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  • La guerre avant la guerre...

    Les éditions Konfident viennent de publier une chronique de Thierry Marignac intitulée La guerre avant la guerre. Romancier non-conformiste et traducteur d'anglais et de russe, Thierry Marignac a publié plusieurs romans, dont Fasciste (réédition Actusf, 2015),  Renegade Boxing Club (Gallimard, 2009),  Milieu hostile (Baleine, 2011), L'icône (Les Arènes, 2019) ou Terminal croisière (Auda Isarn, 2021), ainsi que des recueils de nouvelles.

     

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    " Thierry Marignac découvre Kiev fin 2004, en pleine révolution orange, à l'occasion d'un reportage sur la toxicomanie en Ukraine financé par une ONG de George Soros. Avant son départ, un ami russe l'a mis en garde : « Tu veux toujours y aller ? La guerre civile vient de commencer... »

    Quand il retourne dans le pays, dix ans plus tard, la révolte du Maïdan est passée par là. On se bat dans le Donbass, entre Ukrainiens, affrontements qui justifieront huit ans plus tard « l'opération militaire spéciale » ordonnée par le Kremlin.

    Loin des propagandes des deux camps, Thierry Marignac raconte l'Ukraine qu'il connaît : un État en faillite, gangrené par la corruption, livré à la cupidité d'une poignée d'oligarques, à la violence de groupes criminels opérant sous différents paravents idéologiques et à toutes les ingérences étrangères. Un édifice vermoulu, dont la grande erreur des Russes fut de croire qu'il s'écroulerait en février 2022, mésestimant ainsi un incontestable sentiment national."

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  • La Guerre Sainte des démocraties face au choc des réalités...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Pierre de Lauzun cueilli sur Geopragma et consacré à l'échec du discours idéologique porté par le camp occidental dans l'affrontement avec la Russie. Membre fondateur de Geopragma, Pierre de Lauzun a fait carrière dans la banque et la finance.

     

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    La Guerre Sainte des démocraties, face au choc des réalités

    A propos de la guerre d’Ukraine, la question d’un grand affrontement entre démocraties et régimes autoritaires a été soulevée. Beaucoup en sont convaincus dans ce qu’on appelle un peu rapidement l’Occident. La réalité est autrement plus nuancée.

    On le voit déjà au niveau planétaire : si une majorité nette de pays a condamné l’invasion russe de l’Ukraine, seuls les Occidentaux ont décidé des sanctions. Entre les deux lectures possibles ‘occidentales’ du conflit ukrainien (agression contre un Etat, ou lutte du bien et du mal), la première se révèle bien plus féconde internationalement. La grande majorité des pays hors ‘Occident’, démocraties comprises, ne se sent pas impliquée par une idée de grande croisade contre des forces antidémocratiques. D’autant qu’ils ne se sentent pas menacés par la Russie. La situation est sur ce point nettement différente de celle de l’URSS, qui avait un programme idéologique et pouvait s’appuyer sur des forces locales plus ou moins classées comme révolutionnaires, de sorte qu’à côté de la menace militaire éventuelle, limitée à certaines zones, on craignait une menace idéologique bien plus large.

    Ce qui veut dire concrètement que la prétention des Occidentaux à représenter un camp qui serait celui de la démocratie est de fait contestée. Bien des pays considèrent d’ailleurs à tort ou à raison que la menace d’une intervention occidentale, notamment américaine, idéologique ou à prétexte idéologique, est pour eux plus sérieuse que la menace des autres, et en tout cas plus étayée par l’expérience. On peut ajouter que la définition même du camp des démocraties n’est pas vraiment évidente. Comme chacun sait, dans le camp dit occidental de nombreux régimes non-démocratiques ont trouvé et trouvent tranquillement place.

    Du côté des Etats classés autoritaires (Chine, Russie, Iran et autres) la situation est loin d’être simple ou uniforme. Partout il y a une ligne officielle, plus ou moins idéologique, et à forte composante nationaliste. Mais c’est à usage interne, et de façon très différenciée. Si la Chine présente à l’évidence une situation spécifique, en cela que l’idéologie marxiste y est supposée rester une référence interne majeure, et qu’un parti communiste y est parti unique, ce n’est pas un produit d’exportation, au moins actuellement et à vue humaine. De même a fortiori pour la Corée du Nord. Quant à la Russie actuelle, le régime, de fait de plus en plus autoritaire, ne met pas en avant de modèle politique original pouvant servir d’exemple, en dehors du simple fait de ce caractère autoritaire. Corrélativement, ce pays ne se signale pas par une grande originalité idéologique. Certes il se présente comme divergeant du monde occidental sur plusieurs sujets, comme les questions de société et de mœurs, mais cela ne constitue pas une alternative politique. On ne se rapproche d’une forme d’idéologie prosélyte qu’avec l’Iran, mais ce n’est qu’un cas parmi d’autres dans le monde musulman ; et la dimension iranienne d’un côté, chiite de l’autre, apparaît très largement prépondérante dans son action extérieure.

    Il apparaît donc en définitive que du point de vue des idées et du régime le rapprochement entre Russie, Chine et Iran est passablement circonstanciel, et largement dû à l’existence d’un adversaire commun, occidental. On ne saurait discerner de véritable impérialisme idéologique de leur côté.

    Cela ne les classe évidemment pas comme des petits saints. Il y a chez les uns ou les autres une propension évidente au débordement de puissance, de sorte que dans leur opposition commune aux Occidentaux (en fait, aux Américains) le discernement entre cause et effet soit sujet à débat. Mais ne n’est pas l’effet d’un antagonisme idéologique irréductible, du moins vu de leur côté et de celui des tiers. La volonté de puissance est une chose, l’idéologie une autre. Inversement bien sûr, de trop grands succès de leur côté favoriseraient sans doute un modèle autoritaire de régime ici ou là, mais cela pourrait prendre des formes très variables, faute de modèle.

    Il est par ailleurs patent que la propension occidentale, ou plutôt américaine, à la recherche régulière de l’instauration de la démocratie par la force, est à la fois remarquable par son inefficacité et, à nouveau, une cause majeure de la crainte que cette manie instille non moins régulièrement un peu partout. Le monde arabe a été comme chacun sait le lieu le plus caricatural de la démonstration, le cas du malheureux Iraq étant ici emblématique. Cette démocratisation avait pourtant eu l’air d’opérer après 1945 en Allemagne et au Japon, mais c’était après une guerre à mort radicale, et dans une mesure importante dans les deux pays on renouait avec des situations antérieures à leur dérive agressive. Et en tout cas cet interventionnisme ne fonctionne pas ailleurs. D’autant moins que, comme on l’a dit, dans la perception générale hors Occident la volonté de puissance du supposé libérateur l’emporte sur les motivations démocratisantes affichées. En bref, l’affichage démocratique est ruiné par son identification de fait avec ce qui est perçu à tort ou à raison comme un impérialisme. C’est manifeste notamment en Afrique ou au Moyen Orient, ou sous une forme plus modérée en Amérique latine. Et même là où la dimension stratégique peut favoriser l’identification au camp occidental, voire à la démocratie, celle-ci n’est pas vécue comme une copie impliquant la solidarité – ainsi en Asie du Sud et du Sud-Est.

    Est-ce à dire qu’il n’y ait pas en la matière de soft power ? Ou que les thèmes idéologiques soit sans effet ? Evidemment non. Il est évident que le thème de la démocratie ou plus encore celui de la liberté ont une audience et une résonance, éventuellement fortes. Mais sur ce plan le facteur essentiel reste les évolutions politiques internes, qui peuvent bien sûr être facilitées par une action de rayonnement si elle est appropriée. A condition de ne pas insister sur des facteurs répulsifs comme l’idéologie woke, et cette manie de vouloir imposer une vision des mœurs qui répugne à la plupart des cultures.

    On peut noter par ailleurs qu’en matière économique, notamment de commerce international, une attitude apparemment inverse a prévalu côté occidental. Mais elle était en réalité tout aussi idéologique, et non moins contestable. Toujours par idéologie, on a en effet poussé activement à une ouverture maximale des frontières douanières et autres, et à l’entrée de la Chine puis de la Russie à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), sans aucune réflexion sur la dimension pourtant évidemment stratégique d’un tel commerce, et sur le besoin de se protéger de ces partenaires qu’on vilipendait par ailleurs. Car on croyait avec une naïveté confondante que le « doux commerce » allait déboucher sur la paix, et surtout, dans les pays concernés, sur la démocratie. Le résultat de cette illusion a été de donner à la Chine le moyen d’un formidable bond en avant qui en a fait l’usine de la planète et un compétiteur stratégique de premier plan.

    La mythologie de la supposée croisade des démocraties contre les forces du mal, et le mélange des genres entre relations de puissance et idéologie, sont donc en résumé contre-productives de façon générale, et cela du point de vue même de ses promoteurs. Certes, au niveau international, la dimension idéologique n’a pas disparu, mais à l’époque actuelle ce qui domine est le polycentrisme des puissances, le développement de chacun dans sa logique propre. Face à cette réalité, on ne peut qu’être frappé par le contraste avec le rôle subsistant de l’idéologie dans la vie politique dans ce qu’on appelle Occident. Y compris d’ailleurs au niveau interne, que ce soit par son utilisation croissante par la construction européenne au détriment des réalités nationales, ou par son rôle ravageur dans le déchirement interne américain. Mais en tout cas, sous sa forme conquérante et agressive ce n’est pas un très bon article d’exportation.

    Conséquemment, dans le cas de la guerre d’Ukraine le déterminant principal pour l’attitude à tenir n’est pas la nature des régimes (ce qui n’empêche pas d’avoir une opinion critique sur eux et leurs comportement, et de l’exprimer), mais la dimension internationale, qu’il s’agisse de considérations de droit, d’évaluation des rapports de forces réels ou espérés, ou de la paix possible.

    Pierre de Lauzun (Geopragma, 16 mars 2023)

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  • Les quatre justiciers...

    « Que dire de ses romans, sinon qu'ils sont tous à l'image de leur auteur: haletants, vulgaires, magnifiques ? Bref, vivants, tellement vivants. »

    Jean Mabire, Edgar Wallace, dans Que Lire (tome 5)

     

    Les éditions Auda Isarn viennent de rééditer un roman d'Edgar Walllace intitulé Les quatre justiciers.

    Correspondant de guerre, journaliste, écrivain, Edgar Wallace (1875-1932) travailla également pour le cinéma américain et fut notamment le scénariste du célèbre film King Kong en 1933. Les 4 Justiciers est le premier des 90 romans qui firent de lui, en Angleterre, « le roi du thriller » dans les années 1920-1930.

     

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    " L’inspecteur Falmouth écoute sonner au loin la cloche de Big Ben. En même temps, il regarde fixement la porte derrière laquelle un homme, un ministre, risque sa vie. Pourtant toutes les précautions ont été prises. Toute la machinerie de Scotland Yard est déployée… Dans les rues, la foule stationne, avide de savoir si le ministre mourra à huit heures précises, comme l’ont juré les 4 Justiciers, ces mystérieux inconnus qui se sont donné pour tâche de pallier les insuffisances de la justice des hommes, de lutter contre les criminels qu’elle est incapable de débusquer et de punir, d’éliminer de la surface du globe les parfaites incarnations du mal qui y sévissent en toute impunité.

    L’inspecteur tend toujours l’oreille. Big Ben sonne le dernier coup de huit heures. Le miracle se serait-il produit ? Le ministre aurait-il échappé à la menace… Mais, soudain, un cri déchire le silence revenu ! L’inspecteur enfonce la porte et se rue dans le bureau… "

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  • Giorgio Locchi et le surhomme...

    Le 30 décembre 2022, Rémi Soulié recevait, sur TV libertés, Antoine Dresse, alias Ego non à l'occasion de la publication de deux essais de Giorgio Locchi, Définitions (La Nouvelle Librairie, 2022) et Wagner, Nietzsche et le mythe surhumaniste (La Nouvelle Librairie, 2022).

     

                                         

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  • L'exil des collabos...

    Les éditions du Cerf viennent de publier une étude historique d'Yves Pourcher intitulée L'exil des collabos 1944-1989. Historien, professeur des universités à l'IEP de Toulouse, Yves Pourcher est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la période de l'occupation.

     

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    " Ministres à Vichy, chefs de police, patrons de presse, speakers de radio, acteurs de cinéma ou simples quidams, ils sont partis au mois d'août 1944 dans les wagons de l'ennemi, puis ils se sont cachés. Leur exil a duré 45 ans pour certains ! Yves Pourcher nous offre ici une galerie de naufragés de l'histoire.

    Août 1944. La veille encore, ils étaient ministres, chefs de police, patrons de presse ou vedettes de cinéma. Mais les voilà qui fuient. Ils quittent la France dans les wagons de l'ennemi. Les uns mourront en exil. Les autres reviendront pour chercher refuge dans l'oubli. Certains finiront traqués et jugés. Leurs noms ? Abellio, Bonnard, Déat, Céline, Darquier de Pellepoix... Leurs fautes ? La glorification de Hitler, l'administration de Vichy, la formation des miliciens, la répression des résistants, la déportation des Juifs. Leurs lieux de fuite ? L'Allemagne écrasée et, de là, la Suisse neutre, l'Espagne franquiste, l'Argentine péroniste mais aussi les couvents retirés des Alpes.
    Il fallait Yves Pourcher pour exhumer les archives, les témoignages, les correspondances qui dévoilent l'après-guerre des collabos, les chefs et les seconds couteaux, les célébrités et les anonymes. Dans cette galerie des naufragés de l'histoire, où se mêlent le déshonneur et la nostalgie, le reniement et l'endurcissement, les ultras côtoient les lâches et les profiteurs acharnés, les fascistes incurables. Qu'ils se fassent précepteur des riches, marchand d'huîtres, maître-nageur, rubricard de presse, auteur de science-fiction ou écrivain maudit, ils fuient devant le rouleau de l'opprobre, connaissent la malédiction des vaincus, ruminent leur passé, redoutent l'heure de leur condamnation. Autant d'existences pathétiques à la mesure d'autant de complicités
    criminelles.
    Une enquête inédite et totale. Un livre magistral. Une grande leçon d'histoire sur la France d'hier. "

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  • L'union des droites est-elle un leurre ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Rodolphe Cart, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la question de l'union des droites...

     

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    Pourquoi l’union des droites est un leurre

    Depuis des décennies, la fausse alternance gauche-droite est la base du spectacle politique français. Cette illusion ne cache-t-elle pas la réalité d’un clivage plus profond qu’est l’opposition verticale entre le peuple et les élites ? La dernière livraison de L’Incorrect réunissait pour un entretien les trois représentants « jeunes » des principaux partis politiques de droite avec Guilhem Carayon (LR), Stanislas Rigault (Reconquête !) et Pierre-Romain Thionnet (RN). À cette occasion, le magazine déclarait que cette jeunesse avait le désir de « couper le cordon ». Depuis cet échange, beaucoup de commentateurs ont évoqué une possible « union » pour ces jeunes n’ayant pas les scrupules de leurs prédécesseurs. Ce futur accord des partis de droite est-il souhaitable ?

    Après les victoires de coalitions en Suède et en Italie, le concept d’union des droites est revenu sur le devant de la scène. Selon un sondage Odoxa-Backbone Consultingk de septembre 2022, 68 % des sympathisants du RN et 93 % des électeurs de Reconquête étaient favorables à une coalition LR-RN-Reconquête. En revanche, si 57 % des sympathisants de la droite de gouvernement étaient favorables à s’allier avec le RN en 2019, ils étaient dorénavant une majorité à rejeter une telle perspective. Aussi, 89 % des sympathisants Renaissance favorables à une alliance la situaient avec LR, et, réciproquement, 51 % des sympathisants LR favorables à une alliance l’imaginent avec Renaissance.

    Ces chiffres annonçaient déjà ceux de la réforme des retraites. Selon un sondage Cluster17 pour Le Point, il n’y a que les électeurs d’Emmanuel Macron (7 sur 10) qui soutiennent majoritairement ce projet de réforme, les sympathisants LR (5,8) ainsi qu’une partie des électeurs de Zemmour (4). Ensuite on tombe à 2,5/10 pour les électeurs du RN, à 1,5 pour ceux de Roussel, et à peine à 0,9 pour les mélenchonistes. L’entretien de L’Incorrect confirme ce positionnement puisque Stanislas Rigault souscrit à « 99,9% » à la lecture de Guilhem Carayon et des LR. Contre l’avis des deux autres, Pierre-Romain Thionnet suit la ligne de son parti et s’oppose à cette réforme.

    Sortir de l’« arc républicain »

    Si les trois affirment défendre la « question civilisationnelle », Pierre-Romain Thionnet assure que son « adversaire politique » est le macronisme. Aussi, il dit quelque chose d’intéressant quand il déclare qu’ils appartiennent tous au « même camp ». Ce que corrobore Guilhem Carayon, qui ajoute que « l’avantage de notre génération de droite est que l’on se connaît tous ». Ce faisant, tous mettent involontairement le doigt sur les défauts majeurs de la droite française : elle est – ou est perçue (c’est l’important), quand bien même elle ne l’est pas – comme urbaine, endogame et soumise de fait à l’« arc républicain ».

    Depuis son arrivée massive à l’Assemblée nationale, les tentatives du RN pour devenir un parti comme les autres échouent les unes après les autres. La porte reste fermée pour le RN qui essuie refus sur refus de la part de ces « alliés présumés naturels » que sont les LR. Alors que le RN joue le jeu en votant des textes dont l’importance dépasse les simples clivages politiques, la NUPES, quant à elle, s’abstient toujours dès qu’il s’agit d’un texte ou proposition de loi provenant de l’autre côté de l’hémicycle. Tout ce beau monde s’abrite derrière l’argument de l’« arc républicain ». « Le regroupement du centre et des modérés face aux extrêmes, c’est exactement l’idée de la “Troisième force” sous la IVe République », rappelle Mathias Bernard. Et gare à ceux qui franchiraient le Rubicon comme Charles Millon en 1998 à la présidence de la région Rhône-Alpes, puisque ce dernier, en acceptant les voix du FN, était devenu un pestiféré – et cela même pour la droite « républicaine ».

    Le bloc bourgeois ennemi du camp national

    Une partie du peuple en a marre de ce spectacle d’un monde politique qui simule une opposition fictive et « frivole » (Michel Clouscard). Les deux sondages précédents confirment que le clivage horizontal n’aura servi qu’à masquer une opposition entre deux blocs sociaux (les blocs élitaire et populaire). Pendant que les godillots de l’« alternance unique » (Jean-Claude Michéa) simulaient de se battre sur des sujets sociétaux comme l’islam, la PMA ou le mariage des homosexuels, le parti de l’extrême centre (de EELV aux LR) en a toujours profité pour mener son agenda antinational de destruction de l’industrie par l’Union européenne et du remplacement du peuple par l’immigration.

    L’union des droites fait encore partie de ses manigances censées faire croire au peuple qu’il reste une solution par la voie légale, démocratique, élective. Elle serait là pour représenter un spectacle gauche-droite auquel les Français croient de moins en moins. En réalité, une guerre civile « larvée », dont les Gilets jaunes ne furent qu’un soubresaut, continue de grossir. Ce conflit entre les deux blocs rejouera bientôt ces luttes anciennes du sacerdoce et de l’Empire, des gallicans et des ultramontains, des adeptes de l’Ancien régime et de la Révolution.

    Bien que séparés en apparence, l’éternel marais – autre nom du centrisme français – représente cette classe dominante et antipatriotique aux manettes. La guerre civile qui vient opposera les partisans du temple de la République contre ceux de la maison France. Maintenant que la supercherie du clivage droite-gauche est de plus en plus visible, la seule chance du bloc élitaire réside dans la fusion de ces forces dont Macron fut l’exemple parfait avec la réunion des deux bourgeoisies. Ce parti de l’Ordre est la partie organique de la classe dominante actuellement au pouvoir, et que les bourgeois conservateurs (LR et une partie de Reconquête !) ne quitteront jamais par intérêts sociaux.

    Notre époque ressemble à celle de la révolution de 1848. Si le régime de l’époque assurait la domination de la bourgeoisie, c’est surtout la haute bourgeoisie financière qui dominait la petite bourgeoisie productive – ce qui poussa la Garde nationale à fraterniser avec les classes populaires en février 1848. Comme aujourd’hui, cette nouvelle droite bourgeoise – pas celle issue de l’Ancien Régime et du pouvoir foncier – est hostile au peuple du travail. Si la chute de Louis-Philippe marqua la fin de la dynastie capétienne, la fin de Macron (ou de son successeur) annoncera la fin de la dynastie bourgeoise en France. Et comme la révolution de 1848 sonna le déclenchement du Printemps des peuples en Europe, on peut espérer que la révolte de la nation française entraînera un mouvement de fond pour le Vieux Continent.  

    L’extrême centre contre l’union des extrêmes

    Jusqu’en 1914, la République a été incapable de réconcilier la gauche et la droite, et ce fut seulement au moment de la Première Guerre mondiale, grâce à l’Union sacrée, qu’elle put revendiquer une certaine légitimité. Ce n’est donc pas 1789 qui fonde la République, mais bien seulement la Victoire de 1918, mais qui n’a jamais répondu aux questions politiques que soulevait la Révolution. Si la Révolution se fit au nom de valeurs universelles dont se revendique la gauche, ce sont bien des valeurs locales (celles de la droite) comme le nationalisme qui ont sauvé la France. Si la République est légale, elle aussi est illégitime.

    Le pacte qui liait les Français au régime de la Ve République est rompu. La lente soumission du gouvernement et du Parlement au président de la République, la sécession des élites françaises, puis l’ascendant pris par l’UE (juges communautaires, Banque centrale européenne, droit européen) ont peu à peu éloigné le peuple de la République. Or, le fond du débat repose sur cette distinction de la légitimité et de la légalité. Depuis le général de Gaulle, la République ne réussit plus à conserver l’ordre symbolique qui pouvait la rendre légitime. Sous parapluie européen, les élites françaises continuent la destruction de la France : vente à la découpe des fleurons publics, avènement du tout-tertiaire, libéralisation des échanges et immigration de masse.

    La République, et avec elle sa classe dirigeante, a rompu le contrat social qui la liait au peuple à la suite de la Révolution. Depuis 50 ans, le peuple français se bat pour conserver ce pacte concret et qui avait le mérite d’exister, mais le bloc élitaire fait tout pour accéder à une autre réalité universelle et virtuelle (européisme, dissolution des frontières et libéralisme). Comme le rappelle l’historien Fabrice Bouthillon, le seul moyen pour gouverner un pays si fracturé est le gouvernement au « centre ». En France, il y a deux centrismes : l’extrême centre par rejet des extrêmes (ni gauche ni droite) ou l’union des extrêmes par addition des extrêmes (de gauche et de droite). Et ce sont ces couples qui déterminent depuis plus de deux siècles la politique française : Thermidor et le Directoire, l’orléanisme et le bonapartisme, le radicalisme et le boulangisme, l’européisme et le gaullisme, le macronisme et le souverainisme.

    Faire l’union des droites, c’est faire sien un état d’esprit plus qu’un programme. C’est prendre la défense de l’ordre établi et participer à ce carnaval gauche-droite dont raffolent les véritables possesseurs de la richesse et du pouvoir. Au contraire de l’union des extrêmes qui doit tenir compte des deux bords – on se souvient de la politique gaulliste –, l’extrême centre n’a besoin que de lui-même. Or, c’est une stratégie de rupture et non de réforme qu’il faut à la France. Il faut trancher ce nœud gordien et mépriser l’« arc républicain », car comme disait Groucho Marx : « Jamais je ne voudrais faire partie d’un club qui accepterait de m’avoir pour membre. »

    Rodolphe Cart (Site de la revue Éléments, 10 mars 2023)

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