Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Par delà droite et gauche...

« Si un jour l’imagination politique, l’exigence et la volonté politiques ont une chance de rebondir, ce ne peut-être que sur la base de l’abolition radicale de cette distinction fossile qui s’est annulée et désavouée elle-même au fil des décennies, et qui ne tient plus que par la complicité dans la corruption »

Jean Baudrillard, De l ’exorcisme en politique ou la conjuration des imbéciles, Sens et Tonka, 1998

 

Nous reproduisons ci-dessous un texte intéressant cueilli sur le blog de Maxime Tandonnet. Il livre une vision du clivage droite/gauche plus machiavélienne qu'idéologique.  Maxime Tandonnet est un haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, conseiller à l'Elysée et auteur de plusieurs essais, notamment : Le Grand bazar ou l'Europe face à l'immigration (L'Harmattan, 2001) ; Migrations, la nouvelle vague (L'Harmattan, 2003) ; Le défi de l'immigration : la vérité, les solutions (François-Xavier de Guibert, 2004) ; Migration : sortir du chaos (Flammarion, 2006) ; et Géopolitique des migrations : la crise des frontières (Ellipses, 2007).

 

aigle1.jpg

 

Par delà droite et gauche

Il n’existe pas me semble-t-il, d’idée ou de valeur, de gauche ou de droite en soi . Tout dépend des époques et des stratégies de pouvoir.

Quelques exemples :

-La Nation, la souveraineté nationale : aujourd’hui plutôt considérées comme des valeurs de droite, elles étaient jadis les marques distinctives des gauches européennes, contre les monarchies et les empires. La Révolution française et les révolutions européennes du XIXème siècle se sont faites au nom des Nations et ce sont les hommes de 1789 qui inscrivent la souveraineté nationale dans la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen.

-La justice sociale n’était pas spécifiquement une valeur de gauche jusqu’au XXème siècle. En France, sous la Troisième République, les radicaux qui incarnent la gauche ne s’y intéressent pas, leur préoccupation essentielle étant la lutte contre le cléricalisme. Un homme comme Alexandre Millerand, marqué à gauche jusqu’au années 1910, bascule à droite en partie parce qu’il trouve la gauche trop timorée notamment sur les retraites ouvrières.

-La colonisation a été impulsée sous la Troisième république par le centre gauche – Thiers, Jules Ferry, Freycinet, Méline – au nom de la « mission civilisatrice de la France (sic) », alors que la droite de l’époque, les monarchistes, sont dans l’ensemble défavorables à cette politique.

-L’égalité hommes-femmes ? La gauche radicale s’est opposée tout au long de la Troisième République au vote des femmes, suspectées d’être sous l’influence des « curés ». C’est le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire de la République française qui l’a enfin imposé en 1944.

-L’immigration : on a du mal à le croire mais la gauche française a longtemps été fort réservée sur le sujet, contre le patronat favorable à l’accueil d’une main d’œuvre bon marché. Dans la première moitié du XXème siècle, ce sont le Cartel des gauches dirigé par Edouard Herriot (1924) puis les gouvernements issus du Front populaire (1936-1938) qui prennent les mesures de rigueur en matière d’immigration : voir mon billet sur l’histoire de la déchéance de nationalité. Le 6 janvier 1981, l’Humanité publie une lettre de George Marchais selon laquelle : « la poursuite de l’immigration pose aujourd’hui de graves problèmes. Il faut les regarder en face et prendre rapidement les mesures indispensables. C’est pourquoi nous disons : il faut arrêter l’immigration, sous peine de jeter de nouveaux travailleurs au chômage ». Le 10 décembre 1989, le Président Mitterrand déclare: « En matière d’immigration, le seuil de tolérance a été atteint ».

Les idéologies relèvent en grande partie des circonstances, des calculs, des intérêts de pouvoir, des postures. L’essentiel, en politique, c’est-à-dire l’organisation et la conduite de la cité, au sens noble du terme, tient à la personnalité des dirigeants plus qu’à leurs idéologies qui sont la façade, l’habillage des choses. Les paramètres qui font un homme d’Etat ne varient guère, eux, en fonction des époques. Ils restent de tout temps à peu près les mêmes : lucidité; courage; sens du bien commun; dynamisme; volontarisme; créativité; capacité de dialogue et d’écoute.

Je devine que nombre de mes lecteurs ne partageront pas cette vision, ou alors avec des nuances, mais en tout cas la discussion est ouverte si le sujet intéresse certains d’entre eux.

Maxime TANDONNET (Le blog de Maxime Tandonnet, 1er juin 2011)

Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!

Les commentaires sont fermés.