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bureaucratie

  • L’énarcho-bureaucratie, maladie mortelle du système de santé...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Dominique Remmaker, cueilli sur Polémia et consacré à la crise de l'hôpital. Dominique Remmaker, biologiste et chercheur.

     

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    Covid-19. L’énarcho-bureaucratie, maladie mortelle du système de santé

    À l’occasion d’une pandémie qui agit comme un véritable révélateur de l’incurie de nombre de ses dirigeants, la France vient de découvrir avec horreur qu’elle est un pays sous-développé. Un pays qui dépense annuellement plus de 11 % de son PIB pour financer son système de santé et où, pourtant, manquent les moyens les plus élémentaires de protection des soignants et de la population en face d’un virus respiratoire ; ainsi que les moyens de diagnostiquer l’infection et de dépister les porteurs asymptomatiques, ceux qui sont à haut risque de propager le virus. De ce fait, des êtres humains meurent et mourront, qui ne devraient pas mourir.

    Les mensonges des politiciens

    Ces êtres humains meurent et mourront d’imprévision, d’inconséquence, d’incompétence. Parmi eux, des médecins et d’autres professionnels, qui seront allés au front pour aider leurs semblables, sans aucune protection, comme les Saint-Cyriens en 1914 face aux mitrailleuses allemandes. Conséquences terribles, mais hélas prévisibles et maintes fois dénoncées, de vingt années de pouvoir sans partage de l’énarcho-bureaucratie de la santé, à la main du pouvoir politique.

    Les politiques et leurs affidés médiatiques mentent : ils commencent par expliquer que les masques ne servent à rien pour justifier qu’on en manque. Puis, ils racontent que le dépistage du virus n’a pas d’intérêt en dehors des cas graves (ce qui, si l’on y réfléchit bien, n’a aucun sens) pour masquer le manque de réactifs, alors que le matériel et les professionnels sont là, mais ces derniers n’ont pas les moyens de travailler.

    En sorte que, si nous avons le choix entre deux paradigmes pour faire face à la crise Covid-19 : le confinement généralisé avec protection maximale de ceux qui travaillent pour la collectivité (incluant les masques) versus le dépistage généralisé avec isolement radical des seuls porteurs (comme en Corée du Sud, à Singapour), nous ne sommes pas capables d’en appliquer un seul.

    Le système hospitalier français : du meilleur au pire

    Comment le système de santé français et, au premier chef, l’hôpital public, qui furent les meilleurs du monde à l’orée des années 2000, en sont-ils arrivés là ?

    C’est qu’il fallait en finir avec le « pouvoir médical », pour installer celui des directeurs gestionnaires issus de l’ENA et de son avatar, l’École de Rennes.
    Et créer l’invraisemblable gabegie des Directions ministérielles et Agences de l’État, toutes redondantes les unes avec les autres, et des Agences Régionales de Santé, véritables usines à fonctionnaires sans la moindre vision territoriale de l’organisation médicale, qui est pourtant leur mission.
    Il fallait former des générations de hussards gris, en quête d’ascenseur social, pour mettre au pas ces soignants qui gaspillent l’argent public, pour saigner à blanc l’hôpital public, réduisant chaque année davantage ses moyens en personnels et en matériels. Leur obsession : fermer des lits et « rendre » des postes. Tout cela au nom de la folle idéologie de l’hôpital-entreprise et du Directeur-Patron, consacrée par la loi HPST (Hôpital, Patient, Santé, Territoire) de Sarkozy et Bachelot, puis de l’économisme libéral au pouvoir, avec le désastreux duo Hollande-Touraine. Des promotions entières de jeunes hauts-fonctionnaires arrogants, soucieux de plaire à Monsieur/Madame le Ministre, sont venus expliquer aux médecins comment traiter leurs malades, car ils se sont mêlés de tout, ces nouveaux seigneurs, y compris de décider des projets médicaux, de l’organisation des soins, de la recherche. Sans y connaître rien. C’est ainsi que les tableurs Excel et les premiers de la classe à Henri IV ont décidé du sort des malades.

    Kafka à l’hôpital

    Pour autant, l’hyper-administration de l’hôpital n’a pas régressé ; elle n’a fait qu’enfler, au point d’engloutir jusqu’à 30 % du budget hospitalier. On a vu fleurir les Directions (et autant de rentes bien juteuses pour fonctionnaires et autres politiques méritants, en pré-retraite ou dans l’attente de leur nomination dans un grand corps de l’État… Avec appartement de fonction et voiture avec chauffeur, prébendes dignes de l’Ancien Régime) à mesure qu’on manquait de lits et d’infirmières. On a créé des Directions de la « Qualité », des Directions de la « Performance » (sans rire !), des « Relations Internationales » et mille autres emplois de bureaucrates inutiles ; on a arrosé d’argent public des cabinets d’audits incompétents pour produire des études sans intérêt, qui n’ont servi qu’à opprimer les soignants un peu plus, les contraignant à une productivité digne du fordisme, au détriment des malades, de l’humanité médicale et de la qualité (réelle) des soins.

    On a fabriqué une « organisation » du système de santé dont la complexité est ubuesque et dont les dirigeants sont en perpétuelle querelle de pouvoirs et de prés carrés. Tout le monde veut décider et personne ne gouverne. Avec, en dessous, un énorme ventre-mou de fonctionnaires à trente-deux heures, qui constitue un obstacle permanent à la fluidité de la chaîne de décision.

    Et si seulement les inutiles se contentaient d’être payés à ne rien faire… Au contraire, pour justifier son existence et sa prétendue utilité, la bureaucratie produit des normes et des réglementations incessantes, reflets de sa peur panique de l’imprévu et de ses propres responsabilités. Elle menace d’asphyxie budgétaire tous ceux qui ne veulent pas se soumettre. Elle travaille à son maintien et à son pouvoir, comme les politiques qui la légitiment. Mais à la fin, tout va bien, Madame la Ministre, regardez les courbes des indicateurs… Avec les économies réalisées, nous pouvons nommer un nouveau Directeur dans un grand CHU : avez-vous un obligé à caser ?

    Quand on fera le bilan de la tragédie en cours, il faudra se garder de guillotiner des coupables ou de faire sauter des fusibles, pour mieux persister ensuite dans l’injustifiable. Il ne faudra pas s’en prendre aux individus, quelque incompétents qu’ils aient pu être ; ne pas les jeter en pâture à la population et aux journalistes. Tout cela ne servira à rien. C’est tout un système à bout de souffle qu’il faudra abattre. L’énarcho-bureaucratie a fait son temps. Elle doit être mise à l’os et, pour ce qui en restera, au service des soignants et des patients. Et alors, seulement, il y aura l’argent et l’efficacité nécessaires pour faire face à la prochaine pandémie.

    Dominique Remmaker (Polémia, 24 mars 2020)

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  • La bureaucratisation du monde...

    Les éditions La Découverte viennent de publier La bureaucratisation du monde à l'ère néolibérale, un essai de Béatrice Hibou. Directeur de recherches au CNRS, Béatrice Hibou est déjà l'auteur d'un autre  essai intitulé Anatomie politique de la domination.

     

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    "Nos sociétés modernes sont victimes d'un envahissement croissant de la vie professionnelle et quotidienne par la bureaucratie. Comment qualifier autrement l'exigence toujours croissante de papiers, fussent-ils numériques ? Et que dire de la confrontation incessante avec des procédures formelles pour avoir accès au crédit ou à un réseau informatique, pour louer un logement, noter des banques ou bénéficier de la justice ? Ou encore du besoin de respecter des normes pour que les comptes d'une entreprise soient certifiés ou qu'un légume soit qualifié de biologique ? Au point de rencontre entre Max Weber et Michel Foucault, Béatrice Hibou analyse les dynamiques politiques sous-jacentes à ce processus. La bureaucratie néolibérale ne doit pas être comprise comme un appareil hiérarchisé propre à l'Etat, mais comme un ensemble de normes, de règles, de procédures et de formalités (issues du monde de l'entreprise) qui englobent l'ensemble de la société. Elle est un vecteur de discipline et de contrôle, et plus encore de production de l'indifférence sociale et politique. En procédant par le truchement des individus, la bureaucratisation ne vient pas "d'en haut", elle est un processus beaucoup plus large de "participation bureaucratique". Pourtant, des brèches existent, qui en font un enjeu majeur des luttes politiques à venir."

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  • Le doux monstre de Bruxelles...

    Les éditions Gallimard viennent de traduire un pamphlet de l'auteur allemand Hans Magnus Enzensberger intitulé Le doux monstre de Bruxelles ou L'Europe sous tutelle. Observateur critique et pessimiste de la société contemporaine, Hans Magnus Enzensberger est notamment l'auteur de Médiocrité et folie (Gallimard, 1991), Hammerstein ou l'intransigeance (Gallimard, 2010) ou Politique et crime (Gallimard, 2011).

     

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    "Dans ce bref pamphlet, Hans Magnus Enzensberger s'attaque frontalement à l'Europe. Une provocation supplémentaire de la part de cet Européen convaincu ? Non, un cri d'alarme contre la bureaucratie bruxelloise qui, sous prétexte d'harmoniser, détruit peu à peu l'idéal qui a présidé à la construction de l'Union. Absence de démocratie flagrante, organismes innombrables, langue sclérosée, l'Europe, Enzensberger en est convaincu, travaille aujourd'hui à sa perte. Une contribution argumentée et mordante au débat sur l'avenir de l'Europe."

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  • Une nouvelle Guerre de Trente ans ?...

    Les éditions Le Polémarque, dirigées par Laurent Schang, viennent de publier un court essai de Bernard Wicht intitulé Une nouvelle Guerre de Trente ans ? - Réflexions et hypothèses sur la guerre actuelle. Spécialiste des questions stratégiques, Bernard Wicht est l'auteur de L'OTAN attaque (Georg, 1999) et de Guerre et hégémonie (Georg, 2002) et nous avons récemment mis en ligne un point de vue qu'il a publié dans la presse suisse, intitulé Le « port d’arme citoyen » et le nouvel équilibre de la terreur.

     

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    « La crise de la zone Euro est sans doute le chant du cygne de la Modernité occidentale, l'UE représentant l'ultime avatar de la construction étatique moderne avec sa bureaucratie supra-étatique et son centralisme à l'échelle continentale. Et, dans l'immédiat, la crise devrait encore renforcer ce centralisme bureaucratique ; la Commission s'est fait donné le mandat (certes temporairement limité) d'un contrôle économique des États membres et, de facto, un droit de regard dans la politique budgétaire des États membres. Ceci signifie un renforcement considérable du pouvoir supra-étatique de l'UE. Mais, paradoxalement, ce renforcement représente probablement l'épilogue de l'histoire de l'État moderne, le dernier acte d'une pièce qui s'est jouée pendant environ 500 ans, le dernier coup d'éclat d'une institution sur le déclin. »

    Bernard Wicht est privat-docent à la Faculté des sciences sociales et politiques de l’Université de Lausanne. Ses travaux portent essentiellement sur la stratégie et la pensée militaire. En parallèle, ses activités professionnelles l’ont mis en contact étroit depuis près de vingt ans avec les institutions européennes et les autres organisations internationales présentes en Europe.

    54 pages sur beau papier, 8 euros + 2 euros de frais de port aux Éditions Le Polémarque, 29 rue des jardiniers, 54000 NANCY

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