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europe - Page 86

  • Préhistoires d'Europe...

    Les éditions Belin viennent de publier un bel ouvrage, richement illustré, de Anne Lehoërff intitulé Préhistoires d'Europe - De Néandertal à Vercingétorix. Anne Lehoërff est professeur de protohistoire européenne à l'université Charles-de-Gaulle-Lille-3.

     

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    " Durant environ 40 millénaires (nous ne sommes dans notre histoire connue par des sources écrites qu'au 2e millénaire !), nos ancêtres ont vécu, fabriqué des merveilles, enterré leurs morts, construit des villes et des nécropoles, défriché toute l'Europe occidentale. L'Europe, dans sa version large – de l'Atlantique à l'Oural et même un peu au-delà — a innové, inventé l'agriculture et la métallurgie : c'est la Révolution néolithique, dont nous vivons encore.
    Cela dit, les humains de ces époques anciennes n'ont pas laissé de témoignages écrits : juste des traces matérielles que l'archéologue déchiffre, grâce à l'étude des données mises au jour dans – et sous – le sol. Au fur et à mesure que les méthodes de l'archéologie se perfectionnent et se professionnalisent, la vision qu'on peut avoir de ces lointains ancêtres se précise et se raffine.
    Un livre plein de surprises, à la pointe de la recherche, qui sera pour beaucoup une révélation. "

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  • L’âme européenne est actuellement "en dormition", mais cela ne signifie pas qu’elle ait disparu...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Jean-François Gautier au site Le Rouge & le Noir et consacré à l'âme européenne. Docteur en philosophie, essayiste, musicologue et historien des sciences, Jean-François Gautier collabore aux revues Éléments et Krisis et a récemment publié Le sens de l'histoire (Ellipses, 2013).

     

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    Jean-François Gautier : « L’âme européenne est actuellement ‘en dormition’, mais cela ne signifie pas qu’elle ait disparu »

    Le Rouge et le Noir : Votre intervention lors du colloque annuel de l’institut Iliade portera sur la pérennité de l’âme européenne. Comment définir, à l’heure où des vagues migratoires successives engendrent le « renouvellement » des populations autochtones, l’âme européenne ?

    Jean-François Gautier : L’âme, la psuchè intellective telle que l’entendaient Aristote et une part essentielle du néoplatonisme (que l’on qualifierait mieux de néo-artistotélisme), est une manière de mise en forme de la réalité, et surtout de la réalité spatiale, c’est-à-dire politique. Les Européens ont toujours distingué ce qui est de chez eux et ce qui est du dehors. Dans les cités helléniques, cela correspondait aux domaines d’Hestia et d’Hermès. L’imperium romain distinguait quant à lui les citoyens et les autres. Et la Déclaration de 1789 rappelle que la souveraineté « réside essentiellement dans la Nation ». L’âme européenne est ce qui donne forme et mouvement à une certaine manière de vivre, de dire le droit des gens et d’affronter le devenir sur un territoire donné. Elle est actuellement ‘en dormition’, comme disait notre ami Venner, mais cela ne signifie pas qu’elle ait disparu.

    Le Rouge et le Noir : Le terme de pérennité laisse sous-entendre une continuité dans le temps. Quel rôle joue le christianisme, présent en Europe depuis plus de 1500 ans, dans la continuité de l’âme européenne ?

    Jean-François Gautier : Il me semble nécessaire de distinguer deux réalités sociales et culturelles. D’un côté le christianisme proprement dit, qui relève d’une théologie monothéiste propre aux clercs et aux savants. Il a entretenu des relations souvent conflictuelles avec les institutions politiques, mais ces mêmes institutions se sont souvent servi de lui, et de son personnel, pour arbitrer des conflits purement politiques. Ce fut le cas en Angleterre lorsque l’Acte de suprématie de 1534 fit de Henry VIII le seul chef d’une Église devenue ‘anglicane’ sans changer quoi que ce soit à la théologie. Et il ne faut pas oublier, en France même, la première convocation des États généraux qui permit à Philippe IV, en janvier 1302, d’affirmer l’autonomie du pouvoir royal sur ses terres. Geste repris par Louis XIV avec la Déclaration de 1682 rédigée par Bossuet et consacrant une Église ‘gallicane’. Ce sont bien des problèmes de territorialisation des pouvoirs qui sont ici évoqués, tout comme ils le furent dans le très long conflit opposant la papauté et l’Empire germanique. Le christianisme en fut un révélateur efficace.

    D’un autre côté, moins directement politique, il a existé un catholicisme rural qui, quant à lui, était polylâtre, à cultes multiples, et magnifiait nombre de saints locaux, ceux des territoires paroissiaux. Il en subsiste encore des traces en Bretagne, en Irlande, en Espagne ou en Italie. Ce catholicisme-là a été le dernier conservatoire des ferveurs européennes traditionnelles, très éloignées des contenus monothéistes officiels. Le concile Vatican II a eu soin d’en limiter la portée, mais le facteur décisif de leur effacement a été celui des grandes vagues d’urbanisation de la seconde moitié du XX° siècle, avec un recul des pratiques religieuses qui a nui tout autant à l’entretien de l’âme européenne qu’au christianisme proprement dit.

    Le Rouge et le Noir : Pérennité suppose qu’il y ait eu transmission d’une psyché commune aux Européens par le passé. Or, nous faisons face à un phénomène de mondialisation abhorrant les frontières et assujetti à un besoin compulsif d’immédiateté, non inscrit dans l’horizon de la longue mémoire. Dans ce cadre, n’estimez-vous pas ce combat perdu d’avance ?

    Jean-François Gautier : La psuchè européenne ne se résume pas à un contenu, mais se dit de manières de vivre et d’organiser tant l’espace institutionnel que l’espace symbolique. Il y a là motif à variations multiples, régionales ou locales. Le premier support de cet agir européen, ce sont les langues. Les Européens ont en commun des langues à construction en sujet-verbe-complément. Tant qu’elles se maintiendront face au globish, elles porteront un potentiel d’indépendance et prépareront d’éventuelles révoltes, si celles-ci deviennent indispensables. Les Européens n’aiment pas être le complément de quoi que ce soit, ils préfèrent être les sujets de l’action, c’est-à-dire, chez eux, les maîtres de leur sort.

    Le Rouge et le Noir : Vous aviez évoqué par le passé que, pour l’Européen, la seule signification de l’histoire est son absence de sens. Conditionnant sa conduite, la perpétuelle construction constitue l’un de ses seuls exutoires. En quoi cette acception des choses diffère de l’immédiateté plébiscitée par une grande majorité de nos contemporains à l’heure actuelle ?

    Jean-François Gautier : C’est précisément parce que l’Histoire, pour les Européens, n’a pas de sens préalable qu’ils ont été portés vers les confins. De longues périodes de conquêtes, commencées à la Renaissance, ont pris fin du fait de la rotondité de la Terre : on ne refait pas deux fois le même tour du monde, pas plus qu’Ulysse n’entreprend deux fois son Odyssée. Les décolonisations ont marqué cet achèvement. Aujourd’hui, les peuples colonisés reprennent en sens inverse la Querelle de Valladolid de 1550 : puisque nous sommes comme vous, nous exigeons d’habiter chez vous, et tout de suite. C’est typique des peuples sans mémoire, mais néanmoins pourvus d’habitudes et de mœurs qui ne sont pas les nôtres. Ulysse rentrant à Ithaque découvrit des gens prêts à prendre sa place et à transformer Ithaque en Las Vegas, pour parler moderne. Ils n’ont pas duré bien longtemps. Ceux qui débarquent chez nous se persuadent qu’ici (ici, pas en Chine) on gagne à tout coup au casino de la Sécurité sociale, des allocations familiales et du logement. Nombre d’Européens emboîtent le pas. Mais le bandit manchot va se fatiguer, la première grande crise financière en sonnera le glas, de même que celui de la marchandisation transfrontalière. Alors, bien sûr, les apologistes de la fatigue de vivre et de l’impuissance à agir, tous les conservateurs modernes, ceux-là vont être déçus. Mais il y a, dans tous les pays européens, une jeunesse prête à inventer son devenir ailleurs que dans les salles de shoot. Leur enthousiasme sera d’autant plus irrésistible que la tâche sera immense.

    Le Rouge et le Noir : Aujourd’hui véhiculé à grand renfort de plaidoyers pour le vivre-ensemble, le cosmopolitisme érigé en vertu semble avoir remporté un combat – au moins sémantique. Dans cette perspective, quels moyens mettre en œuvre pour retrouver une identité européenne ?

    Il n’y a pas à retrouver une identité européenne perdue, mais seulement à continuer d’affirmer celle qui nous caractérise. Il faut se méfier des grands textes et des idéologies qui expliquent tout par avance. Mieux vaut regarder la réalité quotidienne, certes partielle, mais combien éloquente. Les Européens du centre ou de l’Est ont compris où les a menés l’asservissement à un sens préétabli de leur histoire. Ils n’ont aucune envie de réentendre la même leçon universalisante. Chez nous, où les idéologies égalitaires et marxisantes ont tenu les chaires universitaires et les relais médiatiques, la leçon n’est pas encore entendue. Mais il y a tout un peuple d’instituteurs et d’enseignants qui en ont assez de se faire insulter par des gamins, ou des policiers et des gendarmes qui ne supportent plus d’être rabroués à chaque coin de rue, des médecins et des pompiers qui ne veulent plus être caillassés. Il paraît que nombre de candidats aux prochaines élections présidentielles cherchent des programmes convaincants. Qu’ils ne cherchent pas trop loin. Imposer le retour de l’instruction élémentaire dans les écoles, et l’application du droit dans les territoires où il est bafoué, voilà de quoi remplir au moins deux quinquennats, avec réélection garantie. Le reste s’en suivra. Et si rien n’est fait en ce sens, il restera évidemment la rue. Ce n’est pas la perspective la plus enviable, d’autant moins engageante qu’elle serait doublée d’une perte des élites, dont une partie s’en irait vivre ailleurs. Mais tous les peuples européens ont connu, à un moment ou à un autre, des institutions qui les ont trahis. Ils n’ont pas disparu pour autant. Quant aux élites en partance, il faut se rappeler que l’armada d’artisans calvinistes chassée par la Révocation de l’édit de Nantes, en 1685, a initié ce qui est devenu l’industrie de la Prusse. Très mauvaise affaire pour la France, certes, mais pour l’Europe ? Il est possible que les Russes ou les Polonais, comme Frédéric-Guillaume Ier en Prusse, trouvent les termes d’une sorte de nouvel Acte de Tolérance accueillant les révoqués de l’Universel, chassés de France ou d’ailleurs par les caillasses des idéologues et de leur dogues. Un tel transfert nuirait certainement aux États, ou à ce qui en restera, mais pas à l’âme européenne. Avec toutes ses riches variantes, elle s’exprimait déjà sur les parois de nos grottes voilà trente mille ans. Nul ne peut la rayer d’un trait de plume. Pas même le mammouth laineux ou le rhinocéros à poils longs qui, eux, ont disparu de nos horizons.

    Jean-François Gautier, propos recueillis par Aloysia Biessy (Le Rouge & le Noir, 5 avril 2016)

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  • Les petits secrets du T.T.I.P....

    Les éditions Astrée viennent de publier un essai de Montjoie intitulé Les petits secrets du T.T.I.P. Montjoie est le pseudonyme d'un analyste expérimenté des échanges économiques et financiers entre l'Europe et les Etats-unis.

     

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    " Voilà un sujet qui a déjà fait couler des tombereaux d’encre sans pour autant donner au lecteur un éclairage aussi global que celui que nous apporte l’essai de « Montjoie ». Son analyse est déjà devenue en quelques semaines le document de référence sur le traité transatlantique car elle va bien au-delà de la simple thématique du libre-échange (accords ALE/FTA et A.C.R). Au fil de chapitres concis et remarquablement structurés, l’auteur nous fait l’implacable démonstration que ces mégas accords dits de nouvelle génération, qui soulèvent tant de passions contraires, relèvent en fait d’une seule et même stratégie intégrant à la fois l’intelligence commerciale, financière , monétaire, voire juridique et, bien sûr, militaire. En abrégé, ce que les experts désignent généralement sous son appellation anglo-saxonne, le « Corporate Monitoring Governance » dont l’objectif principal est de sceller dans le marbre les « équilibres planétaires du futur » . . . sous leadership américain, s’entend.

    Sous le pseudonyme de « Montjoie » se cache un observateur avisé autant qu’un analyste chevronné. Sans exagération aucune. Il nous interpelle par sa connaissance des problèmes inhérents au « package euro-atlantique » voire au-delà dans sa composante « T.T.I.P PLUS » incluant ce clone plurilatéral qu’est le T.I.S.A. Il nous régale aussi par ses projections étonnantes à commencer par l’instrumentalisation par tierces parties des institutions européennes et ce, à l’approche d’une année décisive pour le devenir de la « Multinationale Europe ». Alors, « 2017 » l’annus horribilis ?

    Une approche critique, quoique impartiale, du T.T.I.P/ T.A.F.T.A. Un texte clair et accessible, y compris pour le lecteur profane ou peu attentif aux finesses du Grand Jeu auquel se livrent les grandes puissances d’aujourd’hui . . . ou celles en devenir. "

     

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  • Et si les foules sentimentales se réveillaient ?...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 24 mars 2016 et consacrée au choix aux attentats commis par les terroristes islamistes à Bruxelles. Et si les "foules sentimentales" européennes, anesthésiées par 70 ans de paix, sortaient progressivement de leur torpeur, se demande l'auteur du Suicide français...

     


    Attentats à Bruxelles : "Les foules... par rtl-fr

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  • Quand l'Union européenne discrédite l'Europe...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à l'échec de l'Union européenne...

     

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    Alain de Benoist : Le plus grand reproche que l’on puisse faire à l’Union européenne, c’est d’avoir discrédité l’Europe !

    Que l’on soit europhile ou eurosceptique, un fait est patent : l’Europe va plus mal que jamais. Pourquoi ?

    Les signes s’accumulent en effet : crise de l’euro qui perdure, « non » des Danois au référendum du 3 décembre, vagues migratoires hors de contrôle, colère sociale, paysans au bord de la révolte, aggravation des perspectives financières, explosion des dettes publiques, montée des populismes et des mouvements « conservateurs » et eurosceptiques. S’y ajoute la possible sécession de la Grande-Bretagne, qui créerait évidemment un précédent. Jean-Claude Juncker l’a déjà avoué : l’année 2016 pourrait bien marquer le « début de la fin » de l’Union européenne. « Personne ne peut dire si l’Union européenne existera encore en l’état dans dix ans », a déclaré de son côté Martin Schulz, président du Parlement européen. « Nous risquons une dislocation », a renchéri Michel Barnier. « L’Europe, c’est fini », a conclu Michel Rocard. Cela donne le ton. L’Union européenne se défait sous nos yeux sous l’impact des événements.

    Dans l’affaire des migrants, le pape François opposait récemment ceux qui veulent dresser des murs et ceux qui veulent établir des ponts. Il oubliait qu’entre les ponts et les murs, il y a les portes, lesquelles fonctionnent comme des écluses : on peut, selon les circonstances, les ouvrir ou les fermer. La mise en place de l’espace Schengen supposait que l’Union européenne assure le contrôle de ses frontières extérieures. Comme elle en a été incapable, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, le Danemark, l’Autriche, la Slovaquie, la Slovénie, la Croatie, la Serbie, la Macédoine et même la Belgique viennent, les unes après les autres, de rétablir le contrôle de leurs frontières intérieures ou de limiter de manière drastique les entrées de « réfugiés » sur leur sol. Cela signifie que l’espace Schengen est déjà mort. Ne vouloir établir que des ponts, c’est se condamner, à terme, à ne plus dresser que des murs.

    Le début des années 1990 a vu la fin du consensus tacite des citoyens vis-à-vis du projet d’intégration communautaire. À l’heure actuelle, un tiers seulement des Européens déclarent faire confiance aux institutions européennes, soit qu’ils pâtissent de la crise (dans les pays du Sud), soit qu’ils craignent d’être touchés à leur tour (dans les pays du Nord). De l’Europe, on attendait l’indépendance, la sécurité, la paix et la prospérité. On a eu la vassalisation au sein de l’OTAN, la guerre dans les Balkans, la désindustrialisation, la crise agricole, la récession et l’austérité. D’où un sentiment de dépossession qui touche tous les peuples.

    Les souverainistes pourraient se réjouir de l’actuel retour en force des nations, mais ne s’agirait-il pas du retour des égoïsmes nationaux ?

    L’actuel retour aux frontières n’est qu’un repli temporaire qui ne correspond nullement à un retour en force de l’État-nation. Tous les centres de décision des pays européens restent aux mains d’instances internationales, ce qui revient à dire que leur souveraineté (politique, économique, militaire, financière, budgétaire) ne tient plus que par la peinture. Au surplus, il n’y a pas un reproche que l’on fait à l’Union européenne que l’on ne pourrait pas adresser tout aussi bien aux États-nations. Le déficit démocratique des institutions européennes, par exemple, n’est jamais qu’un exemple de la crise générale de la représentation qui affecte aujourd’hui tous les pays, parallèlement à une crise fondamentale de la décision que l’on retrouve à tous les niveaux.

    Était-ce inéluctable ?

    Le plus grand reproche que l’on puisse faire à l’Union européenne, c’est d’avoir discrédité l’Europe. L’Europe actuelle est, en effet, tout sauf une Europe fédérale, et c’est pourquoi elle est incapable de s’unir dans le respect de la multiplicité des « nous » nationaux, c’est-à-dire des existences collectives qui existent en son sein. Elle n’a jamais voulu se construire comme une puissance autonome, mais comme un vaste marché, un espace de libre-échange censé s’organiser selon le principe exclusif des droits de l’homme, sans attache collective ni allégeance à une chose commune. Elle s’est faite, dès l’origine, à partir de l’économie et du commerce au lieu de se faire à partir de la politique et de la culture. L’idée sous-jacente était que, par une sorte d’effet de cliquet, la citoyenneté économique entraînerait inéluctablement la citoyenneté politique. C’est le contraire qui s’est produit.

    Conformément aux diktats du « sans-frontiérisme » libéral, l’Europe a voulu s’unifier dans une perspective « universelle », en se référant à des notions abstraites sans aucun ancrage culturel ou historique pouvant faire sens pour les peuples. Loin de protéger les Européens de la mondialisation, l’Union européenne est ainsi devenue l’un de ses principaux vecteurs. Au lieu de chercher à faire émerger une volonté politique commune fondée sur la conscience d’un destin unique, elle a choisi de s’ouvrir au monde sans réaliser qu’on ne peut s’adapter aux circonstances extérieures sans posséder un principe intérieur. Loin de se situer dans la perspective d’un monde multipolaire, elle s’est mise au service d’une « religion de l’humanité », préfigurant ainsi un ordre cosmopolitique fondé sur l’universalisation de la démocratie libérale (un oxymore dont le sens exact est la soumission des procédures démocratiques au système du marché).

    Le drame est que plus les politiques que la Commission européenne met en œuvre échouent, plus elle s’obstine à persévérer dans la même voie, convaincue qu’elle est que tout va s’effondrer si l’on interrompt sa fuite en avant. On n’échappera donc pas à cette fuite en avant. Ni à l’effondrement.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 17 mars 2016)

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  • Crise migratoire : la rupture historique qui pourrait emporter l'Europe...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du groupe Plessis cueilli sur le Figaro Vox et consacré à la crise migratoire et à ses conséquences pour l"Europe. Le groupe Plessis rassemble des hauts-fonctionnaires attachés à l'autorité de l'Etat et à la souveraineté nationale...

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    Crise migratoire : la rupture historique qui pourrait emporter l'Europe

    Les migrations posent désormais à l'Europe un défi existentiel. Ne soyons pas naïfs, la déferlante migratoire, si rien de sérieux n'est fait, n'est pas près de s'arrêter. Ce mouvement massif de populations, engagé depuis des décennies, s'est brusquement accéléré avec la crise libyenne qui a ouvert l'accès de la Méditerranée centrale aux migrants africains. Il s'est encore amplifié avec la crise syrienne, ouvrant les routes des Balkans et de la Méditerranée orientale à un nouveau flux massif en provenance du Proche et du Moyen-Orient, mais également d'Afghanistan et du Pakistan. Il n'y a aucune raison, en l'état actuel des choses, de penser que ce mouvement s'épuisera de lui-même, bien au contraire: les candidats au départ se comptent par millions. Et la nouveauté pour l'Europe, c'est à présent une vague d'immigration clandestine algérienne!

    A cette crise migratoire, profondément déstabilisatrice pour les nations européennes, s'est ajouté le risque terroriste. Des indications convergentes montrent que des combattants de Daech, par centaines et peut-être par milliers, profitent de ce flux pour infiltrer l'Europe. Dernier en date, le général Breedlove, commandant les forces de l'OTAN en Europe, déclarait le 1er mars dernier devant le comité des forces armées du Sénat américain, que «l'Europe fait face à l'inquiétant défi de ces migrations de masse enclenchées par l'instabilité et l'effondrement des Etats et masquant les déplacements de criminels, de terroristes et de combattants étrangers. Dans ce mélange, l'Etat islamique se répand comme un cancer…» . De son côté, le directeur d'Europol estime entre 3 000 et 5 000 le nombre des djihadistes infiltrés en Europe . Nombre d'entre eux sont certainement passés parmi les migrants, à l'instar de plusieurs des assassins de l'attentat de novembre et du 4ème commando dont on vient d'apprendre l'existence . D'ailleurs, Manuel Valls a reconnu lui-même que plusieurs terroristes «ont profité de la crise des migrants pour se glisser en France» .

    Préoccupante également la proportion d'hommes jeunes parmi ces migrants. Les populations déplacées par la guerre sont, comme c'est le cas d'ailleurs dans les camps en Turquie , généralement composées au moins à parts égales de femmes et d'hommes. Or, d'après les statistiques d'Eurostat , 72% des demandeurs d'asile en Europe en 2015 sont des hommes, à tel point qu'en Suède désormais, le rapport hommes/femmes des 16/18 ans s'établit à 123 pour 100, soit une proportion plus dégradée qu'en Chine …

    D'autres signes alarmants sont apparus: les agressions de Cologne et les événements similaires révélés depuis, les attaques de chrétiens dans des foyers de réfugiés en Allemagne , les avertissements d'autorités religieuses du Levant. Alors, parmi ces migrants, combien de combattants, combien de sympathisants de l'islam radical et du djihad, combien de neutres plus ou moins bienveillants, combien de fanatiques?

    Décidément, les migrants sont bien l'arme non-conventionnelle («hybrid war») qu'a évoquée Donald Tusk, le très consensuel président du conseil européen, devant le Parlement européen le 23 septembre 2015 . Il n'est toutefois guère facile de savoir qui tient cette arme de déstabilisation massive. On peut cependant affirmer sans se tromper qu'elle profite à Daech, bien sûr, mais également à la Turquie dont on connaît par ailleurs le jeu trouble en Syrie. Et c'est avec cette même Turquie que la chancelière allemande, après entraîné l'Europe dans le chaos, s'avise de négocier un accord de dupes dont on peut assurer à coup sûr, s'il voit le jour, qu'il ne sera mis en œuvre qu'au seul bénéfice de la Turquie. Pour les Turcs: la libre-circulation en Europe (!), le doublement de l'aide européenne de trois à six milliards d'euros, des avancées dans les négociations d'adhésion à l'Union ; pour les Européens: la promesse de réadmissions, hypothétiques compte tenu notamment des obstacles juridiques, de demandeurs d'asile arrivés en Grèce, moyennant en plus, et c'est le comble, la réinstallation en Europe, un pour un, de réfugiés syriens présents en Turquie. Et l'on nous présente cet accord comme une victoire! La Sublime Porte sait bien profiter de nos faiblesses…!

    Cet accord boiteux, pour ne pas dire calamiteux, ne freinera pas ou guère les flux migratoires, mais suscite pourtant l'émotion des belles âmes qui y voient une atteinte insupportable au dogme selon lequel l'immigration est bonne par essence, et d'autant meilleure qu'elle est massive. Face à la crise migratoire, les élites européennes apparaissent impuissantes, pétrifiées par leurs contradictions, prises entre la crainte des conséquences de cet événement sans précédent et leur vision irénique de l'immigration. Pourtant, certains ont pris la mesure du désastre, notamment en Europe de l'Est où les pays les plus menacés tentent de s'unir pour endiguer le flux et protéger leurs frontières. C'est bien la preuve que l'Union européenne, simple instance bureaucratique de gestion, est incapable d'assurer la sécurité des Européens. Seuls les Etats, qui disposent, selon la définition de Max Weber, du monopole de la violence légitime, sont en mesure de s'opposer au besoin par la force, certes avec retenue et discernement, au franchissement illégal de leurs frontières. Et c'est bien la grande faiblesse de l'Europe et des Etats de l'Ouest du continent que de renoncer par avance à ce recours à la force ; c'est l'abdication de toute maîtrise de son destin ; c'est la porte ouverte à toutes les soumissions.

    Pendant ce temps en France, pourtant victime d'attentats meurtriers, notre classe politique ne s'inquiète guère. On vote le 18 février, à la dérobée, dans un hémicycle quasi-désert, une loi surréaliste sur l'immigration, qui rendra encore plus difficile le renvoi des clandestins et des déboutés du droit d'asile (voir, sur FigaroVox du 19 février, l'excellente tribune d'Alexis Théas ). On est ainsi désormais sûr qu'aucun clandestin ou demandeur d'asile, ou peu s'en faut, qui mettra le pied en France ne repartira sinon volontairement. Notre Gouvernement pousse décidément à son paroxysme l'art d'être à contre-courant… Mais le silence sur ces sujets de la droite, toute à la préparation des primaires et à ses querelles d'appareil, n'est pas moins sidérant et dénote une futilité et une désinvolture inquiétantes. Quant au FN, ses députés n'ont même pas participé au vote de la dernière loi.

    Il n'est pas impossible que l'on assiste à un événement d'une ampleur historique qui marque la fin de l'Europe comme construction politique et la déstabilisation durable et peut-être irrémédiable des sociétés européennes. On entend d'ailleurs de plus en plus de Français prêts à partir à l'étranger pour y trouver, pour eux et leur famille, la sécurité et l'avenir qu'ils pensent désormais ne plus pouvoir trouver en France. Face à ce vent mauvais, des solutions existent (voir entre autres notre article du 14 octobre dernier ), au premier rang desquelles on trouve la protection effective et active, au besoin par la force, de nos frontières et la remise à plat de tout notre dispositif juridique et administratif de gestion de l'immigration. Mais il manque une voix, respectée et crédible, sérieuse, volontaire et patriote, pour les porter dans le champ politique. Nous, comme bien d'autres, attendons l'émergence de cette personnalité.

    Groupe Plessis (Figaro Vox, 18 mars 2016)

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