Bien sûr, dans la crise de Lampedusa, chacun peut fort légitimement être choqué par l’attitude du gouvernement italien qui ne semble envisager, comme solution au débarquement rapide et massif (bien que, par comparaison aux flux globaux, numériquement « relativement » faible…) d’immigrés clandestins tunisiens sur son sol, que le fait de se délester du problème sur son voisin français.
D’un point de vue « identitaire » comme « européen », cette « panico generale » du gouvernement berlusconio-leganordien est incontestablement éminemment condamnable.
Pour autant, face à elle, les rodomontades « frontiéristes » de Nicolas Sarkozy, via son porte-flingue électoraliste Claude Guéant, n’apparaissent guère plus efficientes ni défendables, bien au contraire.
Une l’analyse un tant soit peu dépassionnée fait rapidement apparaître le triste constat suivant : égoïsme national (de circonstance), politique à courte vue, déclarations démagogiques, stratégies électoralistes et incohérence générale prévalent de la même façon des deux côtés des alpes.
Côté français, c’est surtout l’incohérence absolue qui domine de façon tout particulièrement éclatante le psychodrame de Lampedusa.
Tout d’abord, on aimerait bien que Messieurs Sarkozy et Guéant nous expliquent en quoi les 25 000 clandestins de Lampedusa sont un problème plus urgent et plus dramatique que les 200 000 autres clandestins qui arrivent tout au long de l’année dans notre beau pays par d’autre voies d’immigration.
Parce que, en cette période pré-électorale, les premiers sont plus visibles et médiatiques que les seconds ? Sans doute. Et c’est ainsi, qu’an nom de considérations de politique politicienne intérieure et dans l’optique notamment de la lutte contre la progression du Front National, le petit Nicolas, malgré son bilan absolument catastrophique en matière de gestion de l’immigration, nous rejoue Fort Alamo à Vintimille, au risque d’enterrer les derniers espoirs de solidarité européenne.
C’est pourtant aux frontières extérieures de l’Europe que se joue l’avenir de nos peuples et non dans des bisbilles picrocholines internes et des tenatives de maintenir en vie l’illusion du « souverainisme » et du possible contrôle de frontières nationales que les actuels Davy Crocket de L’Elysée et de Matignon ont passé toute leur carrière politique à démanteler.
Mille immigrés clandestins arrivant par Roissy, ça va, dix arrivant par l’Italie, bonjour les dégâts !
Ensuite on aimerait aussi beaucoup que nos gouvernants nous expliquent pourquoi il convient de se fâcher tout rouge contre nos cousins italiens au nom des 25 000 immigrés qu’ils nous envoient (il est vrai assez « lâchement »…) alors que, parallèlement, nos élites ne cessent de nous rabâcher, dans un grand concerto libéral et nihiliste (pléonasme), que la France va devoir impérativement accueillir dans les prochaines décennies plusieurs millions (sic) de nouveaux immigrés pour à la fois assurer son renouvellement démographique, pérenniser son système de retraites et relancer son développement économique (Alleluïa !).
Immigré Medef, très bien, Immigré transalpin, chagrin ?
Enfin, on aimerait également savoir comment reprocher à l’Italie d’être moins attractive que la France pour les populations immigrées quand nous nous enorgueillissons quotidiennement des merveilleux mécanismes « sociaux et sociétaux » (CMU, RSA, AME, criminalisation de la « préférence nationale »…) qui ont fait de notre pays un eldorado fantasmé pour toute la misère du monde.
Un système que personne (ou presque.. et en tout cas nullement Sarkozy et son gang…) n’entend remettre en cause, ce qui serait pourtant autrement plus cohérent et efficace pour lutter contre la submersion migratoire que le grand guignol joué aujourd’hui par quelques compagnies de gendarmes à la frontière italienne…
Xavier Eman (Blog du Choc du mois, 18 avril 2011)