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Anthropologie de la racaille...

Nous reproduisons ci-dessous une chronique de Bruno Lafourcade, cueilli sur son site personnel et consacré à la racaille comme nouvelle espèce anthropologique... Écrivain talentueux, Bruno Lafourcade a publié ces trois dernières années, trois romans, L'ivraie (Léo Scheer, 2018), Saint-Marsan (Terres de l'ouest, 2019) et Tombeau de Raoul Ducourneau (Léo Scheer, 2019) ainsi que deux pamphlets, Les nouveaux vertueux (Jean-Dézert, 2017) et Une jeunesse, les dents serrées (Pierre-Guillaume de Roux, 2019), et un polar, Le Hussard retrouve ses facultés (Auda Isarn, 2019).

 

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Anthropologie de la racaille

La révélation d’une nouvelle espèce anthropologique fait la joie du savant, la fierté d’une nation et l’intérêt du public. C’est ce triple effet que nous rencontrâmes en découvrant Homo rascaillus – dont nous présentons ici les origines, le milieu naturel et les mœurs.

L’origine de Homo rascaillus, racaille en français vulgaire, ou caillera en néo-français vernaculaire, est clairement circonscrite : l’espèce fit son apparition, nul ne l’ignore plus, à la fin du XXe siècle, dans la partie extrême-orientale de l’Europe. Sa variété la plus connue appartient à la souche Rascaillus banleucus, bien que d’autres espèces aient prospéré ailleurs. Nous avions pensé que Homo rascaillus était apparenté à Homo faber pour l’habitude, propre à l’espèce commune, de remplir d’essence une bouteille et d’y glisser un chiffon enflammé, mais nos estimables confrères, les professeurs Mucchielli, Lapeyronnie & Lagrange, ont tendance à rapprocher Homo rascaillus de Homo ludens pour son envie irrépressible de lancer, dans les voitures de ses voisins, la bouteille enchiffonnée, ou, sur des espèces indigènes encasquées et étrangères à son milieu, des pierres, des briques, des cendriers, des boules de pétanque, de vieux annuaires, des os de mouton, des pots de mayonnaise, des bouteilles de gaz, des machines à laver ainsi que d’autres éléments d’électroménager. L’espèce indigène, Homo souchus, se familiarisa rapidement avec Homo rascaillus, dont les us & les mœurs lui furent si sympathiques qu’il partit s’établir ailleurs.

D’un habitat constitué de hautes barres d’immeubles où se serrent des milliers représentants de l’espèce, Rascaillus banleucus ludens semble avoir retiré de fortes préventions contre la solitude : il ne se déplace seul que contraint et forcé. Il n’est pas rare que des groupes de Rascaillus proposent facétieusement à d’autres groupes croisés, qu’ils soient de milieux banleucus éloignés ou de l’espèce indigène Homo souchus, des coups de poing, de pied, de marteau ou de couteau. MM. Mucchielli, Lapeyronnie et Lagrange voient là une autre résurgence du ludens dans le rascaillus.

Parallèlement, le Rascaillus banleucus semble incapable de quitter son milieu naturel. Pour ne pas avoir à abandonner celui-ci, qu’il défend contre des prédateurs de milieux éloignés, ou contre l’espèce indigène, il a développé une agriculture parallèle, dont les plants femelles produisent du delta-9-TétraHydroCannabinol, très utile pour passer de la Renault Twingo à la Bugatti Veyron. Il se révèle également incapable de quitter ses origines, sa famille, ce qui le conduit à une endogamie nuisible au développement cognitif. À cet égard, nous avons identifié deux espèces de jeunes femelles rascaillus : la cagole et l’envoilée. Une troisième espèce a sans doute existé, qui constituait vraisemblablement le chaînon manquant, et dont nous constatons la raréfaction, sinon la disparition. Le mâle, cependant, qui cherche la copulation avec la jeune femelle rascaillus, se trouve privé, pour deux raisons, de la satisfaction de ce besoin. D’abord, il convoite la cagole et il en a honte ; ensuite, il ne convoite pas l’envoilée et il en a honte. Les conséquences sont doubles : dans les parties troglodytes de son habitat, il a tendance à pratiquer, seul ou avec d’autres mâles, des activités fellatoires et sodomites, avec la cagole, consentante ou non ; et à se marier avec l’envoilée, quelque peu érectile qu’elle soit.

La vêture de Homo rascaillus consiste dans un ensemble d’éléments dépareillés. Homo rascaillus dans sa variante la plus répandue est encapuchonnée ; pantalons de survêtement ou de toile de jean : les premiers doivent monter assez haut sur les chevilles que l’on voie les chaussettes, les seconds sont descendus assez bas que l’on voie les dessous (le jean ainsi porté entravant considérablement la marche, il pourrait s’agir d’une mesure auto-coercitive dont nous n’avons pas saisi le sens). D’autre part, si l’espèce est volontiers dolichocrânienne, ou dolichocéphale, c’est qu’elle porte, souvent en arrière et sur le sommet du crâne, comme pour rehausser celui-ci, une casquette, qui semble la coiffe d’été et de printemps, tandis que les automnes et les hivers sont l’occasion de porter des bonnets à oreillettes ou rabats, peut-être pour rappeler le basset artésien.

La nourriture chez Homo rascaillus est essentiellement articulée autour de la distinction hallal/haram, qui lui semble essentielle et dont nous ne sommes pas parvenus à comprendre le sens ni l’intérêt.

Homo rascaillus connaît une forme de langage, c’est à peu près certain, bien que peu articulé : il s’apparente plutôt à un grognement. Ainsi, dans un rite propre à l’espèce, il n’est pas rare de voir un Rascaillus en fourrure donner, en grognant des allusions aux mœurs dissolues de certaines mères de la tribu, de nonchalants coups de liasse sur les fesses de cagoles en bikinis. Les mâles les plus évolués possèdent une graphie lointainement apparentée à celle de Homo souchus. Elle consiste dans la calligraphie de signes ésotériques, souvent la stylisation et le coloriage de leurs propres noms abrégés, ou de leurs surnoms, ou encore de leurs pseudonymes. Sur des murs, et sur toute sorte de surfaces non destinées à cet usage, on repère, collées, ou bien dessinées et coloriées, mais aussi gravées à la pointe du compas ou taillées à la lame d’un cutter, ou encore écrites au feutre, au marqueur et à la bombe aérosol, des marques identiques, ou d’autres : dessins de parties corporelles (avec une nette prédilection pour les appareils génitaux des sexes mâle et femelle), signes ou sigles (« BOOBA », « BENLADEN ») et professions de foi diverses (« Jennifer sallope », « Feujs encullé »).

On note enfin qu’une autre école anthropologique relie Homo rascaillus à Homo œconomicus pour son goût manifeste de la caillasse ; et à Homo religiosus pour certaine passion coupable consistant à se laisser pousser la barbe et bloquer des rues en se mettant à genoux et en baissant la tête au sol. Or ces deux branches devraient être contradictoires tant il apparaît que la première, calquée sur la sous-culture mercantile anglo-saxonne et l’hédonisme de masse (cinéma industriel, clips vidéo, publicités, chansons commerciales), semble incompatible avec la piété, la spiritualité, l’ascèse et les hautes valeurs morales impliquées par la seconde. Curieusement, elles ne le sont pas.

Il apparaît, au terme de cette communication, que Homo rascaillus, dans son mode de vie, ses vêtements, son langage, ses pratiques est un être neuf, que nous serons amenés à voir croître et prospérer. Si nous devions cependant porter un jugement moral sur lui, nous laisserions parler MM. Mucchielli, Lapeyronnie et Lagrange qui, dans un souci de synthèse, écriraient incidemment et non sans péremptoire :

« Homo rascaillus, cette espèce neuve, structurée par la subculture encasquettée nord-américaine, par l’avidité pour les biens de consommation les plus immédiats, périssables et médiocres, par la valorisation de la caillasse, du loisir massifié et trépanant, par un tropisme vers le bruyant et le vociférant, par le mépris pour l’école, le savoir et ses bouffons, par la haine et le ressentiment à l’égard des indigènes, par la réification des femmes, par l’auto-victimisation complaisante, par la vénération a-critique de l’islam, par la violence la plus sauvage, la plus gratuite et la plus amorale, Homo rascaillus, donc, est une chance pour la France. »

Bruno Lafourcade (Site de Bruno Lafourcade, 24 novembre 2019)

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