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tariq ramadan

  • Feu sur la désinformation... (320)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, et Nicolas Faure.

    Au sommaire :

    • 1 : L’image de la semaine
      Après l’assassinat du directeur du pôle asile du Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile de Pau par un migrant, les médias se sont fait étonnement discret.
    • 2 : Islamo-gauchisme : une réalité malgré le déni
      Frédérique Vidal a récemment annoncé vouloir lancer une enquête sur l’influence et les conséquences de l’« islamo-gauchisme » dans les universités. Cette décision a provoqué un scandale politico-médiatique. Pourtant, l’islamo-gauchisme est bien une réalité.
    • 3 :  Revue de presse
    • 4 : Génération Identitaire : les mensonges face à la mobilisation
      Samedi dernier, Génération Identitaire organisait à Paris une manifestation contre la dissolution voulue par Gérald Darmanin. Et les médias ont évidemment été gênés de voir que tout s’était bien passé. Au point que certains journalistes ont inventé un salut nazi pour attaquer la mobilisation.

     

                                              

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  • Islamogauchisme dans les universités ? Une réalité depuis 20 ans...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Olivier Vial, cueilli sur le site du Figaro Vox et consacré à la polémique autour de l'islamogauchisme à l'université. Olivier Vial est directeur du Centre d’Etudes et de Recherches Universitaire.

     

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    Universités : « l’islamogauchisme ? Une réalité depuis 20 ans »

    A-t-on encore besoin d’une enquête pour prouver la montée de l’islamogauchisme à l’université, comme le demande la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal? La violence et le nombre de protestations qui ont suivi cette annonce ne suffisent-ils pas à démontrer l’ampleur du phénomène. Si ce dernier n’était pas aussi important et installé, personne n’aurait à craindre une telle démarche?

    Or, les indignations surjouées de nombre d’universitaires en études post-coloniales - dont certains revendiquaient et affichaient pourtant depuis des mois la mention #islamogauchiste dans leur biographie twitter - révèlent bien qu’ils sont nombreux à la redouter.

    Quant à la Conférence des présidents d’université, pour continuer à dissimuler le problème sous le tapis et éviter que l’on s’intéresse à ce qui se passe sur ses campus, elle instruit l’habituel procès en diabolisation dénonçant, dans un communiqué, l’utilisation d’un terme qu’il conviendrait de «laisser sinon aux animateurs de Cnews, plus largement à l’extrême droite qui l’a popularisé.»

    Mais de quelle extrême droite parle la CPU? Celle de Manuel Valls qui fut l’un des plus réguliers critiques de l’islamogauchisme? Celle de Claude Askolovitch du Nouvel Observateur qui dénonçait les «gauchistes d’Allah»? Celle de la militante Caroline Fourest qui, la première, révéla avec force les connivences d’une partie de la gauche avec Tariq Ramadan ?

    Pour ne pas déranger les instances universitaires et surtout ne pas apparaître d’extrême droite à ses yeux, sommes-nous obligés de tout accepter? Accepter que l’Université Paris 1 supprime en 2019 un cycle de formation sur la «prévention de la radicalisation» animé par Mohamed Sifaoui à la suite des pressions exercées par des syndicats et des universitaires?

    Accepter qu’à Lille, les représentations de la pièce écrite par Charb, le directeur de Charlie Hebdo assassiné lors des attentats de 2015, soient annulées au motif qu’elles seraient islamophobes? Accepter que des étudiants de Sciences Po organisent depuis 2016, le «Hijab day» pour inciter à porter le Hijab et ainsi banaliser son usage? Accepter que l’Université Lyon 2 cautionne un colloque intitulé «Lutter contre l’islamophobie» organisé en partenariat avec le Collectif Contre l’Islamophobie en France?

    Accepter qu’un professeur de sociologie soit poussé à la porte de son laboratoire de recherche à Limoges pour avoir dénoncé la présence d’Houria Boutledja, la sulfureuse fondatrice du parti des indigènes de la République dans une formation proposée par son établissement?

    Tout accepter par peur de stigmatiser n’est-ce pas déjà sombrer dans un des travers de l’islamogauchisme? Le journaliste du Monde Jean Birenbaum, dans un article de novembre 2020, montre comment par réflexe tiers-mondiste, une partie de la gauche a développé une forme d’indulgence vis-à-vis de l’islamisme.

    Certains, de façon cynique, ont vu là une opportunité, une stratégie possible. Dès le milieu des années 90, une partie de l’extrême gauche trotskiste très présente dans les universités va ainsi commencer à théoriser la nécessité de se rapprocher des mouvements islamistes. Déçue par les classes populaires, qu’elle accuse de devenir de plus en plus conservatrices et d’être, de fait, incapable de porter la révolution, elle va se tourner vers les minorités et percevoir l’islamisme comme une arme et un allié efficaces pour lutter contre «l’impérialisme occidental».

    Au début des années 2000, les campus vont ainsi devenir le lieu où cette «union» va s’épanouir. La gauche altermondialiste, proche du NPA, qui alors tient le haut du pavé va s’amouracher de Tariq Ramadan et de ses fidèles dans les universités.

    En 2002, les étudiants musulmans de France, association proche des frères musulmans, font une percée remarquée lors des élections au CROUS (résultats dénoncés à l’époque par l’UNEF avant que le syndicat ne devienne le marche pied de cette mouvance). En décembre de la même année, sur pression d’associations et de syndicats, le conseil d’administration de l’Université Paris 6 appelle au boycott des universités et des universitaires israéliens. L’alliance est scellée.

    La seconde guerre du Golf, en 2003, leur offre l’occasion d’apprendre à manifester côte à côte. En 2004, le service d’ordre de plusieurs organisations d’extrême gauche étudiante sera même mobilisé pour encadrer la manifestation pro-voile, organisée par le très radical Mohamed Latrèche du Parti Musulman de France.

    Cette alliance entre islamiste et «gauchistes» ne s’est pas développée que dans la sphère militante, elle a également prospéré idéologiquement forgeant des concepts «universitaires» susceptibles de remplir l’arsenal militant de ceux qui veulent renverser notre modèle de société.

    Ainsi dès 2003, le développement du concept d’islamophobie a été rendu possible par la rencontre d’universitaires, comme Vincent Geisser, chercheur au CNRS et d’associations militantes. Ces dernières vont alors multiplier les rencontres et les conférences avec comme objectif d’imposer le terme dans le débat public.

    Aujourd’hui, le développement des études décoloniales poursuit le même objectif: offrir un vernis scientifique aux combats politiques du moment. Ainsi, les concepts de «racisme systémique», de «privilège blanc», de «blantriarcat» sont sitôt «produit» par l’université reprise par des activistes pour dénoncer l’État, la Police, le Patriarcat et nourrir le ressentiment des minorités contre nos sociétés dans l’espoir de les inciter à se soulever. Vieil espoir trotskiste.

    Cela fait plus de vingt ans que l’islamogauchisme a fait son nid dans nos universités. Il prospère à l’ombre des petites lâchetés des instances universitaires qui ont souvent choisi de composer avec lui et de pratiquer ce qui ressemble à des «accommodements raisonnables».

    En 2003, alors que les incidents et les revendications communautaires se multiplient, la vice-présidente de l’Université Paris 13, va, à l’occasion d’un colloque organisé par la CPU, proposer par exemple de mettre en place des commissions laïcité pour négocier l’application de ce principe dans les établissements. «9 étudiantes de Villetaneuse ont refusé de participer à l’enseignement obligatoire du sport, car elles portaient le foulard. Nous avons trouvé un compromis: elles sont d’accord pour suivre la réglementation sportive qui interdit le port du voile pour la course et la gymnastique, tant qu’aucun homme n’est présent. Nous avons donc formé un groupe uniquement féminin» se félicite-t-elle.

    Alors a-t-on vraiment besoin d’une enquête pour mesurer l’influence de l’islamogauchisme dans nos universités? Peut-être! Mais la confier au CNRS et aux membres de l’alliance Athéna qui n’ont jamais fait preuve de grande lucidité en la matière, cela ressemble surtout à un nouveau moyen d’enterrer le sujet !

    Olivier Vial (Figaro Vox, 18 février 2021)

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  • Un certain monsieur Plenel...

    « Il faudra tout de même qu’on sache qui est vraiment ce monsieur Plenel » François Mitterrand

    Les éditions Plon viennent de publier une enquête de Laurent Huberson sur Edwy Plenel. Journaliste, Laurent Huberson est auditeur de l'Institut des Hautes Études de Défense nationale et de l'Institut des Hautes Études de Sécurité intérieure.

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    " Le parcours d'Edwy Plenel, journaliste redoutable et redouté, ne cesse d'étonner. On le croyait fini en 2005 après son éviction du Monde. Treize ans plus tard, voici l'investigateur aux fameuses moustaches au sommet de son pouvoir. Fondateur de Mediapart, cet ancien trotskiste, aujourd'hui partisan d'une République "radicale", pratique un journalisme très politique. Au service de quelle idéologie ? Avec quels moyens, parfois retors, a-t-il réussi à sortir les grandes affaires politico-financières de ces dernières années, de Nicolas Sarkozy à Liliane Bettencourt ou encore Jérôme Cahuzac ? A quoi tient la sulfureuse polémique autour de Tariq Ramadan ? Une enquête riche et passionnante qui dévoile les secrets d'une personnalité hors du commun. "

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  • Feu sur la désinformation... (173)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et dirigée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, avec le concours d'Hervé Grandchamp.

    Au sommaire :

    • 1 : The Voice met les voiles
      Mennel Ibtissem une candidate de the Voice est rattrapée par ses anciens tweets. La chanteuse voilée avait posté sur les réseaux sociaux des commentaires « complotistes » et affichait son soutien à des associations islamistes. Des positions qui ont provoqué le départ de la concurrente après une semaine de polémique médiatique.
    • 2 : Le Zapping d’I-Média
      « Et si Emmanuel Macron était un réfugié afghan à Calais ? » c’est le titre de la séquence diffusée par le média AJ+. Ce média créé par Aljazeera et qui s’adresse aux « générations connectés » met en scène Emmanuel Macron tout au long d’un parcours migratoire. Si Macron était expulsé « il aurait pu être menotté, bâillonné, privé de ses sens »....

    • 3 : Conflits raciaux en Italie, entre occultation et censure
      Attentat en Italie contre des migrants. Les médias français ont cherché à occulter les origines de l’acte de Luca Traini. Le meurtrier cherchait à venger l’assassinat d’une jeune italienne de 18 ans Pamela. Elle avait été retrouvée découpée en morceaux dans les valises du suspect. En France le site Fdesouche a relayé l’information. Dans les commentaires de l’article, on pouvait lire quelques appels au meurtre ou à la « haine ». Pour le journaliste de RMC Jean Jacques Bourdin c’est une raison suffisante pour demander la fermeture du 1er site de réinformation...
    • 4 : Les tweets de la semaine
      Indignation à géométrie variable pour Aude Lancelin ! L’ancienne journaliste de Marianne et de l’Obs’ s’indigne de la « calomnie » contre Che Guevara tout en se réjouissant de la pseudo impuissance sexuelle de Céline.
    • 5 : Ramadan: de la Chaire à l’enfer
      Cette année Ramadan tombe en février, il y a peu il était décrit comme un « grand intellectuel ». Il est désormais un « islamologue controversé » ou encore un « théologien Suisse »...

     

                                   

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  • La nouvelle guerre civile...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Eric Werner, cueilli dans le n°106 d'Antipresse, lettre d'information de Slobodan Despot, dont la nouvelle formule sera disponible en début d'année 2018. L'auteur évoque une Europe en passe de devenir une terre de confrontation entre deux idéologies totalitaires, l'islamisme et le féminisme...

    Auteur d'un essai essentiel, L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015), Eric Werner vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

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    La nouvelle guerre civile

    On assiste à l’heure actuelle au déferlement d’une marée féministe, mais en face il y a la marée islamiste. D’une certaine manière, le féminisme et l’islamisme sont les deux grandes idéologies de notre temps. Il en existe d’autres, assurément, mais leur importance est comparativement moindre.

    Il y a une trentaine d’années, l’historien allemand Ernst Nolte avait écrit un ouvrage intitulé: La guerre civile européenne, 1917–1945: national-socialisme et bolchevisme[1]. On serait tenté aujourd’hui d’écrire: islamisme et féminisme, la nouvelle guerre civile européenne.

    Islamistes et féministes mènent parfois des combats communs. L’ennemi de mon ennemi est mon ami. Voyez ainsi l’attitude de certaines féministes sur la question du voile intégral. La haine de l’ancien monde l’emporte ici sur certaines peurs: peurs, objectivement parlant, pourtant, bien fondées (il est permis au moins de le penser). La dénonciation du sexisme par les féministes est à géométrie variable. On l’a bien vu encore lors des émeutes sexuelles de Cologne en 2015.

    Pour autant, ces deux idéologies n’en sont pas moins fondamentalement antagonistes.

    Il n’est pas inutile à cet égard de revenir sur l’affaire Ramadan. Cette affaire est emblématique à plus d’un titre. Elle montre, en particulier, quelque chose d’important, à savoir que la seule force aujourd’hui capable d’équilibrer l’islamisme en Europe occidentale, autrement dit de le tenir en échec, est le féminisme. Ailleurs (en Russie, en Inde, au Moyen-Orient même, etc.), il en va peut-être autrement. Mais on ne parle pas de ce qui se passe ailleurs. On parle de ce qui se passe en Europe occidentale. S’il n’y avait pas aujourd’hui le féminisme, si le féminisme n’existait pas, l’islamisme, à coup sûr, aurait probablement aujourd’hui partie gagnée dans nos pays. Il y régnerait d’ores et déjà en maître. Car, à part le féminisme, qu’est-ce qui lui fait encore obstacle: les anciennes Églises chrétiennes désormais converties à l’islamophilie? Il est assez manifeste que non. L’État laïc et républicain? Le dernier roman de Houellebecq, Soumission, décrit bien la mécanique inexorable d’assujettissement progressif dudit État à l’islamisme. Mais il y a le féminisme.

    Jusqu’ici, Ramadan volait de succès en succès. Toutes les portes lui étaient ouvertes (médias, universités, etc.). Il pouvait tout dire, tout se permettre. Ce grand islamologue, disait-on. Sauf que, pour une fois, il s’est cassé les dents. A force de fréquenter l’ancien monde, il s’était mis en tête que les choses iraient désormais très vite. L’ancien monde? Une pomme pourrie. Mais il avait oublié le féminisme. Là, pour une fois, Ramadan a trouvé à qui parler. Un adversaire à sa mesure, en quelque sorte.

    On ne se fait pas trop de souci pour Ramadan lui-même. Tôt ou tard il rebondira. Il n’est même pas sûr qu’il passe par la case prison. Salafisée (ou qatarisée) comme elle l’est aujourd’hui, jamais la France officielle n’osera l’envoyer derrière les barreaux. Ou ce serait très surprenant. Mais ce qui vient de se passer n’en laissera pas moins des traces. Ce n’est pas impunément qu’on se heurte aujourd’hui au féminisme. C’est une idéologie puissante. L’islamisme aussi, bien sûr. Mais justement l’islamisme trouve ici sa limite.

    En théorie, le féminisme se bat pour l’égalité entre les sexes. Il est bien connu depuis Tocqueville (De la Démocratie en Amérique) que lorsque des groupes, quels qu’ils soient, en viennent à se mobiliser pour l’égalité (sociale, raciale, etc.), l’égalité est d’ores et déjà une réalité. Les groupes en question sont toujours en retard en ce domaine: en retard sur l’évolution objective. Il subsiste, certes, aujourd’hui encore, certaines inégalités entre les sexes. Mais souvent au détriment des hommes. En Suisse, par exemple, les hommes sont astreints au service militaire, et non les femmes. C’est un lourd handicap pour les jeunes hommes, en particulier ceux poursuivant des études universitaires. En Suisse toujours, l’âge de la retraite est plus bas pour les femmes qu’il ne l’est pour les hommes, alors même que l’espérance de vie des premières est plus élevée que celle des seconds. En contre-partie, il est vrai, les salaires des femmes sont souvent moins élevés que ceux des hommes. Le principe, à travail égal salaire égal, n’est pas toujours respecté. Etc.

    Laissons cela. Le véritable objet du combat féministe n’est pas l’égalité entre les sexes (même s’il en est souvent question). Il est, ce qui est différent, de changer la nature humaine. On veut créer un homme nouveau (au féminin comme au masculin). C’est ce que résume l’idéologie du genre. En ce sens, le féminisme rejoint le marxisme-léninisme. Car changer la nature humaine, c’est aussi ce que voulaient Marx, Lénine, Staline. Le genre s’enseigne aujourd’hui dans les écoles et les universités d’Europe occidentale comme, autrefois, le diamat [2] dans les universités de Russie et d’Europe orientale. C’est notre petit diamat à nous.

    Le féminisme est aujourd’hui ce qui fait barrage à l’islamisme. On lui en saurait évidemment gré s’il n’était lui-même, comme on le constate de plus en plus, porteur de risques graves en termes d’atteintes à l’État de droit et aux libertés personnelles. L’hystérie qui caractérise les campagnes actuelles contre le «harcèlement», les surenchères qui l’accompagnent (pogroms à répétition, lois «attrape-tout», etc.), en témoignent assez. La charia d’un côté, l’idéologie du genre de l’autre. Se résignera-t-on indéfiniment à ne pouvoir combattre une espèce donnée de totalitarisme que par une autre ?

    Eric Werner (Antipresse n°106, 10 décembre 2017)

     NOTES

    1. Trad. fr. Éditions des Syrtes, 2000 (rééd. Librairie Académique Perrin, 2011.)
    2. Diamat = matérialisme dialectique. Le mot désignait le corpus idéologique stalinien.
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  • La mauvaise chute de Tariq al-Capone...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Slobdan Despot consacré à Tariq Ramadan et cueilli dans les n°103 et 104 d'Antipresse, sa lettre d'information, dont la nouvelle formule sera disponible en début d'année 2018. Éditeur et écrivain, Slobodan Despot vient de publier, après Le miel (Gallimard, 2014), un deuxième roman intitulé Le rayon bleu (Gallimard, 2017).

     

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    La mauvaise chute de Tariq al-Capone

    J’ai toujours considéré inélégant de tirer sur l’ambulance. Mais que faire lorsqu’on est en guerre et qu’on se rend compte que l’adversaire utilise les ambulances pour exfiltrer ou relocaliser ses troupes? On l’aura deviné, je parle du panier à salade qui a évacué M. Tariq Ramadan de l’arène des idées pour le transférer sur le terrain du procès de mœurs. Malgré la gravité des accusations qui pèsent sur lui, certains en éprouvent comme une frustration. Comme si Frère Tariq, tel Fantômas, s’était encore une fois tiré d’affaire avec son habileté d’anguille.

    Voici quelques jours, mon ami Christophe Calame publiait sur les réseaux sociaux quelques phrases de journal consacrées à l’affaire. «La formule était cinglante — «Tariq Ramadan est tombé, comme sont tombées Mossoul et Raqqa» — mais hélas incomplète. Tariq Ramadan est tombé comme Mossoul et Raqqa seraient tombées non en tant que bastions de l’État islamique, mais, par exemple, en tant que lupanars (ce qu’elles étaient sans doute aussi, mais collatéralement).

    Loin de moi l’idée de considérer le viol comme une faute collatérale. Je laisse ce mépris aux copains et défenseurs parisiens de M. Strauss-Kahn. Mais Tariq Ramadan est «tombé», tel Al Capone piégé par le fisc, à cause d’un sous-produit de son industrie, et non à cause du «cœur du business» qu’il serait urgent de démonter.

    La focalisation sur le comportement privé du petit-fils de Hassan al-Banna (et petit-neveu du «réformiste libéral» et dissident Gamal al-Banna dont il ne se réclame guère) risque d’escamoter son action publique et la subversion rétrograde qu’il a efficacement contribué à répandre. Bref, ce magistère idéologique (n’allons pas l’appeler spirituel, car on peine à déceler une quelconque spiritualité dans sa rhétorique) qui continue d’intimider une part significative de l’opinion et d’en électriser une autre. Et qui a sans doute efficacement prolongé son impunité sur un chemin parsemé d’abus inaperçus par des yeux qui regardaient ailleurs et de dénonciations non entendues par des oreilles soudain fermées à la détresse féminine. Quand il ne s’agissait de pure et simple indolence, comme celle de Mme Brunschwig-Graf qui, alors ministre de l’instruction publique du canton de Genève, s’était refusée à agir «sur la base de rumeurs» — mais qui ne s’est nullement empressée non plus de faire vérifier lesdites rumeurs. (Fort heureusement, elle allait par la suite devenir présidente de la Commission fédérale contre le racisme, et donc en mesure de sévir contre ceux qui auraient eu l’idée de creuser ces rumeurs et d’en tirer d’abusives conclusions.)

    Des vertus de la présomption d’innocence

    Des mois, voire des années durant, les responsabilités pénales hypothétiques du professeur genevois vont donc occulter ses responsabilités morales établies. Car, en attendant son verdict, M. Ramadan bénéficie de toutes les protections que lui confère l’État de droit, à commencer par la présomption d’innocence que défendront jusqu’à la dernière miette de vraisemblance certains des avocats les plus prestigieux et les plus coûteux du barreau genevois.

    Que Frère Tariq soit condamné ou non au terme du processus n’est même pas si important que ça. On savoure d’ores et déjà l’ironie de l’histoire qui a fait de cet islamiste sophistiqué le héros d’une nouvelle affaire Dreyfus. Les camps sont formés et ne démordront pas de leurs positions. En cas de condamnation, ceux qui ont d’emblée crié au «complot sioniste» n’y verront bien entendu que la confirmation de leur thèse. En France, la polémique entre la tribu Médiapart (pro-TR) et la tribu Charlie Hebdo (anti-TR) a rapidement enflé jusqu’à l’accusation d’appel au meurtre!

    En attendant, plus personne ne songera à s’occuper du message central du gourou.

    Mais quel est-il, au fait? Dans le brouhaha de ces derniers jours, on l’a complètement perdu de vue. Pour peu qu’on ait jamais eu envie de le voir, de le décomposer et de le résumer. Ce travail-là eût été une affaire d’intellectuels et d’universitaires — en particulier lorsqu’il s’agit, comme ici, d’un intellectuel particulièrement bien verni. Mais les intellectuels du domaine francophone semblent fort réticents à croiser le fer avec Frère Tariq. Ils préfèrent laisser cette périlleuse besogne à des politiques bien moins outillés pour cela. Quand ils ne pétitionnent pas en sa faveur.

    Petite parenthèse: de l’impunité des «grands intellectuels»

    La levée de boucliers en faveur de Frère Tariq est à l’opposé diamétral du lynchage public de Harvey Weinstein, alors que les deux étaient accusés, à peu près, des mêmes forfaits. C’est que l’un est un «grand intellectuel» dénoncé par des femmes sans éclat tandis que l’autre n’est qu’un jouisseur et un faiseur de fric accusé par des stars. Et peu importe si l’intellectuel ne laisse qu’un sillage de brumes et de louvoiements alors que le jouisseur, tout poisseux qu’il est, a produit certains des meilleurs films de ces dernières décennies.

    C’est étrange, chez les intellos, ce besoin de se décerner des alibis, aurait observé Michel Audiard. On songe à la vague de compassion dont a bénéficié parmi ses pairs cet autre enfumeur de haut vol, le philosophe marxiste Louis Althusser, lorsqu’il étrangla sa femme. Ce crime sordide, qui n’aurait valu à un homme ordinaire que honte et répudiation publique, a fait d’Althusser un mythe, surtout parmi ceux qui ne l’avaient jamais lu. Le médiocre rimailleur Cantat, en orchestrant son come-back, s’est sans doute cru lui aussi membre de la caste des druides lévitant au-dessus de la loi commune. Mais il s’est pris les pieds dans le tapis: il n’avait pas pondu suffisamment de théories obscures pour que le meurtre sauvage de Marie Trintignant lui soit tout à fait pardonné.

    Coincer l’escobar

    Mais revenons au message central de Frère Tariq, à son rôle dans le dispositif. Il n’est jamais aisé de cerner la tactique d’un jésuite: nos amis catholiques en savent quelque chose avec leur dernier pape (et le premier issu de la Compagnie de Jésus). Or Frère Tariq est, par son habileté rhétorique et ses procédés, l’autre grand jésuite qu’il nous reste. Il mérite même, stricto sensu, l’appellation d’escobar, ce substantif que nous a légué Blaise Pascal en exposant dans ses Provinciales l’hypocrisie du pompeux jésuite espagnol Antonio Escobar y Mendoza (1589-1669).

    «ESCOBAR, subst. masc. — Personnage hypocrite, sachant utiliser d'adroits subterfuges pour arriver à ses fins ou les justifier.»

    Nous n’avons plus hélas de logiciens suffisamment lucides et déterminés pour disperser comme un Pascal la jésuiterie orchestrée par Tariq Ramadan et son entourage de frères musulmans. Nous n’avons même plus, du reste (et c’est plus grave), suffisamment de foi en la logique. Il nous faut nous débrouiller tout seuls avec nos modestes moyens intellectuels et notre aversion pour l’esbroufe, cet instinct précieux que toute notre éducation supérieure s’emploie à endormir.

    En pareil cas, le mieux est de ramener le cas à ses éléments fondamentaux. Quelles sont les fins de Tariq Ramadan? Rendre l’ordre social et politique de l’islam légitime en Europe — et bien entendu légal dans un deuxième temps. Et ses adroits subterfuges? Essentiellement, le double langage, «la duplicité des polémistes jésuites, qui usent de deux poids et deux mesures selon qu’ils ont affaire à leurs amis ou à leurs ennemis».

    Il n’est qu’à comparer la dissonance entre les propos tenus par Frère Tariq à l’attention de sa clientèle européenne et ceux qu’il réserve au «B2B», à sa communication intraislamique. D’autres l’ont relevée, il suffit de prendre la peine de lire.

    Pour amadouer son public infidèle et le convaincre de la compatibilité de l’ordre politique islamique avec l’état de droit européen, Ramadan convoque une vaste et superficielle bibliographie de philosophes occidentaux, mais en évitant soigneusement de mettre en question ses propres dogmes fondamentaux. Il insinue, sous-entend, calomnie (au sens pascalien). Détail hautement significatif: le retour perpétuel de la phrase «vous me faites dire ce que je n’ai pas dit» — due sans doute à la malveillance de ses détracteurs, mais également à la cautèle dont il entoure ses propres positions.

    Pour lever cette brume, pourtant, il y a un procédé simple: mettre le maçon au pied du mur. Lui demander, par exemple, de préciser si le meurtre pour Dieu demeure toujours plus halal que le meurtre par emportement, comme il l’illustre dans un livre de 1995, faisant passer avec art la violence djihadiste pour une non-violence «théologique».

    Plus concrètement encore, insister pour obtenir du rhéteur une condamnation sans équivoque (par oui ou par non) de la lapidation des femmes, en tant que symbole des pratiques les plus incompatibles qu’on puisse imaginer avec un ordre social moderne. C’est cette condamnation fondamentale qu’aucun adversaire de Ramadan n’a jamais pu obtenir. Tout juste a-t-il concédé l’idée d’un «moratoire» sur les châtiments corporels — et l’a traduite par un appel monocorde conçu pour ne pas être entendu là où il aurait dû l’être.

    Imagine-t-on un responsable politique européen, un intellectuel, un prof par surcroît, proposer un «moratoire» (et non un rejet net et absolu) sur les pratiques pédophiles?

    Il est étrange que tous ses interlocuteurs aient passé outre cette hypocrisie fondamentale sans jamais lui opposer la politique de la chaise vide. Une femme lapidable, pourtant (avant ou après le fameux «moratoire»), est par excellence aussi une femme violable. L’argument a étrangement échappé aux féministes indignées, qui ont préféré dénoncer la «culture du viol» qui serait la marque de «l’homme» en général, plutôt que la signature du prédicateur moraliste en particulier, quelle que soit sa religion.

    Dans le monde dit musulman, heureusement, tout le monde n’a pas cette myopie de dindes et d’autruches. Certain.e.s ont très clairement établi le rapport entre un comportement et l’idéologie qui le sous-tend. A commencer par les victimes elles-mêmes.

    Comme on pouvait s’y attendre, la déchéance de l’islamiste le plus présentable dans les salons et les auditoires a encore donné lieu à des exercices comiques de contorsion bien-pensante. D’accord, il a agressé des femmes (à moins que ce soit un «complot sioniste», qui sait?), mais enfin, quel homme ne l’a pas fait — ou pas eu envie de le faire? Toutes les sociétés sont phallocratiques, clament les puritain.e.s islamogauchistes, toutes reposent sur une «culture du viol», réel ou symbolique, et T. R. n’est que le dernier arrivé dans un club d’abuseurs qui accueille déjà du beau linge: éminents producteurs et réalisateurs de cinéma, journalistes, etc.

    La condition d’entrée au Rape club est simple: il suffit d’être adulte et de sexe masculin. Tout homme, tôt ou tard, finira par frapper à la porte…

    Par cette vaste généralisation, on détourne les regards de ce qui est le véritable éléphant dans la pièce. Et si l’on focalisait un peu? Si, en dehors de l’appartenance sexuelle, on se penchait aussi sur l’idéologie ouvertement professée par cet abuseur à répétition présumé?

    Une fable édifiante

    Revenons pour commencer sur une leçon parcourue un peu trop vite. Je mentionnais la semaine dernière un ouvrage que Frère Tariq avait publié au Liban en 1995. On y lisait un exemple édifiant tiré de la vie d’Ali. Au moment d’achever un ennemi vaincu qui lui avait craché au visage, le guerrier avait rengainé son épée et laissé vivre l’homme terrassé. Devant les récriminations outrées de ses très humanistes compagnons d’armes, Ali leur explique: «Il m’a craché au visage et j’ai craint de le tuer par colère vis-à-vis de ma propre personne et non pour Dieu.»

    Cet épisode, selon Frère Tariq, «permet de mesurer combien les premiers compagnons du Prophète (bsl) étaient proches de Dieu et l’aimaient de tout leur être». Car il permet de répondre à une question capitale: «Est-ce parce qu’on nous insulte personnellement qu’on réagit ou est-ce l’exigence de justice et de dignité devant Dieu qui est notre moteur?»

    Ainsi donc, en se bornant à rappeler un exemple canonique, notre escobar en arrive sans se mouiller personnellement (l’esquive étant sa grande spécialité) à justifier la violence djihadiste. Car ce conte moral est évidemment destiné à être lu à rebours. Ce qu’il n’est pas permis de faire à cause de nos sentiments propres, il est permis de le faire au nom de la «dignité» de Dieu. Tuer l’ennemi à terre n’était pas un problème pour Ali: c’était de le tuer pour soi-même et non en tant qu’offrande à Allah. Or de la permission à l’injonction, il n’est qu’un pas.

    Les récits abondent sur la placidité des djihadistes qui, lors des attentats, poignardent ou fusillent des femmes et des enfants sans haine particulière, juste parce que leur sang serait censé satisfaire la justice d’Allah. C’est pas pour eux, c’est pour Dieu. Ça change tout! Et l’on ne manque pas non plus de témoignages de proches sur le calme, la douceur, voire la gentillesse de tant de jeunes gens qui viennent d’accomplir d’épouvantables carnages avant de se détruire à leur tour. «On ne comprend pas! Un garçon si sympa, si ordinaire…»

    Bien sûr qu’on ne comprend pas. Puisqu’on ne lit pas ce qui est écrit en toutes lettres…

    «Le moment est crucial», note Frère Tariq. Serait-il suffisamment crucial, chez les partisans de cette lecture-là de l’islam, pour qu’on puisse étendre cette éthique de la violence admise à d’autres domaines que la razzia et la guerre? Par exemple, aux rapports avec les femmes?

    La vie, c’est le Mal

    Il ne me semble ni abusif ni original de relever que l’islam traditionnel a un problème avec les femmes. Le christianisme aussi, du reste, à ce détail près que le modèle de société qu’il a fondé a passé son temps, ces deux ou trois derniers siècles, à repousser les ténèbres du puritanisme. Sans oublier cet autre détail que le puritanisme est combattu en tout premier lieu par le Christ lui-même, ami des prostituées et ennemi juré des scribes, des pharisiens et des formalistes de tout poil, qu’il traite joliment de «sépulcres blanchis».

    Vassili Rozanov, l’un des plus audacieux penseurs chrétiens, a consacré des pages troublantes à cette étrange dérive d’une parole de vie et de lumière vers une idéologie de la stérilité et de la noirceur à mesure que le christianisme s’officialisait. Les hommes de la clarté lunaire sont-ils encore évangéliques, se demande-t-il. Ou ne seraient-ils pas retombés — enchaînons-nous — dans les dérives manichéennes que le christianisme des origines a justement combattues? De la Perse ancienne jusqu’aux gnostiques, des gnostiques aux délires écolo-gauchistes et véganes, la haine des cathares (des purs, en grec) pour le joyeux bordel, la bransloire perenne (selon Montaigne) qu’est ce monde peuplé d’humains mal torchés est une objection constante à l’insouciance coupable où nous nous vautrons depuis la nuit des temps. Quel baume au cœur des rabat-joie et des frustrés de tout genre que de pouvoir déclarer le monde entier bon à brûler parce qu’ils n’y ont pas trouvé leur juste place! Quel alibi pour les révolutionnaires, les inquisiteurs et les tartuffes que de pouvoir régler leurs comptes avec de moins ratés qu’eux au nom d’une raison supérieure liée à la malignité de la vie elle-même. Or qu’est-ce qui perpétue cette vie mal embouchée sur terre, sinon la fertilité de la femme?

    Un certain islam, ainsi, a décidé de mettre des barrières entre les hommes innocents et leurs éternelles tentatrices. Il faut être ouest-européen et n’avoir eu avec l’islam que des rapports expéditifs de colon à colonisé pour accorder foi aux fables selon lesquelles les voiles plus ou moins intégraux «protégeraient» les femmes et témoigneraient du «respect» qu’on leur porte. Cela serait-il vrai, du reste, qu’il faudrait s’interroger sur l’incapacité de ladite idéologie à juguler les pulsions bestiales du mâle autrement qu’en supprimant l’objet de leur concupiscence.

    Dans les sociétés qui ont une pratique plus longue et plus quotidienne de cette idéologie, comme l’Inde, la Russie, la Grèce ou la Chine, on se berce d’un peu moins d’illusions. C’est pourquoi, dans lesdites sociétés, tout «dialogue» avec les repose avant tout sur un rapport de forces. Sans rapport de forces, point de dialogue car la soumission, dans son concept même, l’exclut.

    La leçon oubliée de Cologne

    Ainsi en va-t-il aussi, du reste, dans les sociétés arabo-musulmanes elles-mêmes lorsqu’elles essaient de prendre part à la modernité (et que nos donneurs de leçons ne les renvoient pas à coups de bombes ou de révolutions montées à leurs coutumes régressives). C’est qu’on y est un peu informé du problème. C’est pourquoi la pratique et la prédication de l’islam sont sévèrement encadrées par l’Etat dans tous les pays musulmans, alors qu’en Suisse ou en Grande-Bretagne les prédicateurs fondamentalistes et leurs sponsors du Golfe persique ont pratiquement carte blanche. Ce n’est que dans un tel cadre qu’un tartuffe fondamentaliste peut sévir dans la plus parfaite impunité des années durant.

    On aurait pu croire que la vague migratoire de ces dernières années finirait par mettre au parfum nos oies blanches. Nous en sommes encore loin, alors même que les agressions de Cologne nous ont donné un aperçu grandeur nature des défis qui attendent les femmes en Europe, et qui sont d’une tout autre nature que l’«outrage sexiste verbalisable» que M. Macron a soudain décidé de réprimer avec la dernière énergie.

    Au lendemain de ce gang-bang en place publique, j’ai raconté (Antipresse n° 7, 17.1.2016) comment mon salon de coiffure «hommes» (mais tenu par des dames) à Belgrade avait soudain été envahi par de petits groupes, certes très candides, de jeunes réfugiés syriens:

     «La coiffeuse n’en revenait pas:

     — Pourquoi nous ? Il y a tant de salons tenus par des hommes, en ville…

     Pour ma part, c’était justement la raison. Les jeunes réfugiés venaient là moins pour se faire couper les cheveux que pour se faire frôler par des femmes. Combien d’entre eux avaient été touchés au corps par une femme autre que leur mère ? Ils arrivaient rarement de Damas, plus souvent de campagnes reculées. La visite dans ce salon de coiffure était pour eux une expérience érotique avouable.»

    A la suite des mêmes événements, l’écrivain algérien Kamel Daoud livrait, dans une tribune du Monde, une analyse beaucoup plus incisive du conflit entre l’islam et la femme:

     «Le rapport à la femme est le nœud gordien, le second dans le monde d’Allah. La femme est niée, refusée, tuée, voilée, enfermée ou possédée. Cela dénote un rapport trouble à l’imaginaire, au désir de vivre, à la création et à la liberté. La femme est le reflet de la vie que l’on ne veut pas admettre. Elle est l’incarnation du désir nécessaire et est donc coupable d’un crime affreux: la vie.

     C’est une conviction partagée qui devient très visible chez l’islamiste par exemple. L’islamiste n’aime pas la vie. Pour lui, il s’agit d’une perte de temps avant l’éternité, d’une tentation, d’une fécondation inutile, d’un éloignement de Dieu et du ciel et d’un retard sur le rendez-vous de l’éternité. La vie est le produit d’une désobéissance et cette désobéissance est le produit d’une femme.»

    La pilule de désinhibition

    Kamel Daoud est sans doute un libre penseur, un hérétique. Mais ce qu’il dit entre si bien en résonance avec l’exemple du prophète Ali, loué par le bon Tariq. Tuer ou violer pour ses passions (donc pour la vie), c’est haram. Tuer ou violer pour Dieu, c’est halal. Pour se mettre en règle avec Dieu, il suffit de donner à ses pulsions une justification théologale. Une pilule de désinhibition dont les mécréants, les athées et les libertins ne disposent pas — et doivent du coup la remplacer par la drogue ou l’alcool.

    Henda Ayari, la première femme qui a porté plainte contre Tariq Ramadan pour viol, résume l’attitude de son agresseur présumé par une maxime qui claque comme un fouet: «soit vous êtes voilée, soit vous êtes violée». Si une femme est violée parce qu’elle était dévoilée, le viol n’avait pas pour «moteur» la satisfaction des basses pulsions de l’homme (qui est tout de même du châtiment l’arme nécessaire), mais «l’exigence de justice et de dignité devant Dieu».

    Encore une fois, le cas n’est pas jugé, et nous n’irons pas plus loin dans la spéculation. Après tout, la possibilité que Frère Tariq soit victime de dénonciations calomnieuses voire d’un «complot sioniste» n’est pas à exclure tout à fait.

    Sans enfreindre sa présomption d’innocence, on pourrait tout de même lui poser cette simple question à la fois théologique et pratique: sur les 72 vierges qui constituent la récompense des bienheureux dans l’au-delà, combien sont consentantes? Un bon théologien devrait pouvoir répondre sans peine.

    Slobodan Despot (Antipresse n°103 et 104, 19 et 26 novembre 2017)

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