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Points de vue - Page 154

  • Gilets jaunes ou sombres machinations ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de François-Bernard Huyghe, cueilli sur Huyghe.fr et consacré au mouvement des gilets jaunes, dont la première mobilisation doit avoir lieu le 17 novembre. Spécialiste de la guerre de l'information, François Bernard Huyghe, auteur de nombreux livres, a récemment publié La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2015) et Fake news - La grande peur (VA Press, 2018).

     

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    Gilets jaunes ou sombres machinations ?

    Nous saurons samedi si le mouvement des gilets jaunes fera un flop (parce que difficile à organiser sans appareil politique ou syndical) ou s’il coagulera, comme c’est plus vraisemblable, une exaspération monstre qui ne surprend que ceux qui n’en participent pas.

    La riposte gouvernementale s’articule autour de deux arguments simples :
    - Ce n’est pas notre faute- nous faisons le maximum pour vous soulager- et, de toute façon, à long terme, il n’y a pas d’alternative (argument de nécessité)
    - Attention, vous allez être manipulés par les extrémistes (argument des intentions et conséquences)

    Sans discuter sur le fond l’argument 1 (part des taxes dans le prix du litre et répartition des fonds supplémentaires collectés, répercussion de la baisse du baril etc.), force est de constater qu’il tombe assez à plat. Moins par l’argumentaire qu’il développe que par la relation qu’il instaure. Le ton pédagogique est employé pour démontrer aux malheureux (qui voient bien ce que leur coûtent de plus leurs trajets quotidien) que tout cela n’est qu’une perception relative : le carburant a déjà été plus cher, il faut comparer à d’autres pays, la part des taxes revenant à l’Etat est à évaluer par rapport à son usage et aux avantages que vous en retirez…

    C’est l’air bien connu de. : c’est plus complexe, il ne faut pas faire d’amalgame. Certains de ces considérations relativistes ne sont pas délirantes , mais le message que retiennent les usagers mécontents est surtout qu’ils sont traités de débiles. La réalité qu’ils éprouvent est dévaluée au nom de la vérité supposée des chiffres. Mieux : ils leur sont retournés dans la figure pour leur démontrer qu’ils ne comprennent pas leur véritable intérêt. Qu’ils sont aveuglés et peut-être un peu stupides.

    C’est dit implicitement ou explicitement. Dans le genre « antibeauf », le compte Twitter de Jean Quatremer de Libération est assez représentatif de cette stratégie de l’insulte. Elle consiste à systématiquement qualifier le contradicteur (faux pauvres mais vrais stupides, haineux, manipulé par l’extrême droite, ou lâches, anonymes, se faisant représenter une dame qui croit à l’astrologie ou autres coquecigrues). Il est connu que ces niais sont victimes de fake news et de discours complotistes. Et en choisissant bien ses adversaires (le tweet le plus excité et le plus mal orthographié), on peut trouver de quoi justifier son mépris de classe.

    L’argument 2, la manipulation d’extrême-droite (voire une petit peu d’extrême-gauche), fonctionne sur le principe d’un complotisme anti complotiste. Son postulat : les gens ne pourraient pas mal penser s’ils n’y avait pas de mauvaises gens pour les faire penser faux. Du fait qu’ils ne croient pas la même chose que le dirigeants et les élites, ou du moins que les médias mainstream, on déduit que les mécontents sont manipulés. Ce type de raisonnement suppose une inversion : puisque les fachos soutiennent une revendication (après coup) et qu’ils risquent d’en profiter (éventuellement), c’est qu’ils l’ont suscitée (avant et délibérément). Et comme, par hasard, les régions où il y a le plus de mécontents et gilets jaunes, se trouvent bien plus coïncider avec la France périurbaine qui se déplace beaucoup en voiture et qui vote Le Pen ou Mélenchon qu’avec la rive gauche, le suspect est confondu.

    Il faut rendre une justice à Libération dont nous venons de critiquer un représentant : un autre de ses journalistes note très justement que l’argument « à qui profite le crime, au RN, donc… » traduit surtout une incapacité à comprendre ce qu’est un mouvement de protestation lié à une expérience quotidienne. Voir la façon dont se produit cette mobilisation : par la base, de façon virale, à partir de gens qui se ressemblent et que les algorithmes des réseaux sociaux incitent de plus en plus à interagir avec leurs semblables. Sans idéologie, sans organisation hiérarchique, sans programme ? Juste la traduction d’une indignation qui se transforme en mobilisation quand elle trouve des relais pour amplifier la parole de ceux d’en bas ? Hé oui, c’est possible. Cela s’est produit à l’occasion d’autres pétitions en ligne en France (solidarité avec le bijoutier de Nice, par exemple). Et au moment du printemps arabe, ceux qui cherchent célébraient le pouvoir de la contestation spontanée en ligne sans chercher la main de qui que ce soit.
    Une fois de plus la rhétorique du mépris fonctionne sur le double principe de dévaloriser la critique en termes de vérité (les crétins qui ne comprennent pas) et d’intentionnalité (les extrémistes qui attisent le feu). Est-ce cela la pensée complexe ?

    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 12 novembre 2018)

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  • Élections européennes en folie...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Richard Dessens, cueilli sur Eurolibertés et consacré à l'hystérisation de la campagne des élections européennes par Emmanuel Macron. Docteur en droit et professeur en classes préparatoires, Richard Dessens a notamment publié La démocratie travestie par les mots (L'Æncre, 2010), Henri Rochefort ou la véritable liberté de la presse (Dualpha, 2017) et La démocratie interdite (Dualpha, 2018).

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    Élections européennes en folie

    À six mois des élections européennes, un climat délétère et de provocation se développe et tend à chercher à creuser une fracture profonde en Europe. La fin des partis traditionnels est entérinée au niveau européen par Emmanuel Macron qui recherche un affrontement violent avec ses adversaires qu’il traite ouvertement comme des ennemis issus des mouvements fascistes et nazis des années 1930, comme il l’exprime très clairement. Il les injurie même sans vergogne, et très loin du ton doucereux et diplomatique dont il se veut l’image relayée savoureusement notamment par la grande chaîne d’information BFM (dite « BFMacron »).

    L’État « impartial » cher à François Mitterrand et pivot de la campagne de François Hollande en 2012 vient de voler en éclat…

    Ses ennemis : la « lèpre nationaliste » assimilée sans nuance au NSDAP ou aux Faisceaux italiens d’avant-guerre, pour susciter une « Grande Peur » en Europe et attirer à lui une masse électorale craintive, crédule et émotive sur ces sujets. On attend pour bientôt un rappel de la Shoah pour faire bonne mesure.

    Emmanuel Macron dépasse les bornes sans que personne dans la grande presse officielle ne s’en indigne, glosant, commentant et minimisant avec le plus grand sérieux les folles incartades d’un président qui joue avec le feu, et bien plus provocateur qu’un Donald Trump dont le moindre mot le fait vouer aux gémonies. Jean-Luc Mélenchon est même un petit garçon face à ses outrances inouïes et ne lui arrive pas à la cheville dans ses gesticulations pourtant non dénuées de fondement lorsque l’on voit ce que M. Macron est capable de faire.

    Pourtant, l’élimination de tous les grands partis traditionnels d’Europe en France, Allemagne, Italie, Autriche, Hongrie ou leur affaiblissement ailleurs, sont un sujet de réjouissance à la fois pour M. Macron et aussi pour les mouvements ou gouvernements taxés de « populistes ».

    Ainsi les deux adversaires déclarés sont déjà passés par-dessus les partis pour clarifier d’une certaine manière les enjeux européens et leur apporter toute leur importance : l’immigration et la sécurité d’une part et, avec eux, une reconsidération de la notion d’État de droit d’une façon plus générale. Les petites cuisines chères aux partis traditionnels sont rejetées sur le côté de la route.

    Mais cette simplification apparente, et peut-être salutaire, cache d’autres craintes que ce « faux combat » dissimule. Les mouvements « populistes » européens, ou américains maintenant, sont tous partisans d’une économie très libérale, comme M. Macron lui-même. C’est peut-être leur seul point commun, mais il est de taille. D’ailleurs le discours économique d’Emmanuel Macron est beaucoup moins mondialiste qu’à ses débuts et tend à prendre depuis peu en compte les intérêts nationaux et européens. Ce n’est probablement pas un hasard.

    Qu’il puisse y avoir une convergence d’intérêts économiques, et la présence de Steve Banon en Europe tendrait à le prouver, entre M. Macron et les « Populistes » au bout du compte, est un paramètre qui n’est pas à écarter. Quitte à sacrifier quelques « valeurs » européennes périmées, à restreindre les flux d’immigration, tout en recomposant une Europe dans laquelle la haute finance aurait définitivement pris le pouvoir. M. Macron ne serait-il pas finalement un « Trump européen » en germe ?

    Pour l’instant M. Macron agite des chiffons rouges et réveille les vieux démons du passé, toujours vendeurs pour créer une apparente opposition frontale dans un nouveau bipartisme européen qui aurait au moins en commun l’élimination des vieilles structures au profit d’un grand « tout financier » tout aussi désolant, mais nouveau.

    Ceci étant, il est aussi risible qu’inquiétant d’entendre l’UE et Emmanuel Macron psalmodier les valeurs intangibles et sacrées de l’« État de droit » et de visionner le clip réalisé par l’État français pour mobiliser les électeurs en vue de la prochaine élection européenne. Ce clip est totalement partisan, stigmatisant MM. Orban et Salvini sans aucun complexe.

    C’est un clip de « La République en Marche » et non celui d’un État impartial qui poursuit un but exclusivement civique. Mais « l’État impartial » cher à François Mitterrand et pivot de la campagne de François Hollande en 2012 vient de voler en éclat et ne doit déjà plus être une valeur fondamentale de l’« État de droit ». Nous sommes entrés dans l’ère nouvelle de l’« État partial » macronien sans vergogne. On croit rêver.

    Tout cela est aussi outrancier – tout en laissant de marbre tous les commentateurs qui, il y a peu, se seraient offusqués et auraient crié à la dictature si Nicolas Sarkozy avait dit et fait le dixième de M. Macron –, que la dénomination des deux futurs partis européens amorcée par M. Macron : la « Lèpre nationaliste » (LN) d’un côté, et de l’autre, appelons le « Choléra macronien » (CM). Par certains côtés on croit revenir avec angoisse sur les bancs du cours préparatoire (CP).

    Richard Dessens (Eurolibertés, 12 novembre 2018)

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  • Macron et les années 30...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy cueilli sur Polémia et consacré aux déclarations du Président de la République sur la ressemblance de notre époque avec celle des années 30... Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a récemment publié La Superclasse mondiale contre les peuples (Via Romana, 2018).

     

     

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    Retour des années 30 ? Macron ne croit pas si bien dire

    Emmanuel Macron est déjà entré en campagne pour les élections européennes. Il a choisi la diabolisation de ses adversaires qui, selon lui, incarneraient « la lèpre nationaliste » ; alors que, lui, représenterait bien entendu le camp « progressiste », celui du Bien.

    Un clip de propagande, financé par le contribuable, valorise ainsi l’Europe de Bruxelles et présente Matteo Salvini et Viktor Orban comme les artisans diaboliques de la désunion européenne.

    Et dans une interview à Ouest France [1] Emmanuel Macron a renchéri : « Le moment que nous vivons ressemble à l’entre-deux-guerres. »

    La ficelle est évidemment un peu grosse et revient à suggérer que ceux que les médias nomment les populistes seraient des fascistes voire des nazis. Et qu’Emmanuel Macron serait un valeureux résistant contre la nouvelle peste brune…

    La réalité est tout autre.

    Un contresens historique

    La leçon d’histoire d’Emmanuel Macron tente de nous faire, ne peut qu’amuser car elle repose sur un grave contresens historique.

    Mais il faut dire qu’en digne représentant de la Davocratie, Emmanuel Macron ne connaît pas l’histoire. Il n’a d’ailleurs que mépris pour « le monde d’avant ». Ce n’est pas de sa faute, car, à l’Ena, on n’enseigne que l’économie et le droit, pas l’histoire ni les humanités.

    Prétendre assimiler au fascisme la révolte des peuples européens contre l’oligarchie mondialiste qui règne à Bruxelles repose sur un total contresens.

    Car, précisément, ceux que l’on désigne aujourd’hui sous le terme de populistes ne veulent pas instaurer la dictature – celle du prolétariat ou celle d’un Chef comme dans les années 30 – mais au contraire restaurer la démocratie.

    Une démocratie que, justement, les oligarchies européennes ont détruite en instaurant la dictature des minorités ainsi que le gouvernement des juges et en transférant la souveraineté des Etats à la bureaucratie mondialiste de l’Union européenne.

    Les progressistes sont en réalité les nouveaux totalitaires

    Quand Emmanuel Macron fait mine de défendre l’Union européenne contre les méchants populistes, en réalité il défend le totalitarisme post-démocratique que la Davocratie a imposé à l’Europe.

    Un nouveau totalitarisme qui consiste à imposer aux peuples des évolutions qu’ils rejettent, notamment s’agissant de l’immigration de peuplement ou de la déconstruction « sociétale » des mœurs et des identités.

    Comme le disait si bien Daniel Cohn Bendit, un fidèle soutien d’Emmanuel Macron : « Il faut arrêter de dire que le peuple a toujours raison [2] ».

    On ne saurait mieux démontrer que l’oligarchie mondialiste a la démocratie en horreur.

    Les prétendus progressistes – qui, soit dit en passant, ne cessent de déconstruire l’histoire sociale de l’Europe – sont en réalité les nouveaux totalitaires. Des totalitaires qui veulent museler les peuples européens en imposant partout leur censure et leur propagande.

    Ce sont donc bien eux qu’il faut arrêter et non les populistes !

    En réalité la situation est bien pire que dans les années 30 !

    La référence macronienne à l’entre-deux-guerres comporte cependant une part de vérité, mais pas du tout dans le sens où l’entendent le Président de la République et les médias de propagande à sa dévotion !

    En réalité, la situation actuelle est bien pire que dans les années 30.

    En effet, de nos jours, comme dans les années 30, les régimes parlementaires sont incapables de faire face aux événements : ils sont impuissants face au chômage de masse car ils pratiquent la même politique récessive consistant à augmenter les impôts et à baisser les salaires et les pensions.

    A la différence que, dans les années 30, les frontières existaient encore en Europe alors qu’aujourd’hui on les a détruites au nom du libre-échangisme mondialiste. Mais, comme dans les années 30, la pauvreté et la précarité s’installent partout et les inégalités sociales sont de plus en plus criantes.

    Car, comme dans les années 30, la bourgeoisie et les nouveaux riches méprisent les peuples. Avec cette différence que, dans les années 30, les riches avaient peur de la révolution communiste, alors que de nos jours ils n’ont plus peur de rien et se croient tout permis.

    L’impuissance des régimes parlementaires, comme dans les années 30 !

    Dans les années 30, les régimes parlementaires sont également incapables de résoudre pacifiquement la question des minorités nationales et des réparations de guerre, fruit amer du catastrophique traité de Versailles imposé par les politiciens français et les Etats-Unis, à toute l’Europe.

    Comme de nos jours les gouvernements de l’Union européenne ne savent pas comment faire face aux flux migratoires vers l’Europe ; ni comment résoudre la communautarisation et l’islamisation croissante de la société.

    Dans les années 30, les gouvernements tournent dans le vide car ils sont victimes de l’instabilité parlementaire.

    De nos jours, ils tournent dans le vide car ils ont perdu les moyens de gouverner : ils ont tout abandonné à l’Union Européenne, aux Banques et aux grandes firmes mondiales ! Et comme dans les années 30, la corruption du personnel politique s’amplifie parce que les lobbies dictent leur loi en toute impunité.

    Comme dans les années 30, la crise est morale et politique !

    Comme dans les années 30, l’Europe connaît une profonde crise morale.

    Dans les années 30, la crise résulte de la catastrophe européenne de la Grande Guerre.

    De nos jours elle résulte de l’épuisement du cycle libéral-libertaire qui débouche sur un profond nihilisme et sur l’effondrement individualiste de la société.

    Comme dans les années 30, la violence politique et sociale ne cesse d’augmenter. On a même vu un ministre de l’Intérieur [3] affirmer, le jour de son départ, que la situation serait incontrôlable d’ici 5 ans ! Ou un chef d’Etat major des Armées avertir que si les banlieues de l’immigration s’embrasaient, les Armées n’auraient pas les moyens d’y faire face [4].

    Mais à quoi sert donc l’Etat ?

    Comme dans les années 30, la défiance vis-à-vis des gouvernants de plus en plus illégitimes, car ils ne protègent plus les peuples, ne cesse d’augmenter. Le pays réel s’éloigne donc de plus en plus du pays légal.

    Une analogie trompeuse

    Alors Emmanuel Macron a raison mais malgré lui : la situation rappelle en effet, mais en bien pire, celle de l’entre-deux-guerres en Europe.

    Mais Emmanuel Macron nous trompe sur le sens de son action : il n’incarne pas en effet ceux qui résistent au chaos qui vient, mais au contraire ceux qui le provoquent par leur aveuglement idéologique libéral, libertaire et mondialiste et par leur autisme. Notamment par leur refus d’écouter ce grand cri de douleur européen qu’est le populisme.

    Comme hier, les politiciens refusent d’écouter la misère des peuples et leur aspiration à retrouver leur fierté nationale.

    Comme dans les années 30, les Français attendent aujourd’hui des hommes politiques qui soient à la hauteur des heures décisives que l’Europe et la France vont devoir affronter.

    Mais on sait déjà, hélas, qu’Emmanuel Macron, Jupiter fatigué, ne sera pas au rendez-vous de cette histoire qui vient.

    Michel Geoffroy (Polémia, 5 novembre 2018)

     

    Notes :

    [1] Le 31 octobre 2018

    [2] Le Figaro.fr du 5 juillet 2016

    [3] Gérard Collomb

    [4] Selon Philippe de Villiers , le 2 novembre 2018 à l’émission Les terriens du samedi,  l’ancien chef d’état major des armées aurait averti le président de la république « Si ça pète dans les banlieues, on n’est pas capable de faire face, on n’a pas les moyens de faire face, on n’a pas les hommes. »

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  • Le populisme, un instinct de survie des peuples ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros cueillli sur le Figaro Vox et consacré au populisme. Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et intervient régulièrement dans les médias. Elle vient de créer, avec Hervé Juvin, Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.

     

     

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    Caroline Galactéros : «Le populisme exprime l'instinct de survie des peuples»

    La dénonciation d'une vague populiste planétaire, signe prétendu d'une montée des périls et de l'arrivée d'une nouvelle «peste brune» qui voudrait abattre les démocraties libérales et progressistes européennes, mais aussi américaine, brésilienne ou philippine, témoigne d'une gravissime incompréhension de la vérité même de l'expression démocratique contemporaine dans de vastes parties du monde. La solution, nous dit-on la mine grave? «Faire front»… en poursuivant la fuite en avant politicienne et la défausse technocratique. Haro sur le baudet! Tous ces apprentis dictateurs qui, en Hongrie, Pologne, République Tchèque, Autriche, Italie, aux États-Unis, aux Philippines et désormais au Brésil l'emportent sur les partis traditionnels sont les ennemis d'une «démocratie» incomprise, et leurs électeurs d'ignorantes victimes qui ne savent pas ce qu'ils font en votant pour eux.

    Comme c'est commode! Gommant comme par magie toutes les turpitudes de gouvernants déchus souvent corrompus ou démagogues, qui n'ont en commun que leur arrogance et leur inefficacité dans la gestion de leurs pays respectifs, on les idéalise et l'on s'y identifie même, nous considérant immaculés et surtout «du bon côté», de celui de l'humanisme irénique, de la fin consentie des États, des nations et des frontières, du progressisme sociétal sans frein, de l'accueil d'une diversité ethnique et religieuse dont on veut ignorer la charge déstabilisatrice.

    Qu'est-ce que le populisme? La crispation rétrograde de masses ignorantes et précarisées par une mondialisation qui a pris le mors aux dents et les traite comme des nombres et des ensembles, qu'il faut faire taire en leur assurant un minimum vital? Ou bien le chant malheureux et de plus en plus insistant d'un abandon ressenti et d'un refus de l'engloutissement progressif de ce qui faisait la riche diversité des nations, leur tonalité culturelle et politique spécifique et irréductible? Discréditer cette heureuse résilience, c'est se tirer une balle dans le pied. Le melting-pot américain lui-même est en souffrance. L'Amérique, nous dit-on, est en guerre civile froide… Mais le problème des démocrates américains lors de la dernière présidentielle - et l'une des causes de la défaite d'Hillary Clinton - fut de croire pouvoir gagner en misant sur le communautarisme et en segmentant furieusement le corps électoral sans percevoir son besoin de rassemblement. Trump, quels que soient ses travers et ses fautes, a su incarner ce besoin de cohésion, de destinée collective. C'est tout le génie de son «Make America great again». Ce n'est pas pour rien que ses adversaires l'accusent sans cesse de diviser le pays. Il manifeste violemment un manque de souffle collectif et ne met pas la poussière sous le tapis lénifiant de grandes déclarations creuses. Et puis, dans le cas américain, il existe encore un garde-fou: la conviction d'une vocation «impériale» et le sentiment diffus d'appartenance à une grande nation, qui sont toujours bien vivants dans la population, tandis qu'ils succombent chez nous sous les inhibitions et la repentance même de ceux qui devraient le défendre bec et ongles.

    Mais ces incantations courroucées contre le danger «populiste» et la réaffirmation martiale du «no pasaran» contre des «valeurs démocratiques et républicaines» sont sans objet et seront sans effet. Et même contre-productives. Premièrement, car les mots ne valent pas action. Confusion particulièrement aiguë chez les élites françaises. Deuxièmement, car la peur n'évite pas le danger. C'est le déni de la réalité, l'ignorance et l'aveuglement qui sont dangereux, pas les réalités électorales et politiques désormais lourdes que nos Cassandre démagogues prétendent ainsi conjurer. Les peuples parlent, les peuples crient même désormais, et c'est là une preuve de vitalité démocratique, d'instinct de survie. Ils manifestent leurs angoisses identitaires, leur «insécurité culturelle» tout autant qu'économique, mais surtout leur refus de se résigner à l'indifférence et au mépris que l'on témoigne depuis trop longtemps à leur bon sens et souvent à leur clairvoyance. Ils ne supportent plus l'incurie satisfaite de ceux qui prétendent les diriger et disent les comprendre. Alors, ils votent avec leurs pieds, (comme en France), ou bien ils écoutent chaque jour d'avantage les voix qui leur promettent des «solutions» aussi radicales et simplistes fussent-elles, celles qui mettent les pieds dans le plat et abordent les questions taboues et celles qui fâchent, depuis trop longtemps délaissées par les partis traditionnels. Car ils veulent que leurs politiciens retombent sur terre, prennent la mesure de phénomènes planétaires qui menacent leur sentiment toujours vivace d'appartenance à des nations... en danger. Ils voudraient bien, quel scandale, voir émerger des leaders… dotés de leadership, d'une vision, d'une volonté de les protéger de l'insécurité culturelle mais aussi de l'insécurité tout court.

    Des gros mots? Non, simplement des évidences qui gênent les utopistes et les politiciens qui depuis longtemps ont abdiqué leurs responsabilités et oublié ce que signifie précisément gouverner en démocratie: écouter, comprendre, représenter et servir les intérêts du peuple de vos mandants qui vous a délégué sa souveraineté. Servir, c'est d'abord s'oublier, totalement, penser plus grand que soi et agir par total dévouement. C'est voir loin et penser librement. C'est oser décider et affronter l'impopularité immédiate de décisions nécessaires. C'est convaincre. C'est protéger ceux qui vous ont fait confiance. C'est leur dire la vérité. C'est comprendre la complexité des mutations planétaires, qu'elles soient démographiques, économiques, culturelles, religieuses, environnementales. C'est prendre la mesure de leur signification géopolitique et de l'évolution probable des rapports de force dans lesquels il faut préserver l'intérêt national. C'est enfin parvenir à conjuguer la préservation des libertés politiques et des droits humains sans laisser la collectivité nationale se fragmenter autour de corporatismes revendicatifs qui insidieusement, privatisent peu à peu l'espace public et l'exposent à toutes les instrumentalisations internes et externes.

    Gouverner, c'est donc trouver l'alchimie délicate entre libéralisme économique, progressisme tempéré et un certain conservatisme sociétal autour des notions de lien, de famille, de patrie aussi. C'est ne pas sauter à pieds joints, juste pour «être dans le coup», dans les fantasmes transhumanistes et les ruptures anthropologiques en cours, cyniquement présentées comme des vecteurs de progrès humain, en fait accélérateur de la satisfaction illimitée du tout-puissant désir des individus. Ce désir qui est une tyrannie, qui arase tout sur son passage, la famille, l'Histoire, la filiation, le cœur même de l'humanité de l'homme. Évidemment, tout cela est difficile, aléatoire, ingrat. Il est plus aisé de pratiquer frénétiquement la méthode Coué et de faire tourner les moulins à vent en stigmatisant les relents de «fascisme» au lieu de traiter enfin les problèmes.

    En Europe, c'est la question migratoire qu'il faut en premier affronter, car elle est à l'origine du sentiment croissant d'insécurité culturelle. La décision d'Angela Merkel de l'été 2015 lui a coûté sa popularité mais a surtout fait se lever une immense inquiétude sur tout le continent. C'est une faute stratégique majeure. L'arrivée de formations politiques très à droite est directement liée à cet angélisme ahurissant complètement hors sol. En second lieu, il faut oser traiter sans mollir l'explosive question du rapport entre l'Islam et le socle historique, culturel et religieux européen, donc celle des conditions et proportions de leur compatibilité pratique. C'est ensuite les conditions de l'autonomisation économique de l'Europe, qui passe par un affrontement avec la prétention américaine à décider du niveau de prospérité des économies européennes comme de leur indépendance énergétique via l'imposition d'une extraterritorialité juridique léonine devenue un pur et simple avantage concurrentiel. C'est enfin décider notre sortie de l'enfance stratégique, repenser notre relation avec notre grand voisin russe, et structurer une défense européenne autonome permettant une affirmation géopolitique devenue impérative pour échapper à la tenaille américano-chinoise qui se referme lentement mais sûrement sur notre pusillanimité.

    La démagogie est donc de fait l'inverse du populisme qu'il faut cesser de diaboliser. La démagogie est du côté des élites dont l'indifférence aux peurs et au bon sens des peuples est si forte qu'elle s'apparente à un silence assourdissant et conduit au «dégagisme» que l'on voit à l'œuvre partout. L'autorité n'est pas l'autoritarisme. Écouter les peuples n'est pas de la démagogie. Comprendre leur besoin de leadership et de sécurité n'est pas menacer nos libertés, c'est les préserver et refuser de nous laisser dévorer en silence par un communautarisme qui va achever de fragmenter puis tuer notre démocratie.

    Cessons de nous payer de mots, de nous gargariser de nos fantasmes confortables. L'indifférence des grands partis de gouvernement comme de la superstructure européenne aux craintes populaires est suicidaire. La démocratie n'est pas une statue d'airain figée dans une pureté absolue. C'est un équilibre fragile et meuble, qu'il faut sans cesse consolider en l'adaptant aux menaces qui l'attaquent et qui ne sont certainement pas l'instinct de survie des peuples exprimé fébrilement dans les urnes. La démocratie libérale occidentale doit se repenser, oser questionner ses fondements et les conditions de sa sauvegarde, de son ressourcement, qui passent notamment par des freins à mettre sur l'ultra mondialisation, qui a déclassé et fragilisé les classes moyennes, les rendant vulnérables à des discours extrémistes. Elle doit repenser son lien avec le peuple, mais aussi les notions de limite, de frontière, de droits et de devoirs. Elle est, depuis une génération surtout, devenue le creuset d'un communautarisme qui la dissout et elle a, au nom de la tolérance et du progrès humain, totalement mésestimé les dangers politiques de celui-ci et l'influence domestique, notamment sécuritaire, de problématiques géopolitiques lointaines et globales.

    Si on continue de croire faire disparaître le danger en le niant, nous allons subir nous aussi un effet de boomerang difficile à dominer. Le danger en effet, c'est l'arrivée, par la voie des urnes, de partis extrémistes et démagogiques dont le discours rassure mais qui n'ont que des solutions outrancières. C'est l'expression à leur profit des instincts de repli et de fermeture de populations fragilisées. L'urgence est donc, pour les partis européens dits de gouvernement, de se reconnecter au niveau de conscience et de lucidité des peuples et d'entendre leurs craintes sans les mépriser. Car l'Europe entière, plongée dans un environnement international inquiétant qu'elle ne comprend pas ou si mal, coincée dans un idéalisme complètement dépassé, semble courir à tombeau ouvert vers son engloutissement. Ainsi faut-il redéfinir l'identité européenne en brisant les tabous et en refusant l'ouverture de notre ensemble à tous vents, car des offensives politiques et confessionnelles sont en cours qui misent sur notre manque de lucidité et notre goût immodéré pour la contrition.

    Sur le plan stratégique, c'est la même chose. Nous n'avons plus d'autre choix que de sortir de l'impuissance et de cesser de galvauder la notion de souveraineté pour enfin la pratiquer. C'est valable évidemment pour l'Europe, mais déjà pour la France. Pour ne prendre qu'un exemple, celui si triste de la Syrie, quel est aujourd'hui l'intérêt de Paris à persister à défendre l'indéfendable? La France ne peut être le fossoyeur d'États laïcs. Après avoir miraculeusement su éviter de participer à la destruction de l'Irak, elle s'est fourvoyée dans une entreprise de déstabilisation régionale en Lybie et en Syrie, parfaitement contraire à ses intérêts nationaux et dont elle doit très vite se désolidariser. Elle ne peut non plus continuer, pour quelques milliards toujours dus, d'appuyer même à mi-mots, un régime saoudien dont la réalité moyenâgeuse, à mille lieues de toute modernité ou progressisme, apparaît au grand jour, rendant plus indécente encore l'indignation embarrassée de ses soutiens cyniques. La France doit être faiseur de paix. La paix concrète, la paix qui passe par la reconnaissance de la survie d'un État, la Syrie, qui ne s'est pas laissé abattre. Faire la paix, c'est d'abord reconnaître ses erreurs de jugement, ses choix politiques erronés, et prendre part à un processus constructif qui préserve nos intérêts et nos valeurs, loin des diabolisations ridicules qui ne satisfont qu'une cohorte d'intellectuels éthérés, auxquels on pourrait d'ailleurs recommander un stage in situ, à Idlib par exemple, pour enfin ouvrir les yeux et comprendre que le martyre du peuple syrien a assez duré et que rien ne le justifie plus.

    Notre déni du réel devient plus que ridicule: il est tragique. Nos gouvernants doivent enfin écouter leurs mandants, reconnaître leur impéritie sécuritaire, leurs incohérences diplomatiques dont les effets sanglants se ressentent sur le territoire national, cesser d'alimenter le communautarisme en favorisant l'expression d'intérêts corporatistes et des dépendances destructrices de la cohésion nationale comme de l'enracinement multiséculaire de l'identité française sur un socle judéo-chrétien et humaniste. Dire cela n'a rien à voir avec de l'intolérance religieuse, tout à voir avec le refus de se voir dicter par l'extérieur des «canons» confessionnels, culturels ou politiques d'expression «identitaire» qui n'ont rien à voir avec la république, la laïcité, l'histoire, les valeurs et la loi françaises. Le fracas du monde doit nous éclairer. Les peuples n'ont pas tort parce qu'ils sont peuples. Ils refusent juste d'être des «populations» et des «territoires» gérés comme de simples réalités statistiques interchangeables.

    Le pragmatisme, c'est une honnêteté essentielle, c'est le courage de se reconnecter au réel, ici, et là-bas, même s'il nous déplaît ou nous heurte. C'est entrer en cohérence comme on entre en religion pour conjurer le véritable danger: l'éclatement des nations sous les coups conjugués de l'ultra individualisme et du communautarisme. Réconcilier progrès et ordre, cesser de confondre autorité et autoritarisme. Revisiter le conservatisme qui n'est pas une régression mais une marque aussi d'humilité et de limite mise à l'hubris narcissique de l'homme, désormais galvanisée par les illusions technologiques. Faire des choix difficiles qui nous sauveront, sauveront notre crédit et notre ascendant moral. La lumière est au bout du chemin de cette mue douloureuse. La popularité aussi, pour celui qui saura en convaincre son peuple et en tenir l'exigence dans le temps. Il faut crever l'abcès maintenant.

    Caroline Galactéros (Figaro Vox, 2 novembre 2018)

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  • Le cadavre Mao dans le placard bobo...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il rappelle l'engouement pour le maoïsme d'une partie de l'intelligentsia française au début des années 70...

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    Les génocides ? Parlons-en ! Le cadavre Mao dans le placard bobo

    « Bourgeoise » ou « prolétarienne », la gauche adula jadis Mao Tsé-Tung. Début 1961, de retour de Chine, François Mitterrand affirme à L’Express (23 février) que Mao est « un humaniste » et que « le peuple chinois n’est en aucun cas au bord de la famine ». Or, de 1958 à 1962, le Grand Bond en avant de Mao fait 36 millions de morts (plus qu’en 1939-1945), famines, tortures, cannibalisme, nécrophagie, massacres massifs – 45 millions en comptant la guerre mondiale, 450 fois Nagasaki. En pleine paix, sans nul désastre naturel – juste un délire idéologique du Grand Timonier.

    Dans les archives du PC chinois, par volumes entiers : « Un paysan exhume quatre cadavres pour en dévorer la viande […] une fillette abandonnée tue et mange son petit frère de quatre ans. » Quatre ans après, c’est la révolution culturelle prolétarienne : la Chine à nouveau ravagée. Seule nuance : le fanatisme remplace la famine. Lors de banquets cannibales, les Gardes rouges dévorent « cœurs, foies et sexes de victimes », même « des enfants en bas âge ». Les « éléments noirs » (réactionnaires) sont enterrés vivants, lapidés, noyés, éventrés, émasculés, ébouillantés, explosés à la dynamite, souvent en groupe.

    L’enquête du PC chinois parle d’« assassinats effroyables », de « tueurs pire que des bêtes […] à la cruauté et sauvagerie révoltantes ». Yang Jisheng, le Soljenitsyne chinois (lui-même communiste), dénonce « l’une des pires convulsions de l’histoire humaine ». Que fait Mao, durant ces atrocités ? « En 1966, quand les gardes rouges massacrent ses ennemis, Mao (72 ans) est au bord de sa piscine avec de jolies filles de 17-18 ans. »

    Sur la rivière Xiao, un témoin voit, au fil de l’eau, passer cent cadavres à l’heure. Ainsi de suite, partout en Chine. Des morts par millions, encore. Pour le PC chinois (enquête de 1981), « la révolution culturelle (1966-1976) fut la pire catastrophe pour le Parti, l’État et le peuple, depuis 1949 ».

    Alors que la famille Zhou – et tant d’autres – subit le martyre, que fait l’intelligentsia française ? Elle a-do-re le maoïsme. L’Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes (UJCML) « étudie la pensée de Mao ». Sémillants intellos, Philippe Sollers et Julia Kristeva « couvrent les bureaux de Tel Quel [leur revue] des pensées de Mao »… Kristeva (entre deux contacts avec le KGB bulgare…) exalte Mao qui a « libéré les femmes et résolu l’éternelle question des sexes »… Pour Maria Antonietta Macciocchi, « la révolution culturelle inaugurera mille ans de bonheur »… Christian Jambet et Guy Lardreau font du Petit Livre rouge « la réédition des évangiles », de Mao, « la résurrection du Christ ». Fin 1976, encore, Macchiocchi, Sollers, etc., pleurent l’éviction des bourreaux-mao de la direction du PC chinois (Le Monde, 20 novembre, « Qu’est devenu l’idéal de la démocratie prolétarienne ? »).

    La Gauche prolétarienne – dont l’héritage médiatique vomit, à présent, le « populisme » – écrit, le 14 mars 1970 (le génocide chinois allant bon train) : « Nous sommes des maoïstes […] La vérité est du côté du peuple et est une arme toute-puissante. » Les 17 et 18 avril 1975, Libération glorifie l’amorce du génocide des Khmers rouges : « Le drapeau de la résistance flotte sur Phnom-Penh » et « Sept jours de fête pour une libération ». Plutôt trois ans d’enfer par la dictature pour les pauvres Cambodgiens qui y laissèrent un tiers de leur population.

    Depuis, c’est le grand silence (des cimetières). Ces journaux ont vaguement dénoncé ces horreurs, mais « oublié » les maoïstes. Exemple – parmi d’autres : pour les hagiographes du Monde, Jacques Rancière est « un auteur d’essais mondialement connus » […] philosophe dont « l’œuvre entretient un dialogue permanent avec le texte platonicien et un compagnonnage constant avec la littérature ». Or, Rancière fut un mao si fanatisé qu’il trouvait (dit l’ex-mao Jean-Pierre Le Dantec) l’UJCML bien molle et trop encore « dans le camp des mandarins ».

    Telle est l’intelligentsia qui, la poussière balayée sous le tapis, sans honte sur son terrible passé, fait encore la morale à tout un chacun. Avis à ces ex-gardes rouges des quartiers chics : pas vous et pas ça.

    NB : les détails et sources des affaires ci-dessus exposées sont à disposition de tout fact checker vétilleux.

    Xavier Raufer (Boulevard Voltaire, 5 novembre 2018)

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  • Fascistométrie et rééducation des masses...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de François-Bernard Huyghe, cueilli sur son site Huyghe.fr et consacré aux tentatives, grossières, du système politico-médiatique d'assimiler la vague populiste à une résurgence du fascisme... Spécialiste de la guerre de l'information, François Bernard Huyghe, auteur de nombreux livres, a récemment publié La désinformation - Les armes du faux (Armand Colin, 2015) et Fake news - La grande peur (VA Press, 2018).

     

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    Fascistométrie et rééducation des masses

    Les années trente reviennent, paraît-il. Certes les esprits tatillons, très « vieux monde », pourraient trouver quelques différences mineures : une guerre mondiale encore fraîche avec ses millions de morts et ses anciens combattants au désespoir, une crise économique pré-keynésienne notamment dans une Allemagne ruinée et saisie par un chute folle de la monnaie, des revendications territoriales (ou des occupations) entre pays européens, le péril bolchévique qui terrifiait sur fond de grèves ou d’émeutes, des gens armés en chemise de couleur se battant partout, les puissances d’une Europe divisée reposant sur leur colonies, guère de concurrence économique d’Asie mais aussi guère d’État providence, réarmement partout, des migrations essentiellement inter-européennes, des sociétés encore largement chrétiennes et rurales, un nationalisme assumé par les classes dirigeante à rebours ce qu’elles professent aujourd’hui, des gouvernements très instables, la montée de partis politiques totalitaires s’assumant comme tels… Passons.

    Chacun a bien compris qu’Emmanuel Macron jouait sur le point Godwin en nous suggérant un quasi retour du fascisme contre lequel il serait le dernier rempart. Fascisme est pour le moins un terme polysémique et nous nous sommes livrés à un petit test comparatif. En Italie puisque l’épouvantail Salvini est si souvent évoqué.

    Prenons d’abord un définition « classique » par Umberto Eco qui, en 1995, énonce quatorze caractéristiques sinon de tous les fascismes, du moins du fascisme comme « ur-fascsimo », archétype (plutôt un schéma d’un fascisme absolu ou poussé à l’extrême, même si chaque fascisme particulier diverge légèrement par rapport à lui) :

    - Culte de la tradition
    - Refus du monde moderne
    - Culte de l’action pour l’action
    - Refus de l’esprit critique
    - Culte de l’unité du peuple
    - Appui sur les classes moyennes
    - Obsession du complot
    - Exaltation de la lutte contre un ennemi surpuissant
    - Rejet de tout pacifisme comme trahison
    - Élitisme de masse (notre communauté est supérieure)
    - Culte du héros
    - Machisme
    - Droits des peuples contre droits des individus
    - Recours à un néo-langage porteur de forts contenus idéologiques

    Nous pourrions discuter chacun de ces points et nous demander plus en détail lesquels s’appliqueraient au stalinisme ou au maoïsme et lesquels seraient vraiment typiques de Salvini. Mais admettons qu’il s’agit d’un idéal-type, de tendances poussées à l’extrême et reconnaissons qu’Eco propose au moins des catégories significatives.

    Petite comparaison avec un texte qui fait grand bruit en Italie vingt-trois ans plus tard L’Espresso publie en ligne un test intitulé « fascistometro » donc destiné à mesurer le degré de fascisme du lecteur suivant son nombre de réponses positives ou d’approbation à 56 affirmations. Ces affirmations que nous n’avons pas la place de reproduire ici peuvent apparaître comme de bon gros lieux communs, mais sont présentés par l’hebdomadaire centriste comme autant d’étapes sur le chemin qui nous mènerait aux années les plus sombres.

    Quelques exemples :
    - l’Italie est un pays ingouvernable
    - Il nous faudrait un régime présidentiel
    - Les journalistes sont tous au service du pouvoir
    - Je vous rappelle que ces gens-là votent
    - Il faudrait les recenser
    - Je pense à nos garçons des forces armées
    - C’est facile de parler quand on est bien au chaud
    - Un pays sans frontière n’est pas un pays.
    - Etc.

    Le lecteur pourra consulter la liste complète, et, s’il le veut, procéder au test. On lui accordera que les phrases ne sont pas d’une immense finesse (cela dit : essayez d’inverser - un pays sans frontière est un pays, l’Italie est un pays gouvernable, je ne pense pas à nos garçons des forces armées, c’est courageux de parler quand on est bien au chaud- et faites vous des copains…) . Certes, nous ne cherchons pas à démontrer que les rédacteurs de l’Espresso (la romancière M. Murgia qui a rédigé le test) sont légèrement moins fins que l’auteur du « Nom de la rose ». Il y a une terrible différence de registre. Analyser le fascisme pour Eco, c’est penser quelques catégories fondamentales d’où découlent des attitudes. Pour L’Espresso c’est criminaliser des phrases de bistrot, avec une bonne dose de mépris de classe. C’est accessoirement culpabiliser des réactions populaires spontanées pour y dénoncer le germe de la nouvelle lèpre. Le fascisme le produit spontané de la niaiserie des masses : difficile de faire plus contre-productif.
    Du reste, Mme Murgia publie en ce moment avec H. Janeczek intitulés « Attention au fascisme qui vit en vous ». L’idée est claire. Nous sommes tous potentiellement fascistes. Racismes et violences sont universels (ce serait donc une pulsion de nature et non une construction de quelques cultures dominantes ?). Il faut donc apprendre à s’autoanalyser et à s’autodiscipliner. Dressage et repentance. Le problème du fascisme n’est pas un problème politique, c’est un problème psychanalytique.Vigilance, camarades, dressons un barrage contre les pulsions des masses.

    Proposition de test pour L’Espresso :
    « Si vous étiez un fasciste désireux de gagner les prochaines élections que feriez vous aux électeurs ?

    A) Je leur enverrais des gens en uniforme leur parler de dieux antiques, de mort au combat, de mobilisation totale du peuple tout entier, de la prochaine guerre à entreprendre contre un adversaire surpuissant...
    B) Je leur ferais lire L’Espresso pour les persuader que ceux qui souhaiteraient plus d’emplois pour leurs concitoyens ou qui critiquent les fonctionnaires sont des nôtres : la preuve que le ventre est encore fécond d’où est sortie la bête immonde
    C) je traduis le clip gouvernemental français (évoqué à l’article précédent)
    D ) Je reprends les slogans psys de Mai 68 sur la libération de la parole et je crie « à bas le Surmoi ».

    François-Bernard Huyghe (Huyghe.fr, 3 novembre 2018)

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