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droit - Page 2

  • Loi et jugement...

    Les éditions de L’École des hautes études en sciences sociales viennent de publier un essai de Carl Schmitt intitulé Loi et jugement - Une enquête sur le problème de la pratique du droit. De nationalité allemande, juriste et philosophe du politique, ami d'Ernst Jünger, Carl Schmitt est l'auteur de nombreux ouvrages importants comme La notion de politique (1928), Terre et Mer, un point de vue sur l'histoire du monde (1942), Le nomos de la terre (1950) ou Théorie du partisan (1963).

     

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    " Comment savoir si une décision judiciaire est correcte ? Telle est la question qui se pose à nous tous, qui souhaitons que le droit vienne à notre secours quand nous en avons besoin. En 1912, celui qui n’est pas encore le sulfureux Carl Schmitt donne à cette interrogation une réponse surprenante qui, aujourd’hui peut-être plus que jamais, nous parle encore. Dans Loi et jugement, ouvrage de jeunesse brillant et érudit, traduit et replacé par Rainer Maria Kiesow dans une perspective critique, on perçoit déjà le goût de l’auteur pour la rhétorique, le style et, plus précisément, le goût pour les concepts en opposition, pour les mots en guerre, par lesquels il deviendra célèbre : ami/ennemi; légalité/légitimité ; théologie/politique ; règle/exception ; État/mouvement/peuple ; terre/mer ; mais aussi juif/aryen. Or c’est avec l’examen de la relation loi/jugement que tout a commencé. Y a-t-il harmonie ou tension? Déduction ou déconnexion? Continuité ou rupture? Là réside tout le problème de l’État de droit et de l’état de légalité – une question toujours ouverte. "

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  • Dialogues sur la Justice...

    Les éditions Perspectives libres viennent de publier un essai de Norman Palma intitulé Dialogues sur la Justice. Économiste et philosophe, professeur à Paris IV, Norman Palma est l'auteur de plusieurs essais comme  Pourquoi Marx a-t-il échoué ? (Perspectives libres, 2014), Autopsie d’un désastre économique (Perspectives libres, 2015), La guerre des Amériques (Perspectives libres, 2015) ou Penser avec Aristote (Perspectives libres, 2017).

     

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    " Suum cuique tribuere, rendre à chacun ce qui lui est dû, telle était la définition que l’Antiquité donnait à la Justice. Plus qu’une simple garantie de l’intégrité des personnes, de la possession des biens et de la régularité des contrats, la Justice est l’idéal régulateur des Anciens et le droit doit faire appel à l’idée de Justice pour instaurer un idéal de concorde civique. Face à nos sociétés agonisantes, où chacun voit sa place de plus en plus niée, l’idéal antique peut-il nous aider à revivifier une société où il n’y a plus ni égalité ni justice, ni justesse ? Norman Palma continue son périple dans la pensée des Anciens en l’illustrant par des problèmes contemporains au cours de dialogues socratiques. "

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  • Terre et mer...

    Les éditions Pierre-Guillaume de Roux viennent de rééditer un essai de Carl Schmitt, intitulé Terre et mer, qui avait été publié initialement en français par les éditions du Labyrinthe en 1985. Le texte est complété par une introduction d'Alain de Benoist. De nationalité allemande, juriste et philosophe du politique, ami d'Ernst Jünger, Carl Schmitt est l'auteur de nombreux ouvrages comme La notion de politique (1928), Le nomos de la terre (1950) ou Théorie du partisan (1963).

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    " Terre et mer : ces données élémentaires de l’existence humaine déterminent à la fois le caractère spécifique des droits des peuples et de la façon de faire la guerre.

    Les différentes conceptions que se font les nations et les hommes d’Etat de la politique, de la guerre, du droit, des rapports d’amitié et d’hostilité, sont, en effet, enracinées dans les modalités de leur relation à l’espace.

    Paru pour la première fois en 1944, puis réédité en 1981, ce livre constitue une introduction à l’œuvre de maturité de Carl Schmitt et notamment à l’essai Der Nomos der Erde (1950), dans lequel se trouve abordé le problème de la paix. L’histoire nous est présentée ici comme une opposition entre « ceux qui vivent sur la terre ferme » et « ceux qui écument les mers », histoire qui a trouvé son expression la plus fascinante dans la lutte entre l’Angleterre et la France napoléonienne. Le dualisme existant entre terre et mer a marqué de son empreinte toute la période récente de l’histoire européenne. C’est à partir de lui en particulier, qu’ont été définies les notions modernes de politique, d’Etat, de droit et de travail. Mais ici, Carl Schmitt ne fait pas seulement œuvre de théoricien. Il expose aussi ses vues sous la forme d’un récit à sa fille Anima. Ce qui lui permet de parler de manière vivante aussi bien de l’atmosphère de la piraterie que des calculs stratégiques des grands chefs d’Etat-major. "

     

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  • L'ordre du discours juridique national-socialiste...

    Les Presses universitaires de France viennent de publier un essai d'Olivier Jouanjan intitulé Justifier l'injustifiable - L'ordre du discours juridique nazi. Professeur de droit public à l'université Paris 2 Panthéon-Assas et germaniste, Olivier Jouanjan est déjà l'auteur de Une histoire de la pensée juridique en Allemagne 1800-1918 (PUF, 2005).

     

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    " C’est généralement au nom des valeurs que l’on refuse au « droit nazi » sa qualité de « droit ». Cette manière, évidemment légitime, présente cependant le défaut de ne pas permettre une véritable compréhension de ce droit étrange et inquiétant, de ce droit monstrueux et, à travers lui, de l’idéologie du nazisme, plus précisément de sa grammaire et de sa rhétorique. Au-delà d’une histoire du « droit nazi », de ses institutions et pratiques, ce sont ses discours qui sont ici interrogés, l’ordre du discours des nombreux juristes engagés pour dire le droit nazi.
    Par un exercice de tératologie juridique est ici mise au jour la façon dont les oxymores et inversions d’un langage totalitaire viennent bouleverser, renverser et travestir la langue du droit léguée par Rome, afin de justifier « en droit » l’injustifiable moral. Invitation à penser le droit « normal » et les enjeux de ses mutations actuelles qui semblent abandonner les ressources de son trésor latin – son abstraction et sa conceptualité –, cet essai ne se réserve pas aux seuls spécialistes ; il est porté par la conviction que l’analyse d’un versant monstrueux peut aider, en contrepoint, à méditer l’ordre raisonnable du droit. "

    Sommaire

    Introduction – Prendre le « droit » nazi au sérieux ?

    Première partie – Conversions

    Chapitre premier – Doctrines weimariennes, doctrines nazies : Entre continuité et discontinuité
    La faute du positivisme
    Weimar et la « querelle des méthodes et des approches »

    Chapitre 2 – La « mise au pas » du monde des juristes
    La mise au pas des universités et le « nouveau droit des étudiants »

    La Fédération des juristes nationaux-socialistes allemands
    L’Académie pour le droit allemand
    Le contrôle de l’édition juridique

    Chapitre 3 – Se convertir au nazisme : Essai d’interprétation
    Deux itinéraires : Ernst Rudof Huber et Reinhard Höhn

    La « génération 1900 » et l’engagement nazi

    Seconde partie – Inversions

    Chapitre premier – Inverser, renverser, rénover : Le renversement des valeurs juridiques
    Tradition et révolution juridiques
    L’exemple de la « rétention de protection » (Schutzhaft)

    Chapitre 2 – Le mythe juridique de la communauté
    Destins allemands de la communauté

    La communauté et la destruction du droit public
    La communauté et la « rénovation » des droits civil et criminel

    Chapitre 3 – Deux théories du droit nazi : Carl Schmitt, Karl Larenz
    Carl Schmitt et la pensée concrète de l’ordre et de la configuration

    Karl Larenz ou les errements du néo-hégélianisme nazi

    Épilogue – Perversions
    Le droit, forme de vie

    Être juif, de quel droit ?
    Une déformalisation radicale du droit
    Une idéologie du management
    La langue du droit

    Bibliographie

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  • L'offensive judiciaire globale des Etats-Unis...

    Nous reproduisons ci-dessous le texte d'une conférence de Jean-Michel Quatrepoint, donnée devant la fondation Res Publica et cueillie sur le site d'Euro-Synergies.

    Jean-Michel Quatrepoint, qui a publié en 2015 Alstom, scandale d'Etat (Fayard, 2015), explique comment les États-Unis utilisent l'arme du droit contre leurs adversaires économiques...

     

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    États-Unis: Une offensive judiciaire globale

    L’exportation du droit américain, l’extraterritorialité des lois américaines est un processus qui ne date pas d’aujourd’hui. Voilà des années, voire des décennies que les États-Unis développent une stratégie globale d’hyperpuissance en s’appuyant sur un arsenal juridique et en imposant leurs lois, leurs normes, au reste du monde. Il aura fallu l’amende colossale infligée à BNP Paribas (8,9 milliards de dollars) et celle qui, infligée à Alstom (772 millions de dollars), fut la véritable cause, quoi qu’en dise le PDG d’Alstom, de la vente de la division « énergie » à General Electric, pour que nos dirigeants découvrent la réalité d’une guerre économique engagée depuis des décennies. Ils ont ainsi découvert, tardivement, le caractère meurtrier d’un arsenal juridique dont la mise en place remonte à plus d’un quart de siècle.

    Dans la décennie 90, après l’effondrement du communisme, les États-Unis vont se doter d’une série de lois qui concernent les entreprises américaines mais aussi toutes les entreprises étrangères. La majorité de ces lois, Trade Acts ou embargos, permettent aux responsables américains du commerce d’identifier et de sanctionner les comportements « injustes et déraisonnables » des acteurs économiques rivaux des Américains.

    On peut classer ces textes dans quelques grands chapitres :
    Le plus connu aujourd’hui est la lutte contre la corruption, le fameux Foreign Corrupt Practices Act(FCPA) qui s’appliquait aux entreprises américaines qui versaient des pots de vin aux fonctionnaires et aux hommes politiques pour obtenir des contrats. En 1998, ce FCPA est étendu aux entreprises étrangères et il va servir de modèle à la convention OCDE censée réprimer la corruption, notamment en matière de grands contrats.

    Le second chapitre est une batterie de lois qui criminalisent le commerce avec les États sous embargo américain. Certaines de ces lois sont bien connues, telles les lois Helms-Burton et D’Amato qui sanctionnent les entreprises commerçant avec l’Iran, Cuba, la Libye, le Soudan etc. (au total il y aura 70 embargos américains à travers le monde). En 2006, un banquier britannique, un des dirigeants de la Standard Chartered, dira : « Putains d’Américains, qui êtes-vous pour nous dire et pour dire au reste du monde que nous ne devons pas travailler avec les Iraniens ? ». Quelques années plus tard la Standard Chartered devra payer 700 millions de dollars d’amende pour avoir commercé avec l’Iran.

    Autre chapitre, une batterie de lois criminalisent le commerce avec les pays sous embargo ONU.
    Ensuite viendra le blanchiment de l’argent sale des terroristes ou des narcotrafiquants.

    Le Patriot Act, édicté en 2001 après l’attaque sur les Twin towers, sous couvert de lutte contre le terrorisme, donne des pouvoirs élargis aux différentes agences pour accéder aux différentes données informatiques.

    Enfin la loi Dodd-Frank de juillet 2010 confère à la SEC (Securities and Exchange Commission), le gendarme américain de la bourse, le pouvoir de réprimer toute conduite qui, aux États-Unis, concourt de manière significative à la commission de l’infraction, même lorsque la transaction financière a été conclue en dehors des États-Unis et n’implique que des acteurs étrangers. Cela va donc très loin.

    Cerise sur le gâteau, en 2014, le Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) donne au fisc américain des pouvoirs extraterritoriaux qui contraignent les banques étrangères à devenir ses agents en lui livrant toutes les informations sur les comptes et avoirs des citoyens américains dans le monde. Si elles n’obtempèrent pas, 30 % de leurs revenus aux États-Unis sont confisqués et, plus grave encore, elles peuvent se voir retirer leur licence. Or, pour une banque, notamment les plus grandes, ne plus pouvoir travailler aux États-Unis et ne plus pouvoir compenser en dollars équivaut à un arrêt de mort. On a souvent voulu voir derrière le FATCA le moyen pour les Américains de faire enfin plier les banquiers suisses, les « gnomes de Zurich », les obliger à abandonner leur sacro-saint secret bancaire. C’est vrai… mais c’est l’arbre, moral et médiatique, qui cache la forêt. Ainsi, BNP Paribas a été contrainte de fournir dans le cadre de son amende la liste des comptes de ses clients américains et franco-américains. C’est ainsi que des personnes fort respectables, qui ont la malchance d’avoir la double-nationalité mais qui ont toujours gagné et déclaré leur argent en France, sans avoir de revenus aux États-Unis, sont sommées par l’Internal Revenue Service (IRS), le fisc américain, de fournir toutes leurs déclarations d’impôts. Si jamais elles ont payé moins en France que ce qu’elles auraient payé aux États-Unis, l’IRS leur réclame la différence. Cela s’appelle du racket.

    Avec le recul, on s’aperçoit qu’il est très difficile de contester chacune de ces mesures : Qui va s’élever contre le fait de lutter contre la corruption… ? De même qui n’est favorable à la répression des narcotrafiquants et du blanchiment de leur argent ? Il en est de même du terrorisme. C’est là toute l’habileté du projet américain théorisé en 2004 par Suzanne Nossel, laquelle a inspiré Hillary Clinton lorsque cette dernière était secrétaire d’État.

    C’est la théorie non du soft power mais du smart power, affirmation par les États-Unis d’une vision universelle au nom de leur compétence universelle.

    Les États-Unis se vivent comme le nouveau peuple élu. Leurs victoires contre les forces du mal (en 1945 contre le nazisme, plus tard contre le communisme), leurs performances économiques, témoignent de la supériorité de leur modèle. Il est donc normal que tous les autres peuples adoptent ce modèle car la globalisation implique l’uniformisation. Les États-Unis énoncent donc de grands principes, valables pour tous et que tous sont contraints de respecter à travers un arsenal juridique, à travers la puissance du dollar, à travers les technologies qui permettent de tout savoir (on pense à la NSA). Le tout, bien sûr, pour le bien commun.

    Cette compétence universelle, par définition, s’applique à toutes les activités humaines. L’offensive contre la FIFA et Sepp Blatter (et par ricochet contre Michel Platini), a été menée par les Anglo-saxons, par les Américains. Une offensive fort habile car chacun sait que la FIFA (Fédération Internationale de Football Association), comme le CIO (Comité international olympique), sont des lieux où le népotisme et la corruption règnent en maîtres. Pour les Américains, il s’agit de faire exploser ce système et de le remplacer par un autre où la puissance américaine sera dominante et imposera ses règles.

    Il est très difficile de s’opposer à ce smart power, véritable idéologie qui s’appuie sur la défense des droits de l’homme, la libre concurrence non faussée, le droit des consommateurs, le droit des minorités etc.

    Cette stratégie s’appuie également sur les ONG anglo-saxonnes. Ce sont elles qui sont à l’origine de l’affaire Volkswagen. Loin de moi l’idée de défendre Volkswagen et l’industrie automobile allemande mais il est intéressant d’observer comment cette affaire s’est déroulée. Au départ, le lobby automobile européen, dominé par les industriels allemands, avait de très bonnes relations avec la Commission européenne et, évidemment, les normes de pollution et de consommation en Europe ont été fixées avec l’assentiment des constructeurs automobiles. Nous avons tous pu constater que l’affichage des consommations des véhicules ne correspond absolument pas à la réalité sur le terrain. Il se trouve que Volkswagen avait misé sur le diesel, invention essentiellement européenne, pour pénétrer le marché américain. Or, aux États-Unis, les normes anti-pollution pour le diesel sont beaucoup plus rigoureuses qu’en Europe, notamment pour les particules fines (on pourrait parler d’une norme protectionniste). Volkswagen a décidé, pour pénétrer le marché américain avec ses véhicules diesel, d’installer secrètement un logiciel fourni par Bosch. Logiciel qui permettait de masquer la réalité de émissions de particules. Ce truquage est découvert par une ONG américaine qui dévoile l’affaire en 2014 et transmet le dossier à l’agence fédérale de protection de l’environnement. C’est alors que l’affaire commence. Volkswagen, qui a effectivement triché, est piégée. Les media s’en mêlent, la machine s’emballe (48 Class actions, dans 48 États différents). La machine de guerre judiciaire américaine s’est mise en branle et le coût pour Volkswagen, indépendamment du coût pour son image, va se chiffrer en dizaines de milliards de dollars. Volkswagen (tout comme sa filiale Audi) avait énormément misé sur les États-Unis : le marché américain devait être le nouvel eldorado pour le constructeur automobile allemand qui espérait s’implanter aux États-Unis, bénéficier du dollar, d’une main d’œuvre moins chère qu’en Europe pour réexporter ensuite des modèles ou des sous-ensembles sur le marché européen et sur l’Asie. Ambition que l’industrie automobile américaine, en plein renouveau, grâce aux subventions données notamment à General Motors, ne voit pas d’un très bon œil. Est-ce un hasard si l’affaire du petit logiciel de Volkswagen a émergé ? Ce qui va se passer sur l’affaire Volkswagen est important car, si les Allemands plaident coupables, ils ont cependant commis un crime de lèse-majesté début janvier en refusant aux prosecutors et aux enquêteurs américains l’accès à leurs données, notamment sur le sol allemand. En effet, quand la machine judiciaire américaine est en branle (les entreprises qui sont « passées dans la moulinette » en savent quelque chose), les enquêteurs américains déboulent et ont accès à tout, mails, documents etc. Or les Allemands, invoquant la German law, qui interdit la communication de données à des puissances étrangères extérieures à l’Union Européenne, ont refusé de donner l’accès aux documents et aux mails internes à leur siège social. Les Allemands iront-ils jusqu’au bout du bras de fer, refuseront-ils d’obéir aux injonctions de la justice américaine? Cela peut se terminer par l’obligation pour Volkswagen de fermer ses usines aux États-Unis. On est là dans un processus lourd de conséquences.

    Les États-Unis, forts de leur puissance, ont donc développé un arsenal juridique tous azimuts. Ils décident qui peut commercer avec qui. Ils peuvent décider aussi d’éliminer les concurrents. Les entreprises françaises en savent quelque chose avec l’Iran. À la différence de ce qui se passait dans les années 80-90, ils bénéficient de la position du dollar: 78 % des transactions mondiales se font en dollars et tout est compensé par les États-Unis. Comme toutes les transactions en dollars transitent par les États-Unis, toute transaction en dollars est soumise à la loi américaine. Ils ont aussi les écoutes : on a découvert que la NSA et les services américains écoutaient systématiquement tout, y compris les chefs d’État… et personne n’a protesté. Et surtout, cette extraterritorialité devient un extraordinaire business qui profite d’abord aux Américains. Les amendes proprement dites commencent à atteindre des montants conséquents. Pour les banques, le total des amendes infligées par la justice américaine est de 125 milliards de dollars, dont une bonne partie concerne les banques américaines. Mais les banques américaines ont été condamnées pour les affaires de subprimes (aucun banquier américain n’a fait de prison) tandis que les banques européennes et japonaises ont été condamnées pour avoir violé des embargos. Les banques suisses ont payé un très lourd tribut pour ne pas avoir communiqué à temps un certain nombre de données.

    On en est aujourd’hui à 35 milliards de dollars d’amendes pour les banques étrangères et une demi-douzaine de milliards de dollars pour les groupes industriels. Sur les dix premières amendes infligées, notamment pour des affaires de corruption, aux groupes industriels, neuf concernent des groupes étrangers. Le record va à Siemens (800 millions de dollars) suivi par Alstom (772 millions de dollars).

    Cet argent sert d’abord à l’auto-alimentation du système judiciaire américain (la SEC, le Trésor, le DOJ etc.) dont les coûts annexes sont considérables. Le système judiciaire américain, les centaines de milliers de lawyers des cabinets, sont embauchés par les entreprises et vivent « sur la bête ». L’argent des amendes fait donc vivre le système judiciaire américain au sens large. S’y ajoute la contestation de brevets etc. L’application de ce système de l’extraterritorialité est un formidable business qui alimente la machine judiciaire et juridique américaine.

    Les gens de BNP Paribas seront sans doute heureux d’apprendre qu’une partie de leur amende va servir à indemniser les citoyens américains qui avaient été victimes de la prise d’otages à l’ambassade des États-Unis à Téhéran en 1979. Plus de cinquante personnes, retenues pendant 444 jours, n’avaient jamais été indemnisées parce que, dans l’accord entre l’Iran et Ronald Reagan, l’Iran avait refusé de payer quelque indemnité que ce soit (l’une des raisons pour lesquelles les Iraniens avaient pris en otage les personnels de l’ambassade américaine était la « prise en otage » par les Américains des compte iraniens à la Chase Manhattan Bank…). Le Congrès a l’intention d’utiliser 1 à 2 milliards de dollars, pris sur l’amende de BNP Paribas, pour indemniser ces ex-otages américains.

    Plus grave : les accords que les entreprises étrangères sont contraintes de signer s’accompagnent généralement de la mise sous tutelle de fait de ces entreprises qui, de par le settlement, l’accord passé avec la justice américaine, subissent pendant six mois, un an, trois ans… la présence de contrôleurs indépendants chargés de vérifier que l’entreprise condamnée se conforme bien à toutes les règles de la compliance américaine. Alcatel Lucent avait été condamnée il y a quelques années à une amende pour corruption à propos d’affaires qui remontaient au début des années 2000 (le montant, moins important que celui infligé à Alstom, s’élevait quand même à 170 millions de dollars). Contrainte d’accepter pendant trois ans la présence d’un contrôleur indépendant, Alcatel Lucent devait lui donner toutes les informations que ce contrôleur jugeait utiles à la réalisation de sa mission. D’aucuns disent que Alcatel Lucent a été ainsi pillée pendant quelques années par la justice américaine. Les secrets de fabrication et un certain nombre de données essentielles peuvent être transférés ainsi à une puissance étrangère.
    L’extraterritorialité du droit américain permet à la puissance américaine, sur les secteurs qu’elle estime stratégiques, d’asseoir sa domination.

    Merci.

    Jean-Michel Quatrepoint (Fondation Res Publica, 1er février 2016)

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  • La guerre et le droit...

    Les éditions L'Harmattan viennent de publier un traité en trois volume de David Cumin intitulé Le droit de la guerre. Maître de conférence en droit public et en sciences politiques à l'université Lyon III, David Cumin est un spécialiste de l’œuvre de Carl Schmitt et est l'auteur de Carl Schmitt - Biographie intellectuelle et politique (Cerf, 2005) ainsi que d'une Histoire de la guerre (Ellipse, 2014).

     

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    " Aussi ancien que la guerre et que le droit international dont il constitue le cœur historique, le droit de la guerre existe. Croisant droit et polémologie, portant sur les conflits armés internationaux et internes, ce traité expose, explique et reconstruit l'ensemble du droit international contemporain relatif à l'emploi de la force armée - auteurs et acteurs de la belligérance, ses buts, moyens, théâtres, régimes - et propose une analyse critique de la responsabilité réparatrice et punitive. "

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