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  • La percée du nationalisme en Europe de l’Est est-elle liée à une nostalgie des régimes communistes ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Lionel Baland, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la spécificité de l'ancienne Allemagne de l'Est, dont on voit la population voter majoritairement pour deux partis populistes anti-immigration, l'un de droite et l'autre de gauche...

     

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    La percée du nationalisme en Europe de l’Est est-elle liée à une nostalgie des régimes communistes ?

    Si la montée en puissance des idées nationalistes en Europe de l’Ouest s’explique par l’arrivée massive d’immigrants posant des problèmes graves et par la désindustrialisation produite par la mondialisation effrénée, elle questionne en Europe de l’Est où les étrangers non-européens sont, pour le moment, encore peu nombreux et où l’économie est en plein développement.

    Parmi les endroits situés au sein de l’ancien bloc de l’Est où le nationalisme monte, l’Est de l’Allemagne présente la particularité, pour le moment unique, de combiner le fait d’avoir, d’une part, connu le communisme et, d’autre part, d’être confronté à la présence importante de migrants, arrivés après l’ouverture en 2015 des frontières par la chancelière fédérale démocrate-chrétienne (CDU) de l’époque, Angela Merkel, qui a ensuite réparti ceux-ci dans l’ensemble de son pays, y compris au sein de la partie orientale.

    Cette zone voit désormais deux partis de type nationaliste y obtenir des résultats éclatants : une version de droite appelée Alternative für Deutschland (Alternative pour l’Allemagne – AfD) et une de gauche anti-immigration, le Bündnis Sahra Wagenknecht – Für Vernunft und Gerechtigkeit (Alliance Sahra Wagenknecht – Pour la raison et la justice – BSW), dont la figure de proue et co-présidente est Sahra Wagenknecht. Si l’AfD est patriote ; dans l’Est, elle peut être qualifiée clairement de nationaliste et son programme, qui est libéral d’un point de vue économique et social au niveau fédéral (avec comme fer de lance de cette tendance la co-présidente fédérale du parti Alice Weidel), est dans l’Est plus axé sur le « patriotisme solidaire » théorisé par l’écrivain de la Nouvelle Droite allemande Benedikt Kaiser dans son ouvrage Solidarischer Patriotismus. Die soziale Frage von rechts (« Patriotisme solidaire. La question sociale vue de droite ») paru en 2020.

    Cette demande, forte d’un point de vue électoral de plus de solidarité et de plus de protection face à la mondialisation et à l’immigration de masse, est-elle liée à une nostalgie de l’époque de la République démocratique allemande (RDA) communiste ? L’historien allemand Ilko-Sascha Kowalczuk, qui est un des experts les plus renommés de l’histoire de la République démocratique allemande et qui s’oppose à la montée en puissance de l’AfD et du BSW dans l’Est de l’Allemagne, qu’il lie au phénomène illibéral représenté par le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, publie un ouvrage au sein duquel il tente d’éclairer cette question : Freiheitsschock. Eine andere Geschichte Ostdeutschlands von 1989 bis heute (« Choc de la liberté. Une autre histoire de l’Allemagne de l’Est de 1989 à aujourd’hui »).

    Le choc de la transformation

    Ilko-Sascha Kowalczuk estime que, lors de la chute du mur de Berlin et du rideau de fer, la population d’Allemagne de l’Est a subi un choc face à l’arrivée de la société ouverte, théorisée par le penseur libéral Karl Popper au sein de son ouvrage La Société ouverte et ses ennemis (1945) ; et de nombreuses personnes n’ont pas perçu ce changement en tant que libération. De plus, les habitants de l’Est ont pensé que la société ouverte apporte nécessairement la prospérité économique, ce qui n’est pas le cas.

    Après la chute du communisme, à la fin de l’année 1989, et la réunification de l’Allemagne survenue moins d’un an plus tard, les habitants de l’Est, qui s’attendaient à de lentes modifications, à l’impact limité, se sont retrouvés face à des transformations radicales. De nombreuses personnes ont été déçues et désillusionnées par ces changements et la précarité qui en a découlé. De plus, en République démocratique allemande, la société civile était quasi inexistante, sauf au sein des Églises, et n’était pas souhaitée par le parti politique dominant, le SED, et la Sécurité d’État, la Stasi. Le nationalisme était, en fait, répandu au sein de la RDA. Dans l’Est, l’ancrage des partis politiques reste faible et la banalisation du passé communiste et national-socialiste y est plus développée. Inutile de dire que la réunification y a laissé des traces, car elle a créé de nombreuses injustices. Elle est perçue comme une opération ayant permis la vente à la découpe de l’économie est-allemande à des intérêts financiers de l’Ouest de l’Allemagne. Les Allemands de l’Est, les « Ossis », se sentent considérés comme des citoyens de seconde zone qui ont été discriminés tant à l’Ouest de l’Allemagne (car considérés comme « arriérés » et non-adaptés aux exigences productivistes de l’économie de marché) que chez eux où des personnes arrivées de l’Ouest du pays réunifié ont mis la main sur des postes importants au sein de l’appareil d’État ou y ont implanté des commerces et entreprises en disposant de fonds financiers dont étaient dépourvus les habitants de l’Est du pays. Un fait à noter donc : la dénonciation des élites par l’AfD porte avant tout sur celles de l’Ouest. Bien que né en ex-RFA, ce parti obtient ses meilleurs scores dans l’ancienne RDA. La presse du Système, perçue comme une émanation de l’Ouest, y est déclarée « mensongère ».

    La voix de l’Est

    Alors que, lors des dernières élections législatives de 2021, le parti post-communiste Die Linke n’a décroché que 4,9 %, n’atteignant pas le seuil électoral des 5 %, et ne doit sa présence à la Chambre des députés – en recevant 39 sièges – qu’à l’obtention de trois mandats directs dans l’Est, Sahra Wagenknecht, qui est issue de ce parti et a annoncé le quitter en octobre 2023 pour former le BSW, bénéficie d’un grand nombre de passages dans les médias nationaux car elle est perçue comme la voix de l’Est du pays.

    « Beaucoup de ce que l’AfD ou le BSW représentent, par exemple un État fort, une posture anti-occidentale liée à une proximité avec des États autoritaires comme la Russie, l’aspiration à une société homogène, une orientation nationale-ethnique de la politique sociale, des frontières fermées, un rejet de l’Europe et de l’euro, la mise en avant du principe de “L’Allemagne d’abord” et un point final aux débats épuisants sur l’histoire allemande obtiennent une grande résonance dans l’Est de l’Allemagne, par-delà le clivage entre les partis », résume Ilko-Sascha Kowalczuk (p. 182).

    L’auteur pense que l’actuelle percée de l’AfD dans l’Est, avec des cadres politiques venus de l’Ouest, se répercutera aussi, demain, dans la partie occidentale.

    La population de l’Est a compris, à la suite du crash financier de 2008, que tout ne va pas de soi dans le capitalisme et se trouve face à l’instabilité créée par le défi de l’évolution due à la digitalisation. Elle se tourne en conséquence vers la sécurité et le passé. Or, l’Est de l’Allemagne dispose d’une longue tradition autoritaire : Empire allemand, République de Weimar, Troisième Reich, RDA. Ainsi les Allemands de l’Est se sentent-ils solidaires avec la Russie car ils voient en Vladimir Poutine le représentant d’une position anti-occidentale et anti-américaine.

    Deux ouvrages qui ont rencontré un grand succès, et qui n’apportent selon Ilko-Sascha Kowalczuk rien de nouveau en termes de contenu, ont dernièrement façonné le débat : Der Osten : Eine west-deutsche Erfindung (« L’Est : une invention Ouest-allemande ») du professeur de littérature Dirk Oschmann et Diesseits der Mauer. Eine neue Geschichte der DDR 1949-1990 (« De ce côté du mur. Une nouvelle histoire de la RDA 1949-1990 ») de l’historienne Katja Hoyer. Le premier rend responsable l’Ouest de tout ce qui ne va pas depuis 1990 et innocente l’Est. Le deuxième présente la société de la RDA comme ayant été harmonieuse et éloignée des dirigeants dictatoriaux dont elle se souciait peu. L’Ostalgie – nostalgie de l’Allemagne de l’Est communiste – a pris le dessus sur le souvenir des désagréments de l’époque.

    La lutte est lancée

    Ilko-Sascha Kowalczuk estime que le système libéral est menacé dans de nombreux pays d’Europe, le Danemark constituant à ses yeux une exception, car les sociaux-démocrates y ont repris et appliqué une partie de la rhétorique des partis patriotiques, leur coupant ainsi l’herbe sous les pieds.

    Lui, qui a connu le régime communiste de la RDA, puis sa chute et le triomphe du libéralisme, craint fortement que le système actuel ne tombe à son tour. En effet, dans l’Est de l’Allemagne – et peut être aussi à l’avenir à l’Ouest –, les partis politiques du Système, représentant la société ouverte libérale, peuvent perdre la bataille contre les trois partis anti-système qui prétendent renouer avec la grandeur du passé : les nationalistes de l’AfD, les nationaux-bolcheviks du BSW et les post-communistes de Die Linke. Le match est lancé et il n’y aura qu’un vainqueur.

    Lionel Baland (Site de la revue Éléments, 24 octobre 2024)

     

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  • Feu sur la désinformation... (480)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou et Lucas Chancerelle.

     

                                           

    Au sommaire cette semaine :

    L'image de la semaine : l’incendie d’une église dans le Pas-de-Calais par un multirécidiviste. Nous vous dirons ce que les médias taisent sur le profil du présumé coupable.

    Dossier du jour : les tergiversations d’Emmanuel Macron pour nommer son Premier ministre et les enjeux de loges et de médias derrière ce choix.

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    Pastilles de l’info :

    1) La suite du feuilleton Arcom vs Hanouna
    2) Victoire de l'AfD en Allemagne : les médias amers
    3) International : France Info au summum de sa forme !
    4) Les intérêts des oligarques français en Ukraine
    5) Dissonance médiatique quant aux JO de Paris

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    Portrait piquant (en partenariat avec l’OJIM) : Laure Mandeville, surnommée “bons baisers de Washington”.

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  • La droite identitaire allemande rebat les cartes !...

    Le 22 janvier 2024 sur Radio Courtoisie, le Libre journal "Vivre la civilisation européenne", animé par Romain Petitjean, recevait Lionel Baland et Antoine Dresse (alias Ego Non) pour évoquer l’irruption spectaculaire d’une droite conservatrice et identitaire dans le paysage politique allemand

    Journaliste belge, Lionel Baland anime un blog qui suit de très près l’actualité des partis patriotiques en Europe. Il est l’auteur de Jörg Haider, le Phénix - Histoire de la famille politique et libérale et nationale en Autriche (Éditions des Cimes, 2012).

    Ego Non, spécialiste de philosophie politique, au fait des grandes dynamiques politiques en cours en Europe centrale et occidentale, vient de publier un essai intitulé Le réalisme politique -  Principes et présupposés (La Nouvelle Librairie, 2024), dans la collection Longue Mémoire de l’Institut Iliade.

     

                                            

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  • Feu sur la désinformation... (245)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et dirigée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, avec le concours de Nicolas Faure.

    Au sommaire :

    • 1 : Villeurbanne : islamisme et relativisme médiatique
      Un migrant afghan a poignardé mortellement un jeune Savoyard de 19 ans et blessé plusieurs personnes à Villeurbanne. Les médias ont tout fait pour relativiser l’attaque islamiste.
    • 2 : Revue de presse
      Dans cette nouvelle rubrique, nous balayons quelques actualités médiatiques particulièrement intéressantes. Censure, bien-pensance et folie végane, il y en a pour tous les goûts !
    • 3 : Condamnation inique, silence médiatique
      Trois militants identitaires ont été iniquement condamnés pour avoir mené une opération symbolique de sécurisation des frontières dans les Alpes. Les médias ont fait profil bas.
    • 4 : Vers le réveil allemand ?
      Pour clore l’émission, Jean-Yves Le Gallou analyse la hausse notable des scores de l’AFD en Allemagne.

                                    

                                          

     

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  • Feu sur la désinformation... (205)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés, consacrée au décryptage des médias et dirigée par Jean-Yves Le Gallou, président de la fondation Polémia, avec le concours d'Hervé Grandchamp.

     

    Au sommaire :

    • 1 : Mélenchon est-il un méchant con ?
      Perquisition de l’appartement de Jean Luc Mélenchon et des locaux de la France Insoumise, de nombreux journalistes dénoncent la violence du député, un éclat de trop ou une justice aux ordres du pouvoir politique ?
    • 2 : Le Zapping d’I-Média 
      Dimanche 14 octobre, élection régionale en Bavière. Pour beaucoup de journalistes, les résultats montrent la percée des verts, et de « l’extrême droite », l’AFD. Certains journalistes n’hésitent pas à faire le parallèle entre les années 30 et la percée de l’AFD.

    • 3: Balance ton post, balance ton contrevenant
      Balance ton post, la nouvelle émission de Cyril Hanouna ferait dans le sulfureux. L’animateur phare de la chaine C8 a invité dans son émission une femme en burqa, et Emile Duport, un IVG sceptique. Devinez quel invité a fait réagir les journalistes et le gouvernement.
    • 4 : Les tweets de la semaine
      Le conseil d’Etat retoque une décision du CSA contre Zemmour. La radio RTL avait été mise en demeure par le CSA suite à une chronique d’Eric Zemmour pour un « éloge à la discrimination ». La plus haute juridiction administrative a considéré que le principe d’égalité devant la loi, qui interdit tout forme de discrimination, n’interdit pas toute critique à son égard.
    • 5 : L’enquête Inch’Allah, des journalistes avec un train de retard
      Deux journalistes du Monde Davet et Lhomme, publient une enquête sur l’islamisation de la France. Inch Allah une enquête décrite comme rigoureuse, mais une enquête presque plus évoquée sur la forme que sur le fond. 

     

                                  

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  • Chemnitz : fin ou renaissance du peuple allemand ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Olivier Tisier, cueilli sur Metamag et consacré à l'impact qu'ont eu en Allemagne les manifestations de Chemnitz, provoqués par le meurtre d'un Allemand par des migrants. Olivier Tisier vit et travaille en Allemagne.

     

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    Chemnitz : fin ou renaissance du peuple allemand ?

    Voilà plus d’une semaine que l’Allemagne ne parle que de ça. Dans chaque ville, à chaque coin de rue, dans chaque commerce, chaque entreprise, chaque Kneipe et Kiosk à Lotto de Bundesrepublik… absolument partout!…

    Récapitulons brièvement les faits. Chemnitz, une ville modeste de Saxe. 240 000 habitants, un soir de week end. On fête le 845e anniversaire de la ville dans une ambiance bonne enfant si propre à l’Allemagne. Quand soudain des “réfugiés“ s’en prennent à une jeune allemande dans l’idée de la violer. Un groupe d’Allemands lui vient alors en aide. Parmi eux Daniel Hillig, 35 ans. Il sera poignardé par les agresseurs et perdra la vie. Scénario tragique mais hélas dorénavant classique qui n’est pas sans rappeler la mort du jeune Adrien Perez 26 ans poignardé lui aussi à mort en France à Grenoble cet été à la sortie d’une boîte de nuit dans l’indifférence quasi générale des autorités.

    La suite ? Un coup de tonnerre, une mobilisation sans précédent, des marches et des manifestations en hommage à son acte de courage mais aussi la colère d’un peuple allemand qui est complètement à bout. Un peuple allemand qui a fait sécession avec la politique de Merkel et plus généralement avec ses élites classiques. Tout un peuple ? Hélas non, les traditionnnels antifas organisent contre-manifestations, blocages et violences à l’endroit des quidams qui témoignent leur peine et leur légitime colère. Les médias? Comme d’habitude acquis au politiquement correct et au pas d’amalgame. Ils ont pour mission de prévenir par la doxa toute évolution droitière de l’opinion. Mais aussi de maintenir la police sous pression afin de la rendre zélée sous peine d’être taxée d’empathie voire de collusion avec le peuple qu’elle est chargée de défendre. Et pour finir les traditionnels artistes engagés décidant d’organiser un concert gratuit à Chemnitz pour que l’amour soit plus fort que la haine. Le slogan est breveté internationalement, il faut le croire.

    Déjà la propagande s’enclenche, le nazisme serait de retour en Allemagne

    Oui vous avez bien entendu le nazisme! L’extrême droite menacerait à nouveau la viabilité de l’état allemand et il faudrait à nouveau la combattre pieds à pieds sans attendre. Les contre-manifestations antifas ont d’ailleurs réunis plusieurs milliers de personnes, sentant à juste titre qu’à Chemnitz se jouait une bataille symbolique. Pour l’occasion la société flixbus et blablacar ont même offert des Gutschein, des bons d’achats en cadeau permettant de se rentre à Chemnitz à moindre frais pour y défendre le vivre ensemble aux côtés des bolchos et d’assister aux concerts de rockeurs millionnaires…Mais hélas pour tous ces sinistres représentants d’une Allemagne déconfite, bien plus nombreux étaient les anonymes et les militants nationalistes de toute obédience venus rendre hommage à plusieurs reprises à Daniel. „Nous sommes le peuple“ scandaient ils comme d’autres avant eux lorsqu’ils défiaient le pouvoir totalitaire de la RDA.

    Il y aura un avant et un après Chemnitz car cela a été le crime de trop

    Les Allemands de l’Est ne pardonneront ni n’oublieront jamais. Il faut bien comprendre qu’après guerre on a troqué en Allemagne de l’Ouest le sentiment national contre une douce qualité de vie. Beaucoup d’Allemands de l’Ouest se sont alors vautrés dans un matérialisme répugnant fait de grosses berlines impeccables, de costumes hugo boss, d’appartenance à des clubs de tennis ou de golf, de voyages sur des îles plus ou moins lointaines en compagnie de créatures exotiques plus ou moins majeures… bref la panoplie intégrale du gros beauf fier de son affiliation à une classe moyenne supérieure tant fantasmée. Mais en Allemagne de l’Est, ce fut bien différent et il existe encore des survivances de traditions anciennes, de solidarités locales, de sociabilités et de comportement non-mercantiles. Les „ossies“ , les habitants de l’Est placent leur art de vivre avant toute autre contingence. Ce sont des gens rugueux, peu ouverts au compromis et manquant de souplesse dans les affaires. Mais la préservation de leur modus vivendi est à ce prix. Et c’est de là que provient cette solidarité ethnique. Celle là même qui a fait fuiter le nom de l’assassin et son origine dans la presse ainsi que celles de ses complices. J’imagine qu’un fonctionnaire de justice n’a pas voulu laisser passer. Notons encore que l’importance de l’implication des corps constitués dans un processus révolutionnaire s’avère toujours crucial.

    Pour aborder l’affaire sous le volet politicien, indiquons que l’AfD, parti qualifié d’extême droite a lui aussi manifesté. C’est le seul parti chez qui on ne peut reprocher une quelconque récupération politique car ils ont fait du refus de l’immigration leur cheval de bataille. En Saxe, ils sont de plus sur leurs terres et le cortège fut suivi par plusieur milliers de personnes.

    On entend parler en France d’une arrogance allemande, d’une domination allemande. La domination politique et économique de l’Allemagne sur l’Europe est incontestable mais la domination culturelle ou la fierté nationale? Elle n’existe presque plus ailleurs qu’en Allemagne de l’Est. Figurez-vous que les gens ont plus peur de se faire traiter de facho à l’ouest que d’avouer leur tristesse et leur colère face à la mort de cet homme qui est venu en aide à une femme. Je discutais avec une amie à Berlin originaire du land de NRW, elle ne m’a pas un instant parlé de la mort de cet homme qui est pourtant l’événement principal. Elle m’a confié sa crainte de voir l’extrême droite arriver au pouvoir. On a véritablement corrompu le peuple allemand, on l’a acheté avec de l’argent, du papier et ce dès la fin de la guerre et le début du processus de dénazification qui a vu tous les membres de l’enseignement supérieur suspecté de sympathie nazie être mis au rancard. Et dans tous les segments de la société avec notament l’utilisation du fameux Fragebogen(le Questionnaire) sur lequel a écrit un auteur qui nous est cher, Ernst von Salomon. Questionnaire visant à tirer les vers du nez et à ficher les éventuels éléments réticents au nouvel ordre démocratique et marchand. L’Allemagne a troqué sa vitalité, sa fierté, sa capacité à se penser comme un peuple… bref son identité contre du divertissement et du confort c’est à dire pour devenir en bout de course un pays de vieillards jouisseurs.

    Ce qui s’est passé à Chemnitz, cet horrible drame se reproduira à nouveau nous le savons tous. Il incombe aux jeunes Allemands d’inverser maintenant le cours de l’histoire. Tout n’est peut être pas perdu. L’Allemagne de l’Est se dresse face au pouvoir de Berlin. Il faut que d’autres foyers révolutionnaires se lèvent ailleurs et en particulier à l’Ouest. Mais le dynamisme allemand agit hélas sur tous ou presque comme du bromure. Paralysant ici et là toute volonté de révolte. C’est triste à dire mais il n’y aurait qu’une crise économique violente, plongeant l’Allemagne dans la misère pour relever ce peuple, peuple qui conserve malgré tout en lui des qualités d’organisation, de sérieux et un stoïcisme dans l’épreuve qui continue de forcer notre admiration.

    Olivier Tisier (Metamag, 24 septembre 2018)

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