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xavier raufer - Page 17

  • “Sociologie critique”, grands principes et grands sentiments...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur le site du nouvel Économiste et consacré à l'alliance passés entre certains milliardaires rapaces et d'anciens militants trotskistes pour saper les bases de l’État-nation...

     

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    “Sociologie critique”, grands principes et grands sentiments

    Imaginons qu’un chercheur proche de la droite libérale ou nationale fasse financer une étude par un oligarque ami de Poutine – en prime, un peu filou. Qu’est ce qu’il prendrait ! On entend d’ici le tollé des journalistes-procureurs sur l’affreuse compromission… Le retour des collabos. Une pétition indignée dénoncerait l’étude “qui ne passe pas”… Une manif’ peut-être…

    Prenons à l’inverse un chercheur partisan de la gauche radicale, hostile à la “société de classes”. De ceux qui excusent tout malfaiteur ou terroriste, sanguinaire djihadi ou migrant-violeur, comme “victime de l’exclusion et du racisme”. Quelle chance il a, ce “sociologue critique” ! Car lui peut toucher des subventions de fort glauques requins de la finance, et dans un silence de cathédrale, encore.

    Désignons d’abord le requin, puis voyons qui il “aide” et pourquoi. Voici M. George Soros, capitaliste “de gauche”, déjà condamné et re-condamné par la justice française ; enfin, débouté par la Cour européenne des droits de l’homme, suite à sa condamnation pour une arnaque visant la Société Générale.

    Est-il calmé ? Non. En décembre dernier, le ‘New York Times’ – qui est loin du brûlot anticapitaliste – s’indigne : alors que “les inégalités sont les plus criantes depuis un siècle”, des milliardaires ont, pour “fuir l’impôt”, monté à leur seul profit un indécent système d’évasion fiscale. Passons les détails : sous le titre “A Private Tax System Saves Billions For The Wealthiest”, l’“ésotérique combine” est révélée par le ‘New York Times’ du 30 décembre dernier.

    Parmi ces ploutocrates, "the liberal billionnaire George Soros" dont le NYT, choqué, souligne qu’il “appelle publiquement à taxer les plus riches, tout en s’enrichissant plus encore par l’évasion fiscale”.

    Rappel : M. Soros possède 24 milliards de dollars – peu taxés, car il a liquidé son hedge fund (terme qui, pour l’opinion, pue l’arnaque à cent mètres), pour un aimable “family office”. On a compris que, passant du hedge fund à l’émouvant “bureau familial”, M. Soros évite encore bien des taxes.

    Autre truc lui permettant de “fuir l’impôt”, la philanthropie : M. Soros investit quelques décimales de ses milliards dans des fondations “humanitaires”. Cela fait moins vampire et plus père Noël, donc permet aux médias de le présenter comme “investisseur et philanthrope”, non comme “ploutocrate”. M. Soros se disant “de gauche”, ses fondations font dans les grandes causes comme l’injustice et le racisme.

    C’est ainsi qu’en 2009 (M. Soros est déjà condamné par la justice française), sa fondation Open Society Justice Initiative finance une étude sur les contrôles d’identité “au faciès” de notre police nationale. Dans le jargon de la “sociologie critique”, cela donne “Les stéréotypes et préjugés visant les minorités visibles”. Il s’agit en fait d’intimider la police – à la joie de voyous, voire de terroristes, parmi lesquels le Berrichon n’abonde certes pas. Car bien sûr et sans nuances, l’étude conclut en taxant de racisme exacerbé une police brutale et réac.

    Or qui réalise cette étude, pour la filiale “justice” de l’Open Society Institute de M. Soros ? Deux chercheurs-militants du CESDIP [Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales, ndlr], un libertaire centre de recherche français, notre Vatican de la culture de l’excuse, notre Mecque de la “sociologie critique”. Un centre dont, depuis deux décennies au moins, les positions publiques sont constamment alignées sur celles de la gauche militante la plus extrême, entre trotskisme et anarchisme Des chercheurs et un centre que la subvention d’un prévaricateur condamné n’a pas semblé gêner plus que ça.
    Ainsi se rejoignent deux forces libertaires : des milliardaires et d’ex-militants désormais proches du mercenariat œuvrent ensemble à fragiliser l’État-nation, en l’occurrence français, seul rempart contre les anarchies conjuguées de Wall Street et des quartiers hors contrôle.

    Une idée : durant la révolution culturelle, la direction du Parti communiste chinois se trouva jadis bien gênée. Les gardes rouges s’affirmaient en effet plus à gauche que le PC – ce qui, pour un marxiste-léniniste, est impossible. Pour riposter, la propagande du PC ajouta alors toujours à l’idéogramme “garde rouge”, les signes “de-gauche-en-apparence-mais-de-droite-en-réalité”. Peut-être faudrait-il réhabiliter cet habile logogramme, pour les centres de recherche naguère de gauche et désormais voués à servir M. Soros & consorts ?

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  • Radioscopie de ce que l’on sait maintenant des ratés de l’antiterrorisme...

    Nous reproduisons ci-dessous une analyse du criminologue Xavier Raufer, cueillie sur Atlantico et consacré aux ratés des services antiterroristes français...

     

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    Attentat du 13 novembre, deux mois après : radioscopie de ce que l’on sait maintenant des ratés de l’antiterrorisme

    Une police et des militaires épuisés, dont nombre des cadres et chefs n'ont pas eu un jour de repos - fêtes incluses - depuis le 13 novembre ; au front depuis désormais 60 jours. Des acteurs de l'antiterrorisme plus inquiets encore qu'à l'automne passé, à mesure qu'ils réalisent qu'au-delà de nos frontières, l'Union européenne perd le contrôle de ses territoires et frontières.

    Tétanisées, vouées aux bienséances et aux chamailleries, les impuissants de Bruxelles ont vu le tsunami d'un million de "migrants" déferler sur l'Europe. Tel est le niveau "macro" ; au plan "micro", ce fut pire encore, comme le démontre cruellement le cas Abdelhamid Abaaoud.

    Abaaoud, icône jihadie des revues et vidéos sanglantes de l'Etat islamique "cible prioritaire des services antiterroristes européens". Abaaoud, "star" de  "tous les fichiers antiterroristes de tous les pays de l'UE". Abaaoud dont tout magistrat interrogeant un jihadi rentré de Syrie, entend sans cesse le nom.

    Or depuis la Syrie, Abaaoud arpente en 2015 l'Europe de l'île de Leros à Birmingham, via la Grèce, les Balkans, l'Italie, la Hongrie et l'Autriche ; la France bien sûr et la Belgique. Abaaoud jamais repéré en Europe, dont nul ne s'avisera qu'il est là, avant le massacre du 13 novembre.

    Depuis janvier 2015, les acteurs de l'antiterrorisme font face avec acharnement. D'évidence, le criminologue ne leur fait pas la leçon. Bien plutôt aspire-t-il à situer les tragédies de 2015 dans leur perspective géopolitique et profondeur historique ; à ex-poser un champ de bataille dans le cours d'une guerre.

    D'abord, ce fondamental : Pour Raymond Aron, l'essence de l'Etat-nation tient en ceci : "Respecté à l'extérieur, en paix à l'intérieur". Or en 2015, la France subit les pires attentats de son histoire : 150 morts, plus de 300 blessés. Ce respect, cette paix, sont sévèrement atteints : il faut les restaurer au plus vite. Ceci passe par deux phases : comprendre l'échec d'abord, y remédier ensuite. Car, la mission d'un gouvernement (quel qu'il soit) n'est pas de commémorer, mais d'agir en sorte qu'il n'y ait pas de commémorations à faire.

    L'attaque du 13 novembre

    Ce soir là, de 21h20 à 21h53, trois commandos de moudjahidines sèment la mort dans Paris et alentours. Ces neuf (ou dix) terroristes sont dirigés depuis Bruxelles par une "triple coordination" (selon l'enquête belge), qui maintient avec les assassins un constant contact : une énorme opération, préparée des mois durant entre la zone de jihad, la Belgique et la France. L'enquête achevée impliquera sans doute dans l'action une trentaine d'acteurs de tout niveau : logistique, commandos, coordination.

    Issus du quartier bruxellois de Molenbeek, ces moudjahidines sont de jeunes maghrébins français ou belges. Copains de bistrot ou de prison, tous sont fichés comme voyous, repérés comme radicaux.

    Leur opération nécessite trois planques en Belgique, deux (connues) en région parisienne ; la location d'au moins trois véhicules et un transfert d'argent (connu) par mandat télégraphique.

    Avant l'assaut du 13 novembre, et durant l'action, ces "minutieux" mais peu discrets terroristes voyagent et communiquent intensément.

    Du 17 septembre au 14 novembre 2015, deux d'entre eux (dont un "kamikaze" de Paris) échangent 109 appels téléphoniques. Lors de l'attaque, le seul téléphone d'un terroriste dénombre, en quelques heures, 25 appels entre Paris et Bruxelles. du 15 novembre jusqu'à sa mort du surlendemain, Hasna Aït Boulahcen téléphone 248 fois et envoie 310 messages.

    En octobre 2015, Salah Abdeslam achète une dizaine de détonateurs en région parisienne ; de là au 13 novembre, lui et son frère louent des voitures et sillonnent les routes entre Bruxelles et Paris.

    Renseignement préventif : un échec absolu

    En France, en Belgique ou en Europe, rien de cela n'a été repéré, rien n'a été compris, rien n'a été efficacement préventif. Or comme toujours en pareil cas, les signes avant-coureurs abondaient :

    - Février 2009 : suite à un attentat commis au Caire, (une lycéenne française y est tuée) une suspecte extradée en France signale les préparatif d'un attentat visant le Bataclan, salle dont "le patron juif finance l'armée israélienne". Sur quoi une instruction judiciaire est ouverte en juillet 2010. Côté exploitation de renseignement, rien n'en sort.

    - Août 2015, un jihadi rentré de Syrie révèle aux policiers qu'Abaaoud lui a demandé de tirer dans la foule d'un concert de rock. Le Jihadi insiste : "ça va arriver très bientôt... Là-bas, ils cherchent vraiment à frapper en France...".

    - Avant les attaques visant Charlie-Hebdo et l'Hypercacher, Amedy Coulibaly était vu par les chefs du renseignement intérieur comme un petit voyou. Il n'était donc pas surveillé - tâche pourtant aisée, Coulibaly étant sorti de prison en mars 2014 sous bracelet électronique... Le négligé Coulibaly fréquentait cependant depuis 2010 un groupe de fanatiques du nord-est de Paris signalés depuis 2005 et figurait sur la liste américaine TIDE (Terrorist Identities Datamart Environment), de terroristes potentiels américains et étrangers.

    Aveuglement donc - et en prime, des énormités. Voici Samy Amimour, l'un des bouchers du Bataclan. Au printemps 2012, il peut adhérer à... l'Association nationale de tir de la police (ANTP), après qu'on l'ait gentiment initié au tir au pistolet 9 mm. Sous contrôle judiciaire depuis octobre 2012, Amimour, interdit de sortie du territoire, rend ses documents d'identité et pointe au commissariat - mais file en Syrie en septembre 2013, un juge lui ayant restitué son passeport...

    Une riposte à ce jour rétrospective

    Des journalistes complaisants s'émerveillent de ce que "les préparatifs des terroristes et le déroulement des opérations [soient désormais] retracés avec une grande précison". Les criminologues pensent qu'à l'inverse, le problème est là : avoir appris tout ça après le terrible massacre. Car depuis janvier 2015, la réaction officielle : communication de crise, traitement médiatique, réponse policière, état d'urgence, relève, et ne relève que, du registre rétrospectif.

    L'état d'urgence : ce qui remonte du terrain est que perquisitions et assignations à résidence deviennent inefficace en une semaine, application policière de la célèbre loi des rendements décroissants. Comme ces actions ciblent surtout des bandits que la police veut de longue date cravater, et que dans ce milieu darwinien, la courbe d'apprentissage est forcément rapide, tout s'évapore en quelques jours : armes, éléments incriminants, etc.

    Que faire pour demain ?

    Ici, une question s'impose : comment éviter un nouveau 13 novembre ?

    Les acteurs de terrain de l'antiterrorisme savent trop bien que notre millefeuilles antiterroriste est pesant, fragmenté et alourdi depuis l'été 2015 par une couche bureaucratique supplémentaire. Ce dispositif doit être renouvelé, simplifié, rendu rapide et prédictif. Un problème qualitatif, non quantitatif, et nul apport à l'aveuglette d'hommes et d'ordinateurs n'y remédiera.

    Reste le problème des hommes : accumulant les échecs depuis 2012 et Mohamed Merah, l'actuel dispositif antiterroriste est intact à ce jour. A sa tête, les responsables de ces échecs ont été maintenus ou promus. Nulle sanction n'a jamais été prise. Le gouvernement ne touche à rien, de peur sans doute que le ciel ne lui tombe sur la tête.

    60 jours après, où en sommes-nous

    Eviter le prochain massacre dépendra surtout des réponses données aux questions stratégiques que voici.

    - Trois (ou quatre) des terroristes du 13 novembre ne sont toujours pas identifiés. Qui sont-ils ? D'où venaient-ils ? A qui rendaient-ils compte ?

    - Au-delà, des acteurs majeurs du massacre sont en fuite, certains inconnus, comme les deux coordinateurs de l'opération. Où sont-ils, que trament-ils ?

    - Plus largement : sous surveillance, Abaaoud révèle à sa cousine "avoir profité de la vague de migrants arrivés en Europe cet été pour se rendre en France". On l'identifie en septembre 2015 sur l'île grecque de Leros, parmi les migrants. Le 3 octobre, deux des terroristes inconnus du 13 novembre débarquent à Leros parmi une centaine de migrants. Peu après, on apprend que l'Etat islamique "détient d'authentiques passeports [syriens] vierges, qu'il fournit à ceux qui veulent gagner l'espace Schengen".

    Là, le problème révèle son essence - clairement politique. Car hier encore à Bruxelles ou à Paris, des officiels indignés qualifiaient de calomnie xénophobe le risque d'infiltration terroriste dans les flux migratoires. Or telle était la tragique réalité. Ces terroristes infiltrés dotés de passeports syriens, combien sont-ils ? Combattre pour gagner demande une vision réaliste de la menace. Mais le fan-club de la mondialisation heureuse est-il capable de cela? 

    Xavier Raufer (Atlantico, 15 janvier 2016)

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  • « Qui dit guerre dit effort de guerre » ...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré à la "guerre" menée par la France contre l’État islamique...

     

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    « Il ne sert à rien de supprimer Daech si l’on ne sait pas par quoi le remplacer ! »

    François Hollande a promis aux Invalides de « tout faire pour détruire les fanatiques de l’armée de Daech ». On en prend le chemin ?

    C’est de la gesticulation. Après s’être refusé à bombarder les positions de l’État islamique pendant plus d’un an pour se concentrer sur l’aide apportée aux opposants à Bachar el-Assad, le chef de l’État a seulement décidé d’intensifier nos frappes. Mais des attaques aériennes n’ont jamais permis de gagner une guerre, surtout réalisée par des chasseurs-bombardiers qui ont le plus grand mal à atteindre les cibles mobiles et des ennemis particulièrement aptes à la dispersion et à l’imbrication avec les populations (ne soyons pas naïfs au point de croire que nos frappes ne touchent que des djihadistes !). On compte à l’heure actuelle de vingt à trente frappes par jour sur un territoire grand comme la Grande-Bretagne, soit environ 8.300 frappes depuis le début des bombardements. Les frappes réalisées par nos avions de combat ne représentent que 4 % de ce total. Elles ont, au mieux, permis de détruire 1 % du total des effectifs armés de Daech. On est loin du compte.

    Qui dit guerre dit effort de guerre. Or, depuis des années, les budgets militaires sont les parents pauvres de la dépense publique. Passés désormais au-dessous du seuil de suffisance, ils ne permettent plus d’assurer nos missions régaliennes dans un monde qui devient pourtant toujours plus dangereux. Parallèlement, des milliers de militaires qui pourraient être mieux employés ailleurs ont été transformés en vigiles de rue (les opérations Vigipirate et Sentinelle mobilisent l’équivalent de deux brigades, alors que nous n’en avons que douze). Comme l’a dit le colonel Michel Goya, « il est toujours délicat de jouer les gros bras quand on n’a plus de bras ».

    Que faudrait-il faire ?

    Chacun sait bien qu’on ne pourra pas faire éternellement l’économie d’un envoi de troupes au sol. Mais personne ne s’y résout pour l’instant. Citons encore le colonel Goya : « Il n’y a combat dit asymétrique et résistance souvent victorieuse du “petit” sur le “fort” que tant que ce dernier craint de venir combattre sur le terrain du premier […] Quand on ne veut pas de pertes, on ne lance pas d’opérations militaires. »

    S’assurer de l’étanchéité de la frontière avec la Turquie, aujourd’hui inexistante, serait l’un des premiers objectifs à atteindre. La Turquie joue, en effet, un jeu irresponsable. Tout ce qui l’intéresse est de nuire à Bachar el-Assad et d’empêcher la naissance d’un État kurde indépendant. Elle aide directement ou indirectement Daech, et elle le finance en lui achetant son pétrole. Elle n’a pas hésité à abattre un avion russe parce que celui-ci bombardait des convois pétroliers, et les États-Unis lui ont apporté leur soutien dans cette agression d’une gravité inouïe au seul motif que les Turcs sont membres de l’OTAN.

    Cela pose la question de nos rapports avec l’OTAN, dont le général Vincent Desportes n’hésite pas à dire qu’elle est devenue une « menace sur la sécurité des Européens » et un « outil de déresponsabilisation stratégique » qui « nous prive des moyens de gagner des guerres et constitue le meilleur obstacle à l’édification d’une défense commune européenne indépendante ». À l’inverse, cela devrait nous amener à collaborer sans arrière-pensées avec tous les ennemis de nos ennemis, à commencer par la Russie, la Syrie et l’Iran. Mais soyons sans illusions : tous les spécialistes savent que cette guerre ne peut être qu’une entreprise de longue haleine, qui va durer au moins dix ou vingt ans.

    À supposer que les Occidentaux – ce terme est employé à dessein – aient la capacité technologique de gagner la guerre contre le terrorisme, comment ensuite gagner une paix durable ?

    Parler de « guerre contre le terrorisme » (ou « contre le fanatisme »), comme le font les Américains, n’est qu’une façon détournée de ne pas nommer l’ennemi. Notre ennemi n’est pas le terrorisme. Notre ennemi, ce sont ceux qui utilisent le terrorisme contre nous – et qui nous ont à ce jour plus terrorisé que nous ne les avons terrorisés nous-mêmes. On a tendance, aujourd’hui, à présenter les interventions militaires comme des « opérations de police ». C’est oublier qu’il y a une différence essentielle entre les unes et les autres, car la guerre aspire à la paix par la victoire, tandis que la police poursuit une mission sans fin (on ne fait pas la paix avec les délinquants). Refuser le statut d’ennemis à ceux que l’on combat, c’est s’engager dans des hostilités qui n’en finiront jamais.

    Lutter contre l’État islamique implique de s’attaquer aux causes premières de sa force, lesquelles ne sont pas militaires, ni même religieuses, mais fondamentalement politiques. Il ne sert à rien de supprimer l’État islamique si l’on ne sait pas par quoi le remplacer. S’imaginer que les choses reprendront leur cours normal une fois qu’on aura fait disparaître les « fanatiques » et les « psychopathes », c’est rêver debout. Cela exige une intense activité diplomatique, à la fois nationale et surtout régionale. Au bout du compte, une grande conférence internationale sera nécessaire, qui devra sans doute envisager un remodelage des frontières. Mais dans l’immédiat, il faudrait déjà en savoir plus sur l’État islamique, et se demander – la question a été posée récemment par Xavier Raufer – comment il se fait que ses principaux dirigeants ne sont justement pas des islamistes, mais le plus souvent des anciens cadres de l’armée de Saddam Hussein.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 28 décembre 2015)

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  • Réflexions sur le terrorisme et sur l'Etat islamique...

    Dans un entretien donné samedi 14 novembre 2015 à Elise Blaise et Martial Bild sur le plateau de TV Libertés, Xavier Raufer est revenu sur les attentats du 13 novembre  et sur l’État Islamique qui les a commandités et revendiqués. Criminologue et spécialiste du terrorisme, Xavier Raufer est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Les nouveaux dangers planétaires - Chaos mondial, décèlement précoce (CNRS Editions, 2009), Géopolitique de la mondialisation criminelle - La face obscure de la mondialisation (PUF, 2013) et Cyber-criminologie (CNRS Editions, 2015).

     

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  • Schengen et les frontières mentales...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur Le nouvel Économiste et consacré à l'incapacité de nos dirigeants à appréhender la crise migratoire en cours...

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    Schengen et les frontières mentales

    Face au tsunami humain déferlant sur l’Europe depuis l’Afrique et le Proche-Orient, nos dirigeants restent pétrifiés, tel un lapin pris dans les phares : com’, bavardage, conciliabules – rien de stratégique, rien de fort. Et la direction de l’Union européenne (UE) – s’il y en a toujours une ? C’est pire encore, si possible.

    D’abord ceci : un criminologue s’exprime sur ce point, car à l’échelle continentale, cette marée humaine suscite bien sûr des périls criminels et sanitaires multiples. Or en pareil cas, toute réflexion sensée permettant de reprendre l’initiative impose de partir des fondamentaux. Selon nous, les voici:

    - Que veut le peuple français ; que veulent ceux de l’Union européenne ?
    En France, l’opinion exige qu’on supprime la passoire-Schengen (IFOP-Le Figaro, 9/07/2015) 7 Français sur 10 demandent le retour des frontières nationales (pour supprimer Schengen : socialistes, oui 53 % ; UMP, 77 %). Dans l’UE, tous les peuples veulent abolir Schengen !

    - Quelle est aujourd’hui la préoccupation majeure des opinions de l’UE ?
    (Le Figaro/Eurobaromètre 2/08/2015 ; enquête antérieure au tsunami migratoire), 1/l’immigration, 38 % ; 2/l’économie, 27 % ; 3/le chômage, 24 %.

    - Que pensent les Français de l’“antiracisme”-monochrome matraqué par les grands médias d’information ?
    Ils s’en fichent (Opinion Way/Licra, octobre 2013), Intérêt pour les entités “antiracistes” : non, 86 % ; oui, 13 %. Pire chez les 25-34 ans, indifférents à 90 % ! Même, cela les agace (IFOP/Valeurs Actuelles, 14/10/2014) : “On ne peut plus rien dire sans se faire traiter de raciste” : vrai, 76 % ; sympathisants de gauche, vrai, 60 % !

    - Que faire alors, face à une menace multiforme, vagues massives de migrants aujourd’hui affamés et demain, peut-être, hostiles ; mais aussi, bouffées terroristes émanant de bandits ré-islamisés, souvent mentalement confus ?
    Là encore et comme en médecine, le diagnostic est tout : s’il est pertinent mais surtout, fait à temps, le traitement n’en agit ensuite que mieux.
    Or l’art de produire de bons diagnostics nous est récemment transmis par un vrai expert, Xavier Guilhou, dans l’excellent bulletin de l’École de management de Grenoble (Comprendre les enjeux stratégiques, CLES, mars 2015). Un entretien au titre grandiose : “Géopolitique des frontières mentales”.

    Voilà ce que dont avertit M. Guilhou :

    – “Ne pas se laisser enfermer dans des habitudes mentales, dans des grilles de lecture, quand bien même elles seraient confortables”…

    – “Sortir de notre angélisme douillet, en finir avec ces débats d’opinion constamment biaisés par l’idéologie ou la paresse intellectuelle”…

    – Combattre “un cruel déficit d’anticipation, une incapacité chronique à imaginer l’inconcevable”…

    – Ne pas “croire que nos interlocuteurs fonctionnent mentalement comme nous”…

    – “Ne pas tricher avec le réel, avec les populations, avec les événements”…

    – “Ce qui fait la différence, c’est l’agilité mentale dans le questionnement”.

    Avertissement de X. Guilhou : “En privilégiant les postures prudentielles, en nous abritant derrière le principe de précaution, en essayant de nous convaincre comme des perroquets qu’ils n’oseront pas toucher au statu quo qui jusqu’ici assurait notre confort, nous allons sciemment à l’échec”.

    Ces “frontières mentales”-là sont aisées à reconnaître ; ce sont celles des personnages qui, au sommet, nous gouvernent et nous informent. Or au XVIIIe siècle déjà, Emmanuel-Joseph Sieyès (1748-1836), nous disait comment réveiller de tels aveugles : “Ne perdez pas votre temps à discuter avec ces sortes de gens. On ne les persuade point ; livrez-les au fouet des événements pour toute réponse” (“Réponse à quelques opinions contre les grandes assemblées et contre la liberté de parole”).

    Xavier Raufer (Le nouvel Économiste, 4 septembre 2015)

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  • Justice, la descente aux abîmes...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du criminologue Xavier Raufer, cueilli sur Le nouvel Économiste et consacré aux dernières trouvailles de la politique d'"humanisme pénal" développée par la ministre de la justice Christiane Taubira...

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    Justice, la descente aux abîmes

    Majesté médiatique tenant l’Élysée d’une poigne de fer, la garde des Sceaux magnifie son “humanisme pénal”. Dernier avatar dudit “humanisme” : le tribunal de Bobigny “va proposer une thérapie aux délinquants souffrant d’addiction”. Traduisons en français la novlangue-Taubira : on soignera des criminels toxicomanes. Hors de prison bien sûr, car inlassablement, tout est fait pour les vider. Concernant des récidivistes qui “bénéficieront d’un programme thérapeutique intensif”, l’initiative visera à “éviter la récidive”.

     

    Un “projet pilote”, vraiment ? Pas du tout. Le fort libertaire entourage de la garde des Sceaux a même récupéré ce projet dans les poubelles du California Department of Corrections (CDC), institution du “Golden State” chargé des affaires pénitentiaires [www.cdcr.ca.gov.].

     

    Et pas dans des poubelles d’hier – plutôt dans leurs tréfonds des années 1950-60, période où le CDC professait un laxisme qu’il délaisse désormais. Quelle était alors sa doctrine ? Celle du projet pilote de Mme Taubira : victimes de la société, les malfaiteurs commettent des crimes parce qu’on ne soigne pas leur toxicomanie ; ou alors, pour le CDC des fifties, leurs troubles mentaux. Dès lors, l’État californien dépense des fortunes en travail social, programmes alternatifs à l’incarcération, etc. Objectif, déjà : éliminer la récidive. Toujours sensible aux modes bien “vendues”, l’Amérique embraye et bientôt, les programmes type CDC essaiment dans nombre des 50 États.

     

    Travelling avant, au début des seventies : la récidive s’est-elle effondrée aux États-Unis ? Non, au contraire ! Des criminologues et des économistes décident alors d’évaluer le résultat concret des fameux programmes “Care” du CDC.

     

    Coup de tonnerre au printemps 1974 : le N° 35 la revue de politiques publiques ‘National Affairs’ publie une étude de l’économiste Robert Martinson intitulée “What Works ? Questions and answers about prison reform”.

     

    Allons à l’essentiel : la plupart des programmes visant à “soigner” des criminels n’ont pas d’effet mesurable et durable. Pourquoi ? Le plus souvent, le bandit est à la fois toxicomane et braqueur ; ou bien schizophrène et cambrioleur ; et non braqueur ou cambrioleur du fait de sa toxicomanie ou de sa pathologie mentale, comme l’imaginait l’idéologie CDC. À la fin de ces thérapies, on retrouve donc une majorité de cambrioleurs ou de braqueurs toujours aussi actifs ; libres bien sûr, et désormais en pleine santé.

     

    Message pour ‘Les Décodeurs’, ‘Le vrai du faux’ et ‘Décryptage’ : l’auteur a écrit sur ce sujet (1985, Éditions Suger) un ouvrage intitulé ‘Le cimetière des utopies’. Il leur fournira sur demande l’original de l’étude “What Works ?” et maints autres documents criminologiques.

     

    Tel est donc le dernier “projet pilote” de Mme Taubira & co. Chronologiquement, le premier d’entre eux consistait à équiper de bracelets électroniques un maximum de condamnés à de courtes peines. En France, ils sont plus de 11 000 individus à en bénéficier aujourd’hui. Or voilà qu’un brouilleur d’ondes chinois, en vente libre sur Internet, permet de bloquer la transmission du signal d’alarme du bracelet vers le centre de contrôle. Depuis mai dernier, cette nouvelle ravit la “France sauvage”, mais laisse la pourtant fort médiatique Chancellerie murée dans un lourd silence.

     

    Xavier Raufer (Le nouvel Économiste, 23 juillet 2015)

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