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moyen-orient - Page 3

  • Décomposition et recomposition du Moyen-Orient...

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    La revue Conflits, dirigée par Pascal Gauchon, vient de sortir en kiosque un sixième numéro hors-série consacré au Moyen-Orient.

    Vous pourrez y découvrir, notamment, outre des entretiens avec Georges Corm ("Nous vivons en enfer depuis 1956") et Fabrice Balanche ("Moyen-Orient : la situation est pire que jamais"), des articles de Pascal Gauchon ("L'enfer et les bonnes intentions"), de Pierre Royer ("Le poids du désert et de l'histoire"), d'Olivier Hanne ("Frontières et seuils au Moyen-Orient" ; "Vers la fin des frontières" ; "Les représentations du Moyen-Orient"), de Frédéric Pichon ("Échecs et résilience du nationalisme arabe" ; "Irak, Syrie, Liban. La grande guerre régionale"), de Florian Louis ("L'Iran menacé ou menaçant ?" ; "L'uniformisation architecturale des métropoles"), d'Anne-Clémentine Laroque ("Le grand jeu djihadiste au Moyen-Orient"),  de Christophe de Crémiers, Pierrick Langlais et Louis-Marie Masfayon ("A l'heure de la défaite de Daech, quoi de nouveau ? Al-Qaïda"), de Pierre Berthelet ("L'eau plus précieuse que le pétrole ?"), de Sébastien Abis ("Ne pas sous-estimer la variable alimentaire"), de Didier Giorgini ("Les clivages religieux au Moyen-Orient"), d'Antoine Basbous ("L'Arabie saoudite, un colosse aux pieds de pétrole"), de Tancrède Josseran ("Turquie, le pays à cheval"), de Hadrien Desuin ("L’Égypte, une grande puissance pauvre"), de Gil Mihaely ("Une villa dans la jungle. Israël au Moyen-Orient"), de John Mackenzie ("Si tu ne vas pas en Orient, l'Orient viendra à toi"), d'Olivier Zajec ("Du parrain omnipotent au géant hésitant"), de Michel Nazet ("Les routes de la soie mènent au Moyen-Orient"), de Jean-Baptiste Noé ("Le Vatican et le Moyen-Orient. Préserver l'ancrage historique"), de Tigrane Yégavian ("Yemen. La guerre oubliée" ; "ndépendance improbable, unité impossible") ou de Marjorie Bordes ("La mosaïque du Golfe persique").

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  • Incertain Orient...

    Les Presses universitaires de France nous propose de revisiter l'histoire récente de l'Orient compliqué avec l'essai de Florian Louis intitulé Incertain Orient - Le Moyen-Orient de 1876 à 1980. Agrégé d'histoire et chercheur à l’École des hautes études en sciences sociales, Florian Louis est un collaborateur régulier de la revue Conflits, dirigée par Pascal Gauchon.

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    "Des bouleversements provoqués par la désagrégation de l’Empire ottoman à ceux engendrés par les chocs pétroliers des années 1970 en passant par la montée des tensions autour de la question palestinienne, le Moyen-Orient a connu un XXe siècle des plus chaotiques. C’est ce parcours, riche en rebondissements, que retrace et éclaire ce manuel, qui ne néglige pas pour autant d’insister sur les puissants ferments de continuité qui structurent une région sise à la charnière de multiples aires civilisationnelles dont elle opère une forme de synthèse originale.
    Une région dont les équilibres ont été reconfigurés tout au long du siècle, tant par les dynamiques et les rivalités qui l’agitaient de l’intérieur que par les influences et les pressions contradictoires qui s’y exerçaient depuis l’extérieur. C’est donc une histoire décloisonnée et connectée qui s’imposait pour rendre toute sa dignité historiographique à un espace trop souvent réduit à un simple terrain de jeu pour puissances exogènes, mais qui s’avère dans les faits avoir été pleinement acteur de son destin, à défaut d’en avoir toujours été maître."

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  • Pourquoi perd-on la guerre ?...

    Les éditions Odile Jacob viennent de publier un essai de Gérard Chaliand intitulé Pourquoi perd-on la guerre - Le nouvel art occidental. Homme de terrain, spécialiste des luttes de libération nationale et des mouvements de guérilla, Gérard Chaliand s'est toujours intéressé à la stratégie, et on lui doit, outre de nombreux essais, une remarquable Anthologie mondiale de la stratégie, régulièrement rééditée dans la collection Bouquins. Il a raconté son parcours dans La pointe du couteau (Robert Laffont, 2011).

     

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    " Depuis le retrait du Vietnam, le bilan militaire de la puissance américaine et de ses alliés occidentaux est sans conteste négatif : conflits coûteux, résultats militaires médiocres, conséquences politiques désastreuses.

    Conjuguant l’histoire, la géopolitique et l’observation du terrain, Gérard Chaliand rappelle quels étaient les ingrédients de la victoire – et donc les raisons actuelles de l’échec, notamment au Moyen-Orient.

    Voulons-nous vraiment gagner ces guerres ? À quel prix ?"

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  • Irak : la revanche de l'histoire ?...

    Les éditions Vendémiaire publient cette semaine un essai de Myriam Benraad intitulé Irak, la revanche de l'histoire. Myriam Benraad est docteur en science politique et spécialiste de l’Irak et du monde arabe.

     

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    " L’État islamique, ou Da‘ech, apparaît aujourd’hui, dans les médias et les représentations politiques, comme l’adversaire absolu de l’Occident, celui qui multiplie attentats et actes de barbarie, qui met le Moyen-Orient à feu et à sang et qu’il faut combattre à tout prix. À l’origine de cet état de guerre perpétuelle et de ce chaos dans lequel ont sombré les populations civiles, il y a, bien entendu, l’intervention américaine du printemps 2003, qui fit des sunnites, accusés d’avoir soutenu le régime de Saddam Hussein, des parias dans le jeu politique irakien, et qui a laissé derrière elle un champ de ruines. Mais il y a aussi, et c’est tout l’intérêt de cet ouvrage que de le démontrer, le partage du Moyen-Orient par les puissances coloniales britannique et française à la suite de la Première Guerre mondiale et du démembrement de l’Empire ottoman : c’est alors que furent créées ex nihilo des frontières qui convenaient aux autorités mandataires mais ne recouvraient aucune réalité historique. Une fois ce constat dressé, et les responsabilités de chacun établies, on comprend mieux les enjeux de l’effroyable désastre qui a frappé la région, et dont aucune analyse, privée de cette perspective de fond, ne permettrait de rendre compte. "

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  • Panorama du Moyen-orient avec Georges Corm...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Georges Corm, consacré à la situation du Moyen-Orient, signalé par Voxnr et cueilli sur Le site Les clés du Moyen-Orient... On notera que l'entretien, qui date de juin dernier, prévoit avec beaucoup de lucidité les événements actuels...

    Économiste libanais, ancien ministre, Georges Corm est l'auteur de nombreux ouvrages consacrés à l'économie ou à l'histoire du Proche-Orient (en particulier, sa somme intitulée Le Proche-Orient éclaté, régulièrement mise à jour). Un de ses derniers essais importants, intitulé Le nouveau gouvernement du monde - idéologie, structures, contre-pouvoirs, a récemment été réédité en collection de poche aux éditions de La découverte.


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    Le Moyen-Orient est en pleine recomposition. Comment expliquez-vous cette évolution ? Etait-elle en germe, et depuis quand ?

    Il y a beaucoup d’observateurs qui pensent en effet que nous sommes dans l’ère de la fin des accords franco-britanniques dits Sykes-Picot (1916) qui ont balkanisé ce qu’on appelait, au début du siècle passé, les provinces arabes de l’Empire ottoman. Ou d’autres qui parlent de période de transition de régimes autoritaires vers des régimes de type démocratique. Je pense que dans les deux cas, nous sommes loin de tels scénarios. En effet, la remise en cause des Etats existants paraît quand même assez difficile, sauf à généraliser des situations de chaos partout. Si nous prenons le modèle syrien, ou éventuellement le modèle libyen où il y a emploi massif d’armes venues de l’extérieur, à la limite on peut dire qu’il y a des zones d’influences qui se mettent en place sous l’égide des grands acteurs régionaux et internationaux. Mais enfin je ne vois pas d’Etats disparaître de la carte et de nouveaux Etats être créés et reconnus, comme cela a pu être le cas avec l’ex-Yougoslavie. Probablement si nous étions en contact géographique direct avec l’Europe, ceci aurait pu arriver, mais sur l’autre rive de la Méditerranée cela paraît quand même nettement plus difficile. D’un autre côté, pour ce qui est de la transition vers la démocratie, le problème qui se pose aujourd’hui est essentiellement celui de la nature des mouvances islamiques sur lesquelles les milieux européens et américains ont misé depuis bien des années. Ces mouvances, trop souvent idéalisées, ont désormais montré leur vrai visage, celui d’un autoritarisme et d’un désir de contrôle des libertés individuelles.

    Nous avons donc un problème aigu, important, qui va déterminer l’avenir : est-ce que les mouvances de type modernistes, laïques ou attachées aux libertés individuelles et qui refusent le référent religieux dans le fonctionnement d’un système politique vont pouvoir s’affirmer face aux mouvances islamiques ? On peut être inquiet si l’on prend en compte le fait que ces dernières jouissent jusqu’ici de l’appui total de l’Occident et qu’elles bénéficient en outre de très importants financements en pétrodollars, en provenance des royautés et émirats pétroliers alliés des Etats-Unis et de l’Europe. Ce sera donc une très longue bataille, très intéressante. C’est cette bataille qui va décider du sort du monde arabe et de la possibilité pour ces pays arabes d’établir non seulement de véritables règles démocratiques, mais aussi une véritable indépendance par rapport aux forces régionales et internationales.


    Concernant la crise syrienne, de nombreux acteurs sont impliqués (Qatar, Arabie Saoudite, Turquie, Israël). Pourquoi ?

    Mais vous avez oublié dans cette liste la France, l’Angleterre, les Etats-Unis ! J’ai eu l’occasion d’expliquer dans diverses interviews que dès le départ, il y a une différence fondamentale entre la révolte syrienne et ce qui s’est passé en Tunisie, en Egypte et au Yémen. En Syrie, vous aviez un malaise rural important depuis 2007, du fait d’une série d’années de sècheresse, puis du fait que le gouvernement a voulu faire plaisir au Fonds Monétaire International et aux pays occidentaux, et qui s’est mis à supprimer pas mal des subventions dont jouissait l’agriculture. Les observateurs de terrain en Syrie savaient que le monde rural, autrefois très privilégié par le régime et qui avait longtemps constitué sa base essentielle, commençait vraiment à connaître un état de mécontentement grandissant.

    Quand vous regardez où ont eu lieu les manifestations en Syrie, quelle était la composition sociale des manifestants et quel était leur nombre, on voit bien qu’ils étaient des ruraux pauvres dans des régions rurales pauvres périphériques, situées aux frontières avec la Jordanie et la Turquie. Les images parlaient d’ailleurs d’elles-mêmes. Elles contrastaient avec les grandioses manifestations de masse, tunisiennes, yéménites ou égyptiennes, où tous les groupes sociaux et toutes les classes d’âge étaient au rendez-vous. On a très vite assisté à l’arrivée d’armes aux mains des groupes d’opposants qui se sont constitués sur le terrain. De plus, il y a eu le déchaînement d’une guerre médiatique absolument spectaculaire contre le régime syrien. Or, les manifestations de masse en Syrie ont eu lieu en faveur du régime et contre l’opposition armée ; dans ces manifestations on a vu toutes les classes sociales, tous les groupes d’âge et de très nombreuses femmes…

    C’est donc une différence absolument fondamentale par rapport aux autres situations de révoltes dans le monde arabe. Par ailleurs, l’armée ne s’est nullement effondrée et elle a fait face avec de plus en plus de détermination et de violence à l’arrivée, de l’international, de combattants qu’on appelle à tort Djihadistes, parce que lorsque des musulmans tuent d’autres musulmans, cela n’est pas un djihad. On a donc eu en Syrie un scénario qui s’est mis en place qui est en train d’aboutir à une destruction systématique de la société syrienne et de sa richesse matérielle (infrastructures, habitations, potentiel industriel). C’est une répétition de ce que la communauté internationale a fait subir à l’Irak et demain nous verrons – comme cela s’est passé en Irak ou auparavant au Liban – que sous prétexte de reconstruction, le pays sera pillé par des grosses entreprises de BTP arabes ou turques ou internationales. On a déjà vu cela au Liban où, au sortir des quinze ans de violence entre 1975 et 1990, le pays a été enfoncé dans une dette invraisemblable et où après vingt-deux ans de reconstruction il n’y a toujours pas d’eau ou d’électricité courantes ! Et en Irak, malgré son énorme richesse pétrolière, les grandes infrastructures d’eau et d’électricité ne sont toujours pas complètement reconstruites. Il faut donc s’attendre à un même scénario en Syrie.

    Par ailleurs, il faut bien voir que les données internes syriennes sont tout à fait secondaires dans le conflit, car la Syrie est devenue un champ d’affrontement colossal entre, d’un côté les deux grandes puissances montantes, la Chine et la Russie, ainsi que l’Iran, et de l’autre les pays occidentaux, l’OTAN… dont le but est très clairement de faire sauter les derniers verrous anti-israéliens de la région, ces derniers verrous étant essentiellement constitués de l’axe Iran-Syrie-Hezbollah qu’on appelle, pour le dénigrer et pour donner dans le sensationnel, « l’arc chiite ». Beaucoup d’analyses se font à base de sensationnel communautaire qui est instrumentalisé pour faire croire que le conflit est entre chiites et sunnites à l’échelle régionale, alors qu’il s’agit d’un problème de géopolitique très profane. Il y a aussi des considérations pétrolières et gazières qui entrent en jeu.

    Pensez-vous qu’un embrasement régional pourrait avoir lieu dans le contexte de la crise syrienne, notamment au Liban ?

    Déjà en 2007, dans la revue Futurible, j’avais évoqué un scénario de troisième guerre mondiale éventuelle, déclenchée autour la question du développement de la capacité nucléaire iranienne. Car les passions anti-iraniennes étaient déjà d’une virulence peu commune qui n’a pas baissé de registre. Le reproche fait à l’Iran étant sa rhétorique anti-israélienne et surtout son aide au Hezbollah libanais passant par la Syrie. Aussi, l’axe Iran, Syrie, Hezbollah est-il considéré depuis des années comme à abattre dans les milieux de l’OTAN. Or, il faut bien voir que même si cet axe est réduit ou affaibli ou disparaît, il rebondira ou sera reconstitué différemment, et ceci tant que l’Etat israélien continuera de se comporter comme il se comporte vis-à-vis des Palestiniens qui continuent d’être dépossédés de ce qu’il leur reste de terre, mais aussi vis-à-vis des Libanais qu’ils ont énormément fait souffrir entre 1968 (date du premier bombardement contre le pays) et 2000, lorsque l’armée israélienne est forcée de se retirer du pays après 22 ans d’occupation, puis tente en 2006 de supprimer le Hezbollah par une série de bombardements massifs qui durent 33 jours.

    On a déjà assisté, à plusieurs reprises, à l’espoir d’avoir « débarrassé » le Moyen-Orient des forces hostiles à la domination israélo-américaine de la région. Ils ont tous été déçus. Cela a été le cas lors de la seconde invasion du Liban par Israël en 1982, qui a abouti à l’exil de l’OLP en Tunisie et dans d’autres pays loin des frontières israéliennes. Puis, cela a été le cas avec la conférence de Madrid et les accords israélo-palestiniens d’Oslo en 1993. Enfin cela a recommencé avec l’invasion de l’Irak en 2003 qui a fait penser que le Moyen-Orient serait en paix grâce à l’élimination de Saddam Hussein. C’est pour cela que je parle des « passions » américaines et européennes en faveur d’Israël, qui empêchent toute possibilité raisonnable de rendre aux Palestiniens leurs droits. Tant que cette situation n’est pas réglée conformément aux lois internationales, et non pas par la force, le Moyen-Orient va rester en ébullition avec tous ces risques d’affrontements dont nous parlons, et qui peuvent effectivement s’embraser.

    Ceci dit, il faut bien voir que dans ces passions, la folie n’est pas totale, c’est-à-dire que les Etats-Unis, après des déploiements militaires qui leur ont coûté énormément (Afghanistan et Irak) et où curieusement ils ne sont pas venus à bout de Al Qaïda, n’ont plus envie d’aventures militaires extérieures. Ce qui est une bonne chose. Maintenant, ils ont trouvé des relais régionaux qui sont notamment la Turquie, qui avait l’air prête à se battre jusqu’au bout contre la Syrie, quatre ans seulement après avoir signé des accords de coopérations, d’amitiés, de fraternité, de libre échange avec ce pays. Ils ont trouvé également les pétrodollars qui financent les armées de combattants venus de l’extérieur.

    L’on s’attendait, dans ces Etats intervenants extérieurs, à ce que l’armée syrienne s’effondre rapidement et tout le régime avec. Mais cela n’est pas arrivé, à la surprise générale de tous ceux qui connaissaient très mal le contexte syrien. Et aujourd’hui, l’armée semble reprendre le dessus militairement. Toutefois, tant que le gouvernement syrien ne pourra pas contrôler ses frontières, qui sont très longues avec la Turquie, l’Irak, la Jordanie et le Liban, les combats et la destruction de la Syrie vont continuer. Quant à ce projet de conférence à Genève, ce n’est qu’un mauvais théâtre. Il me rappelle celui d’il y a quarante ans, lorsque les soviétiques réclamaient une conférence internationale sur la Palestine à laquelle ils se seraient associés. Or, il n’y a eu qu’une seule séance orpheline d’apparat, les Américains et les Israéliens ne souhaitant pas accorder de l’influence à l’URSS dans ce conflit. Donc je suis très sceptique face à ce projet de conférence. Jusqu’ici, nous voyons des rencontres américano-russes sur la Syrie pour organiser une conférence entre les parties au conflit, mais sitôt la réunion terminée, les déclarations des parties au conflit contredisent la volonté d’apaisement.

    Concernant les retombées sur le Liban, elles sont très intéressantes. Le gouvernement libanais a prétendu sagement vouloir rester neutre dans le conflit syrien. Ceci en application du slogan qui existe depuis des années : « le Liban d’abord ». Il s’agit d’ailleurs d’un slogan que même l’OLP avait adopté après sa sortie de Beyrouth en 1982 en vertu duquel « la Palestine d’abord ». On le trouve aussi en Irak après l’invasion américaine et on l’entend dans les milieux de l’opposition syrienne. Or, l’on a vu combien ce slogan a abouti à affaiblir les dirigeants de l’OLP qui sont impuissants devant la colonisation, mais à affaiblir aussi l’Irak.

    Au Liban, ceux qui ont porté ce slogan ne l’appliquent pas, puisqu’ils sont les premiers à s’impliquer militairement par l’envoi de combattants dans la situation syrienne, de même que le Hezbollah le fait, l’arrivée de son armement dépendant largement de la survie du régime syrien, et donc aussi à terme sa propre survie. C’est pourquoi je pense que l’insécurité va demeurer sur toutes les zones géographiques libanaises limitrophes à la Syrie, puisque les combattants vont et viennent. Tout cela alors que l’armée israélienne est toujours surpuissante et a vraisemblablement des velléités d’intervenir à nouveau au Liban dans l’espoir de réussir à faire disparaître le Hezbollah. Cependant, je ne pense pas que l’insécurité va se propager sur tout le territoire. Certes, il y a à Saïda ce cheikh salafiste, radical et anti-Hezbollah qui veut faire le coup de feu contre ce parti. Il est brusquement apparu sur la scène libanaise depuis un an, vraisemblablement financé par les pétrodollars saoudien ou Qatari. La ville de Saïda connaît donc une période troublée, mais dans l’ensemble, la population de la ville est calme, à l’inverse de la ville de Tripoli, qui peut se laisser gagner par le radicalisme islamique. Par contre, plus inquiétant est le délitement des institutions de l’Etat. Mais le Liban sait s’autogérer.


    Que pensez-vous de la situation du pouvoir hachémite en Jordanie ?

    Je crois que les Israéliens doivent continuer à se gratter la tête : faut-il essayer de faire un Etat palestinien en Transjordanie, ce qui est un vieille idée d’Ariel Sharon pour régler le problème palestinien, et ce qui permettrait du même coup d’expulser les Palestiniens restés dans ce qui est devenu le territoire d’Israël. Ou bien faut-il mieux conserver cet allié fidèle des Etats-Unis qu’est la monarchie jordanienne, qui garantit la sécurité de la frontière avec Israël. Mais comme je ne suis pas dans le secret de la pensée stratégique israélienne, je n’ai pas de réponse.


    Après le deuxième mandat de Barack Obama, voit-on un repositionnement de la politique américaine concernant le Moyen-Orient ?

    Non, quand on regarde les Etats-Unis et qu’on cherche à déterminer leurs objectifs principaux, on constate ceci : un, la sécurité d’Israël, et donc qu’Israël puisse continuer de coloniser comme elle le fait depuis 1967. Deux, empêcher l’Iran d’avoir l’armement nucléaire. Dans le sillage évidemment, démanteler l’axe Iran-Syrie-Hezbollah, et ce toujours pour la sécurité d’Israël. Et puis, le contrôle des routes d’approvisionnement pétrolier, et le maintien de l’hégémonie que l’Europe a eu puis que les Etats-Unis ont de concert avec l’Europe sur toute cette zone hautement stratégique pour l’économie et la géopolitique mondiales. C’est très simple à décrypter. Quand Barack Obama a fait son célèbre discours au Caire en 2009, il était dans la droite ligne de la politique américaine traditionnelle, il n’en a pas bougé d’un iota. Ce n’est pas le fait d’inclure la citation de deux versets du Coran dans le texte du discours qui exprime un changement de politique, ce que peut être certains ont naïvement pensé ! Mais simplement les Etats-Unis, comme je disais, sont aujourd’hui beaucoup plus prudents, et cet Etat n’a pas envie de nouvelles aventures militaires extérieures, ce qui est le facteur qui calme le jeu. En tous cas, entre la politique du président George W. Bush et celle de Barack Obama, les mêmes constantes sont affirmées. Lors de son récent voyage en Israël, ce dernier a prononcé des paroles inconditionnellement favorables à l’Etat d’Israël et à sa politique, comme l’ont fait tous les présidents successifs, à l’exception d’Eisenhower et plus accessoirement George Bush père et son ministre des Affaires étrangères, James Baker, qui a protesté énergiquement contre la continuation de la colonisation et a même annulé des aides américaines à l’Etat d’Israël.

    Georges Corm, propos recueillis par Sixtine de Thé (Les clés du Moyen-Orient, 21 juin 2013)

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  • Le Grand Jeu...

    Les éditions belges Nevicata viennent de publier Le Grand jeu - Officiers et Espions en Asie centrale, un superbe récit historique du journaliste anglais Peter Hopkirk sur la guerre secrète que se sont menés Anglais et Russes aux confins de l'Empire des Indes, tout au long du XIXème siècle. L'auteur, qui est un spécialiste de cette région du monde sur laquelle il a beaucoup écrit, dépeint des personnages d'une trempe exceptionnelle, qui ont vécu des aventures hors du commun et qui, à des fins militaires, ont contribué à cartographier cette région du monde. On a affaire là à un classique sur le sujet qui attendait depuis longtemps d'être traduit en français. Il faut espérer que l'éditeur traduira également les deux "suites" de cet ouvrage : On Secret Service East of Constantinople, qui traite de l'irruption, au début du XXème siècle, de l'Allemagne comme nouveau protagoniste dans le Grand Jeu, et Setting the East Ablaze, qui retrace la poursuite de celui-ci avec les Soviétiques dans les années 20... Passionnant !

     

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    "Au coeur des montagnes isolées et des déserts brûlants d’Asie centrale, une lutte épique opposa au dix-neuvième siècle l’Empire britannique et la Russie tsariste. Cet affrontement fut connu sous le nom de « Grand Jeu », et ses répercussions se font encore sentir de nos jours. Le vaste échiquier où se déploya cette rivalité s’étendait du Caucase à l’ouest jusqu’au Tibet à l’est. Lorsque le jeu débuta, les frontières de la Russie et des Indes étaient distantes de plus de trois mille kilomètres. A la fin, moins de trente kilomètres les séparaient par endroits. Les Britanniques étaient convaincus que les Russes ne s’arrêteraient pas avant de s’emparer des Indes, le joyau de l’Empire britannique. La guerre semblait inévitable. Ce livre raconte l’histoire du « Grand Jeu », l’un des chapitres les plus
    romanesques de l’histoire moderne, à travers les aventures de ses acteurs. De jeunes officiers des deux camps, pour qui participer au « Grand Jeu » était le sel de leurs rêves, l’occasion d’échapper à la monotonie de la vie de garnison et de se couvrir de gloire. Leur mission consistait à noircir les zones blanches sur les cartes, découvrir les probables routes d’invasion, collecter des renseignements, s’allier les potentats locaux, rapporter les mouvements de l’autre camp… Certains voyageaient déguisés en pèlerins ou en marchands de chevaux, d’autres se présentaient en uniforme militaire. Le jeu était toujours dangereux et plusieurs n’en revinrent jamais. Les violentes répercussions du « Grand Jeu » nous hantent encore aujourd’hui. Le renversement de dignitaires locaux, l’invasion d’ambassades, les retraites infamantes d’Afghanistan, les bains de sang du Caucase : tout cela était déjà familier dans la presse victorienne. Aujourd’hui, alors que la guerre d’Afghanistan se prolonge, les leçons de l’histoire du « Grand Jeu » restent plus que jamais au coeur de l’actualité."

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