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chaos - Page 11

  • Vers la revanche du réel...

    Nous reproduisons ci-dessous une excellente analyse de William Léonard, cueilli sur Scriptoblog, le site qui a donné naissance aux éditions le Retour aux Sources.

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    Vers la revanche du réel

    Aux alentours du 28 juin, plusieurs journaux de la presse régionale se firent l'écho d'un fait-divers particulièrement intéressant, dont je citerai quelques extraits, tirés de l'édition en ligne du Progrès, feuille lyonnaise :

     

    "Ce matin à 10H30, notre camion chargé de livrer le lait à une association de femmes en difficulté s'est retrouvé bloqué devant la cité par des poubelles remplies de sable et une bande de jeunes", a déclaré Jacques Ansquer.

    "Ils ont dit qu'ils faisaient la vérification du chargement, ils ont ouvert les portes, sont rentrés dans le camion, soi-disant pour vérifier qu'il n'y avait pas de policiers à l'intérieur", a-t-il ajouté. "Les bras nous en tombent. Aujourd'hui c'était du lait, donc ça ne les a pas intéressés, mais demain on se fera dépouiller d'autres choses si ça les intéresse".

    Une réunion extraordinaire du bureau de l'association est prévue mercredi pour déposer plainte auprès du procureur de la République.

    "Nous ne sommes plus dans une situation de non-droit, il y a désormais des zones régies par un autre droit que le nôtre", a dénoncé M. Ansquer, ironisant sur "les nouveaux octrois". "On s'attaquait aux policiers, aux pompiers, aux chauffeurs de bus, maintenant on s'en prend aux gens qui viennent aider les plus démunis", a-t-il déploré. "Mais il n'est pas question pour nous de renoncer à notre mission".

     

    Qu'un tel récit ne figure qu'à la rubrique des faits-divers est en soi quelque chose de suffisamment amusant et significatif pour être de suite signalé. Fidèles à leurs habitudes, et à la culture de l'euphémisme qui est l'appanage de leur profession lorsqu'il s'agit de traiter d'un événement se déroulant dans, selon l'expression consacrée, “un quartier sensible”, les journalistes ont en effet accordé à cet acte de guérilla – appelons les choses par leur nom – une importance comparable à celle du premier chien écrasé. Circulez, braves gens, tout va bien ! Nous savons cependant que nous ne pouvons pas compter sur les gens de presse : leur métier, peut-être depuis toujours, consiste davantage à vêtir la réalité d'un masque pudique qu'à, comme ils disent, “décrypter l'information”. Lire un journal intelligemment est un périlleux exercice d'exégèse, digne d'un Kabbaliste émérite : chaque mot exhibe le mensonge et dissimule la vérité. C'est pourquoi il convient ici de ne s'en tenir qu'aux faits : un camion de la banque alimentaire a été fouillé par des individus ne s'autorisant en cette occasion que de leur force, à l'entrée d'un territoire dont ils semblaient devoir assurer la sécurité, un peu à la manière des douaniers qui, jadis, gardaient les frontières nationales.

     

    Les éternels ravis de la crêche se demandent bien sûr comment nous avons pu en arriver là, alors même que très nombreux sont ceux qui, sans prendre trop de risques avec la postérité, avaient déduit il y a parfois fort longtemps les événements auxquels nous sommes aujourd'hui quotidiennement confrontés. Il est vrai qu'ils étaient nantis d'une qualité qui prête particulièrement au lynchage : la lucidité. Le mythe de la Caverne platonicienne ne révèle-t-il pas, en sa conclusion, que l'homme à qui est donné de contempler la vérité dans sa pleine splendeur est tué dès lors qu'il prétend la révéler à ceux qui rêvent encore ?

     

    Sachant que ceux qui liront ce texte sont pour la plupart des observateurs avertis, souffrant suffisamment, d'ailleurs, d'être traités en Cassandre à la moindre remarque trop peu élogieuse pour des temps irascibles, il me semble inutile de retracer la généalogie de ce désastre : nous savons pourquoi, nous savons comment, et malheureusement, nous conjecturons bien souvent une amère fin.

     

    La question qui m'importe ici est la suivante : pourquoi ces faits se multiplient-ils sans que l'Etat, en principe garant de la sureté générale, n'amorce le moindre début de réaction pour les faire cesser ?

     

    Ma réponse aura au moins le mérite d'être simple : parce qu'il ne le veut pas.

     

    Et pourquoi ne le veut-il pas ?

     

    Parce qu'il ne le peut pas.

     

    L'Etat est impuissant face aux gens qui, aujourd'hui, se conduisent dans certains territoires du pays comme s'ils en assumaient la souveraineté. La politique, disait Gambetta, c'est “l'art du possible”. Le Politique fait ce qu'il peut, en quelque sorte. S'il ne fait rien, c'est qu'il ne peut pas, et le verbe pouvoir est ici à prendre au sens le plus essentiel. Les idéologies contemporaines (mondialisme, ultra-libéralisme, relativisme absolu et universalisme tyrannique, hystérie shoatique, etc.) et les Puissances qui lui accordent foi pèsent si lourd qu'il est inimaginable qu'un Etat, leur jurant allégeance chaque jour que Dieu fait et tirant sa légitimité transcendantale de cette servitude absolue, soit en mesure d'agir indépendamment des forces qui le guident. Cela n'enlève rien, bien sûr, à la responsabilité de ceux qui, aujourd'hui, assument des tâches publiques : il suffirait en effet qu'ils rompent avec ces sinistres donneurs d'ordres pour que le pays recouvre une souveraineté pleine et entière sur son territoire. Mais nos dirigeants sont à ce point pleutres et clientélisés, leurs intérêts personnels seraient à ce point mis en danger par une telle démarche, que jamais ils n'oseront faire vaciller sur leur socle les idoles grâce auxquelles, rappelons-le, ils prétendent exister aux yeux du monde. Cela leur est littéralement impossible.

     

    Le socle métaphysique de cette impuissance, aussi branlant et ruiné soit-il (car personne n'est dupe, à part bien sûr les illuminés, les salariés du Désastre payés pour s'extasier, et les sans-défense, enfants et esprits malléables), ce sont les romanciers qui en parlent le mieux. Une oeuvre en particulier, rééditée ces derniers mois (et même disponible en supermarchés !), jette une lueur foudroyante sur le chapelet de “faits-divers” auxquels les média nous exposent quotidiennement. Le Camp des Saints, de Jean Raspail, roman extralucide rédigé en 1972, a cette immense qualité que, plus que la succession des événements qu'il présente à la manière d'une narration historique, il dresse le portrait fantastique d'un personnage immatériel tenant sous sa botte les puissances du monde. Rappelons, pour ceux qui ne l'auraient pas lu, l'intrigue de cet ouvrage : au tournant du siècle, une flotte de plusieurs centaines de milliers de réfugiés du tiers-monde se dirige vers les côtes françaises. Faut-il repousser les nécessiteux, les abattre, ou les accueillir ? La réponse de l'Occident gavé de moraline est aisée à deviner, et à la fin, rien n'est entrepris contre les envahisseurs pacifiques : le pays est pris.

     

    “Conscience globale” est le nom donné par Raspail à ce démiurge tyrannique, dont les oukazes sont appliquées dans l'instant par des hommes qui, pourtant, savent qu'en obéissant à ce maître despotique, ils signent leur arrêt de mort. Cette belle “Conscience” somme les puissants de s'agenouiller devant tout ce qui paraît petit, misérable, exploité, souffrant, et enjoint tout ce qui est enraciné, solide et fier, à dénigrer ce qui fait sa force, à se haïr jusqu'à souhaiter sa propre disparition, au nom du Bien. C'est, en quelque sorte, la figure allégorique de l'idéologie développée par Sartre dans la préface des “Damnés de la Terre”, plus la mystique raciale indexée sur l'égalitarisme le plus rigoureux, avec comme horizon final la régénération morale de l'humanité à travers le métissage, c'est à dire l'arasement des différences biologiques.  Ce Prince est néanmoins un Janus. Car la “Conscience”, dans le roman de Raspail, c'est aussi “la Bête”. En lecteur avisé du Nouveau Testament, l'écrivain met en scène ce “dragon” qui “parle comme un agneau” (Apocalypse 13 – 11), cette bête qui voudrait faire “l'Ange”, et qui, derrière son parler de miel, dissimule de bien coupables intentions.

     

    Cette allégorie, en plus de peindre à merveille l'Idéologie Mondiale, mélange de “morale de midinette” comme le disait Montherlant et de délire eugéniste New-Age franchement prométhéen, voire satanique, nous aide à comprendre pourquoi, dans la situation qui est la notre et qui ne tardera pas, sauf miracle, à s'aggraver, nous ne pourrons compter sur aucun Etat dit moderne, libre et démocratique pour assurer la sûreté des citoyens : la “Conscience Globale”, Princesse de ce Monde, veille au grain.

     

    Car ses principes sont simples et lumineux : ils sont partout, ils règnent, ils s'épanouissent, ils sont heureux. Que ceux qui m'accuseraient d'exagérer lisent les présentes lignes, tirées de la profession de foi du Syndicat de la Magistrature français, et qui en résument l'esprit : “Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour l’écrasé contre la compagnie d’assurance de l’écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice. “. J'ajoute : pour le non-Blanc contre le Blanc... Par extension, il s'agit de protéger les criminels contre les honnêtes gens. René Gallinier pourra témoigner de la toute puissance de ces lois qui, ne figurant dans aucune constitution, exercent pourtant leur empire sur tout et tous.

     

    Un autre exemple particulièrement frappant de ce délire fut trouvé ce matin même par votre serviteur, sur le site “Rue 89”. Le rédacteur reprenait un certain nombres d'arguments pondus par d'éminents sociologues anglo-saxons pour justifier l'abandon du combat contre le trafic de drogue par les autorités de police : “les minorités ethniques sont les principales victimes de la prohibition car « le pouvoir blanc » utilise le prétexte de lutte contre la drogue pour contrôler les populations considérées comme anxiogènes et à vocation carcérale depuis l'esclavage. La guerre à la drogue se déroule principalement sur le territoire des minorités qui doivent gérer à la fois le champ de ruines laissé par les guerres de gangs, et les ravages dus à l'abus de substances très toxiques”.

     

    Jusqu'à présent, le commentaire le plus éclairant face à la fouille sauvage du camion marseillais me paraît le fait d'un autre écrivain, Renaud Camus, qui, depuis quelques années, a essuyé plusieurs campagnes de calomnies de la part des gardiens du Temple. Par chance, il bénéficie de soutiens puissants, qui lui ont épargné jusqu'à maintenant la proscription.

     

    L'auteur ne m'en voudra sans doute pas de reproduire ici quelques unes des vérités qu'il énonce avec une très-louable lucidité : “la prétendue “mixité” et le non moins mensonger “multiculuralisme” ne sont que les noms que les lâches, les aveugles et les aveugleurs donnent à la colonisation en cours, laquelle se présente et se présentera de plus en plus en termes de territoires à soumettre, à défendre, à interdire et à exploiter, autant dire en termes militaires”.

     

    Involontairement, l'articule de Rue 89 lui donne raison : lorsqu'on utilise l'expression “territoire des minorités”, c'est que l'on a déjà intégré, inconsciemment ou non, la logique sécessionniste qui les structure.

     

    Cela dit, par le jeu d'une dialectique qu'avait déjà entrevue Tocqueville, lorsqu'il prophétisait que la constitution d'un Etat composé d'ensembles régionaux ou provinciaux artificiellement fédérés autour d'un pouvoir central aurait pour conséquence la recomposition du territoire en divisions organiques de type communautaires, l'affaire du camion marseillais, symptomatique de l'aveuglement de nos élites politiques, médiatiques et intellectuelles, me permettra de compléter ce qu'écrit très justement  Renaud Camus .

     

    Alors que l'on a persuadé, usant pour ce faire d'une sirupeuse propagande, les braves citoyens européens de la nécessité d'abolir les frontières et les postes douaniers, alors que l'on a fini par faire avaler au vulgus pecum que cette oblitération de tout ce qui pouvait rappeler la riche histoire politique du continent constituait la garantie d'une paix durable (Michel Rocard est l'un des plus ardent défenseurs de l'idée selon laquelle seule une Europe sans frontières ni identité historique, culturelle et charnelle, une pure idée en somme, peut assurer la concorde), alors que l'on s'est obstiné à gaver l'homme moyen de chimères universalistes, afin qu'il accepte docilement l'idée selon laquelle la société multiethnique, multiconfessionnelle et multiculturelle dévoilait l'horizon radieux d'une humanité réconciliée avec elle-même, alors que l'on a guidé le troupeau vers les verts paturages des songes Kantiens et des rêves New-Age - Société des Nations, Paix Perpétuelle, Fin de l'Histoire, Harmonie, Ere du Verseau - voilà que ressurgissent, comme par malice, des frontières, des clivages, des “solutions de continuité” diraient les cuistres. A dire vrai, il n'y a que dans la glossolalie des élites que la Politique et l'Histoire ont cessé d'exister. Les hommes sont naturellement des animaux politiques, et la nature, c'est un cliché, a horreur du vide. Une table-rase ne reste pas longtemps vide : ce qui disparaît aux marges réapparaît au centre.

     

    Plus important, et surtout bien plus inquiétant : ce “fait-divers” démontre que nos dirigeants ont substitué à l'administration des choses (laissée aux gangsters) le gouvernement des coeurs et des esprits : à la multiplication des “zones de non-droit” (comprendre, des territoires sur lesquels s'exercent un autre droit que celui que l'Etat est censé faire respecter) a correspondu une gargantuesque inflation législative chargée d'inventer, puis de “surveiller et punir” de multiples délits de conscience : lois Pleven, Gayssot, et nous en passons, subventions léonines accordées à diverses officines de persécution et de “vigilance”, véritable inquisition commissionnée pour identifier et dénoncer les comportements, propos et pensées inconformes aux canons de la “Conscience Globale”. Au sens institutionnel, il n'y a donc plus de politique. Elle a été remplacée par l'ingénierie des perceptions et des émotions, la gestion biologique du “parc humain”, comme l'écrit Sloterdijk, la mise en conformité avec des règles de fonctionnement techniques et économiques, ce que certains ont pu appeler un “capitalisme cognitif”, encore que l'expression paraisse quelque peu restrictive.

     

    Or, là gît le paradoxe. Nous savons, grâce à Carl Schmitt et Julien Freund, que  l'essence du politique, tel qu'au moins la pensée classique la définit, réside dans “la distinction entre l'ami et l'ennemi”. Les “jeunes” qui ont établi une frontière à l'entrée de leur quartier pratiquent donc la politique éternelle : ils exercent une souveraineté qu'ils entendent faire respecter par la force, et cette souveraineté s'exprime à travers la désignation de l'adversaire : le policier, l'Etat. Si nos institutions, officiellement, n'ont plus d'ennemis (elles n'ont que des idées à combattre et des “bêtes immondes” à exterminer, ce qui n'est pas la même chose) – d'ailleurs, leur “lutte” insensée contre toutes les “discriminations” montre assez que la moindre distinction essentielle (homme/femme, adulte/enfant, autochtone/étranger, intérieur/extérieur) leur fait horreur – elles sont elles-mêmes les ennemis identifiés et revendiqués par ce sous-prolétariat gangstérisé qui, sur le vide du Droit, a reconstitué des entités politiques de type féodales, claniques et/tribales.

     

    On peut, certes, s'inquiéter d'une telle situation. Il apparaît en effet évident que, depuis les émeutes de 2005 et les gages donnés par les politiques et l'hyper-classe à la “jeunesse des banlieues” (l'expression désigne bien entendu la composante prédatrice de cette jeunesse), de la création de la HALDE à un énième “plan-banlieue” surmédiatisé, de la généralisation des pratiques de discrimination positive raciale camouflée derrière des critères sociaux à la multiplication des chartes de la “diversité” mises en place dans les grandes entreprises, et visant à discriminer les blancs (ainsi que l'a avoué Anne Lauvergeon), les voyous que Nicolas Sarkozy promettait de karchériser sont employés comme alliés de revers du Système. On le remarque désormais à chaque manifestation de la jeunesse issue de la classe moyenne blanche. De manière tristement répétitive, les cortèges estudiantins ou les fêtes publiques auxquelles se livre cette autre jeunesse sont attaquées par des hordes de bandits tout droit venues des banlieues ethniques pour “bolosser” du petit blanc “à tête de victime”, dépouiller, piller, voire lyncher pour le plaisir, sous l'oeil impavide de CRS à qui ordre est donné de n'intervenir que pour la forme.

     

    Le Système a tout intérêt à laisser faire : d'une part, face à certaines formes de contestation sociale, il se paie à peu de frais un service de “maintien de l'ordre” non tenu par les règles du droit auquel il doit soumission permanente et absolue, sous l'oeil vigilant de la “Conscience Globale” et ses caméras de surveillance journalistiques; d'autre part, en permettant aux “casseurs” d'infiltrer les cortèges, il décrédibilise les manifestants et recouvre leurs revendications d'un bavardage médiatique sensationnaliste qui les rend inaudibles. C'est la raison pour laquelle les identitaires lyonnais, ayant marché en février dernier “contre la racaille”, ont été beaucoup plus encadrés et inquiétés par les autorités que les gangsters de cités qui avaient semé le chaos la veille : il faut que les mouvements collectifs dégénèrent et s'abîment dans l'anarchie, sans quoi ils pourraient être en mesure de rassembler autour d'eux une unanimité dangereuse pour le Système.

     

    Le rôle de cette racaille clientélisée avait été parfaitement identifié et défini par Marx et Engels – ce que semble avoir oublié la Gauche révolutionnaire, tendance NPA et PC, qui a passé ces trente dernières années à la draguer, révélant par là son absolue duplicité : « Le lumpenproletariat – cette lie d’individus déchus de toutes les classes qui a son quartier général dans les grandes villes – est, de tous les alliés possibles, le pire. Cette racaille est parfaitement vénale et tout à fait importune. Lorsque les ouvriers français portèrent sur les maisons, pendant les révolutions, l’inscription : « Mort aux voleurs ! », et qu’ils en fusillèrent même certains, ce n’était certes pas par enthousiasme pour la propriété, mais bien avec la conscience qu’il fallait avant tout se débarrasser de cette engeance. Tout chef ouvrier qui emploie cette racaille comme garde ou s’appuie sur elle, démontre par là qu’il n’est qu’un traître. » (Marx/Engels : « La social-démocratie allemande »)

     

    Nous pourrions même aller plus loin. Comme le constate Renaud Camus, les institutions contemporaines, fidèle à leur mystique mélangiste et à leur projet d'übermensch métissé, entendent utiliser ces “forces vives” pour “régénérer” le pays.

     

    Les gangsters allogènes sont, plus qu'une force d'occupation, une force de substitution : leurs comportements incivils sont encouragés, leur agressivité n'est jamais réfrênée ni condamnée car elle est la garantie de leur valeur militaire.  Lorsqu'à la télévision, la “Bouche d'Ombre” du Système, l'on diffuse des clips de rap misogynes exaltant les corps bodybuildés d'allogènes roulant des mécaniques, clips sur lesquels Caroline Fourest n'écrit étrangement aucun livre,  lorsque Joey Starr, bien connu pour sa tendresse envers les femmes, est invité chez Drucker, lorsque les charmants bambins impliqués dans des affaires de viols en réunion écopent de peines symboliques, on constate que le modèle d'une virilité belliciste, celle du champ de bataille, est exagérément valorisée lorsqu'il s'agit des “jeunes”, tandis que dans le même temps, les hommes de souche européenne subissent le rouleau-compresseur de la vulgate féministe. L'homme honnête, lit-on, entend-on, doit “retrouver sa part de féminité”, cultiver la douceur et le pacifisme, éviter de se mettre en colère, consacrer une moitié de sa vie aux tâches ménagères, s'accomplir à travers le passage de l'aspirateur, etc.

     

    Les attributs d'une virilité classique caricaturée en brutalité primitive sont ainsi systématiquement portés au crédit des “bad boys” allogènes. Mais parce qu'il institue un rapport de force brute défavorable pour l'autochtone, il est possible de trouver à ce double discours une assez effrayante cohérence : certains sont en effet enjoints à s'affaiblir tandis que les autres reçoivent la permission d'user impunément de la force.

     

     

     

    Cependant, ce simple fait-divers, cet acte de guerre, c'est à dire donc ce phénomène politique, devrait pouvoir constituer un indice d'espérance. Malgré la volonté absolue de retirer du monde tout ce qui pourrait le ramener au réel, les faits restent têtus : la disparition des frontières, des communautés naturelles, du droit, ne peut avoir pour conséquence que la reconstitution d'autres communautés organiques, d'autres droits. La conception politique classique n'est pas morte, et elle risque même de se rappeler bien cruellement à notre souvenir.

     

    Il n'est pas du ressort de ce texte d'analyser dans le détail cet “autre droit”, et le caractère tribal et clanique de ces communautés sécessionnistes que l'impuissance de nos institutions laisse prospérer, bien souvent au dépends même de ceux qui vivent sous la coupe de caïds et de mafieux. Cela dit, il n'est pas douteux que les modèles d'organisation de la vie publique, dans ces espaces, sont incompatibles avec la manière dont nous concevons l'existence.

     

    La bonne nouvelle, c'est que ces phénomènes iront en s'amplifiant au point où chacun sera tenu d'opérer un aggiornamento dans ses conceptions politiques, de déterminer et, enfin, d'adandonner toutes celles qui l'auront conduit à supporter une invivable oppression. Tous les hommes ont en partage un sens aigu de l'injustice : si les mirifiques “valeurs”, quelles que soient les oriflammes trompeurs qu'elles exhibent, accroissent l'iniquité en ce bas monde, les hommes, espérons-le, les brûleront aussi vite et haineusement qu'ils les ont vénérées.

    William Léonard (Scriptoblog, 8 juillet 2011)

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  • Un autre monde ?...

    Alain Chauvet, consultant et professeur à l'Ecole centrale de Paris et à l'Essec, vient de publier aux éditions Lethielleux, Un autre monde - Protectionnisme contre prédation, un essai dans lequel il préconise la réorganisation du monde en grands espaces politiques économiquement autocentrés. Il avait déjà publié en 2009 Après l'Occident - Pour un protectionnisme intelligent aux éditions Desclée de Brouwer.

     

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    "Est-on au bord d'un effondrement de la civilisation occidentale ? La disparition des Etats-providence est elle inéluctable ?

    Comment arrêter les guerres, remettre l'argent à sa place, et éviter le chaos auquel nous destinent les prédateurs financiers ?

    Peut-on rompre la fatalité du cycle millénaire des civilisations grecque, romaine et chrétienne ?

    Comme dans « Après l'Occident » (2009), Alain Chauvet fournit une lecture nouvelle de la mondialisation et de la crise, à partir d'une analyse de l'histoire de l'Humanité.

    Constatant l'impossibilité de mettre en place un gouvernement mondial qui régulerait la planète et éliminerait la prédation, il propose une solution contre-dogmatique : découper le monde en dix grandes civilisations totalement protectionnistes. Dix petits mondes se partageraient la planète et réguleraient chacun l'économie et la vie politique de leur territoire.

    Seule l'Europe, avec son passé social-démocrate et sa puissance économique, peut réussir la première dans cette voie."

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  • Chaos ?...

    "Par opposition au Kosmos, ordonné et d'essence divine, les Anciens Grecs nommaient « Chaos » un état de l'univers dépourvu de forme et indifférencié, où rien n'est déterminable ni concevable. pour la pensée grecque, le Kosmos nait de «la mise en forme » du Chaos. Toujours susceptible de reprendre le dessus, le Chaos n'est donc pas un état antérieur mais un état intérieur. Il perdure à l'intérieur du Kosmos."

    Jean-Sylvestre Mongrenier, Dictionnaire géopolitique de la défense européenne

     

     

    Le numéro 35 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, vient de paraître. Le thème retenu est celui du chaos... Le sommaire est, comme toujours, particulièrement riche.

    Le numéro est disponible à la commande sur le site de la revue Eléments ou sur le site des Amis d'Alain de Benoist.

    Bonne lecture !

     

     

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    Au sommaire :

    • Jean-François Gautier / « Khaos », l’impensable fondamental

    • Pierre Le Vigan / Empédocle et la systémique du chaos

    • Document : Jaime Semprun / L’abîme se repeuple (extraits)

    • Alain de Benoist / Multitude ou chaos ? Sur les thèses de Michael Hardt et Antonio Negri

    • Eric Werner / Jusqu’où ne pas aller trop loin : sur l’avant-guerre civile

    • Entretien avec Alain Bauer / Chaos, insécurité et décèlement précoce des menaces

    • Document : Georges Sorel / La violence révolutionnaire : de la paix sociale au chaos régénérateur (1908)

    • Michel Drac / Le chaos monétaire

    • Entretien avec Philippe Simonnot / L’étalon-or pour sortir du chaos monétaire ?

    • Jean-François Gautier / De « Khaos » à « Chaos »

    • Jean-Louis Harouel / Le chaos du modernisme artistique

    • Entretien avec Bernard Lugan / L’Afrique noire est-elle vouée au chaos ?

    • Le texte : Martin Heidegger / Critique de la volonté de puissance. À propos du nihilisme

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  • Littérature et politique...

    Les éditions Flammarion rééditent dans leur collection de poche Champs l'essai de Stéphane Giocanti, initialement paru en 2009 et intitulé Une histoire politique de la littérature. Professeur de français, Stéphane Giocanti s'est déjà signalé par la publication d'une copieuse biographie du fondateur de l'Action française, Charles Maurras : le chaos et l'ordre (Flammarion, 2006) ainsi que par celle d'un roman, Kamikaze d'été (Edition du Rocher, 2008).

     

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    "François Ier fut roi de France et poète. Le cardinal de Richelieu institua quarante immortels pour fixer sa patrie sur un Olympe littéraire. Avant d'être empereur, Napoléon rêva d'être écrivain. Le romancier Malraux fit un inoubliable ministre de la Culture, pour la gloire d'un général publié lui-même dans la bibliothèque de la Pléiade... Nulle part ailleurs qu'en France politique et littérature ne forment un couple aussi singulier. Et les écrivains, font-ils bon ménage avec la politique ? C'est la question posée par ce livre irrévérencieux, qui invite le lecteur à découvrir des consanguinités surprenantes entre auteurs d'hier ou d'aujourd'hui, de droite ou de gauche, pour le meilleur et pour le pire. Car le peuple indiscipliné des écrivains regorge de courtisans et de guerriers, d'idéologues et de prudents, de sceptiques et de pamphlétaires, de vaillants et de lâches, de prophètes et de mystiques, sans oublier ceux que Stéphane Giocanti appelle joliment les plantés et les maudits : ceux qui se sont fourvoyés dans le ridicule ou le tragique. Une promenade inédite dans l'histoire littéraire, de Victor Hugo à Richard Millet."

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  • 2011, l'année impitoyable !...

    Nous reproduisons ci-dessous le communiqué publié par le Laboratoire européen d'anticipation politique à l'occasion de la sortie du Global Europe Anticipation Bulletin n°51.

     

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    "Ce numéro 51 du GEAB marque le cinquième anniversaire de la publication du Global Europe Anticipation Bulletin. Or, en Janvier 2006, à l'occasion du GEAB N°1, l'équipe de LEAP/E2020 indiquait à l'époque qu'une période de quatre à sept ans s'ouvrait qui serait caractérisée par la « Chute du Mur Dollar », phénomène analogue à celui de la chute du Mur de Berlin qui entraîna dans les années suivantes l'effondrement du bloc communiste, puis celui de l'URSS. Aujourd'hui, dans ce GEAB N°51 qui présente nos trente-deux anticipations pour l'année 2011, nous estimons que l'année à venir sera une année charnière dans ce processus s'étalant donc entre 2010 et 2013. Elle sera en tout état de cause une année impitoyable car elle va en effet marquer l'entrée dans la phase terminale du monde d'avant la crise (1).

    Depuis Septembre 2008, moment où l'évidence de la nature globale et systémique de la crise s'est imposée à tous, les Etats-Unis, et derrière eux les pays occidentaux, se sont contentés de mesures palliatives qui n'ont fait que masquer les effets de sape de la crise sur les fondements du système international contemporain. 2011 va, selon notre équipe, marquer le moment crucial où d'une part ces mesures palliatives voient leur effet anesthésiant s'évanouir tandis que, au contraire, vont brutalement surgir au premier plan les conséquences de la dislocation systémique de ces dernières années (2).

    En résumé, 2011 va être marquée par une série de chocs violents qui vont faire exploser les fausses protections mises en place depuis 2008 (3) et qui vont emporter un à un les « piliers » sur lesquels reposent depuis des décennies le « Mur Dollar ». Seuls les pays, collectivités, organisations et individus qui ont réellement entrepris depuis trois ans de tirer les leçons de la crise en cours pour s'éloigner au plus vite des modèles, valeurs et comportements d'avant la crise, traverseront cette année indemnes ; les autres vont être emportés dans le cortège de difficultés monétaires, financières, économiques, sociales et politiques que réserve 2011.

    Ainsi, comme nous considérons que 2011 sera globalement l'année la plus chaotique depuis 2006, date du début de nos travaux sur la crise, notre équipe s'est concentrée dans le GEAB N°51 sur les 32 anticipations de l'année 2011, qui comportent également nombre de recommandations pour faire face aux chocs à venir. C'est ainsi une sorte de carte prévisionnelle des chocs financiers, monétaires, politiques, économiques et sociaux des douze prochains mois qu'offre ce numéro du GEAB.

    Si notre équipe estime que 2011 sera l'année la plus terrible depuis 2006, date du début de notre travail d'anticipation de la crise systémique, c'est parce qu'elle est à la croisée des trois chemins du chaos mondial. Faute de traitement de fond des causes de la crise, depuis 2008 le monde n'a fait que reculer pour mieux sauter.

    Un système international exsangue

    Le premier chemin que la crise peut prendre pour générer un chaos mondial, c'est tout simplement un choc violent et imprévisible. L'état de délabrement du système international est désormais tellement avancé que sa cohésion est à la merci de toute catastrophe d'envergure (4). Il suffit de voir l'incapacité de la communauté internationale à efficacement aider Haïti depuis un an (5), des Etats-Unis à reconstruire la Nouvelle Orléans depuis six ans, de l'ONU à régler les problèmes du Darfour, de la Côte d'Ivoire depuis une décennie, des Etats-Unis à faire avancer la paix au Proche-Orient, de l'OTAN à battre les Talibans en Afghanistan, du Conseil de Sécurité à maîtriser les questions coréenne et iranienne, de l'Occident à stabiliser le Liban, du G20 à mettre fin à la crise mondiale qu'elle soit financière, alimentaire, économique, sociale, monétaire, … pour constater que sur l'ensemble de la palette des catastrophes climatiques et humanitaires, comme des crises économiques et sociales, le système international est désormais impuissant.

    En fait, depuis le milieu des années 2000 au moins, l'ensemble des grands acteurs mondiaux, au premier rang desquels se trouvent bien entendu les Etats-Unis et son cortège de pays occidentaux, ne fait plus que de la communication, de la gesticulation. Dans la réalité, rien ne va plus : la bille des crises tourne et chacun retient son souffle pour qu'elle ne tombe pas sur sa case. Mais progressivement la multiplication des risques et des thèmes de crise ont transformé la roulette de casino en roulette russe. Pour LEAP/E2020, le monde entier commence à jouer à la roulette russe (6), ou plutôt à sa version 2011 « la roulette américaine », avec cinq balles dans le barillet.


    Evolution mensuelle de l'indice Alimentation de la FAO (2010) et des prix des principales denrées alimentaires (2009/2010) (base 100 : moyenne 2002-2004) - Source : FAO/Crikey, 01/2011
    Evolution mensuelle de l'indice Alimentation de la FAO (2010) et des prix des principales denrées alimentaires (2009/2010) (base 100 : moyenne 2002-2004) - Source : FAO/Crikey, 01/2011
    L'envolée des prix des matières premières (alimentaires, énergétiques (7),...) doit nous rappeler 2008 (8). C'est en effet dans le semestre précédant l'effondrement de Lehman Brothers et de Wall Street que s'est situé le précédent épisode de fortes hausses des prix des matières premières. Et les causes actuelles sont de la même nature que celles d'hier : une fuite hors des actifs financiers et monétaires en faveur de placements « concrets ». Hier les gros opérateurs fuyaient les crédits hypothécaires et tout ce qui en dépendaient ainsi que le Dollar US ; aujourd'hui ils fuient l'ensemble des valeurs financières et les bons du Trésor (ç) et autres dettes publiques. Il faut donc s'attendre entre le Printemps 2011 et l'Automne 2011 à l'explosion de la quadruple bulle des bons du Trésor, des dettes publiques (10), des bilans bancaires (11) et de l'immobilier (américain, chinois, britannique, espagnol, … et commercial (12)) ; l'ensemble se déroulant sur fond de guerre monétaire exacerbée (13).

    L'inflation induite par les Quantitative Easing américain, britannique et japonais et les mesures de stimulation des mêmes, des Européens et des Chinois va être l'un des facteurs déstabilisant de 2011 (14). Nous y revenons plus en détail dans ce GEAB N°51. Mais ce qui est désormais évident au regard de ce qui se passe en Tunisie (15), c'est que ce contexte mondial, notamment la hausse des prix des denrées et de l'énergie, débouche dorénavant sur des chocs sociaux et politiques radicaux (16). L'autre réalité que dévoile le cas tunisien, c'est l'impuissance des « parrains » français, italien ou américain pour empêcher l'effondrement d'un « régime-ami » (17).

    Impuissance des principaux acteurs géopolitiques mondiaux

    Et cette impuissance des principaux acteurs géopolitiques mondiaux est l'autre chemin que la crise peut utiliser pour générer un chaos mondial en 2011. En effet, on peut classer les principales puissances du G20 en deux groupes dont le point seul point commun est qu'ils ne parviennent pas à influencer les évènements de manière décisive.

    D'un côté on a l'Occident moribond avec, d'une part, les Etats-Unis, dont l'année 2011 va démontrer que le leadership n'est plus qu'une fiction (voir dans ce GEAB N°51) et qui tentent de figer tout le système international dans sa configuration du début des années 2000 (18) ; et puis on a l'Euroland, « souverain » en gestation qui est actuellement essentiellement concentré sur son adaptation à son nouvel environnement (19) et son nouveau statut d'entité géopolitique émergente (20), et qui n'a donc ni l'énergie, ni la vision nécessaire pour peser sur les évènements mondiaux (21).

    Et de l'autre côté, on trouve les BRIC (avec en particulier la Chine et la Russie) qui s'avèrent incapables pour l'instant de prendre le contrôle de tout ou partie du système international et dont la seule action se limite donc à saper discrètement ce qui reste des fondements de l'ordre d'avant la crise (22).

    En fin de compte, c'est donc l'impuissance qui se généralise (23) au niveau de la communauté internationale, renforçant non seulement le risque de chocs majeurs, mais également l'importance des conséquences de ces chocs. Le monde de 2008 a été pris par surprise par le choc violent de la crise, mais le système international était paradoxalement mieux équipé pour réagir car organisé autour d'un leader incontesté (24). En 2011, ça n'est plus le cas : non seulement il n'y a plus de leader incontesté, mais le système est exsangue comme on l'a vu précédemment. Et la situation est encore aggravée par le fait que les sociétés d'un grand nombre de pays de la planète sont au bord de la rupture socio-économique.


    Evolution du prix de l'essence aux Etats-Unis (2009-2011) - Source : GasBuddy, 01/2011
    Evolution du prix de l'essence aux Etats-Unis (2009-2011) - Source : GasBuddy, 01/2011

    Des sociétés au bord de la rupture socio-économique

    C'est en particulier le cas aux Etats-Unis et en Europe où trois ans de crise commencent à peser très lourd dans la balance socio-économique, et donc politique. Les ménages américains désormais insolvables par dizaines de millions oscillent entre pauvreté subie (25) et rage anti-système. Les citoyens européens, coincés entre chômage et démantèlement de l'Etat-providence (26), commencent à refuser de payer les additions des crises financières et budgétaires et entreprennent de chercher des coupables (banques, Euro, partis politiques de gouvernement, …).

    Mais parmi les puissances émergentes aussi, la transition violente que constitue la crise conduit les sociétés vers des situations de rupture : en Chine, la nécessité de maîtriser les bulles financières en développement se heurte au désir d'enrichissement de secteurs entiers de la société comme au besoin d'emploi de dizaines de millions de travailleurs précaires ; en Russie, la faiblesse du filet social s'accommode mal de l'enrichissement des élites, tout comme en Algérie agitée par des émeutes. En Turquie, au Brésil, en Inde, partout la transition rapide que connaissent ces pays déclenche émeutes, protestations, attentats. Pour des raisons parfois antinomiques, développement pour les unes, appauvrissement pour les autres, un peu partout sur la planète nos différentes sociétés abordent 2011 dans un contexte de fortes tensions, de ruptures socio-économiques qui en font donc des poudrières politiques.

    C'est sa position à la croisée de ces trois chemins qui fait ainsi de 2011 une année impitoyable. Et impitoyable elle le sera pour les Etats (et les collectivités locales) qui ont choisi de ne pas tirer les difficiles leçons des trois années de crise qui ont précédé et/ou qui se sont contentés de changements cosmétiques ne modifiant en rien leurs déséquilibres fondamentaux. Elle le sera aussi pour les entreprises (et pour les Etats (27)) qui ont cru que l'embellie de 2010 était le signe d'un retour « à la normale » de l'économie mondiale. Et enfin elle le sera pour les investisseurs qui n'ont pas compris que les valeurs d'hier (titres, monnaies, ….) ne pouvaient pas être celles de demain (en tout cas pour plusieurs années). L'Histoire est généralement « bonne fille ». Elle donne souvent un coup de semonce avant de balayer le passé. Cette fois-ci, elle a donné le coup de semonce en 2008. Nous estimons qu'en 2011, elle donnera le coup de balai. Seuls les acteurs qui ont entrepris, même laborieusement, même partiellement, de s'adapter aux nouvelles conditions générées par la crise pourront tenir ; pour les autres le chaos est au bout du chemin."


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    Notes:

    (1) Ou du monde tel qu'on le connaît depuis 1945 pour reprendre notre description de 2006.

    (2) La récente décision du ministère du Travail américain d'étendre à cinq ans la mesure du chômage de longue durée dans les statistiques de l'emploi US, au lieu du maximum de deux ans jusqu'à maintenant, est un bon indicateur de l'entrée dans une étape nouvelle de la crise, une étape qui voit disparaître les « habitudes » du monde d'avant. D'ailleurs, le gouvernement américain cite « la montée sans précédent » du chômage de longue durée pour justifier cette décision. Source : The Hill, 28/12/2010

    (3) Ces mesures (monétaires, financières, économiques, budgétaires, stratégiques) sont désormais étroitement connectées. C'est pourquoi elles seront emportées dans une série de chocs successifs.

    (4) Source : The Independent, 13/01/2011

    (5) C'est même pire puisque c'est l'aide internationale qui a apporté le choléra dans l'île, faisant des milliers de morts.

    (6) D'ailleurs Timothy Geithner, le ministre américain des Finances, peu connu pour son imagination débordante, vient d'indiquer que « le gouvernement américain pouvait avoir à nouveau à faire des choses exceptionnelles », en référence au plan de sauvetage des banques de 2008. Source : MarketWatch, 13/01/2011

    (7) D'ailleurs l'Inde et l'Iran sont en train de préparer un système d'échange « or contre pétrole » pour tenter d'éviter des ruptures d'approvisionnement. Source : Times of India, 08/01/2011

    (8) L'indice FAO des prix alimentaires vient de dépasser en Janvier 2011 (à 215) son précédent record de Mai 2008 (à 214).

    (9) Les banques de Wall Street se débarrassent actuellement à très grande vitesse (sans équivalent depuis 2004) de leurs Bons du Trésor US. Leur explication officielle est « l'amélioration remarquable de l'économie US qui ne justifie plus de se réfugier sur les Bons du Trésor ». Bien entendu, vous êtes libres de les croire comme le fait le journaliste de Bloomberg du 10/01/2011.

    (10) Ainsi l'Euroland avance déjà à grand pas sur le chemin décrit dans le GEAB N°50 d'une décote en cas de refinancement des dettes d'un Etat-membre ; tandis que désormais les dettes japonaise et américaine s'apprêtent à entrer dans la tourmente. Sources : Bloomberg, 07/01/2011 ; Telegraph, 05/01/2011

    (11) Nous estimons que d'une manière générale les bilans des grandes banques mondiales contiennent au moins 50% d'actifs-fantômes dont l'année à venir va imposer une décote de 20% à 40% du fait du retour de la récession mondiale avec l'austérité, de la montée des défauts sur les prêts des ménages, des entreprises, des collectivités, des Etats, des guerres monétaires et de la reprise de la chute de l'immobilier. Les « stress-tests » américain, européen, chinois, japonais ou autres peuvent toujours continuer à tenter de rassurer les marchés avec des scénarios « Bisounours » sauf que cette année c'est « Alien contre Predator » qui est au programme des banques. Source : Forbes, 12/01/2011

    (12) Chacun de ces marchés immobiliers va encore fortement baisser en 2011 pour ceux qui ont déjà entamer leur chute ces dernières années, ou dans le cas chinois, va entamer son dégonflement brutal sur fond de ralentissement économique et de rigueur monétaire.

    (13) L'économie japonaise est d'ailleurs l'une des premières victimes de cette guerre des monnaies, avec 76% des chefs d'entreprises des 110 grandes sociétés nippones sondées par Kyodo News se déclarant désormais pessimistes pour la croissance japonaise en 2011 suite à la hausse du Yen. Source : JapanTimes, 04/01/2011

    (14) Voici quelques exemples édifiants rassemblés par l'excellent John Rubino. Source : DollarCollapse, 08/01/2011

    (15) Pour rappel, dans le GEAB N°48, du 15/10/2010, nous avions classé la Tunisie dans les « pays à risques importants » pour 2011.

    (16) Nul doute d'ailleurs que l'exemple tunisien génère une salve de réévaluation parmi les agences de notation et les « experts en géopolitiques » qui, comme d'habitude, n'ont rien vu venir. Le cas tunisien illustre également le fait que ce sont désormais les pays satellites de l'Occident en général, et des Etats-Unis en particulier, qui sont sur le chemin des chocs de 2011 et des années à venir. Et il confirme ce que nous répétons régulièrement, une crise accélère tous les processus historiques. Le régime Ben Ali, vieux de vingt-trois ans, s'est effondré en quelques semaines. Quand l'obsolescence politique est là, tout bascule vite. Or c'est l'ensemble des régimes arabes pro-occidentaux qui est désormais obsolète à l'aune des évènements de Tunisie.

    (17) Nul doute que cette paralysie des « parrains occidentaux » va être soigneusement analysée à Rabat, au Caire, à Djeddah et Amman par exemple.

    (18) Configuration qui leur était la plus favorable puisque sans contrepoids à leur influence.

    (19) Nous y revenons plus en détail dans ce numéro du GEAB, mais vu de Chine, on ne s'y trompe pas. Source : Xinhua, 02/01/2011

    (20) Petit à petit les Européens découvrent qu'ils sont dépendants d'autres centres de pouvoir que Washington. Pékin, Moscou, Brasilia, New Delhi, … entrent très lentement dans le paysage des partenaires essentiels. Source : La Tribune, 05/01/2011 ; Libération, 24/12/2010 ; El Pais, 05/01/2011

    (21) Toute l'énergie du Japon est concentrée sur sa tentative désespérée de résister à l'attraction chinoise. Quant aux autres pays occidentaux, ils ne sont pas en mesure d'influer significativement sur les tendances mondiales.

    (22) La place du Dollar US dans le système mondial fait partie de ces derniers fondements que les BRIC érodent activement jour après jour.

    (23) En matière de déficit, le cas américain est exemplaire. Au-delà du discours, tout continue comme avant la crise avec un déficit en gonflement exponentiel. Pourtant même le FMI tire désormais la sonnette d'alarme. Source : Reuters, 08/01/2011

    (24) D'ailleurs même MarketWatch du 12/01/2011, se faisant l'écho du Forum de Davos, s'inquiète de l'absence de coordination internationale, qui est en soi un risque majeur pour l'économie mondiale.

    (25) Des millions d'Américains découvrent les banques alimentaires pour la première fois de leur vie, tandis qu'en Californie, comme dans de nombreux autres états, le système éducatif se désagrège rapidement. En Illinois, les études sur le déficit de l'Etat le comparent désormais au Titanic. 2010 bat le record des saisies immobilières. Sources : Alternet, 27/12/2010 ; CNN, 08/01/2011 ; IGPA-Illinois, 01/2011 ; LADailyNews, 13/01/2011

    (26) L'Irlande qui est face à une reconstruction pure et simple de son économie est un bon exemple de situations à venir. Mais même l'Allemagne, aux résultats économiques pourtant remarquables actuellement, n'échappe pas à cette évolution comme le montre la crise du financement des activités culturelles. Tandis qu'au Royaume-Uni, des millions de retraités voient leurs revenus amputés pour la troisième année consécutive. Sources : Irish Times, 31/12/2010 ; Deutsche Welle, 03/01/2011 ; Telegraph, 13/01/2011

    (27) A ce sujet, les dirigeants américains confirment qu'ils foncent tout droit dans le mur des dettes publiques, faute d'anticiper les difficultés. En effet la récente déclaration de Ben Bernanke, le patron de la FED, dans laquelle il affirme que la Fed n'aidera pas les Etats (30% de baisse des revenus fiscaux en 2009 d'après le Washington Post du 05/01/2011) et les villes qui croulent sous les dettes, tout comme la décision du Congrès d'arrêter l'émission des « Build American Bonds » qui ont évité aux Etats de faire faillite ces deux dernières années, illustrent un aveuglement de Washington qui n'a d'équivalent que celui dont Washington a fait preuve en 2007/2008 face à la montée des conséquences de la crise des « subprimes ». Sources : Bloomberg, 07/01/2011 ; WashingtonBlog 13/01/2011


    Samedi 15 Janvier 2011



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  • Gouverner par le chaos !

    Dans la lignée de L'insurrection qui vient du Comité invisible, Gouverner par le chaos, publié aux éditions Max Milo, est une critique radicale et sans concession du système dans leqel nous vivons.

    Gouverner par le chaos.jpg
    Comment devenir les maîtres du monde ? En centralisant l'ordre et le pouvoir autour d'une minorité et en semant le désordre dans le peuple, ramené au niveau de pantins paniqués. La méthode ? L'ingénierie sociale: infiltration des esprits, analyse de nos moindres faits et gestes, contrôle des comportements à distance, marketing de l'intime et autres réjouissances qui font de nous des bons consommateurs.


    Ce texte prolonge l'essai politique insurrectionnel signé du Comité invisible et attribué aux inculpés dans l'affaire de Tarnac. Publié d'abord sur le web et y ayant suscité " enthousiasme débridé ou agacement hystérique" (Le Nouvel Observateur), il a été pour cette édition revu et corrigé par les auteurs. Volontairement anonymes, ceux-ci prônent une résistance constructive: "Créer, c'est résister. Résister, c'est créer."

     

     

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