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Génétique et criminalité, contre la chasse aux sorcières...

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site du Nouvel Économiste et consacré aux recherches scientifiques sur l'existence d'une prédisposition génétique à la criminalité...

 

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Génétique et criminalité, contre la chasse aux sorcières

Publiée en octobre 2014 dans la revue Molecular Psychiatry, sous la direction du professeur Jari Tiihonen (service des neurosciences du Karolinska Institutet, Suède), une étude majeure relance une fondamentale question, presque aussi ancienne que la criminologie elle-même : y a-t-il d’irrémédiables “gènes de la violence” ? Naît-on criminel en raison de ses gènes ? Le devient-on du fait des circonstances, ou bien de son enfance ?

Avant de présenter cette étude, le criminologue doit ici lancer un cri d’alarme, visant à éviter à la société française un désastre analogue à celui qu’elle a subi, et subit encore, dans le domaine voisin de l’autisme.

Voisin, car dans les deux cas, de sectaires idéologues ont usé et usent de violences verbales, de menaces et d’intimidations – voire lancent de vraies chasses aux sorcières – pour interdire toute approche génétique et imposer une vision archaïque, purement psychanalytique (autisme) ou fondée sur le seul déterminisme social (criminologie).

Un utile rappel car pour l’autisme, les adeptes du tout-psychanalytique font tout pour occulter la catastrophe qu’ils ont provoquée. Pendant trente ans et plus en effet, ces extrémistes de la psychanalyse ont imposé à la psychiatrie française une doctrine pour laquelle “le facteur qui précipite les enfants dans l’autisme est le désir de ses parents qu’il n’existe pas”. La terrible sentence est de leur gourou Bruno Bettelheim, qui popularisa aussi celle, toute aussi affreuse, de “mère frigidaire”.

Au passage, on reconnaît ici la commune passion de tous ces ayatollahs psy ou sociologues-critiques : celle de culpabiliser ; la mère dans le cas de l’autisme, les citoyens honnêtes, dans celui du crime.

En matière d’autisme, il faudra attendre 2012 – alors que partout ailleurs dans le monde, le tyrannique et manipulateur M. Bettelheim était discrédité – pour que le tout-psychanalytique soit enfin désavoué en France, au profit d’approches génétiques et épidémiologiques. Pour la présidente d’Autisme-France, le résultat est clair : notre pays “a quarante ans de retard, le chantier est phénoménal”.

Évitons le même triste sort pour l’approche génétique de la criminologie, car à coup sûr, notre biologie, nos gènes et notre anatomie cérébrale influent sur nos comportements violents ; et des études comme celle du prof. Tiihonen et de ses collègues européens et américains aideront à expliquer et motiver l’acte criminel violent.

Même si aujourd’hui rien – et surtout pas l’étude du prof. Tiihonen – ne laisse augurer de futurs dépistages génétiques anti-crime, il importe donc, dans l’intérêt même de notre vie sociale, d’étudier au plus près la part génétique dans les comportements criminels.

Le cadre de l’étude

C’est la première de ce type portant sur un si grand nombre de criminels violents : environ 900 Finlandais emprisonnés pour de tels crimes ; eux-mêmes comparés à des malfaiteurs non violents et à la population générale. Notons ici que les violeurs sont exclus de cette étude et que 20 % des détenus sollicités ont refusé d’y participer.

L’étude intègre d’éventuels facteurs environnementaux (alcoolisme, toxicomanie, personnalité antisociale, maltraitance infantile, etc.), mais qui n’affectent pas vraiment ses résultats.

Une question cependant : la Finlande est un pays ethniquement homogène ; quel résultat attendre d’un pays hétérogène comme le Brésil ? Pour de tels pays, une autre étude serait nécessaire.

Résultat de l’étude

Deux gènes mutés ont l’effet le plus important sur des comportements agressifs violents. Ils sont présents avec “une fréquence nettement plus élevée” chez les malfaiteurs violents.

Les gènes en cause :

– Maoa : il commande la production d’un enzyme (monoamine-oxydase) intervenant dans l’élimination de neurotransmetteurs comme la sérotonine ou la dopamine. La déficience de cet enzyme du fait du gène muté provoque une hyperactivité de la dopamine, cas déjà décrit et relié au risque d’épisodes violents.
– CDH 13 (Cadherin 13) : ce gène est impliqué dans les troubles du contrôle de l’impulsivité (poussant à l’abus de l’alcool ou à l’usage de stupéfiants, amphétamines, surtout).

Constatations positives :

- De 5 à 10 % minimum de tous les crimes violents commis en Finlande le sont par des porteurs de ces gènes mutés.

- Les porteurs de ces gènes mutés ont 13 fois plus souvent un passé d’agresseurs violents que les non-porteurs.

- L’association gènes mutés-violence est la plus étroite pour les criminels les plus agressifs. Au sommet du groupe violent, les 78 individus ayant (au total) commis 1 154 homicides ou tentatives, agressions violentes, etc. sont tous porteurs du gène Maoa muté.

- Idem, pour un groupe de contrôle de 114 auteurs d’au moins un homicide ; les malfaiteurs non violents n’ont en général pas ce profil génétique.

Motifs de prudence

Ces gènes mutés abondent dans la population générale considérée : jusqu’à un individu sur cinq les porte. Or la grande majorité de ces porteurs, même de combinaisons génétiques à haut risque, n’agressera ni n’assassinera jamais.

Directement ou non, des dizaines, voire des centaines d’autres gènes peuvent influer sur l’agressivité ou la violence, mais pas autant.

Le groupe le plus violent de l’étude comprend quand même des non-porteurs des gènes mutés.

L’effet des gènes mutés porterait sur 5 à 10 % de la centaine de facteurs théoriques de risque de violence estimés, pour un individu.

Cette étude révèle ainsi un modèle nouveau, selon lequel divers facteurs génétiques prédisposeraient (à quel point ?) au crime.

Mais la justice, dans tout cela ?
Intéressantes pour des magistrats, de telles études ne sauraient, à court terme, les bouleverser. Rappelons pour conclure que le juge doit d’abord établir si l’accusé comprend ou non les conséquences de son acte ; s’il contrôle ou pas ses pulsions et son comportement. La justice apprécie ainsi la responsabilité pénale d’un individu, et pas un risque génétique.

Xavier Raufer (le Nouvel Économiste, 12 janvier 2015)

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