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  • La dissidence numérique dans tous ses états...

    Le nouveau numéro de la revue Éléments (n°199, décembre 2022 - janvier 2023) est en kiosque!

    A côté du dossier consacré à la dissidence numérique, on découvrira l'éditorial d'Alain de Benoist, les rubriques «Cartouches», «Le combat des idées» et «Panorama» , un choix d'articles variés et des entretiens, notamment avec le fondateur de Champs communs Guillaume Travers,  l'écrivain Christian Dedet, l'historien Roberto Chiarini et le spécialiste des Indo-Européens Jean Haudry, ainsi qu'un débat entre Laurent Dandrieu et Rémi Soulié...

    Et on retrouvera également les chroniques de Xavier Eman, d'Olivier François, de Laurent Schang, d'Hervé Juvin, de Nicolas Gauthier, de Bruno Lafourcade, de Guillaume Travers, d'Yves Christen, de Bastien O'Danieli et de Slobodan Despot...

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    Au sommaire de ce numéro :

    Éditorial

    Décadence. Par Alain de Benoist

    Agenda, actualités

    L’entretien

    Champs communs, le laboratoire de Guillaume Travers. Propos recueillis par François Bousquet

    Cartouches

    L’objet disparu : le porno du samedi soir sur Canal+. Par Nicolas Gauthier

    Une fin du monde sans importance. Par Xavier Eman

    Carnet géopolitique : où va l’Union européenne ? Par Hervé Juvin

    Cinéma : Roger Corman, le dernier roi d’Hollywood. Par Nicolas Gauthier

    Champs de bataille : bataille de Fontenoy, une guerre des nerfs (1/2). Par Laurent Schang

    Le saltimbank, 2e partie : l’Idl. Par Bruno Lafourcade

    Économie. Par Guillaume Travers

    Bestiaire : des poubelles et des ailes, une course aux armements. Par Yves Christen

    Sciences. Par Bastien O’Danieli

    Le combat des idées

    Baballe et business sportif : Qatar ta gueule à la récré. Par Christophe A. Maxime

    Hommage à Mike Davis : la géographie marxiste est un sport de combat. Par Pascal Eysseric

    Vers une théorie du protectionnisme maîtrisé. Par Gabriel Rivière

    Roberto Chiarini : le centenaire de la Marche sur Rome. Propos recueillis par Daoud Boughezala

    Matteo Salvini et Giorgia Meloni, le chassé-croisé. Par Daoud Boughezala

    Demain les monnaies numériques. Par Guillaume Travers

    Razzia sur les terres agricoles : la France en ligne de mire. Par Guillaume Travers

    La fracture coloniale, c’est la facture : l’expertise comptable de Bernard Lugan. Par François Bousquet

    On naît, on aime, on meurt ensemble : le véritable cri d’Edvard Munch. Par Anne-Laure Blanc

    Ma leçon de style, entretien avec Christian Dedet. Propos recueillis par Olivier François

    Entretien avec Jean Haudry : en finir avec les fantasmes sur les Indo-Européens. Propos recueillis par Henri Levavasseur

    Rome ou Babel : débat entre Laurent Dandrieu et Rémi Soulié. Propos recueillis par Thomas Hennetier

    Contre le sans-frontiérisme chrétien: le défi impossible de Laurent Dandrieu. Par Alain de Benoist

    Olivier Germain-Thomas, le grand combat d’un routard mystique. Par Olivier François

    Dossier

    La dissidence numérique dans tous ses états

    L’Amérique dans les têtes : la génération troll sous influence. Par François Bousquet et Pascal Eysseric

    Quels youtubeurs suivez-vous ? Les 36 vidéastes de la dissidence à aimer ou détester. Par Rodolphe Cart, avec Édouard Daloz, Eyquem Pons et Laurent Vergniaud

    Julien Rochedy, le Hussard bleu entre Gutenberg et Elon Musk. Par François Bousquet

    L’homme déconstruit est-il un macho fini ? Par Violaine Malleterre

    « Marxisme culturel » : histoire d’une imposture. Par David L’Épée

    États-Unis : le phénomène Bronze Age Pervert. Par Ethan Rundell

    Panorama

    L’œil de Slobodan Despot 89 Reconquête : confession d’un non-fumeur absolu. Par Slobodan Despot

    La leçon de philo politique : Aristote et la critique du communisme. Par Ego Non

    Un païen dans l’Église : l’amazone d’Aristote dans l’abbaye de Montbenoît. Par Bernard Rio

    C’était dans Éléments : Libye, la trahison de Sarkozy. Par Jacques Vergès

    Éphémérides

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  • Des « militants 2000 » en quête de réalités tangibles, charnelles et incarnées...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte  cueilli sur le site de Dextra, au titre provocateur, consacré aux militants de la génération 2000, moins avides d'idéologie que de réalités tangibles, charnelles et incarnées...

     

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    Les « militants 2000 » sont-ils débiles ?

    Les militants nés dans les années 2000 sont-ils débiles ? C’est un lieu commun pour chaque génération de militants de déclarer que celle qui leur succède est de moindre qualité. Dire des « militants 2000 » qu’ils n’ont aucune culture politique, aucun bagage intellectuel sérieux et qu’ils manifestent, pour la plupart, un caractère versatile, revient à leur rendre une sentence semblable à celle que les « militants 1990 » avaient reçu des « militants 1980 », etc… et jusqu’aux « militants 1920 » sans doute.

    Nous ne parlons pas de la « génération 2000 » dans sa majorité (dénoncer la léthargie des « digital natives » est devenu un lieu commun), ni même de la fachosphère (cet agglomérat de militants cybernétiques qui aurait au moins fait un petit tour de piste dans le militantisme réel il y a 20 ans) mais bien de ces quelques-uns qui franchissent le pas, traversent leurs écrans, pour se présenter devant nous un jour de conférence, de manifestation ou de rentrée militante.

    On oublie trop souvent le con puéril qu’on était à 20 ans mais au-delà du lieu commun il y a un constat qui est sans appel. Les livres synthétiques et percutants que nous découvrions à leur âge, et qui nous illuminaient par leur simplicité, leurs tombent des mains comme s’ils lisaient l’Iliade dans le texte. Ils n’écrivent pas d’avantage qu’ils ne lisent et la majorité de leurs actions militantes demeurent des parodies d’actions anciennes et désuètes.

    En dépit de leur bonne volonté, les « militants 2000 » sont les enfants du XXIème siècle et de son lot d’abrutissement technologique.

    Un autre lieu commun est de considérer que chaque génération vient contrebalancer les comportements excessifs de celle qui la précède.

    Les « militants 1990 » œuvraient dans une époque où l’Histoire était figée dans une voie à sens unique et où le décor du monde d’avant demeurait vaille que vaille (alternance droite/gauche, grande importance accordée à la politique « politicienne », lecture civilisationnelle des phénomènes en cours, …). Cet immobilisme invitait peu à s’accomplir dans l’action mais prédisposait les militants qui ne voulaient pas que s’amuser à se former intellectuellement pour avoir quelque chose à opposer à l’idéologie dominante et pour le jour où l’Histoire reviendrait.

    Les « militants 2000 » sont nés avec un écran devant la tête. S’ils sont arrivés jusqu’à nous c’est qu’ils sont des évadés de l’asile numérique. Comme des rescapés d’un bagne, leur quête de réalités tangibles, charnelles et incarnées (culte du sport qui bascule parfois dans l’hygiénisme, fascination pour les symboles de violence, genre j’enfile une cagoule trois trous avec le dessin de Charles Martel pour manifester à la Marche pour la Vie, communauté autoproclamée de jeunes hommes célibataires, …) semble désordonnée et ne laisse que peu de place à la réflexion sereine et profonde.

    Mais si derrière cette attitude, doublée d’une méfiance envers « l’intellectualisme » jugé excessif de la génération précédente (trop de conférences et de colloques épluchant sans fin les mêmes sujets), se cachait autre chose qu’une inaptitude aux raisonnements complexes et de l’impatience juvénile ? S’il s’agissait aussi d’une adaptation instinctive des « militants 2000 » à l’époque actuelle ?

    Le Comité invisible résumait cette soif de réel dans leur deuxième ouvrage (A nos amis, La fabrique, 2014) : « La moindre expérience réelle fera exploser la misère de cet escamotage. C’est sa misère qui, à la fin, abattra la cybernétique ». Autrement dit, parler de la Cité platonicienne à un jeune isolé, fils unique, parents divorcés, un peu geek et qui erre en marge des jeunes lobotomisés de son âge revient à proposer à manger à celui qui crève de soif. Il peut concevoir l’idée mais celle-ci ne l’intéressera pas tant qu’il n’aura pas rassasié son besoin immédiat de « sentir » un peu de quoi l’on parle : d’avoir des camarades.

    L’époque technicienne dans laquelle nous sommes plongés semble également signifier la fin de l’importance des idéologies (si primordiale au XXème siècle). Les débats d’idées sérieux disparaissent à mesure que les deux camps qui se font face apparaissent de plus en plus clairement à chacun (les tenants de l’anthropologie classique et les techniciens). Dès lors, il est évident qu’il devient inutile de dispenser de nombreuses formations destinées à « savoir quoi répondre » à nos ennemis puisque le dialogue devient inutile (ex : expliquer le lien entre présence d’extra européens et l’insécurité, qu’un garçon possède un pénis à la naissance, …).

    Cet assèchement du combat idéologique va de pair avec le retour et l’accélération de l’Histoire (mesures liberticides, guerres, autoritarisme étatique, …). Des mesures extrêmes comme la suppression du chômage, de la retraite, une partition géographique, un contrôle des naissances, un rationnement arbitraire sur n’importe qu’elle ressource, … ne semble plus impossible et demanderaient d’avantage que de la matière grise pour s’organiser en conséquence.

    Soyons sévères, à l’écoute et pédagogues avec les jeunes militants. Sachons trier dans nos maigres connaissances pour ne leur transmettre que ce qui aura une chance de leur servir et ne les encombrons pas d’outils inutiles pour qu’ils soient disponibles pour l’action. Car s’il est vrai qu’un « imbécile qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis » encore faut-il que l’imbécile sache dans quelle direction aller.

    Dextra (Dextra, 21 novembre 2022)

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  • La droite et la crise du nationalisme...

    Les éditions des Sentiers perdus, diffusées par Akribeia, viennent de rééditer un court essai d'Adriano Romualdi intitulé La droite et la crise du nationalisme. Historien et germaniste, Adriano Romualdi (1940-1974) était considéré avant sa mort comme un des disciples les plus prometteurs de Julius Evola.

     

    Romualdi_La droite et la crise du nationalisme.jpg

    "Adriano Romualdi (1940-1943) a été l’un des plus brillants intellectuels de la Droite italienne. Le destin a voulu que sa vie soit brutalement écourtée. Il est pourtant parvenu à nous laisser un nombre considérable d’essais percutants, consacrés à l’histoire, à la philosophie, aux études indo-européennes, aux orientations politiques et au réarmement intellectuel et spirituel des forces de Droite.
    Ce petit ouvrage comprend une nouvelle traduction de l’un des textes les plus essentiels de l’auteur, ainsi qu’une présentation, qui aidera le lecteur à se familiariser avec son contexte et à dépasser certaines idées reçues."

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  • Voici venu le temps des loups...

    Le 25 novembre 2022, Martial Bild recevait, sur TV libertés, Olivier Maulin à l'occasion de la publication de son nouveau roman, Le temps des loups (Le Cherche Midi, 2022).

    Anar de droite, tendance Rabelais, critique littéraire à Valeurs actuelles, alsacien et roi de Montmartre, Olivier Maulin est l'auteur de romans truculents et païens, comme Les Lumières du ciel (Balland, 2011),  Le Bocage à la nage (Balland, 2013), Gueule de bois (Denoël, 2014) ou La fête est finie (Denoël, 2016), mais aussi d'un recueil d'articles polémiques revigorant, Le populisme ou la mort (Via Romana, 2019). Les éditions de La Nouvelle Librairie ont récemment réédité sa Trilogie royale qui regroupe trois merveilleux romans, En attendant le roi du monde, Les évangiles du lac et Petit monarque et catacombes, d'une drôlerie et d'une vitalité réjouissante, qui étaient devenus difficilement trouvables.

     

                                            

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  • Le Misanthrope de Meudon...

    Les éditions de l'Observatoire viennent de publier Le Misanthrope de Meudon, le deuxième tome du roman graphique de Christophe Malavoy et José Correa, consacré à Louis-Ferdinand Céline, qui fait suite à Les Années noires.

    Lecteur averti de Céline, Christophe Malavoy est comédien, plusieurs fois nommé pour le César du meilleur acteur, et également réalisateur. Il a notamment publié Céline, même pas mort ! (Balland, 2011) et une bande-dessinée consacrée à l’auteur, La cavale du Dr Destouches (Futuropolis, 2015).

    Malavoy_LF Céline - Le Misanthrope de Meudon.jpg

    " Après un long périple à travers l’Europe, laissant derrière eux les manuscrits de l’écrivain et toute une vie, Céline et son épouse Lucette parviennent à gagner Copenhague en 1945, après avoir traversé un IIIe Reich agonisant. Loin de la France qui réclame la tête du Dr Destouches, le couple pense avoir trouvé un havre de paix, et un peu de répit. Mais leur sursis ne sera que de courte durée... Rattrapé par le gouvernement français qui réclame son extradition et son jugement immédiat, Céline est incarcéré pendant plus d’un an à la prison de Vestre Faengsel, à Copenhague, avant d’être assigné à résidence à Korsor, sur les bords de la Baltique.
    Désormais, c’est une véritable vie d'exilé qui commence pour l’écrivain apatride. Un exil de cinq longues années de labeur, dans le froid polaire danois, une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, dans la joie parfois, dans la peur souvent.
    Porté par les illustrations à l’aquarelle de José Corréa, Christophe Malavoy raconte ces années noires, trop souvent ignorées, au plus près de la psyché de l’auteur du Voyage au bout de la nuit, et parvient à transformer la grande Histoire en un roman d’aventure aussi fascinant que poétique. "

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  • Le calme avant la tempête ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Caroline Galactéros, cueilli sur Geopragma et consacré à ce qu'elle analyse comme l'usure des Occidentaux face au jusqu'au-boutisme du président ukrainien...

    Docteur en science politique, Caroline Galactéros est l'auteur de  Manières du monde, manières de guerre (Nuvis, 2013) et de Vers un nouveau Yalta (Sigest, 2019). Elle a créé en 2017, avec Hervé Juvin, entre autres, Geopragma qui veut être un pôle français de géopolitique réaliste.

     

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    Le calme avant la tempête

    On aimerait penser à autre chose. A la coupe du Monde de football qui débute au Qatar, aux fêtes de Noël qui approchent, à la crise qui s’installe, et même aux échauffourées politiques dérisoires qui animent parfois pathétiquement notre Assemblée nationale et paraissent bien insignifiantes au regard des enjeux de fond et de l’avenir de notre pays. Mais la guerre, une fois lancée, ne connait pas de répit et elle prend en Ukraine, des tours inquiétants avec la reprise des bombardements sur la centrale nucléaire de Zaporojie qui en vient à alarmer même le très tempérant directeur de l’AIEA, et dont il demeure difficile d’imaginer que c’est la Russie qui les initie contre ses propres forces…

    Que faire pour conduire le président Ukrainien à rompre avec son jusqu’au-boutisme suicidaire ? Les courants ultranationalistes qui l’environnent, le terrifient sans doute et le contrôlent ainsi que ses forces armées, le placent face à un tragique dilemme de style « loose-loose » : Négocier un compromis territorial avec Moscou, donc consentir peu ou prou à une partition du territoire ukrainien, comme l’enjoignent désormais à mi mots de le faire Américains et Britanniques ? Impossible sauf à se mettre lui-même en danger vital face à la fureur des ultras.  Maintenir ses positions de plus en plus intenables au regard de la réalité militaire sur le terrain, et prétendre reprendre tous les territoires conquis par Moscou, jusqu’à la Crimée, en espérant provoquer enfin l’engagement de l’OTAN, comme le montre son insistance à vouloir accréditer la responsabilité russe dans la pénétration d’un missile sur le territoire polonais contre toute évidence et malgré les démentis circonstanciés de Washington ? Cette attitude pourrait bien précipiter son lâchage par ses plus grands pourvoyeurs d’armements et de subsides. A-t-il compris que sa survie politique dépendra de sa capacité à retomber sur terre, à admettre que l’armée russe est en train de préparer son offensive d’hiver, que le rapport des forces est sans équivoque en sa défaveur, bref qu’il ne peut gagner militairement mais va devoir négocier un compromis s’il veut préserver le peu qui reste de son pays plongé dans le noir, le froid, le délabrement économique et dont même le système de télécommunications est de plus en plus aléatoire ?

    Bref, V. Zelinsky est entre le marteau et l’enclume. Il sait bien, comme d’ailleurs les Polonais, que seule une zone d’exclusion aérienne au-dessus du ciel ukrainien aurait une chance peut-être de préserver ce qu’il lui reste de forces. Mais c’est hors de question pour Washington. Ses alliés occidentaux semblent d’ailleurs connaitre une phase de lassitude et d’inquiétude devant le jusqu’au-boutisme de plus en plus désespéré de leur proxy. Les stocks européens et même américains d’armements sont en train de fondre, et nos armées vont bientôt refuser de s’affaiblir davantage pour le renforcer. Les armes qui sont données à Kiev de toute façon ne renverseront pas la donne militaire. « On » ne le peut ni surtout ne le veut pas, et le jeu des postures commence à montrer ses limites. Le premier ministre britannique Richie Sunak est venu le dire à Kiev il y a quelques jours. Rien n’a filtré de l’entretien qui a dû être désagréable aux oreilles de Zelenski…

    Certes il y a, aux États-Unis, les faucons démocrates néoconservateurs forcenés autour du secrétaire d’État Blinken et de son Département… Mais ils sont eux aussi de plus en plus en butte aux réserves, pour dire le moins, du Pentagone. Le Secrétaire d’État à la défense Lloyd Austin a très récemment rappelé lors d’une conférence à Halifax (où Zelenski est apparu pour dire qu’un cessez-le-feu n’avait aucune chance de durer, ce qui est probablement vrai à ce stade du conflit), que « la Russie disposait d’une armée puissante et d’armes impressionnantes ». Il a aussi dit l’indicible : « l’issue de la guerre en Ukraine définira les contours du monde du 21eme siècle » ! Rien de moins. Le CEMA américain, le Gal Milley a lui clairement affirmé que la seule issue à ce conflit est la négociation. Quant au secrétaire général de l’OTAN, il a abondé en rappelant qu’une défaite de l’Ukraine serait aussi celle de l’Alliance. Barak Obama lui-même, en 2016 déjà, avait reconnu que la Russie disposait d’une incontestable « dominance dans la capacité d’escalade ». Il parlait d’or. Mais cette soudaine lucidité arrive bien tard.

    Si l’enjeu est celui d’un retour à la réalité à Kiev comme à Washington, Londres ou Paris, le conflit des perceptions et surtout des « informations » brouille cette prise de conscience urgentissime. Les médias occidentaux persistent à voir dans les quelques avancées des forces ukrainiennes (par retrait des troupes russes) comme à Kharkov ou Kherson, les prémices d’une grande victoire militaire ukrainienne. On en est pourtant loin. Kherson, cadeau empoisonné, devient très difficile à approvisionner et les forces ukrainiennes toujours sous le feu russe depuis la rive est du Dniepr, commencent à appeler les habitants à la quitter. Les pertes sont lourdes, et les forces armées de Kiev sont de plus en plus suppléées par des troupes polonaises voir américaines présentes au nom d’une discrète « coalition des bonnes volontés » sans pour autant vouloir le moins du monde provoquer de trop une Russie en train de se préparer à une offensive d’hiver et d’injecter méthodiquement ses 300 000 réservistes récemment mobilisés. La Russie se prépare à durer et poursuivre sa guerre d’attrition avec des objectifs de moins en moins limités. L’échec de la politique de sanctions et la description récente par le vice-premier ministre russe de son pays comme d’une « île de stabilité » dans un monde chaotique, même si elle doit être évidemment pondérée, traduit une réalité douloureuse. Le fantasme des néoconservateurs américains de détruire l’économie, l’armée et le pouvoir russes a explosé en vol. Les USA et plus encore l’Europe se sont laissé entrainer par l’hubris belliqueux de certaines de leurs composantes gouvernementales et politiques dans un piège dont l’issue pourrait bien être la démonstration éclatante du déclin de l’Occident et la fin de l’hégémon américain.

    En fait, nous faisons face à la nécessité douloureuse de sortir de notre rêve- abattre la Russie- avant que la déroute ne soit trop humiliante. Deux méthodes s’offrent pour cela aux Américains : la méthode « douce », consistant à laisser Zelenski s’enfoncer en le lâchant progressivement et en lui disant que c’est à lui de décider quand il faudra négocier avec Moscou ; la méthode « radicale », en fait plus bénéfique dans ses effets pour le pays et le peuple ukrainien : négocier directement avec Moscou un compromis territorial et surtout stratégique (c’est-à-dire la neutralisation définitive de l’Ukraine), assécher brutalement le flux d’armes et d’argent  pour imposer les termes d’un accord réaliste à Zelenski qui devra faire de nécessité vertu et y trouverait une « excuse » auprès des ultras qui l’entourent.

    Dans un monde en noir et blanc tel que nous aimons le voir, supporter que « le méchant » gagne n’est pas facile. Mais c’est ce qui nous préserverait de pire encore. On pourrait inscrire une telle négociation dans une vaste refondation intelligente des équilibres de sécurité en Europe et reconstruire à grands frais l’Ukraine pour se faire pardonner de l’avoir instrumentalisée…Mais pour avoir le courage d’une telle approche, qui douchera les opinions publiques occidentales, il faudrait des hommes d’État capables de prendre ces décisions douloureuses et salutaires. Or, c’est une espèce en voie de disparition en Occident, où les politiques à courte vue appuyés sur des médias peu critiques, bercent complaisamment les peuples d’illusions et de « narratifs » engageants mais faux, pour obtenir leur consentement à l’affrontement tout en leur promettant qu’il ne leur en coutera pas grand-chose.  Cette fois-ci pourtant, ce mensonge devient trop gros : Les sanctions sont un échec, les Européens ont froid, voient leur richesse fondre à vue d’œil et commencent à se demander s’ils ne seraient pas les dindons ultimes de cette farce.

    Les États-Unis devraient aussi se demander pourquoi ils se sont engagés si loin et finalement ont accéléré la bascule du monde et notamment des pays du sud à leur détriment ? Sans doute auraient-ils eu plus à gagner en poussant les Ukrainiens à appliquer les Accords de Minsk 2 au lieu de les en dissuader, et plus encore à négocier un traité honnête et équilibré sur la sécurité en Europe avec la Russie quand celle-ci le demandait à toutes forces, encore en décembre dernier, au lieu de franchir la ligne rouge ukrainienne la fleur au fusil…des Ukrainiens.

    Nous sommes désormais engagés dans une longue guerre d’attrition et l’Occident risque d’en sortir avec un discrédit politique, stratégique et militaire massif. Ne parlons pas de l’OTAN…Quant à l’Europe, ainsi que l’a rappelé le Général de Villiers, cette guerre n’est pas de son intérêt, encore moins de celui de la France, qui doivent entretenir des relations normales et apaisées avec la Russie. Est-il trop tard pour casser cette spirale dangereuse et sortir de ce piège ? Il faudrait que Washington choisisse vite la méthode dure évoquée plus haut. Comme l’a récemment rappelé Dimitri Medvedev, les puissances occidentales sont piégées dans un soutien à un gouvernement irresponsable qui ne peut lui-même, sans précipiter sa propre perte, négocier le compromis indispensable ; car celui-ci va devoir se discuter « sur la base de la réalité existante » ainsi que récemment rappelé par Serguei Lavrov, c’est-à-dire sur la base du contrôle de plus en plus avancé des 4 oblasts intégrés formellement à la Fédération de Russie. Évidemment, en Europe et dans certains cercles de pouvoir à Washington, « la réalité existante » est un déni de la réalité militaire, c’est-à-dire un recul des forces russes dont on veut croire qu’elles sont exsangues…. Il faut souhaiter que dans ces querelles des chapelles washingtoniennes, les réalistes et les militaires l’emportent et entament une négociation directe avec Moscou. La récente rencontre entre les chefs du renseignement américain et russe est peut-être un heureux présage. Il faut le souhaiter pour le malheureux peuple ukrainien mais aussi pour notre sécurité à tous.

    Caroline Galactéros (Geopragma, 21 novembre 2022)

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