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Entretiens - Page 28

  • L’Europe, l’Occident et ses menaces...

    Nous reproduisons ci-dessous le texte d'un entretien accordé par David Engels au site Rage dans lequel il livre sa vision de la situation de l'Occident et de l'Europe...

    Historien, essayiste, enseignant chercheur à l'Instytut Zachodni à Poznan après avoir été professeur à l'Université libre de Bruxelles, David Engels est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a  également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020). 

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    L’Europe, l’Occident et ses menaces

    Edgar Bug : Bonjour David Engels et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Votre travail est très inspiré de celui d’Oswald Spengler, quels sont les éléments que vous partagez avec lui ? Quels sont vos points de divergences ?

    David Engels : Très généralement, je partage avec Spengler le constat selon lequel toutes les grandes civilisations traversent des stades morphologiques parallèles et sont mortelles, permettant de prédire au moins les lignes générales de l’évolution future des civilisations non encore pétrifiées. Et tout comme Spengler, je crois que la civilisation occidentale sera bientôt arrivée au bout de son parcours. En revanche, je ne partage pas la philosophie vitaliste de Spengler, dont le dualisme et le réductionnisme esthétique me semblent assez problématiques, ce pourquoi je préfère sous-tendre mon approche morphologique personnelle d’une structure plutôt dialectique. Il y a aussi certaines dissensions techniques entre Spengler et moi : j’ajouterais une demi-douzaine de civilisations in- ou méconnus par Spengler à sa liste, et procéderais à quelques datations différentes. Et finalement, je ne peux partager son enthousiasme pour la perspective d’une Europe dominée, selon lui, par l’Allemagne comme la « nouvelle Rome », même si l’évolution de l’Union européenne actuelle comme système hégémonique germanique semble lui donner raison…

    La civilisation occidentale est au cœur de vos travaux, comment la définiriez-vous ?

    Je procéderais par deux étapes. D’abord, celle historique, bien connue de tous : la civilisation occidentale ou européenne dont l’évolution morphologique proprement dite débute, selon moi, avec les Carolingiens et les Ottoniens, puise ses inspirations dans la loi de l’Ancien Testament, la philosophie gréco-romaine, la transcendance chrétienne et les traditions multiples des peuples européens autochtones. Puis, il y a l’étape psychologique : la civilisation occidentale est animée par un esprit unique souvent décrit comme élan « faustien », et qui distingue la vision du monde de l’homme occidental de celles des autres grandes civilisations, comme l’importance de la corporalité des Grecs, du patriarcat des Levantins, de la vision karmique des Indiens ou de l’immanence des Chinois. Cet élan faustien nous pousse à décliner les différentes phases dialectiques de notre civilisation dans un esprit de dépassement de soi, de quête de l’impossible, de démesure – en bien comme en mal, dans la transcendance comme dans le matérialisme, dans la contemplation comme dans la technologie. Pour visualiser cette particularité, il suffit de penser à l’opposition (et en même temps la continuité) entre la cathédrale gothique et le gratte-ciel new-yorkais…

    Quels sont les dangers qui la menacent ?

    L’occident actuel est menacé par deux dangers. L’un vient du dehors : il s’agit de la situation globale extrêmement dangereuse, où notre faiblesse a rendu possible la montée en puissance de la Chine, le danger de la migration de masse depuis l’Afrique, la radicalisation de l’Islam, l’agression de la Russie, etc. L’autre, plus importante, vient de l’intérieur : c’est l’autodestruction de l’occident qui suit à peu près les mêmes lignes que celle de toutes les autres grandes civilisations en fin de parcours : effondrement de la démographie, déclin de la religion, migration de masse, déconstruction de la famille, mondialisation, haine de soi, polarisation sociale, hédonisme, règne des milliardaires, pollution environnementale, une culture du pain et des jeux, et j’en passe.

    Qu’est ce que « l’Hespérialisme » ? En quoi peut-il constituer la solution aux problèmes de notre civilisation ?

    Le vieillissement et la fossilisation de notre civilisation me semblent inévitables. En revanche, deux questions restent ouvertes. Premièrement : qui décidera de la forme finale que prendra notre civilisation avant de se pétrifier pour les siècles à venir ? A Rome, ce fut la restauration augustéenne qui permit de mettre fin aux horreurs de la guerre civile et de donner un cadre politique définitif à la méditerranée gréco-romaine sous forme de l’Empire romain. Deuxièmement : comment transmettre notre héritage culturel ainsi finalisé et canonisé aux générations futures et même aux civilisations qui succéderont, un jour, quelque part, à la nôtre ? L’hespérialisme tente de donner des éléments de réponse aux deux questions en mettant en avance l’urgence du développement d’un sentiment de patriotisme occidental, évitant à la fois la myopie du souverainisme nationaliste, totalement inapte à protéger nos intérêts dans un monde dominé par des États-civilisation, et l’erreur mondialiste visant le brassage indistinct des cultures et l’établissement chimérique d’un État mondial.

    Quel regard portez-vous sur la guerre en Ukraine ? Cette guerre est-elle celle de Poutine ou assistons-nous à un conflit de civilisations ?

    L’un n’exclut pas l’autre. Il est évident que cette guerre est liée à l’ambition de Poutine d’effacer du moins en partie la « honte » de la dissolution de l’Union soviétique en rendant à la Russie une partie essentielle de son ancien espace impérial. Mais au-delà de l’aspect individuel, cette guerre est en effet une guerre des civilisations. D’un côté, nous avons la logique civilisationnelle occidentale à laquelle une majorité des Ukrainiens souhaitent adhérer, et qui est marquée par l’État-nation (bien que son indépendance actuelle se trouve de plus en plus réduite par des structures fédérales telles que l’OTAN et l’UE), une société civile forte (bien que largement kidnappée par la gauche), des structures démocratiques participatives (bien que de plus en plus sous la domination idéologique du wokisme), une économie libérale (bien que dominée désormais par le « socialisme des milliardaires) et une certaine exaltation de la liberté individuelle (bien qu’aboutissant dans l’hédonisme, le matérialisme et le consumérisme). De l’autre côté, nous voyons, dans la civilisation russe, une approche bien distincte de la nôtre, et marquée par l’approche impériale du « mir » russe où la fragmentation volontaire des identités nationales non-russes se mêle à une exaltation métaphysique de l’identité russe, le messianisme historique de la Troisième Rome, une idéalisation de l’autoritarisme comme seule forme de gouvernement adéquate à l’esprit russe, une manipulation massive de la religion (non seulement orthodoxe, mais aussi musulmane) à des fins politiques, etc. Spengler prévoyait déjà, en accord avec la plupart des penseurs russes du XIXe siècle, que la Russie, nonobstant une certaine occidentalisation « pétrinienne » superficielle, était une civilisation bien distincte de la nôtre, bien que nettement plus jeune, et la guerre actuelle me semble confirmer ce diagnostic.

    Comment expliquez-vous qu’en dépit de cette agression directe et brutale envers l’Occident, Poutine et la Russie ne soient toujours pas identifiés comme ennemis par de nombreux mouvements se réclamant du patriotisme en Europe et aux Etats-Unis ?

    D’un côté, le rejet de ce que notre civilisation est en train de devenir explique assez bien qu’aux yeux de bon nombre de conservateurs, quiconque s’oppose ouvertement aux dérives actuelles – immigrationnisme, culte LGBTQ, folie écologiste, multiculturalisme, hédonisme, instrumentalisation des droits de l’homme, américanisation, bienpensance, haine de soi etc. – semble être un allié naturel ; et Poutine sait jouer très bien la carte du défenseur des valeurs conservatrices, relayée depuis des années par des médias et des influenceurs pro-russes. Qui, en France ou en Allemagne, sait que la Russie actuelle est loin d’être la « Sainte Russie » des images d’Épinal et est caractérisée par une oligarchie mafieuse, un déclin prononcé de l’orthodoxie, un essor spectaculaire de l’islam, un taux d’avortement unique en Europe, une politique vaccinale nettement plus répressive qu’en Europe, et que les opposants au régime ne voient pas seulement, comme en occident, leur comptes dans les réseaux sociaux bloqués, mais aussi leur propre personne enfermée dans des camps de concentration ? Puis, d’un autre côté, n’oublions pas le budget considérable versé depuis la Russie afin de se constituer, parmi la droite, une Cinquième Colonne fidèle : pour beaucoup de conservateurs, mis aux ban de la société et exclu des fortunes versées par la gauche sur ces fidèles, c’est la seule véritable source de revenu…

    La droite refusant d’ouvrir les yeux face à la Russie comme la gauche face à l’Islam, comment l’Occident peut-il sortir de ce double aveuglement ?

    Tout d’abord, par une grande honnêteté intellectuelle. Les États-Unis ne sont pas l’antidote universel au danger russe, car dans sa critique des dérives idéologiques de la gauche occidentale, Poutine marque sans doute des points, et il serait naïf et dangereux de le nier : il nous faut, en effet, un retour à un patriotisme culturel basé sur la valorisation de nos structures de solidarité traditionnelles, non pas sur leur déconstruction. En revanche, la Russie ne m’en semble pas le meilleur garant d’un tel projet « hespérialiste » : d’abord, parce qu’en dépit de quelques ressemblances superficielles, les valeurs « conservatrices » russes sont assez divergentes culturellement de celles des conservateurs européens à cause de la vision très différente du monde et de l’homme ; puis, parce que la Russie veut, avant tout, protéger son propre espace impérial. Si, par chance, les conservateurs européens arrivaient à construire un véritable empire européen, les Russes s’en sentiraient autant menacés que par l’OTAN – et se mettraient à financer immédiatement une opposition de gauche… En même temps, il ne faut pas non plus se leurrer sur l’agenda des États-Unis : même si je ne partage par leur diabolisation si courante en France – après tout, il s’agit probablement du pays occidental où le conservatisme est encore le plus présent au sein de la société et des structures de pouvoir, nonobstant l’immense influence qu’exerce le wokisme par le biais du deep state sur le gouvernement actuel et, par lui et la culture hollywoodienne, sur le monde entier –, l’Europe ne peut éternellement se confiner au rôle de parent pauvre de l’empire américain. Et bien que les États-Unis réclament depuis des années un investissement militaire plus conséquent de la part des États européens au sein de l’OTAN, je ne suis pas sûr qu’ils verraient l’établissement d’une véritable force militaire et politique autonome sur notre continent d’un très bon œil… Ni les Russes, ni les Américains ne peuvent nous « sauver » : comme l’Italie au XIXe siècle , l’Europe doit « se faire elle-même ».

    Quelles leçons l’Occident doit-il tirer de cette guerre ? Ce drame ne démontre-t-il pas l’urgence de délivrer l’Occident des errances idéologiques dans lesquelles il s’est enfermé ?

    En effet, il est grand temps d’abandonner le suicide identitaire et spirituel dont souffre l’occident et de nous « réarmer », tant dans le sens littéraire que littéral du mot. Malheureusement, une grande partie des Occidentaux est déjà entrée dans la « posthistoire » à un tel point que je doute de la possibilité d’en « refaire un peuple » : un tel revirement pourra, au mieux, concerner une petite élite qui, une fois aux manettes d’un appareil médiatique, institutionnel et éducatif adéquat, pourra mener une part majoritaire des citoyens vers une acceptation superficielle de positions « conservatrices », bien que plutôt par opportunisme que par véritable conviction. Après tout, je ne crois pas que l’adhésion aux positions de gauche soit fondamentalement plus enthousiaste : les hommes de la posthistoire veulent surtout jouir de leur vie et être débarrassés du poids du passé…

    Depuis le début du conflit, le couple franco-allemand se trouve discrédité, alors que la Pologne s’est montrée exemplaire dans tous les domaines : l’accueil des réfugiés, la livraison d’armes à l’Ukraine, etc… Pensez-vous que la Pologne puisse devenir une puissance majeure de l’Europe dans les années à venir ?

    Non, je ne le crois pas – malheureusement. D’abord pour des raisons de taille, non seulement démographique, mais aussi économique : bien que l’économie polonaise actuelle s’accroisse, profitant à la fois de la non-saturation du marché national et de la délocalisation d’entreprises et de capitaux venant de l’occident, cette expansion connaîtra, tôt ou tard, un déclin analogue à celui qu’on constate en France ou en Allemagne. À défaut d’investir massivement dans le développement de technologies futuristes, la Pologne subira, à la longue, le même sort que ses voisins. Certes, elle pourra profiter un moment de son statut d’îlot préservé de la migration de masse si l’occident s’embrase dans le « clash des civilisations » – mais si la France et l’Allemagne sombrent, la Pologne sombrera aussi. Puis, pour des raisons d’idéologie : tant que Berlin, Paris, Bruxelles et surtout Washington continueront à être dominés par la gauche woke, celle-ci fera tout pour faire chavirer le conservatisme polonais… Ce serait uniquement grâce à un partenariat étroitissime avec les autres États Visegrad et Trimarium que la Pologne pourrait tenter de devenir un troisième pôle de pouvoir en Europe. Mais j’avoue ne pas avoir observé beaucoup de progrès à ce niveau ces dernières années ; au contraire : tous les projets de ce genre piétinent sur place. De même, l’espoir de voir l’Ukraine, une fois la guerre terminée, se transformer en un allié inconditionnel de la Pologne me semble assez naïf : Kiev s’alignera sur celui qui financera sa reconstruction. Et dans l’état actuel des choses, cet argent viendra de Berlin, non pas de Varsovie.

    Cette guerre a fait sauter un tabou, l’Allemagne et le Japon ont annoncé un réarmement sans précédent depuis la fin du dernier conflit mondial, c’est une page de l’histoire qui se tourne. Pensez-vous possible que ce mouvement puisse également emporter la mauvaise conscience de l’Occident héritée de cette période, et qui constitue la principale arme de guerre psychologique de nos ennemis ?

    Je ne crois pas. D’abord, ce « réarmement » allemand est un grand leurre : jusqu’à présent, rien de concret n’a encore été fait, et l’état de la Bundeswehr est plus mauvais que jamais ; et il y a fort à parier que les sommes faramineuses annoncées depuis mars 2022 aboutiront dans des programmes de formation à la diversité, au financement de la parité homme-femme au sein des troupes, à l’extension du programme de construction de chars adaptés au besoin de femmes enceintes (ce n’est pas une blague) ou au recrutement systématique de minorités musulmanes. Le seul point sur lequel je vois, en effet, un durcissement du langage martial en Allemagne, c’est dans le renforcement de la « lutte contre la droite » : depuis la guerre en Ukraine, la persécution du conservatisme a connu un nouveau sommet en Allemagne, et une bonne partie de la justification de cette lutte est la mise en avant de la similitude (apparente) entre les « valeurs » de l’ennemi russe et les valeurs conservatrices occidentales. Celui qui défend, aujourd’hui, la famille ou s’oppose à l’avortement se voit critiqué pour délit d’imitation de Vladimir Poutine… 

    David Engels (Rage, 21 juillet 2023)

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  • La France au milieu des émeutes...

     

     

    Alain de Benoist : la France au milieu des émeutes

    IL GIORNALE : Les manifestations de ces jours-ci témoignent de l’échec du multiculturalisme. Comment en est-on arrivé là ?

    ALAIN DE BENOIST. Elles manifestent bien sûr un échec du multiculturalisme, mais s’en tenir là serait réducteur. Les violentes émeutes urbaines auxquelles nous assistons en ce moment témoignent aussi d’un pays divisé et fragmenté, non à cause des immigrés, mais en raison d’une idéologie dominante qui a substitué, dans la population générale, la loi du profit aux règles morales. Dans une société dominée par les valeurs marchandes, qui créent structurellement les conditions de la fragmentation et de la déliaison sociale, il ne faut pas s’étonner que personne ne se soucie du bien commun.

    Dans ces émeutes, la gauche a surtout vu une révolte sociale (contre la discrimination, l’exclusion, le chômage, etc.), tandis que la droite a parlé de révolte ethnique annonciatrice d’une guerre civile. Il y a du vrai dans ces deux interprétations, mais elles sont l’une et l’autre à courte vue. Depuis quarante ans des dizaines de milliards d’euros ont été investies dans la « politique de la ville » et la remise en état des « quartiers difficiles » sans aucun résultat. D’autre part, une guérilla urbaine n’est pas une guerre civile. Dans une guerre civile, deux fractions armées de la population s’affrontent, la police et l’armée étant également divisées, ce qui n’est pas le cas ici.

    D’une façon générale, ce sont les interprétations strictement politiques qui s’avèrent incapables de prendre la pleine mesure du problème. Les actuelles émeutes urbaines n’ont aucun caractère politique. Les émeutiers n’ont aucune revendication à faire valoir. Ils veulent seulement détruire et piller. Lorsque des représentant de la gauche ou de l’extrême gauche se rendent dans les cités pour faire savoir qu’ils « comprennent la colère » des émeutiers, il se font expulser ou cracher au visage !

    Dans quelle mesure la crise de l’identité française et européenne influence-t-elle les manifestations ?

    La population française a aujourd’hui perdu tout sentiment d’appartenance à une communauté. Les émeutiers en ont une – ou croient en avoir une. La crise de l’identité française a des racines anciennes. Elle est la résultante de l’emprise d’une idéologie à la fois individualiste et universaliste, qui croit que les hommes sont « partout les mêmes », et que les facteurs ethnoculturels n’ont pas d’importance. Aucune société ne peut résoudre ses problèmes par la seule addition du contrat juridique et de l’échange marchand.

    L’État français est-il remis en cause parce que de nombreux immigrés ne reconnaissent pas l’autorité des institutions françaises ?

    Les émeutiers ne se soucient pas de l’État français, qui les indiffère. Quand ils attaquent les policiers avec des mortiers d’artifice, quand ils incendient des mairies ou des casernes de pompiers, c’est moins parce qu’ils voient en eux des représentants de l’autorité que parce qu’ils les perçoivent comme des intrus. Ils raisonnent en termes de territoire (la « frontière invisible »), de façon purement tribale. Ils s’attaquent d’ailleurs aussi bien aux écoles, aux librairies, aux épiceries, aux boutiques, aux voitures. Ils se regardent comme une bande attaquée par une bande rivale.

    Ce serait une autre erreur de croire que les émeutiers ne veulent connaître aucune règle. Il y a au contraire des règles qu’ils respectent très bien : les leurs ! La plupart d’entre eux viennent de cultures et de sociétés familiales de type clanique, et ils continuent de se comporter de manière clanique. Si l’un d’entre eux est victime de la « violence policière », tous s’estiment victimes aussi. C’est ce que les pouvoirs publics, prisonniers de leur idéologie, ne parviennent pas à comprendre : la mère d’un enfant tué après avoir commis une attaque à main armée ne dira jamais que son fils s’est mal comporté. Elle dira qu’à travers lui, c’est tout le clan qui a été attaqué. C’est le principe même du tribalisme clanique : les miens ont toujours raison puisque ce sont les miens.

    Pourquoi les deuxième et troisième générations sont-elles plus radicalisées que les précédentes ?

    Elles sont plus radicalisées parce qu’elles souffrent d’un déficit identitaire beaucoup plus marqué. De telles émeutes ne sont jamais le fait d’immigrés de la première génération, qui sont venus s’installer en France volontairement tout en conservant une claire conscience de leurs origines, et donc de leur identité. Les deuxième, troisième ou quatrième génération se  considèrent comme algériens, maliens, marocains, sénégalais, etc., même lorsqu’ils ont la nationalité française, mais ils ne connaissent pratiquement rien des pays d’où sont venus leurs parents ou grands-parents. Ils ne se sentent pas français, mais n’ont qu’une identité de rechange artificielle ou fantasmée. Leur frustration est totale. Ils ne peuvent plus exprimer ce qu’ils sont que par la violence et la destruction.

    Dans ce contexte, le système judiciaire français, souvent accusé d’être trop laxiste à l’égard des immigrés qui comment des délits, a-t-il joué un rôle à votre avis ?

    Le laxisme du système judiciaire est bien réel. Les émeutiers savent bien qu’au fond ils ne risquent pas grand-chose, car la loi n’est pas appliquée. Un refus d’obtempérer assorti d’un délit de fuite peut théoriquement valoir jusqu’à dix ans de prison, mais de telles peines n’ont jamais été prononcées. De surcroît, il n’y a plus de places dans les prisons ! Cela contribue à la démoralisation des policiers.

    En 2005 déjà, de graves manifestations avaient eu lieu en France. Qu’est-ce qui a changé par rapport à la situation d’il y a presque vingt ans ? La situation s’est-elle aggravée ?

    Entre 2005 et 2023, il y a des différences. La plus grande ampleur des émeutes, qui en cinq jours ont déjà fait plus que de dégâts de celles de 2005 qui avaient duré trois semaines, s’explique d’abord par le simple fait que les populations immigrées d’où sont issus le émeutiers sont aujourd’hui beaucoup plus nombreuses. Le rôle aujourd’hui prédominant des réseaux sociaux est aussi à prendre en compte. En 2005, les émeutes s’étaient concentrées dans les grandes métropoles, elles touchent aujourd’hui les petites villes. Les émeutiers sont également beaucoup plus jeunes (un tiers de ceux qui ont été interpellés ont entre 13 et 15 ans et étaient inconnus des services de police) et beaucoup plus violents. Dans les cités, une culture de la violence gratuite s’est développée : ce n’est plus seulement pour voler quelque chose que l’on a recours à la violence, mais pour un « mauvais regard », pour un refus de cigarette ou tout simplement pour rien – sinon pour le plaisir. Et l’on monte rapidement aux extrêmes : on continue à frapper qui est déjà à terre, on n’hésite pas à tuer. En France, selon une enquête de l’INSEE, on enregistre une agression gratuite toutes les 44 secondes…

    Le problème de l’immigration ne concerne pas seulement la France, mais aussi d’autres grandes nations européennes comme l’Allemagne où, pourtant, des phénomènes de cette ampleur ne se sont jamais produits. Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans le modèle français en matière d’immigration ?

    C’est précisément la preuve que le seul multiculturalisme ne suffit pas à expliquer les émeutes. Ce qui est particulier à la France, c’est qu’elle a été pionnière en matière d’immigration : le problème se posait déjà chez elle alors que l’immigration commençait à peine dans des pays comme l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne ou le Royaume-Uni. Il y a aussi le fait que l’immigration en France reste associée au souvenir de la période coloniale, qui a fait naître des rancœurs qui ne sont pas éteintes. On ne peut exclure enfin que certaines techniques de maintien de l’ordre qui se sont révélées ailleurs les plus efficaces ne sont pas toujours employées par la police française. La façon dont, pendant des décennies, on s’est acharné à nier l’existence des problèmes a eu des conséquences explosives.

    Les protestations de ces jours-ci auront-elles également des conséquences politiques en vue des élections européennes de l’année prochaine en renforçant la droite ?

    Oui, c’est évident. Des troubles comme ceux auxquels nous assistons en ce moment contribuent à faire ouvrir les yeux. Le Rassemblement national est déjà devenu le premier parti de France, et les sondages le donnent vainqueur des prochaines élections européennes. L’opinion française est excédée, elle n’en peut plus. Elle voit que le gouvernement est totalement dépassé par ce qui se passe. Une majorité de Français voudraient voir l’armée intervenir dans les banlieues. Emmanuel Macron se voit reprocher de n’avoir pas instauré l’état d’urgence, comme cela avait été fait en 2005. Le symbole le plus significatif est l’incroyable succès de la cagnotte lancée sur les réseaux sociaux pour venir en aide à la famille du policier auteur des coups de feu qui ont déclenché les émeutes : en moins de quatre jours, elle a dépassé le million et demi d’euros (avant d’être clôturée) ! Du jamais vu.

    La France est-elle perdue à jamais ou existe-t-il une chance de mettre un terme à cette situation ?

    Il ne faut jamais dire jamais ! Les vieux pays d’Europe ont connu dans le passé des épreuves bien plus graves, et s’en sont toujours relevés. Tout ce qui s’actualise potentialise une réaction en sens contraire. L’histoire est imprévisible. Elle est par définition le domaine de l’imprévu.

    Pensez-vous que ce qui se passe aujourd’hui en France puisse également se produire en Italie ?

    C’est possible, sinon probable. Toute la question est de savoir si le gouvernement italien saura tirer les leçons de ce qui se passe aujourd’hui de l’autre côté des Alpes.

     

    Alain de Benoist (Site de la revue Éléments, 7 juillet 2023)

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  • David Engels rencontre Antoine Dresse, le créateur d'Ego Non...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien de David Engels avec Antoine Dresse, créateur de la chaîne vidéo Ego Non et collaborateur de la revue Éléments.

    Historien, essayiste, enseignant chercheur à l'Instytut Zachodni à Poznan après avoir été professeur à l'Université libre de Bruxelles, David Engels est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a  également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020). 

     

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    «Ne vous contentez pas de critiquer, créez!» Interview avec Antoine Dresse - créateur de la chaîne „Ego Non“

    David Engels : Cher Antoine, il y a quelques années, vous avez créé la chaîne « Ego non » qui jouit désormais d’une notoriété certaine en tant que source d’inspiration et d’éducation à la pensée conservatrice. Pouvez-vous rapidement nous présenter votre initiative ?

    Antoine Dresse: Je terminais mes études de philosophie quand l’idée est née de créer cette chaîne YouTube. Mon inspiration première m’est venue d’un regret de voir que certains concepts ou idées majeures de la pensée politique de droite n’étaient pas assez connus ni mobilisés. Cela m’avait d’abord frappé avec certains concepts novateurs de Guillaume Faye, tels que « l’archéofuturisme » (auquel j’ai consacré ma première vidéo), qui méritent, à mon sens, d’être plus largement diffusés et discutés.

    Dans chacune de mes vidéos, j’essaie donc d’exposer un concept ou une idée majeure d’un auteur, en essayant à chaque fois de le relier, d’une façon ou d’une autre, à une problématique politique contemporaine. Je ne prétends nullement à la neutralité, bien au contraire. Le choix des idées que je présente reflète naturellement une orientation politique, même si je ne partage pas forcément toutes les pensées de l’auteur dont je parle. Je poursuis donc un double but : Premièrement, susciter la curiosité intellectuelle des spectateurs en faisant découvrir certains auteurs ou certaines idées ; deuxièmement, offrir un nouvel angle pour repenser ou recentrer une problématique politique contemporaine.

    L’on critique en effet bien souvent les délires et les dérives de la pensée de gauche, progressiste et égalitaire. La critique est saine et même bien souvent salutaire, mais il me semble qu’il faut aussi pouvoir dépasser ces dérives par « le haut », si je puis dire. Face à la conception du monde propre des hommes de gauche, qui est totale, il faut savoir aussi offrir une conception du monde totale. Prenons un exemple précis : la gauche est égalitaire par essence. Devons-nous nous contenter de dénoncer les dérives de l’égalitarisme tout en conservant l’Égalité comme valeur intouchable ? Ou bien plutôt montrer que la beauté du monde et le développement de la personne humaine ne vont pas sans l’Inégalité ? C’est ce que j’ai essayé de faire avec ma vidéo sur la « philosophie de l’Inégalité » de Nicolas Berdiaev notamment.

    D’origine belge, vous vivez actuellement à Varsovie – un vécu qui m’est, comme le lecteur peut l’imaginer, assez familier. Pouvez-vous nous décrire en quelques mots votre parcours ?

    Mon parcours est assez « européen », si je puis dire ! J’ai grandi dans la ville de Liège, dans la région wallonne et francophone de Belgique. Reprenant une image de Joseph de Maistre, j’ai coutume de dire que j’ai découvert le monde antique sur les genoux de ma mère, à travers les grands récits de la mythologie grecque qu’elle me racontait durant ma petite enfance. La culture grecque n’est en effet pas anodine et a assurément imposé son empreinte sur moi, elle vous communique pour toujours, et à jamais, le sens d’une hiérarchie des valeurs face auxquelles les slogans modernes apparaissent comme ce qu’ils sont vraiment : des simulacres de valeurs.

    Passionné par la culture européenne, j’ai ensuite appris l’anglais, l’allemand et le russe quand j’étais adolescent. A l’âge de 18 ans, avant de commencer l’université, j’ai décidé de passer plusieurs mois en Allemagne et en Russie pour perfectionner la connaissance de ces langues d’une part et pour découvrir la mentalité de ces pays d’autre part. Cette expérience a sans nul doute contribué à consolider en moi un solide européanisme. A mon retour, j’ai commencé des études de philosophie en Belgique – ainsi qu’à Fribourg, en Suisse, pour une année. Même si je m’étais déjà intéressé à la pensée politique auparavant, c’est pendant ces années universitaires que je me suis véritablement formé intellectuellement de mon côté, en lisant tout ce que je pouvais trouver comme vieux livres dans les bouquineries de la capitale. Dans le cadre de mes études plus spécifiquement, je me suis concentré sur la philosophie médiévale et ai rédigé mon mémoire de fin d’études sur Jean Scot Érigène, un grand philosophe irlandais de la renaissance carolingienne.

    A l’issue de mes études, j’ai décidé de combiner mon intérêt pour l’Europe centrale avec la professionnalisation de mon activité de vidéaste. Je me suis installé à Varsovie pour découvrir la Pologne et je me consacre pleinement à mes activités métapolitiques et culturelles. 

    Pour des conservateurs occidentaux, la Pologne et la Hongrie jouissent de la réputation d’être, en quelque sorte, des pays sanctuaires de la civilisation européenne, alors que celle-ci semble en plein déclin identitaire, culturelle, politique et même économique à l’Ouest. Après avoir vécu à Varsovie pendant quelques années, confirmeriez-vous cette impression, et comment voyez-vous le futur de la Pologne ?

    Pour être entièrement honnête, mon impression est partagée. Il va de soi que la Pologne – à l’instar d’autres pays d’Europe centrale – fait office de « bastion conservateur » dans l’Europe du xxie siècle ; que l’on songe à la lutte du gouvernement contre les mouvements LGBT ou contre l’avortement (quoi qu’on en pense par ailleurs !) pour s’en convaincre. La très faible immigration de peuplement extra-européenne confère aussi de facto à ces pays ce statut de « sanctuaires ». Pour autant, il ne faut pas se faire d’illusion sur l’état d’esprit qui règne dans une partie non négligeable de la population, en particulier dans la jeune génération. Les valeurs « progressistes » de l’Occident conservent encore largement leur prestige et leur force d’attraction, au point que l’on peut sincèrement s’interroger sur l’avenir du conservatisme en Pologne et sur la pérennité de ce sanctuaire.

    Attention, mon propos n’est absolument pas défaitiste ni fataliste, au sens où je sous-entendrais que le déclin de la Pologne et de l’Europe centrale soit inéluctable. L’histoire est ouverte et il serait présomptueux de ma part d’affirmer que la Pologne empruntera forcément le chemin de ses voisins occidentaux. Ma remarque vise plutôt un des travers qui affecte toute la droite européenne en général : elle n’a pas grand-chose à opposer. Sa posture consiste bien trop souvent à « conserver », au sens le plus superficiel du terme, des formes sociales qui sont déjà mortes ou mourantes. De même, on n’associe à la droite qu’une attitude négative : « Non à l’avortement », « non aux lobbies LGBT », « Non à l’islamisation », etc. Le « Non » peut être dit avec toute la force du monde, je doute qu’il n’ait jamais autant de puissance créatrice qu’un « Oui ». Or tant que la Pologne n’incarnera pas un modèle alternatif de société, elle sera toujours perçue comme une société libérale défaillante qu’il faut réparer ou amender.

    Quel critère guide le choix de vos sujets de podcasts ? Et quels thèmes sont particulièrement prisés par votre public ?

    Mon critère est celui de la pertinence et de la nécessité d’envisager certains sujets sous un autre angle, afin de pousser plus loin la réflexion. Quand je travaille sur une nouvelle vidéo, je me demande toujours si je ne vais pas simplement ressasser de vieilles idées convenues et s’il y a réellement une plus-value à la vidéo que je vais proposer au public. C’est pourquoi j’ai tenu à faire découvrir des auteurs dont on parle malheureusement assez peu dans le monde francophone, comme Giorgio Locchi par exemple, mais aussi Arnold Gehlen sur l’hypertrophie de la morale, Nicolas Danilesvki sur la civilisation russe ou encore Juan Donoso Cortés et sa critique du libéralisme. En règle générale, je remarque que les thèmes historiques (« Mahomet et Charlemagne » d’Henri Pirenne) et les thèmes purement politiques (« La distinction ami-ennemi » de Carl Schmitt) sont les plus prisés par mon public.  

    Le monde de la droite européenne est littéralement déchiré par le conflit ukraino-russe. Croyez-vous qu’il sera possible, du moins à moyen-terme, de recoller les bouts ?

    C’est une question hélas fort délicate, à propos de laquelle la nuance est souvent absente ! Je n’ai jamais caché ma sympathie pour la cause ukrainienne dans cette histoire, mais je souhaite naturellement que les partisans de l’un ou l’autre camp mettent leurs griefs de côté afin de mener à bien leur combat commun pour la civilisation européenne. Je crains toutefois que certaines fractures ne se muent inévitablement en divorce consommé. Si certaines personnes soutiennent la Russie en raison d’une méfiance compréhensible pour le camp atlantiste américain, une bonne partie des militants de droite la soutiennent par pur ressentiment : contre les « élites », contre le « système », contre l’Occident, etc. Comme si la Russie avait pour volonté de sauver les Européens d’eux-mêmes tel un Deus ex machina ! Non seulement c’est s’illusionner sur l’état réel de la Russie, mais c’est aussi perpétuer une erreur qui a cours depuis fort longtemps à Droite, et que Philippe Baillet nomme « l’Autre tiers-mondisme ». Je crains dès lors que le camp « de droite » ne se fracture de plus en plus entre deux tendances irréconciliables : l’une cherchant à sauver la civilisation européenne de l’intérieur, en luttant contre ses tares sans pour autant chercher à la détruire, et l’autre cherchant son salut dans une alliance avec l’extérieur (le monde « traditionnel » musulman, la Chine ou maintenant le Russie), dans l’espoir de détruire cet « Occident pourri ». Cette seconde position me semble être une erreur complète pour la simple raison qu’elle ne comprend pas l’essence du politique. Comme le disait Julien Freund, on n’a jamais « le même combat » qu’un autre ensemble politique.  

    Ce n’est pas un secret de dire que Youtube, bien qu’intéressé avant tout par le gain commercial, n’est pas particulièrement en phase avec les contenus conservateurs, et nous pouvons constater la même chose pour la plupart des plateformes virtuelles monétisées. Comment voyez-vous l’avenir de votre chaîne dans un contexte devenant de plus en plus difficile pour la droite ?

    Il s’agit effectivement d’un équilibre précaire. Ayant moi-même été censuré de la plateforme Patreon pour « Hatespeech » un mois à peine après mon inscription, je suis bien placé pour mesurer la répression de nos idées sur internet. Pour y pallier, j’ai atteint pour le moment une relative autonomie en me dotant de mon propre site internet : www.ego-non.com .

    « Don’t criticise, but create » - telle est la devise de cette série d’interviews. Que conseilleriez-vous à des jeunes lecteurs voulant s’investir dans la lutte pour la survie de l’occident sans compter nécessairement être actifs dans un domaine politique qui éveille de plus en plus un certain dégoût ?

    Je leur donnerais ces cinq conseils au moins :

    1. Fonder une famille ou la consolider : d’un point de vue collectif comme individuel, cette tâche est capitale. Au niveau collectif, il faut impérativement inverser la tendance démographique que connaît l’Europe. Mais un tel raisonnement peut sembler très abstrait. Au niveau individuel, fonder une famille est aussi, et même en premier lieu, une façon de se réaliser comme personne. Si nous vivons pour léguer un héritage, comme je l’ai dit plus haut, il faut bien avoir des héritiers pour qui se battre. Beaucoup de gens, gagnés par le désespoir et le pessimisme, se demandent si cela vaut encore la peine d’agir. Ils ne se poseraient sûrement pas cette question s’ils avaient des enfants.

    2. Renouer avec la Beauté : un des traits de l’époque contemporaine qui me frappe le plus est le culte de la laideur. La laideur s’est infiltrée partout, dans l’architecture, dans la mode, dans l’art, dans la langue, dans la musique, etc. Or, notre combat est autant éthique qu’esthétique. Nous devons incarner une voie aussi rationnelle que belle ; le fond ne va pas sans la forme adéquate.

    3. Apprendre au moins une langue étrangère : en plus de l’utilité évidente que cela comporte, la connaissance des langues étrangères permet de s’évader mentalement et de relativiser les discours qu’on entend dans notre pays. De plus, s’il s’agit d’autres langues européennes, cela permet justement de nouer des liens de fraternité avec des Européens d’autres horizons.

    4. Se regrouper en communautés : face au déclin démographique que nous connaissons, il faut se préparer à vivre en minorité dans de larges portions de nos territoires et être, de ce fait, prêts à nous entraider. De plus, la société étant largement baignée d’idées de gauche insupportables au sens strict, la solitude et l’isolement peuvent rendre fous ceux qui partagent nos idées sans pouvoir les exprimer. Un dicton bien connu disait jadis : « Un chrétien seul est un chrétien en danger ». Or, cela s’applique également aujourd’hui à tous ceux qui ne pensent pas selon le moule conformiste de l’époque.

    5. Se réinsérer dans la longue mémoire européenne : contre les ethnomasochismes de tout poil, de gauche comme de droite, il s’agit de se réapproprier notre histoire, notre identité et notre culture. Les diverses mythologies indo-européennes, la philosophie classique, la religion chrétienne et la science occidentale sont constitutives de l’âme européenne et de sa grandeur. Les simplifications outrancières qui cherchent à faire l’impasse sur telle ou telle dimension de notre histoire sont l’effet d’une cécité intellectuelle qu’il faut dépasser.

    Antoine Dresse, propos recueillis par David Engels (deliberatio, 25 juin 2023)

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  • Jérôme Sainte-Marie : “ La bourgeoisie est de moins en moins nationale ! ”

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné le 18 juin 2023 (avant les émeutes) par Jérôme Sainte-Marie à Livre noir dans lequel il livre ses analyses chiffrées sur l'état de l'opinion, les forces et faiblesses de Marine Le Pen, Eric Zemmour, LR et Macron. Et l'opposition entre bloc populaire et bloc élitaire, en répondant aux critiques sur cette théorie.

    Politologue et sondeur reconnu, Jérôme Sainte-Marie  est l'auteur de Bloc populaire - Une subversion électorale inachevée ( Cerf, 2021) et de Bloc contre bloc - La dynamique du Macronisme (Cerf, 2019).

     

                                             

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  • Quand les "élites" européennes abandonnent leur pouvoir aux américains !...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné par Emmanuel Todd à Élucid dans lequel il analyse le déclin de l'Europe, et plus exactement, l'abandon soudain et violent du pouvoir de la part des "élites" européennes, au profit d'une puissance extérieure, à savoir les États-Unis. Anthropologue, démographe et historien, Emmanuel Todd est l'auteur de nombreux essais.

     

                                              

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  • Le réveil des identités...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous l'entretien donné par Jean-Baptiste Noé au Libre Média, média d'information québecois, à l'occasion de la sortie de son essai Le déclin d'un monde - Géopolitique des affrontements et des rivalités en 2023 (L'Artilleur, 2022), dans lequel il prédit l’effondrement de l’universalisme et le retour des identités sur la scène internationale. Il plaide pour le retour du réalisme dans un contexte de «brouillard médiatique». Historien, Jean-Baptiste Noé est  rédacteur en chef de la revue Conflits.

     

                                               

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