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italie - Page 11

  • Machiavel l'Européen !...

    Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Dominique Venner publié dans le dernier numéro de La Nouvelle Revue d'Histoire (mars-avril 2011), dont le dossier est consacré à l'Italie. Ce texte a été mis en ligne sur le site personnel de son auteur.

     

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    Machiavel l'Européen

    Son nom lui a joué des tours. C’est en effet peu flatteur d’être qualifié de «machiavélique». On voit aussitôt se dessiner un soupçon de violence madrée et de fourberie. Et pourtant ce qui avait conduit Machiavel à écrire le plus célèbre et le plus scandaleux de ses essais, Le Prince, était le souci de sa patrie, l’Italie. En son temps, dans les premières années du XVIe siècle, il était d’ailleurs bien le seul à se soucier de cette entité géographique. On était alors pour Naples, Gènes, Rome, Florence, Milan ou Venise, mais personne ne pensait à l’Italie. Il faudra pour cela attendre encore trois bons siècles. Ce qui prouve qu’il ne faut jamais désespérer de rien. Les prophètes prêchent toujours dans le désert des esprits avant que leurs rêves ne rencontrent l’attente imprévisible des peuples.

    Né à Florence en 1469, mort en 1527, Nicolas Machiavel était une sorte de haut fonctionnaire et de diplomate. Ses missions l’initièrent à la grande politique de son temps. Ce qu’il y apprit fit souffrir son patriotisme, l’incitant à réfléchir sur l’art de conduire les affaires publiques. La vie l’avait placé à l’école de bouleversements majeurs. Il avait 23 ans quand mourut Laurent le Magnifique en 1492. La même année, Alexandre VI Borgia devint pape. D’un de ses fils, César (en ce temps-là, les papes n’étaient pas toujours chastes), il fit provisoirement un très jeune cardinal, puis un duc de Valentinois grâce au roi de France. Ce César, que tenaillait une terrible ambition, ne sera jamais regardant sur les moyens. En dépit de ses échecs, sa fougue fascina Machiavel.

    Mais j’anticipe. En 1494, survint un événement immense qui allait bouleverser pour longtemps l’Italie. Charles VIII, jeune et ambitieux roi de France, effectua sa fameuse « descente », autrement dit une tentative de conquête qui bouscula l’équilibre de la péninsule. Après avoir été bien reçu à Florence, Rome et Naples, Charles VIII rencontra ensuite des résistances et dut se replier, laissant un joli chaos. Ce n’était pas fini. Son cousin et successeur, Charles XII, récidiva en 1500, cette fois pour plus longtemps, en attendant que survienne François Ier. Entre-temps, Florence avait sombré dans la guerre civile et l’Italie avait été dévastée par des condottières avides de butin.

    Atterré, Machiavel observait les dégâts. Il s’indignait de l’impuissance des Italiens. De ses réflexions naquit Le Prince, célèbre traité politique écrit à la faveur d’une disgrâce. L’argumentation, d’une logique imparable, vise à obtenir l’adhésion du lecteur. La méthode est historique. Elle repose sur la confrontation entre le passé et le présent. Machiavel dit sa conviction que les hommes et les choses ne changent pas. Il continue à parler aux Européens que nous sommes.

    À la façon des Anciens – ses modèles – il croit que la Fortune (le hasard), figurée par une femme en équilibre sur une roue instable, arbitre la moitié des actions humaines. Mais elle laisse, dit-il, l’autre moitié gouvernée par la virtus (qualité virile d’audace et d’énergie). Aux hommes d’action qu’il appelle de ses vœux, Machiavel enseigne les moyens de bien gouverner. Symbolisée par le lion, la force est le premier de ces moyens pour conquérir ou maintenir un Etat. Mais il faut y adjoindre la ruse du renard. En réalité, il faut être à la fois lion et renard. « Il faut être renard pour éviter les pièges et lion pour effrayer les loups » (Le Prince, ch. 18). D’où l’éloge, dépourvu de tout préjugé moral, qu’il fait du pape Alexandre VI Borgia qui « ne fit jamais autre chose, ne pensa jamais à autre chose qu’à tromper les gens et trouva toujours matière à pouvoir le faire » (Le Prince, ch. 18). Cependant, c’est dans le fils de ce curieux pape, César Borgia, que Machiavel voyait l’incarnation du Prince selon ses vœux, capable « de vaincre ou par force ou par ruse » (Ibid. ch. 7).

    Mis à l’Index, accusé d’impiété et d’athéisme, Machiavel avait en réalité vis-à-vis de la religion une attitude complexe. Certainement pas dévot, il se plie cependant aux usages. Dans son Discours sur la première décade de Tite-Live, tirant les enseignements de l’histoire antique, il s’interroge sur la religion qui conviendrait le mieux à la bonne santé de l’Etat : « Notre religion a placé le bien suprême dans l’humilité et le mépris des choses humaines. L’autre [la religion romaine] le plaçait dans la grandeur d’âme, la force du corps et toutes les autres choses aptes à rendre les hommes forts. Si notre religion exige que l’on ait de la force, elle veut que l’on soit plus apte à la souffrance qu’à des choses fortes. Cette façon de vivre semble donc avoir affaibli le monde et l’avoir donné en proie aux scélérats » (Discours, livre II, ch. 2). Machiavel ne se risque pas à une réflexion religieuse, mais seulement à une réflexion politique sur la religion, concluant cependant : « Je préfère ma patrie à mon âme ».

    Dominique Venner

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  • L'Italie : de la chute de Rome à l'unité...

    La Nouvelle Revue d'Histoire est en kiosque (n°53, mars - avril 2011). Le dossier central est consacré à l'Italie, de la chute de Rome à l'unité de 1861. On peut y lire, notamment, des articles de Jacques Heers, de Michel Ostenc ("L'Eveil du Risorgimento", "Mazzini ou le nationalisme républicain") ou de Philippe Conrad ("Napoléon III, l'acteur essentiel") et un entretien avec Marco Perruzi, intellectuel padanien, proche de la Ligue du Nord ("Vers une partition de l'Italie ?").  Hors dossier, on pourra lire, en particulier, une analyse du dernier ouvrage de Pierre Manent sous la plume de Dominique Venner, un article de François Bousquet sur l'oeuvre de D.H. Lawrence, un entretien avec Bernard Lugan sur le Maroc et un entretien sur le populisme européen avec le conseiller national suisse Oskar Freysinger, ainsi que la chronique de Péroncel-Hugoz.

     

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  • Malaparte, vies et légendes...

    Les éditions Grasset viennent de publier Malaparte - Vies et légendes de Maurizio Serra, une remarquable biographie de l'auteur de Technique du coup d'état, de Kaputt ou encore de La peau. Le parcours complexe de ce grand italien, fasciste dissident, intellectuel engagé, journaliste irrévérencieux et romancier y est finement analysé. Maurizio Serra, diplomate italien à l'UNESCO, est aussi l'auteur d'un ouvrage consacré à Drieu La Rochelle, Malraux et Aragon, intitulé Les frères séparés, qui vient d'être réédité à la Table ronde, dans la collection de poche La petite vermillon.

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    "Kurt Suckert dit Malaparte (1898-1957), écrivain italien de père allemand à vocation cosmopolite, a défié toutes les conventions de son temps, dans une épopée flamboyante où se mêlent d'un bout à l'autre vies et légendes multiples. Talent précoce, à la sensibilité éveillée par les carnages de 1914, dont il fit l'expérience comme volontaire en France, conspirateur roué, envoyé spécial sur tous les fronts de guerre, capable de passer des salons aux tranchées, des usines aux longues marches, des bûchers aux bénitiers, de Lénine à Hitler, de Mussolini à Mao, des anarchistes au Pape, militant de toutes les causes et de leur contraire, Malaparte fut un précurseur incontournable de l'intellectuel engagé.
    Mythomane, exhibitionniste, séducteur invétéré, "caméléon" prêt à servir tous les pouvoirs et à s'en servir, l'auteur mondialement célèbre de Technique du coup d'Etat, de Kaputt et de La peau aura tout fait pour cacher son vrai visage. Prophète de la décadence de l'Europe face aux puissances globales (URSS, Etats-Unis, Chine) et aux idéologues de masse (fascisme, communisme, tiers-mondisme), il demeure le grand inconnu parmi les interprètes majeurs du XXe siècle. Cette biographie écrite spécialement pour le public français, se propose, à partir d'un immense matériel souvent inédit, d'offrir le portrait de celui qui voulut « perdre à Austerlitz et vaincre à Waterloo »."

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  • L'affaire Aldo Moro...

    Les jeunes éditions Vendémiaire viennent de publier Une longue saison de douleur et de mort, ouvrage de Philippe Foro consacré à l'affaire Aldo Moro. L'auteur, professeur d'histoire à l'université de Toulouse et spécialiste de l'Italie contemporaine, revient sur l'enlèvement et l'assassinat, en 1978, du président de la Démocratie Chrétienne, trou noir historique dans les très sombres "années de plomb". Au terme de son exposé, l'auteur n'hésite pas à citer parmi les instigateurs probables de ce crime politique le Mossad israélien et la CIA. Passionnant...

     

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    "Sur l'un des scandales politiques les plus retentissants de la fin du XXe siècle, un récit au jour le jour, vif et très informé, nourri par les témoignages des brigadistes, la correspondance de Moro et les notes des différents protagonistes politiques.
    Le 16 mars 1978, via Fani, à Rome, le président de la Démocratie chrétienne Aldo Moro est brutalement enlevé par un commando armé, et les cinq hommes de son escorte tués. Au coeur de ces années de plomb qui voient se succéder en Italie attentats d'extrême droite et d'extrême gauche, dans un climat de désordre et de guerre civile sans précédent, la revendication de cet acte de terrorisme est rapide : il est le fait des brigades rouges, trois hommes et une femme, qui pendant 55 jours retiendront l'homme d'État séquestré dans un appartement du centre ville. L'affaire va bouleverser le pays, et le monde. Aujourd'hui encore, l'historien se trouve confronté, à chaque page de ce volumineux dossier, à d'inquiétantes zones d'ombres. Services secrets de l'Est et de l'Ouest, organisations mafieuses, loges maçonniques, adversaires et compagnons politiques... Au fond, qui avait intérêt à la disparition d'Aldo Moro ?"

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  • Monsieur Caméléon...

    Les éditions de la Table ronde publient dans leur collection de poche, La petite vermillon, Monsieur Caméléon, un roman satirique de Curzio Malaparte, l'auteur de Kaputt et de La peau, paru initialement en 1928. Fasciste critique, l'auteur s'en prend avec une joyeuse insolence à Mussolini...

     

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    "« Dans toute la littérature italienne parue du temps de Mussolini, c’est-à-dire pendant un quart de siècle, tant en Italie qu’à l’étranger, il n’y a pas de satire plus hardie et plus cruelle que ce Monsieur Caméléon. » C’est en ces termes que Malaparte présente sa fable baroque, qui a pour héros un caméléon. Le Duce se prend d’affection pour lui au point d’en faire son confident, puis son ministre. Chargé de réformer la Constitution, l’animal en fera voir de toutes les couleurs à la classe politique italienne, avant de connaître une fin extravagante et tragique.
    Publié en feuilleton en 1928, Monsieur Caméléon a voué Malaparte à la prison et l’exil. À la fois conte philosophique et charge politique, il évoque tour à tour Zadig de Voltaire et Le Dictateur de Charlie Chaplin."


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  • Le compagnon de voyage...

    Publié en 2009 aux éditions Quai voltaire, Le compagnon de voyage, roman inédit de Malaparte, ressort en format poche dans la collection Folio. Une oeuvre qui mérite de trouver sa place aux côtés de Kaputt ou de La peau...

    Nous reproduisons ici la recension qu'en a fait jérôme Garcin sur Bibliobs.

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    Le 3 septembre 1943, après le renversement de Mussolini, les Alliés débarquent à Reggio de Calabre. Même si tout est perdu, quinze soldats italiens, qu'on dirait sortis du «Désert des Tartares», résistent pour l'honneur. Presque tous sont tués dans leur fortin.

    Rescapé, le chasseur alpin Calusia, un paysan originaire de Bergame, a promis à son lieutenant, qui agonisait, de le ramener chez lui, à Naples. Il couche sa dépouille dans un cercueil rempli de foin et de charbon qu'il charge sur un âne et commence, par des chemins de traverse, la longue remontée de la Péninsule en ruines. Calusia est un homme rude, bon et fier. Il ne comprend ni la lâcheté ni la bassesse.

    Et le spectacle qui s'offre à lui tout au long de cet exode ressemble à un cauchemar où les femmes sont humiliées et les voleurs, impunis. Cet inédit de l'écrivain de «la Peau», né en Toscane d'un père allemand, est aussi le dernier texte qu'il ait écrit. Simple comme le scénario d'un road-movie, poignant comme un testament, bref comme un libelle, «le Compagnon de voyage» est aussi l'allégorie du parcours sinueux de Kurt-Erich Suckert, alias Malaparte, passé du fascisme à l'extrême-gauche, mais toujours resté du côté des Calusia, des «pauvres diables» qui ne trahissent pas les vivants et sont fidèles aux morts.

    Jérôme Garcin (Bibliobs, 16 avril 2009)

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