période où le CDC professait un laxisme qu’il délaisse désormais. Quelle était alors sa doctrine ? Celle du projet pilote de Mme Taubira : victimes de la société, les malfaiteurs commettent des crimes parce qu’on ne soigne pas leur toxicomanie ; ou alors, pour le CDC des fifties, leurs troubles mentaux. Dès lors, l’État californien dépense des fortunes en travail social, programmes alternatifs à l’incarcération, etc. Objectif, déjà : éliminer la récidive. Toujours sensible aux modes bien “vendues”, l’Amérique embraye et bientôt, les programmes type CDC essaiment dans nombre des 50 États.

     

    Travelling avant, au début des seventies : la récidive s’est-elle effondrée aux États-Unis ? Non, au contraire ! Des criminologues et des économistes décident alors d’évaluer le résultat concret des fameux programmes “Care” du CDC.

     

    Coup de tonnerre au printemps 1974 : le N° 35 la revue de politiques publiques ‘National Affairs’ publie une étude de l’économiste Robert Martinson intitulée “What Works ? Questions and answers about prison reform”.

     

    Allons à l’essentiel : la plupart des programmes visant à “soigner” des criminels n’ont pas d’effet mesurable et durable. Pourquoi ? Le plus souvent, le bandit est à la fois toxicomane et braqueur ; ou bien schizophrène et cambrioleur ; et non braqueur ou cambrioleur du fait de sa toxicomanie ou de sa pathologie mentale, comme l’imaginait l’idéologie CDC. À la fin de ces thérapies, on retrouve donc une majorité de cambrioleurs ou de braqueurs toujours aussi actifs ; libres bien sûr, et désormais en pleine santé.

     

    Message pour ‘Les Décodeurs’, ‘Le vrai du faux’ et ‘Décryptage’ : l’auteur a écrit sur ce sujet (1985, Éditions Suger) un ouvrage intitulé ‘Le cimetière des utopies’. Il leur fournira sur demande l’original de l’étude “What Works ?” et maints autres documents criminologiques.

     

    Tel est donc le dernier “projet pilote” de Mme Taubira & co. Chronologiquement, le premier d’entre eux consistait à équiper de bracelets électroniques un maximum de condamnés à de courtes peines. En France, ils sont plus de 11 000 individus à en bénéficier aujourd’hui. Or voilà qu’un brouilleur d’ondes chinois, en vente libre sur Internet, permet de bloquer la transmission du signal d’alarme du bracelet vers le centre de contrôle. Depuis mai dernier, cette nouvelle ravit la “France sauvage”, mais laisse la pourtant fort médiatique Chancellerie murée dans un lourd silence.

     

    Xavier Raufer (Le nouvel Économiste, 23 juillet 2015)

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  • Après le « Moment grec » : dernier inventaire avant recomposition ?...

    Nous reproduisons ci-dessous une analyse intéressante de David Desgouilles, cueillie sur son blog Antidote et consacrée à la crise grecque et à ses répercussions sur le paysage politique français. L'auteur est un collaborateur régulier de Causeur.

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    A qui profitera le « Moment grec » ? - Dernier inventaire avant recomposition

    Maintenant que l’actualité grecque a perdu de la vitesse et en attendant que les prochains épisodes débarquent sur nos écrans, il est utile de faire un point sur les bouleversements que cette séquence à produit sur notre échiquier politique et les enseignements qu’on peut en tirer. Le « Moment grec » est l’un de ceux qui permettent d’établir un état des lieux politique et idéologique.

    Puisque le Premier ministre grec Alexis Tsipras en a été l’acteur principal, voyons d’abord du côté de ceux qui se considèrent comme ses partenaires politiques privilégiés en France. On y trouvait le Front de gauche, les frondeurs du PS et une partie des écologistes. Comme l’a expliqué notamment Frédéric Lordon, cette séquence permet à tous, et notamment à ceux qui se réclament de la gauche radicale, de comprendre qu’il ne peut y avoir, de son point de vue, « d’euro sympa ». L’intransigeance du gouvernement allemand, du CDU au SPD, ôte les dernières illusions quant à la possibilité de mettre la monnaie européenne au service de leurs idées. Pire, il est même l’outil privilégié utilisé contre leurs idées. Comme aurait dit un humoriste très apprécié à gauche,  s’ils ne le voient pas maintenant, « ce n’est pas des lunettes qu’il leur faut mais un chien ». Jean-Luc Mélenchon a toujours dit que si, arrivé au pouvoir, il se heurtait au refus allemand, il opterait pour la fin de l’euro. Aujourd’hui, il sait que le refus est définitif. Il faudra suivre ses prochaines déclarations avec attention sur ce thème. Quant aux frondeurs, on a pu observer qu’ils avaient tous voté l’accord signé la semaine dernière, alors même qu’ils savent – et parfois disent – que cet accord a été extorqué à Tsipras. Croient-ils encore à la possibilité d’un « euro sympa » ?  Il nous est difficile de sonder les reins et les cœurs, mais leur foi doit être sacrément ébranlée. En tout cas, Arnaud Montebourg a décidé de convier Yanis Varoufakis à sa traditionnelle Fête de la Rose de Frangy-en-Bresse, fin août. L’ancien ministre grec des finances a conseillé à Tsipras, la nuit du référendum, de réquisitionner la Banque de Grèce et de mettre en place un système de monnaie parallèle, ce qui aurait permis de montrer la détermination du gouvernement et d’anticiper un éventuel Grexit. Tsipras n’a pas souhaité l’écouter. Varoufakis a ensuite voté contre l’accord à la Vouli. Inviter celui qui incarne aujourd’hui le Non grec n’est pas anodin pour Montebourg. Va-t-il prendre un virage sur l’euro en ses terres bressanes dans quelques semaines ? On attend son discours avec impatience. De ce point de vue, nous ne croyons pas à une évolution de Cécile Duflot sur la question. Entre deux maux, l’austérité et l’adhésion à tout ce qui pourrait ressembler à du chevènementisme, l’ancienne ministre du logement a sans doute fait son choix ad vitam aeternam. Jean-Luc Mélenchon l’a appris à ses dépens lors de la sortie de son dernier pamphlet contre l’Allemagne.

    Du côté de la gauche hollando-vallsaise, la question de l’euro est aujourd’hui complètement religieuse. On doit sauver l’euro « à tout prix », parce que l’euro, c’est l’Europe, et l’Europe, c’est la Paix. A partir de ce constat, aucune négociation n’est possible avec l’Allemagne dans la mesure où cette dernière est certaine que ses interlocuteurs ne sacrifieront jamais l’euro et qu’ils feront tout pour le sauver. Ils sont ainsi prêts à tous les sacrifices et tous les renoncements programmatiques. Schaüble peut tout demander à un gouvernement dirigé par cette frange de la gauche. Il gagnera. Pour l’instant, il joue avec la France et l’Italie comme un gros matou avec des souris. Si « l’euro sympa » c’est fini, « l’euro-religion » n’est pas mort.

    Du côté des Républicains et de l’UDI, il y a certes une part « d’euro-religion » mais pas seulement. On a pu observer lors du « Moment grec » une manifestation de fascination quasi-unanime devant le duo Merkel-Schaüble. C’est bien de ce parti qu’on a entendu le plus conspuer Alexis Tsipras. L’ordo-libéralisme de type allemand constitue un objectif à lui seul. L’euro n’est pas une religion comme au PS hollandais, et a justement l’objectif de ne pas être « sympa » comme le souhaitait la gauche radicale. Il est un outil au service d’un modèle qu’on vénère. Pas une feuille de papier à cigarette sur cet objectif entre Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, Xavier Bertrand et François Fillon. Une seule grande voix discordante par rapport à cette ligne, celle d’Henri Guaino. Entre son discours et celui des différents candidats possibles à la primaire, il n’y a plus un fossé mais le Grand Canyon. Toutefois, l’ancien candidat spécial ne préconise pas comme Jean-Pierre Chevènement un démontage de la monnaie unique. S’il souhaite préserver l’existence de cette dernière, c’est par prudence et par crainte qu’une telle opération ne provoque une crise financière mondiale, suscitant davantage de malheurs encore que le statu quo. Si Nicolas Sarkozy et Alain Juppé sont cohérents en soutenant l’idée d’un euro obligeant mécaniquement la France à effectuer les réformes dont ils rêvent, souhaitant une législation fiscale et sociale équivalente à celle de notre voisin d’outre-Rhin, qu’en est-il de François Fillon et de Xavier Bertrand ? Souvenons-nous qu’ils défendirent quant à eux le Non avec Philippe Séguin, ce dernier ayant prophétiquement annoncé les écueils d’une monnaie unique non assise sur un gouvernement vraiment fédéral. On ne comprend pas vraiment, à vrai dire, la fascination de ces deux-là pour l’ordo-libéralisme allemand alors que leur attachement ancien à la souveraineté, tout en revendiquant des idées libérales, devrait leur suggérer de regarder ce qui se passe de l’autre côté… de la Manche. Bertrand et Fillon pourraient en effet assumer un souverainisme libéral à l’anglaise, mais ce n’est pas le cas.

    Qui pourrait bien emprunter ce modèle dans les prochaines  années ? Ce ne sera pas Nicolas Dupont-Aignan, dont le noyau des troupes provient de la frange gaulliste sociale qui militait naguère pour Séguin et Pasqua. Il tente bien, parfois, d’apparaître plus « libéral » que Marine Le Pen, empruntant une sémantique destinée aux petits patrons, aux commerçants et aux artisans, mais ce n’est visiblement pas son ADN. D’ailleurs, si Jean-Pierre Chevènement lui fait des avances et sera présent aux universités de DLF à la rentrée, ce n’est pas pour faire du Cameron. Finalement, celle qui pourrait incarner à l’avenir ce souverainisme libéral, combinant hostilité à l’euro et à l’intégration européenne, mais dans un esprit plus britannique, c’est sans doute Marion Maréchal Le Pen, en menant cette bataille à l’intérieur du FN contre sa tante et Florian Philippot. Ces deux derniers, même s’ils essuient pour le moment la tempête provoquée par le vieux patriarche, demeurent les grands bénéficiaires du « Moment grec ». L’idée qu’il n’y a pas « d’euro sympa » leur permet de gagner la bataille face au Front de gauche, qui les accusait d’être défaitistes en promouvant directement la sortie de l’euro. De surcroît, aux yeux des ouvriers et des employés, ils apportent une cohérence d’ensemble contre les différentes facettes du libéralisme mondialisé. Non seulement ils s’opposent à l’euro depuis plus longtemps, mais ils sont opposés à la libre circulation des marchandises, des capitaux… et des hommes. Pour séduire les classes populaires, le sans-frontiérisme de la gauche radicale constitue en effet un handicap et le demeurera, même si elle fait son aggiornamento sur l’euro.

    Si les crises à répétition de l’euro vont certainement revenir, la prochaine bataille, le prochain « Moment » devrait survenir au moment des votes du traité transatlantique. La gauche radicale sera-t-elle plus à l’offensive que le FN et surtout plus audible ? Le PS cèdera-t-il encore sur ce dossier à l’intransigeance allemande par foi dans la construction européenne, malgré son ministre euro-critique Matthias Fekl, au centre des négociations ? La droite classique LR-UDI demeurera-t-elle la meilleure élève d’Angela Merkel ? Des recompositions auront-elles enfin lieu à cette occasion ?

    Ces enjeux pèseront davantage que le résultat des élections régionales, à n’en pas douter.

    David Desgouilles (Antidote, 21 juillet 2015)

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  • De quoi les partis politiques français sont-ils le nom?...

    Nous reproduisons ci-dessous une analyse de Michel Drac, cueillie sur le site d'information Sputnik et consacré au partis politiques français. Penseur original et hors-système, Michel Drac est l'animateur du site Scriptoblog et le fondateur de l'excellente maison d'édition Le retour aux sources. Ses ouvrages comme De la souveraineté ou Crise économique ou crise du sens ? ont été réédités en un volume intitulé Essais (Retour aux sources, 2013).

     

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    De quoi les partis politiques français sont-ils le nom ?

    Nous avons l'habitude de cartographier l'espace politique français en y positionnant nos principaux partis. Et la plupart du temps, nous nous référons pour cela, inconsciemment, à l'imaginaire associé à ces partis. Vues sous cet angle, les choses paraissent simples.

    Des noms comme "Nouveau Parti Anticapitaliste", "Lutte Ouvrière" ou "Parti Communiste Français" évoquent les grandes luttes de classes du passé, quand un prolétariat héroïque affrontait une bourgeoisie conservatrice. Ces noms sonnent comme le célébrissime premier couplet de l'Internationale: "Debout, les damnés de la terre! Debout, les forçats de la faim!".

    "Parti de Gauche" et "Parti Socialiste" réveillent plutôt la nostalgie des Trente Glorieuses. Ces noms résonnent comme l'hymne mitterrandien des années 70: "Ne croyons plus aux lendemains qui chantent, changeons la vie ici et maintenant!". En arrière-plan se profile le lointain souvenir de la Section Française de l'Internationale Ouvrière, de Léon Blum et d'une alliance de classe, bénie par l'instituteur, entre employés et petits fonctionnaires.

    La droite française n'arrête pas de changer de nom. Maintenant, elle s'appelle les "Républicains". Nous avons désormais un grand parti français dont l'imaginaire renvoie à des références états-uniennes. Un parti formé pendant un épisode de "Dallas" et calibré comme un blockbuster hollywoodien. "Saving President Sarko", tel est le nom du film. C'est assez ridicule.

    Depuis quatre décennies, les lettres "F" et "N" sont associées à un logo calqué sur celui du MSI, un parti fasciste italien. Tous les vaincus du XXe siècle français se sont ralliés à cet étendard: les épurés de 1945, les victimes des guerres de décolonisation, une partie des milieux catholiques traditionalistes. Le FN en a retiré une image sulfureuse.

    Tous ces imaginaires partisans n'ont rien à voir avec la réalité. Notre gauche radicale n'est pas ouvrière. Le Parti Socialiste n'est plus vraiment le parti des enseignants et des employés. Les "Républicains" n'incarnent pas le rêve américain — à vrai dire, ils ne font rêver personne. Et le FN n'a plus grand-chose à voir avec ses origines fascisantes.
    Ramener nos partis politiques aux imaginaires qu'on leur associe, c'est fondamentalement se tromper d'époque. Ces imaginaires trouvent leur source dans des luttes de classes du passé, qui ne sont pas les luttes de classes contemporaines. Ils s'organisent autour de rêves que plus grand-monde ne partage, de souvenirs qui s'estompent et de rancunes presque oubliées. On voudrait maintenir l'illusion que nos principales forces politiques sont dans le monde actuel ce qu'elles furent dans un monde disparu. Cela n'a pas de sens. Nos partis ne sont pas ce qu'ils furent.

    Pour commencer, ce ne sont plus vraiment des organisations de masse. A peine 1 % des Français militent réellement. Du coup, ce que nous appelons un parti politique aujourd'hui n'est pas ce qui portait ce nom autrefois. Pendant les deux premiers tiers du XX° siècle, les partis politiques reposaient sur leurs militants. Désormais, ceux-ci en sont souvent réduits à faire de la figuration dans une mise en scène étudiée pour la télévision. En réalité, l'agora française est presque vide. C'est une tombe glaciale, que les médias réchauffent d'un simulacre de vie avec la complicité de partis politiques fantômes.

    Sauf aux marges, la politique n'est plus l'affaire que de ceux qui en vivent. Le PS est à la pointe de cette évolution. Un militant socialiste sur deux est un élu. L'autre est souvent un employé municipal. Le PS est une machine à prendre des places et à se les partager. Les autres partis politiques essayent manifestement de l'imiter.
    Ces machines électorales ont besoin d'électeurs. C'est pourquoi nos partis politiques se comportent comme des gestionnaires de marque. A travers les médias, ils vendent un imaginaire. Ils offrent aussi, plus sérieusement, un programme de défense de telle ou telle catégorie sociale.

    Tous ces partis sans militants reposent en effet sur un "noyau dur" électoral, bien identifiable sociologiquement, autour duquel en période haute, ils parviennent à rallier des électorats plus flottants. Voilà leur réalité: les électorats stables de nos partis politiques sont leur substance dans les luttes de classes contemporaines. Bon gré mal gré, les leaders sont obligés d'en tenir compte. Même si la majorité de l'électorat est flottant, nos politiciens savent bien qu'ils doivent rester fidèles aux fondamentaux qui solidifient le noyau dur de leur clientèle. C'est ce socle qui leur permet d'atteindre en toutes circonstances la taille critique nécessaire pour forcer la porte des médias. Pour l'avoir oublié en 2007, le FN a failli disparaître.

    L'extrême gauche et le PCF n'attirent plus massivement le vote des catégories populaires. L'électeur-type du Front de Gauche n'est certes pas riche, mais ce n'est pas un ouvrier. C'est dans un peu plus de la moitié des cas une électrice. Cette électrice est soit une étudiante, soit une jeune salariée précaire, soit une baby-boomeuse qui a du mal à joindre les deux bouts, par exemple une salariée du public locataire en HLM. Le socle électoral de notre gauche extrême ou radicale, c'est l'alliance du précariat et du bas fonctionnariat. Cette mouvance possède donc une identité de classe, mais celle-ci n'a plus grand-chose à voir avec le mouvement ouvrier. Le Front de Gauche est peut-être le parti des précaires, mais sûrement pas celui des prolétaires.

    Ridicule: le Parti Socialiste chante encore l'Internationale pendant ses congrès. En réalité, dans les catégories populaires, il pèse à peu près deux fois moins que le FN. Chez les ouvriers, il est même relégué en troisième position, derrière la droite classique: Jaurès est vraiment mort. Le PS est plus que jamais un parti de cadres et de professions intermédiaires. C'est le parti des classes moyennes et supérieures d'un secteur tertiaire qui, dans l'ensemble, a jusqu'ici bénéficié de la mondialisation.

    Problème: l'emprise du PS sur le bas de ces catégories intermédiaires commence à s'effriter sérieusement. La crise rattrape maintenant certains secteurs emblématiques de la petite croissance des années 80-90. Solferino songe à un électorat-relais: le vote ethnique, à l'imitation du Parti Démocrate américain. Déjà, les deux tiers des musulmans voteraient PS. Un appoint indispensable: sans sa clientèle immigrée, le parti de Manuel Valls tomberait sous le seuil fatidique des 20 % de suffrages exprimés en moyenne nationale.

    La droite classique, elle, bénéficie pour le moment du soutien d'une catégorie en pleine expansion: les personnes âgées. L'électeur-type des "Républicains" est un retraité aisé. On peut l'imaginer ancien petit patron, ex-cadre supérieur, mais parfois, c'est tout simplement un ouvrier économe propriétaire d'un beau logement. Dans toutes les enquêtes d'opinion dont nous disposons, il apparaît que si seuls les actifs votaient, les "Républicains" retomberaient pratiquement au niveau du FN, voire un peu en-dessous. Notre droite classique, c'est le parti de la stabilité, du "pourvu que ça dure" — et donc, bien sûr, de l'euro comme digue contre l'inflation. Soit dit poliment, c'est le parti des vieux.

    Par symétrie, le socle électoral du FN peut être déduit du positionnement des autres formations politiques.
    Le Front de Gauche attire un électorat majoritairement féminin: l'électorat FN reste majoritairement masculin. Le Front de Gauche allie deux noyaux durs distincts: les étudiants et jeunes salariés précaires, les petits fonctionnaires baby-boomers. Ce sont aussi les seuls segments de la population à faibles revenus où le FN a du mal à percer.
    PS et FN ont des noyaux durs électoraux parfaitement symétriques. Le PS est le parti du secteur tertiaire bénéficiaire de la mondialisation: le FN est le parti des secteurs primaire et secondaire, victimes de la mondialisation. L'électeur-type PS appartient à une "CSP+" et il est plutôt bien diplômé: l'électeur-type FN est "CSP-" et dans l'ensemble plutôt sous-diplômé. Le PS possède une force d'appoint dans l'électorat musulman: le FN conserve sa frange arabophobe, même si celle-ci ne constitue plus vraiment le cœur sociologique de son électorat.

    Les "Républicains" forment le parti des vieux retraités: le FN est, dans l'ensemble, le parti des jeunes actifs. Mais ici, la symétrie est moins grande. Hors le phénomène générationnel, les socles électoraux de la droite classique et du FN possèdent des zones recoupement importantes.

    Faisons la synthèse.

    Nos partis politiques sont le nom des luttes de classes contemporaines. Ces luttes de classes n'opposent plus une bourgeoisie "à l'ancienne" à un prolétariat "à l'ancienne". Elles s'organisent autour des phénomènes majeurs de l'époque: la mondialisation néolibérale, l'hiver démographique, la submersion migratoire. La mondialisation et l'Europe de Bruxelles: ceux qui en bénéficient, les classes moyennes et supérieures, le secteur tertiaire, contre ceux qui en souffrent, les catégories socioprofessionnelles inférieures, les secteurs primaire et secondaire. L'hiver démographique: l'impossible affrontement intergénérationnel — comment ne pas aimer nos parents, comment ne pas leur en vouloir de nous écraser sous leur nombre? La submersion migratoire: d'un côté les riches qui n'en payent pas le prix et n'y trouvent rien à redire, de l'autre les pauvres qui en encaissent les conséquences concrètes, sur leurs salaires, dans leurs quartiers.

    Tout le bla-bla médiatique sur "les valeurs de la République" ne sert qu'à dissimuler ces réalités. Parti des bénéficiaires de la mondialisation, déserté depuis belle lurette par les ouvriers, le PS nous ressort régulièrement ses rengaines sur "l'argent qui corrompt" ou "notre véritable ennemi, la finance". Leader du parti des vieux, Nicolas Sarkozy mime le rêve américain et l'esprit d'aventure. Si l'on plaque sur le FN l'image du bourreau fasciste, c'est pour dissimuler le fait qu'il est aujourd'hui le parti des victimes. Quant au Front de Gauche, tout le monde a compris que volens nolens, il sert de contrefeu au Bloc Institutionnel.

    D'ailleurs, les puissances étrangères ne s'y trompent pas. Leurs sympathies dans l'espace politique français sont cohérentes avec les luttes de classes dont nos partis politiques sont les noms. Les Etats-Unis soutiennent le PS et les "Républicains": la puissance qui conduit pour l'instant la mondialisation néolibérale ne peut qu'appuyer les partis qui en représentent les bénéficiaires. L'Allemagne préfère les "Républicains": un pays riche et vieux soutient le parti des retraités aisés. Et la Russie, comme on le sait, a choisi le FN. Là encore, c'est parfaitement logique: la puissance qui, sur la scène internationale, conteste l'ordre américain, ne pouvait que soutenir le parti qui, sur la scène française, représente les opposants à cet ordre.

    Michel Drac (Sputnik, 14 juillet 2015)



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  • Naufrage transatlantique...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent article cueilli sur le site Idiocratie et consacré au Traité transatlantique et à ses conséquences dévastatrices...

     

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    Naufrage transatlantique

    Novembre 2015 : Le Tafta (Partenariat Transatlantique entre les Etats-Unis et l’Union Européenne) et son petit frère le CETA (Traité de libre-échange Canada-UE) sont ratifiés à une large majorité par l’Assemblée Nationale, malgré l’opposition acharnée des communistes, des frondeurs du PS, des deux élus FN et d’une trentaine de députés UMP à sensibilité gaulliste débauchés par Nicolas Dupont-Aignan. Ce dernier, particulièrement remonté au cours des débats s’est vu finalement privé d'un quart de son indemnité parlementaire mensuelle en vertu de l’article 71 du règlement intérieur de l’Assemblée, lequel sanctionne tout député « qui adresse à un ou plusieurs de ses collègues des injures, provocations ou menaces.»

    Pour ses promoteurs, ce gigantesque chantier économique, commercial et juridique est la conséquence logique de la mondialisation des affaires. Au nom de quoi en fusionnant l’ALENA (Accord commercial USA-Canada-Mexique) et l'Union Européenne, on bâtira une immense zone de libre-échange de part et d'autre de l'océan atlantique, rassemblant plus de 800 millions de consommateurs et représentant plus de 45% du PIB mondial. Pour ses détracteurs, ces mêmes 800 millions d’humains seront livrées pieds et poings liés aux multinationales.

    Preuve que Cassandre a toujours raison, une semaine après la publication des décrets d’application au JO, un géant américain des hydrocarbures non conventionnels, Anadarko Petroleum  envoie du papier bleu à l’Etat français. Motif de la requête : le moratoire sur les gaz de schiste adopté par Paris en 2013 est une entrave manifeste à la libre entreprise et au droit légitime de ces sociétés à se développer sur le marché mondial. Six mois auparavant, une telle demande aurait été archivée direct à la poubelle. Mais depuis que Tafta a force de loi, la plainte américaine crée une panique générale dans les ministères concernés. Ségolène tempête, Valls s’indigne et Taubira crie sa haine anti-impérialiste sur  Twitter. En pure perte, car le Traité que nous venons de signer autorise les entreprises privées à attaquer n’importe quelle collectivité publique, si elle estime qu’une de ses mesures nuit directement ou indirectement à sa rentabilité. Cela dit on pourrait penser que les Américains n’ont guère de chance d’obtenir qu’un juge français valide leurs délires procéduraux et que l’affaire sera prestement enterrée au tribunal. Sauf qu’avec Tafta, il n’y a pas plus de juge ou de tribunal dans la procédure que de Nuits-Saint-Georges au menu d’un McDo. La clé de ce miracle s’appelle l’ISDS, l’Investor-state dispute settlement,  qu’on peut traduire par « Mécanisme de règlement des contentieux entre investisseurs et États » . L’ISDS est la clé de voute du traité. Il est fondé sur l’idée que les juridictions nationales ne sont pas neutres, en vertu de quoi tous les litiges concernant les sociétés étrangères ne se régleront pas au tribunal, mais en commission d’arbitrage, comme ce fut le cas dans la dernière affaire Tapie.

    Janvier 2016 : Après un dépôt de plainte contre la France, une commission d’arbitrage tripartite a été constituée, composée d’avocats mandatés par la compagnie, par l’Union Européenne et par la Banque Mondiale. C’est la cerise sur le cupcake : la France sera absente des débats ! Selon les nouveaux traités et les règles de fonctionnement de l’Union Européenne, seule la Commission Européenne a la légitimité nécessaire pour régler ces différents commerciaux. Non seulement la plainte d’Anadarko ne peut tomber sous le coup du droit français mais le gouvernement n’a pas l’autorité pour désigner les avocats censés le défendre. L’affaire se présente mal…

     

    Mars 2016 : la France est condamnée par la commission d’arbitrage à verser un milliard d’euros de dommages et intérêts à Anadarko pour le préjudice commercial subi. Dans le même temps, un bonheur n’arrivant jamais seul, un trust canadien de l’amiante porte plainte contre l’interdiction totale décrétée par la France. Les dommages et intérêts réclamés sont faramineux : on parle de près de trois milliards d’euros. Certes Tafta prévoit que les mesures « conçues et appliquées pour protéger des objectifs légitimes d'intérêt public, tels que la santé, la sécurité ou l'environnement » sont exclues de l’accord mais ces restrictions sont annihilées quelques lignes plus loin par la mention par la mention « sauf dans les rares circonstances où l’impact de la mesure  apparaît manifestement excessif ». Un régal pour les cabinets d’avocats.

    Mai 2016 : c’est le printemps, les procès bourgeonnent et les ZAD fleurissent un peu partout dans le sud de la France. On annonce que General Electrics a bien l’intention de faire revenir de gré ou de force le gouvernement français sur les mesures prises par Arnaud Montebourg pour exclure les activités sensibles et nucléaires de la fusion Thomson-GE. L’amende s’annonce salée et la France est toujours vertement tancée par Bruxelles et Berlin pour son entêtement à ne pas rentrer dans les cadres du pacte de stabilité… A un an de la présidentielle, Marine Le Pen, qui a fait de l’abrogation de Tafta son nouveau cheval de bataille, vient de passer la barre des 40% d’intentions de vote…

    Politique fiction ? Oui pour les détails, les noms de personnes ou de sociétés, ou les dates exactes. Tout le reste deviendra cruellement réel, si les discussions sur la ratification du Tafta finissaient par aboutir. Et pour cause : nous n’avons pas inventé les procédures décrites plus haut,  nous avons seulement transposé ici des épisodes bien réels survenus dans le cadre de l'ALENA , l’accord de libre échange nord-américain ratifié en 1992.

    Ainsi, en ce moment même, la société américaine Eli Lilly réclame  500 millions de dollars aux autorités canadiennes. Celles-ci sont accusées d’avoir autorisé la mise sur le marché sous forme de générique de l’Olanzapine, un traitement destiné aux schizophrènes, commercialisé en 1996 par Eli Lilly. Le gouvernement canadien a mis vainement en avant une question de santé publique : ce cas a d’ores et déjà été jugé comme relevant de la stricte compétence des commissions désignées par le chapitre 11 de l’ALENA. ([1]) L’affaire est toujours en cours, entre les mains d’une commission d’arbitrage.

    Le TAFTA ne fait en effet rien d’autre, rappelle l’universitaire québécois Marc Chevrier, que retranscrire le chapitre 11 du traité, qui prévoyait déjà en 1992 la création d'une procédure d'arbitrage internationale pouvant être saisie contre une collectivité par n'importe quel investisseur privé. « Le chapitre 11 de l'ALENA contient un ensemble de mesures de protection des investissements et des investisseurs privés très attentatoires à la souveraineté des Etats », souligne Marc Chevrier. Le directeur de L’Humanité, Patrick Le Hyaric, est plus radical : « Ce serait une dictature sans chars dans les rues, sans généraux casqués et bottés au pouvoir. Il existe déjà de tels exemples à partir d’accords de libre-échange existants. Ainsi, la firme Philip Morris porte plainte contre l’Australie, parce que ce pays restreint le commerce du tabac. Le groupe multinational Novartis poursuit l’Inde pour la contraindre à cesser la production de médicaments génériques. »([2]) 

    Potion amère pour les Canadiens, ce fameux chapitre 11 de l’ALENA était censément destiné à circonvenir le Mexique, les entreprises américaines et canadiennes craignant de devoir se soumettre aux juridictions d'un Etat considéré comme folklorique. Dans les faits, c'est le Canada qui a fait l'objet du plus grand nombre d'actions en justice intentées par des entreprises multinationales à l'encontre de tel ou tel point législatif jugé contraire à leurs intérêts.

    Ainsi, le 14 avril 1997, le gouvernement canadien était attaqué par une société américaine protestant contre l’interdiction d’un additif au carburant décidée après que des constructeurs automobiles canadiens se sont plaints que cet additif déréglait l’électronique des véhicules. Après un jugement préliminaire, le gouvernement canadien accepta de revenir sur l’interdiction pour éviter de payer 250 millions de dollars de dommages et intérêts. Au prix de la sécurité des automobilistes ? En juillet 1998, la firme S.D. Myers, basée aux Etats-Unis, récuse le moratoire imposé par Ottawa sur les déchets chimiques dangereux. Pour ne pas avoir à payer une somme astronomique, le Canada a dû revenir sur sa décision et payer 6 millions de frais de procédure. Le 19 janvier 2000, le transporteur US UPS a dénoncé le monopole partiel de la poste canadienne et exigé 160 millions de dollars de compensation.([3] )

    Ces différents exemples peuvent suffire à justifier l'inquiétude vis-à-vis de la transcription du Chapitre 11 dans le CETA et le TAFTA. De l’autre côté de la « flaque » ([4]), en Europe, c’est l’Allemagne qui émet les plus sévères réserves vis-à-vis de l’ISDS. Et on la comprend : en 2011 l’entreprise d’électricité suédoise Vattenfall a engagé une procédure contre Berlin, réclamant 3,7 milliards d’euros en dédommagement de l’abandon partiel par l’Allemagne du nucléaire civil. Vatenfall refuse de se soumettre au droit commun allemand et réclame la possibilité d’avoir recours à un mécanisme d’arbitrage privé. On imagine quelle désagréable sensation ont dû ressentir les dirigeants allemands en découvrant l’étendue des possibilités laissée en matière d’arbitrage par l’ISDS. D’où la mise en garde de l’essayiste Alain de Benoist, qui a publié très récemment Le Traité Transatlantique et autres menaces (3bis):  « Le montant des dommages et intérêts serait potentiellement illimité et le jugement rendu ne serait susceptible d'aucun appel ». Une vision des choses partagée par Marc Chevrier : « Cela revient à créer une justice d'exception. Si le traité transatlantique ou le traité de libre-échange UE-Canada sont définitivement adoptés, estime-t-il, Allemagne ou Québec devront se soumettre à « une véritable constitution économique invisible qui se juxtaposera aux constitutions nationales ou provinciales et sera appliquée de manière universelle par des juridictions strictement privées. »

    Mais au fait, tout ça pour quoi ? On n’a aucun mal à comprendre l’empressement des Américains à emballer ce panier garni. Face au réveil russe et à l'expansion chinoise et au dynamisme des émergents, les Etats-Unis tentent d'élargir tous azimuts leurs partenariats économiques pour damer le pion à la concurrence. Mais nous autres, Européens qu’avons nous à y gagner? D'autant qu'il faut rappeler que si l'Etat et les collectivités américaines ont gagné jusqu'à présent tous les procès qui leur ont été intenté dans le cadre du chapitre 11 de l'ALENA et de l'ISDS, ce n'est pas en raison d'un obscur complot mondial mais tout simplement parce que les Etats-Unis cultive une culture du lobbying intensive, à laquelle les institutions fédérales et publiques sont aussi rompues que les investisseurs privés. En la matière, nous sommes Européens, encore dans l'enfance. Cela laisse-t-il présager pour le vieux continent un sort comparable à celui du Mexique dont le gouvernement ou les collectivités publiques ne sont jamais sortis gagnants d'un différent réglé par le biais de l'ISDS ? Ce qui est clair, c'est qu'en la matière, le bouleversement juridique s'avérerait là encore largement favorable à l'American Way of Business. 

    Dans les milieux souverainistes, altermondialistes ou écologistes on prédit en chœur un scénario catastrophe d’Etats voyant leur politique économique, sociale, sanitaire, agricole ou environnementale mise au rencart. Reste encore cependant à passer la barrière des représentations nationales. Comme le souligne le site officiel du Parti Socialiste, les sénateurs socialistes ont voté en faveur d’une proposition de résolution européenne, appelant à garantir « qu'en aucun cas, une mesure protégeant un objectif légitime d'intérêt public ne puisse donner lieu à compensation au nom de son impact économique sur l'investisseur, sans quoi il serait préférable de renoncer au volet consacré à la protection des investissements dans l'accord global négocié avec le Canada» En clair, le PS affirme dire non à l’ISDS et d’ en faire un casus belli dans les négociations en cours. Sauf que  le double langage n’est pas fait pour les chiens. Le collectif stoptafta.org rappelle en effet que, lors d’une réunion au sommet à Madrid, tous les sociaux-démocrates européens se sont accordés pour sanctuariser l’ISDS.  Une décision qui fait écho aux déclarations de François Hollande qui déclarait en 2014 lors d’une conférence de presse commune avec Barack Obama : « Nous avons tout à gagner à aller vite. Sinon, nous savons bien qu’il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de crispations. »

    Il faut rappeler ici que le traité que François Hollande se montre si pressé de signer risque non seulement de faire de la souveraineté nationale un souvenir lointain mais qu’il range également l’idée de préférence communautaire européenne au chapitre des causes perdues. Finalement, nos dirigeants ont peut-être trouvé le meilleur moyen de résoudre le problème insoluble de l’Europe politique : c’est de faire disparaître pour de bon le politique.

    Des idiots (Idiocratie, 22 juin 2015)

     

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  • Réflexions sur le phénomène des « migrants » africains...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Bernard Lugan, cueilli sur le site Nouvelles de France et consacré à la vague migratoire venue d'Afrique, qui déferle depuis quelques mois sur les côtes européennes. Africaniste réputé, Bernard Lugan est l'auteur de nombreux ouvrages historiques et a récemment publié Osons dire la vérité à l'Afrique (Rocher, 2015).

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    Réflexions sur le phénomène des « migrants » africains

    Parlons vrai :

    – La vague migratoire africaine que subit actuellement l’Europe se fait par l’entonnoir libyen.

    – Ce dernier fut créé par ceux qui déclenchèrent une guerre insensée contre le colonel Kadhafi qui avait fermé son littoral aux passeurs-esclavagistes.

    – Face à la déferlante, les forces navales européennes recueillent les clandestins… pour les transporter jusqu’en Italie. La différence avec le prophétique Camp des Saints de Jean Raspail est que chez ce dernier, les migrants débarquaient en Europe alors qu’aujourd’hui ils y sont débarqués… pour y être installés.

    – Les responsables de l’ectoplasme bruxellois ont comme seule préoccupation de répartir ces intrus dont les indigènes ne veulent pas entre les pays de l’UE, ne voyant pas qu’ils vont ainsi amplifier le phénomène en créant une pompe aspirante.

    – Cette migration-peuplement est essentiellement la conséquence d’une démographie devenue folle qui tue l’Afrique à petit feu, lui interdit tout développement et exacerbe ses conflits (1).

    – Or cette explosion démographique s’explique parce que les missionnaires, les religieuses soignantes, les médecins et les infirmiers coloniaux ont, hier, au nom de leur « amour des autres », délivré les Africains de la lèpre, de la rougeole, de la trypanosomiase, du choléra, de la variole, de la fièvre typhoïde ; cependant que les militaires les libéraient de l’esclavage arabo-musulman.

    Résultat : en un siècle, la population du continent a presque été multipliée par 10. De 100 millions d’habitants en 1900, elle était passée à environ 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990 et à un milliard en 2014. Dans les années 2050 les Africains seront entre 2 et 3 milliards (dont 90% au sud du Sahara), puis 4,2 milliards en 2100 ; ils représenteront alors 1/3 de la population mondiale. En 2050, 40% des naissances mondiales seront africaines (2), ce qui, ajouté à la baisse heureuse de la mortalité infantile en raison des campagnes de vaccination menées par les ONG et de l’annonce d’un prochain vaccin contre le paludisme, va conduire à un cataclysme encore plus destructeur que l’actuel.

    Comment espérer alors que les migrants cesseront de se ruer vers un « paradis » européen non défendu et peuplé de vieillards ? Un paradis où, par hédonisme, les femmes ne font plus d’enfants ? Un paradis où les hommes s’interrogent sur leur identité sexuelle et où toute attitude virile est considérée comme machiste, autant dire fascisante ?

    Désarmés par l’hystérie émotionnelle de la classe politique et des médias ainsi que par la compassionnelle sollicitude des clercs, les Européens sont sommés de devoir accepter de subir. Un ancien Premier ministre de « droite » est même allé jusqu’à proposer que les forceurs de frontière soient envoyés repeupler les campagnes françaises. Là où les « aides » en tous genres ont depuis longtemps fait taire les salutaires cris de « Haut les fourches »…

    Bernard Lugan (Nouvelles de France, 7 juillet 2015)

    Notes :
    1. Voir à ce sujet mon dernier livre Osons dire la vérité à l’Afrique, Le Rocher, 2015.
    2. Unicef Afrique/Génération 2030. Août 2014, 68 pages.

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  • La France en plein déni de réel : le cas de l’insécurité...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du criminologue Xavier Raufer, cueilli sur Atlantico et consacré au déni du réel dans lequel s'enferme la caste politico-médiatique sur les questions d'insécurité...

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    La France en plein déni de réel : le cas de l’insécurité

    Toujours plus, ce que le sociologue Michel Wieviorka flétrit* comme le "couple obscène médias-politiciens" fuit le monde réel - dont le réel criminel. Dans son récent livre "Malaise dans l'inculture", cette inquiétante symbiose affole aussi Philippe Val, icône de la gauche bourgeoise : "La France est paralysée : personnalités politiques et intellectuelles ne parlent plus qu'en fonction de ce qu'ils imaginent que les journalistes en diront ; ils s'adressent à un miroir médiatique qui leur renvoie une image..."

    Fuyons ce pervers "stade du miroir" (comme disait Jacques Lacan...).

    Allons sur le terrain. Voyons de quelle sécurité jouit vraiment la France ; traquons ces réalités que gouvernants et opposants ignorent ou édulcorent. Ce réel criminel, les militants de l'opposition le perçoivent : à Nantes, le responsable UMP dit sa commune "idéale pour les braquages, les cambriolages et les trafics". A Lyon, l'UMP s'affole de ce que "le tabac de la place Curial a été braqué pour la 4e fois en six mois" et qu'en 2014, "la hausse des cambriolages soit de 11%".

    Une réalité que toute la population française ressent désormais - notamment celle des "quartiers sensibles". Même immigrée ! Las d'être agressés, les Asiatiques de France - citoyens intégrés et travailleurs - appellent aujourd'hui le Premier ministre à l'aide contre les pillards et les prédateurs.

    Or ces réalités échappent aux élites politiques, toujours obnubilées par un "racisme" (celui, monochrome, de la bienséance) dont, dans un récent sondage, 65% des Français déclarent qu'il est secondaire.

    Le Credoc n'est pas un nid d'extrémistes : lisons son rapport, "Evolution du regard sur les quartiers 'sensibles' et les discriminations entre 2009 et 2014" (avril 2015). Une enquête menée avant "Charlie" et les récentestueries entre voyous. - 92% des Français pensent que "la délinquance" (en fait, la criminalité) est trop forte dans les "zones urbaines sensibles" ; 82% veulent qu'on y accroisse la police de proximité - et 76% qu'on y punisse plus sévèrement les "délinquants" ! L'insécurité préoccupe 84% des Français (beaucoup, un peu) et pas 16% d'entre eux (pas beaucoup, pas du tout).Pour le Credoc, "le développement de la police de proximité et la sévérité des sanctions sont les deux thématiques ayant progressé depuis 2009" (l'enquête précédente).

    Précision : peine capitale et statistiques ethniques sont des décisions politiques. Le criminologue peut éclairer ces décisions, voilà tout. Soyons clair : le signataire préfère la perpétuité réelle à la peine de mort; et, étudiant plus ce que font les malfaiteurs que ce qu'ils sont, il use peu des statistiques ethniques.

    Cependant :

    - L'Ipsos et la Fondation Jean Jaurès viennent de publier leur étude annuelle sur "Les fractures françaises". On y lit que désormais, 36% des sympathisants socialistes sont favorables à la peine de mort (+ 15% sur 2014).

    - Un autre sondage montre que 78% des sympathisants de droite approuvent les statistiques ethniques. C'est que, depuis Charlie-Hebdo et l'Hyper-cacher, l'opinion a changé. Bien des yeux se sont ouverts sur un somnambulisme médiatique qui mène au désastre nos dirigeants, au pouvoir comme opposants.

    Preuve : le "Laboratoire de tendances quali-collaboratives" du groupe Publicis publie en mai l'étude "Dissonances : quand les classes moyennes parlent de la France d'après le 11 janvier". Elle regorge de choses cruelles sur "le manque de sérieux des élites, avec un débat politique sans projets"... "Les élus ne remplissent pas le mandat pour lequel ils ont été élus et même, ils sont carrément des obstacles aux changements urgents que la situation exige". Depuis Charlie, "La classe politique, la classe dirigeants, n'a rien fait de concret". Résultat : les Français sont malheureux. Incroyable : même l'Allemagne jadis anti-française qualifiait ainsi la vie bonne : "Leben wie Gott im Frankreich", vivre comme Dieu en France. Au classement Eurostat sur le bonheur en Europe, la France git aujourd'hui derrière la Slovaquie et la Roumanie... Malheureux aujourd'hui - furieux demain - or les colères françaises peuvent être redoutables. Si nos élites politiques ne le comprennent pas, elles risquent de le payer cher.

    Xavier Raufer (Atlantico, 1er juillet 2015)



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