Les éditions Nouveau Monde viennent de rééditer dans leur collection de poche la récente étude historique de Guillaume Bourgeois intitulée La véritable histoire de l'Orchestre rouge. Se livrant à un sain travail de révision de l'histoire, l'auteur abat la statue de Leopold Trepper, mort en 1982 à Jérusalem, que l'intéressé s'était lui-même construit avec l'aide de Gilles Perrault. Guillaume Bourgeois est maître de conférences en histoire contemporaine à l'université de Poitiers et directeur du Centre de recherche historique des universités de Poitiers et Limoges.
" L'histoire de l’Orchestre rouge est la plus célèbre des affaires d’espionnage de la Seconde Guerre mondiale. On ne compte pas les récits dominés par la figure de son chef Léopold Trepper, qui parvint à rassembler une masse d’informations sur la machine de guerre nazie et rendit possible la victoire russe à la bataille de Stalingrad.
La vérité des faits est beaucoup moins séduisante. Les officiers du service de renseignement militaire soviétique (GRU) déployés en France et en Belgique n’ont guère été efficaces et leur grand chef s’est conduit en dilettante. Arrêté par le Sonderkommando Rote Kapelle, Trepper livra de lui-même les hommes et les femmes de son réseau. Il affirma plus tard avoir berné les Allemands (son célèbre « Grand Jeu »), mais c’est là pure invention. Embourbé dans sa collaboration, il leur permit de pénétrer le cœur du dispositif clandestin du PCF. Si près que le Sonderkommando faillit arrêter Jacques Duclos et décapiter la résistance communiste.
Au-delà de sa relecture sans concession de quelques épisodes clés de la Seconde Guerre mondiale, l’auteur propose une réflexion sur la mémoire de cette épopée sanglante, qui ne laissa aucune place à ses véritables héros et glorifia l’imposteur. Il s’interroge sur la capacité de la société à se satisfaire d’une légende et à accepter naïvement le mensonge en tant que fragment d’histoire. "