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Métapo infos - Page 253

  • Rempart !...

    Auteur indépendant, Franck Poupart vient de publier la "saison 3" de son roman intitulé Demain les barbares - Chroniques du grand effondrement (saison 1 et saison 2). Ce roman d'anticipation, particulièrement sombre, qui décrit un futur qui pourrait être le nôtre dans les années 2030, est exclusivement disponible sur Amazon.

     

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    " 2032, la France effondrée sombre dans une terrifiante guerre civile ethno-religieuse. Dans ce chaos post-apocalyptique, trois forces principales émergent : l'organisation identitaire Rempart, le califat islamique et la Jamaa Islamiya. Alex, un ancien policier réfugié à Bruxelles, se voit confier par Rempart —Renaissance & Partage — une mission d'importance capitale pour la survie de la France comme entité historique.

    Cette mission sans retour le conduira à Paris en état de siège, au coeur du Califat, en Bretagne et à l'endroit exact où, treize siècles plus tôt, une coalition de guerriers francs, burgondes et aquitains a écrasé l'armée omeyyade. "

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  • La liberté qui se joue en Ukraine n’est pas celle que nous croyons...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Laurent Leylekian, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la la guerre russo-ukrainienne... Analyste politique et spécialiste des questions aérospatiales, Laurent Leylekian collabore à la revue Conflits.

     

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    Cimetière militaire arménien

     

    La liberté qui se joue en Ukraine n’est pas celle que nous croyons

    Les situations de crise ne sont guère propices à l’exercice du discernement. C’est encore plus vrai des périodes de conflit où – pourtant – cette faculté s’avère plus nécessaire que jamais. Les émotions bien légitimes que suscitent les horreurs de la guerre et les effets surajoutés de la propagande polarisent plus que jamais les sociétés, et les intelligences sont rapidement sommées de « choisir leur camp » qui, quel qu’il soit, est pourtant rarement celui de l’intelligence.

    L’agression russe de l’Ukraine n’échappe pas à la règle et rester fidèle à soi-même est plus que jamais considéré comme une trahison pour tous ceux – et ils sont nombreux – qui veulent nous voir embrasser leur foi. Le dilemme est pourtant de taille pour les authentiques partisans de la liberté.

    Passons rapidement sur l’apologie facile et captieuse de Vladimir Poutine. Certes, il est vrai que c’est l’Ukraine de Porochenko, puis de Zelensky qui, la première, n’a pas respecté les engagements pris lors des accords de Minsk I, puis de Minsk II, sur l’autonomie relative des provinces orientales et russophones du pays. Certes, l’OTAN a bien joué un rôle pervers et déstabilisateur en faisant implicitement miroiter une promesse d’adhésion à l’Ukraine sans jamais la lui offrir explicitement. Certes, les démocraties occidentales en général et l’Union européenne en particulier se sont conduites de manière inavouable comme autant de pousse-au-crime en excitant – voire au besoin en créant de toutes pièces – un ressentiment antirusse qui n’est pas loin de constituer aujourd’hui l’essentiel de l’identité ukrainienne ; une identité qu’on aurait eu bien du mal à discerner de l’identité russe voici encore quarante ans. 

    Une indignation à géométrie variable

    Il n’en reste pas moins que les peuples sont censément libres de leur destin – surtout lorsqu’ils le subordonnent à la mise en œuvre préalable de mécanismes démocratiques – et que les Ukrainiens avaient bien le droit comme tant d’autres avant eux de décider de leur avenir en tant que nation indépendante. À cette aune, on peut cependant d’autant plus regretter le traitement indigne que le régime de Kiev imposait depuis 2014 à ses citoyens russophones qu’il ne relevait précisément pas de ces fameux mécanismes démocratiques et qu’il a constitué le plus sûr chemin à l’intervention russe dont Kiev prétendait justement se départir.

    Mais la question que je veux évoquer n’est pas celle-là. Comme beaucoup le sentent confusément, ce qui est en jeu n’est pas tant la liberté de l’Ukraine que la nôtre, chaque jour un peu plus érodée. Si l’Ukraine n’était pas qu’un prétexte pour affaiblir la Russie, pourquoi ce silence sur l’Arménie ? pourquoi ce silence sur les Kurdes ? pourquoi ce silence sur le Yémen ? pourquoi ce silence sur tant d’autres vallées de larmes où la sérénité des criminels se nourrit de l’indifférence – non pas des occidentaux – mais ceux qui fabriquent leur opinion. La question vient alors immédiatement : pourquoi donc notre immense arsenal médiatique conspirerait-il jour et nuit comme il le fait à établir de manière surabondante les crimes de Vladimir Poutine ; et pas ceux d’Ilham Aliev ; et pas ceux de Recep Tayyip Erdoğan ; et pas ceux de Mohammed ben Salmane ?

    Pour paradoxal que cela apparaisse, la réponse est que Poutine et ce qu’il représente sont les meilleurs garants de nos libertés. J’insiste : de nos libertés à nous, Occidentaux, et non pas bien sûr de celles des Ukrainiens. Évidemment, Poutine est un salaud comme le sont les autres. Mais – pour reprendre l’aphorisme bien connu – les autres sont « nos salauds ». Ce que nos pouvoirs reprochent à Poutine n’est pas tant d’être un salaud que de ne pas être le leur.

    Un lecteur hâtif ou malintentionné pourrait penser que j’excipe de ces quelques vérités l’idée que la vie serait plus douce sous la férule russe. Certainement pas, faut-il le préciser ? Mais dans un monde où de grands blocs totalitaires s’affrontent, la liberté de l’Homme ne subsiste qu’aux franges, qu’aux marges, que dans ces zones de subduction que seul leur affrontement préserve de la solidification monolithique. Partout ailleurs, la pensée libre s’étiole que ce soit sous la botte impitoyable des tyrans orientaux où dans l’étouffoir intellectuel que sont devenues les démocraties occidentales.

    La liberté a besoin d’ un monde multipolaire

    Quelques prophètes – de Georges Bernanos à Jacques Ellul et de Pier Paolo Pasolini à Ivan Illich – l’avaient bien vu avec une prescience à faire frémir : servie par une technique sans cesse plus intrusive, une société au conformisme de termitière interdit chaque jour un peu plus toute dissidence. Là où les bons vieux totalitarismes devaient se contenter d’une adhésion de façade, le totalitarisme postmoderne a les moyens de ses ambitions, celui de surveiller, de rééduquer et de domestiquer les masses avec une finesse et une profondeur inouïes. Les ergoteurs qui prétendent que les démocraties garantissent le pluralisme là où les systèmes autoritaires imposent la voix de l’État sont des plaisantins : chacun utilise ses méthodes – voilà tout – et la variété « démocratique » des médias occidentaux ne constitue que le décorum flexible et protéiforme d’une domination qui ne l’est pas du tout.

    Dans un article récent et remarquable, Gabriel Martinez-Gros affirme que « la guerre en Ukraine est caractéristiques de ces résistances [contre les empires]. La Russie n’est pas l’empire qu’on décrit ici mais un État-nation. L’empire, c’est nous : l’Occident ». La première proposition sur la nature d’État-nation de la Russie est certainement contestable. La seconde sur l’empire et sa religion post-moderne que nous représentons l’est beaucoup moins. Cet empire a longtemps pu paraître bénin en raison de facteurs qui se nourrissaient mutuellement : l’existence d’une menace en termes de projet idéologique global concurrent – le communisme – et la relative modération des pratiques politiques d’un système libéral qui devait compter avec ce concurrent dont les appâts captieux séduisirent et séduisent encore pourtant tant de nos compatriotes.

    La disparition du communisme a conduit l’empire libéral à jeter le masque désormais inutile de la démocratie pour imposer de manière autoritaire – et avec une brutalité qui va en s’accroissant – ses dogmes religieux. S’il est de bon ton de dénoncer les démocraties illibérales, cela ne doit pas masquer que nous vivons désormais un libéralisme antidémocratique : ce libéralisme intégral – économique et sociétal, totalement débridé – ne se donne plus la peine de cacher la cupidité cynique et illimitée qui constitue son ressort psychologique et s’attache à détruire avec une violence décuplée les États-nations et ses institutions qu’il perçoit à juste titre comme les dernières digues capables de restreindre sa toute puissance.

    La stratégie de choc employée provoque un état de sidération au sein nos sociétés qui en sont les victimes, exactement comme un boxeur KO debout ne ressent même plus les nouveaux coups qui vont le mettre à terre. On ne compte plus les faits avérés qui – il y a dix ans encore – auraient jeté le peuple dans la rue et ne provoquent plus aujourd’hui qu’un haussement d’épaules fataliste : les preuves de la corruption d’Ursula Von der Leyen ? haussement d’épaules ; le prix de l’électricité nucléaire indexé sur celui des carburants fossiles ? haussement d’épaules ; la spoliation au nom du marché d’entreprises nationales telle EDF payées avec les impôts des Français ? haussement d’épaules ; l’assassinat quasi quotidien de Français par les troupes d’occupation de la « diversité » ? haussement d’épaules ; notre entrée progressive mais irrémédiable dans un statut de supplétifs cobelligérants de l’empire ? haussement d’épaules ; l’extraterritorialité du droit commercial américain et corrélativement l’exemption juridique par laquelle les États-Unis prétendent soustraire leurs citoyens aux lois des autres pays où ils résident ? haussement d’épaule, etc., etc. C’est bien pour cela que nous devons souhaiter le maintien permanent et même le renforcement de différents pôles de puissance à travers le monde même, et surtout, si plus rien ne les distingue dans leurs fondements. Car – hormis l’hypothèse improbable à court terme de leur effondrement – c’est bien de leur seule concurrence impériale et dans les seuls no man’s land de leurs affrontements que l’Homme libre et affranchi gardera encore à l’avenir une chance minime de subsister.

    Laurent Leylekian (Site de la revue Éléments, 6 décembre 2022)

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  • L'homme qui voulut être roi...

    Les éditions Caurette viennent de rééditer L'homme qui voulut être roi, la nouvelle de Rudyard Kipling, avec de magnifiques illustrations d'Adrien Gaulme.

     

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    " Les Indes, fin du XIXème siècle.

    Deux amis britanniques, Daniel Dravot et Peachy Carnehan, anciens militaires et aventuriers aussi déterminés que peu scrupuleux, caressent un rêve fou : entrer au Kafiristan, pays légendaire où aucun Européen n’a mis le pied depuis Alexandre le Grand, et en devenir les rois…

    Tout le monde connait la nouvelle de Kipling, ne serait-ce que de nom, mais peu sont ceux qui savent que Dravot et Carnehan étaient accompagnés d’Armel Gaulme, un artiste français qui a documenté leur périple. Malheureusement, les carnets de ce troisième homme resté dans l’ombre des deux autres avaient été égarés et on les pensait perdus à tout jamais. C’est par un quasi-miracle qu’ils ont refait surface plus d’un siècle après leur disparition et que les Éditions Caurette peuvent aujourd’hui publier ce témoignage unique d’un monde disparu…

    Sous le crayon d’un dessinateur surdoué, c’est un monde fantastique qui se déploie et éclaire d’un jour nouveau l’incroyable aventure narrée dont Rudyard Kipling s’est fait le témoin.

    Nous ne savons que très peu de choses sur Armel Gaulme, l’auteur des carnets qui a documenté le périple de Dravot et Carnehan au Kafiristan. Quelques notes manuscrites attestent de sa nationalité française, mais en dehors d’une photo floue et de quelques mentions éparses, aucune information sur sa vie ne subsiste. C’est par une chance extraordinaire que ses carnets, que l’on a cru perdus pendant plus d’un siècle, refont l’actualité aujourd’hui. L’histoire de leur redécouverte mériterait à elle seule un roman, mais il suffira de dire que quatre générations plus tard, c’est un des descendants de la famille Gaulme qui, après une quête de près de 10 ans, a réussi à remettre la main sur les fameux documents. Ce descendant qui, ironie de l’histoire, se prénomme lui aussi Armel, a confié aux éditions Caurette le soin de publier ces archives inédites. "

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  • Mathieu Bock-Côté : “Si vous critiquez le multiculturalisme, vous êtes raciste !”...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous l'entretien donné par Mathieu Bock-Côté à Régis Le Sommier sur Omerta, dans lequel il revient sur la question du multiculturalisme.

    Québécois, Mathieu Bock-Côté est sociologue et chroniqueur et est déjà l'auteur de plusieurs essais comme Le multiculturalisme comme religion politique (Cerf, 2016), Le nouveau régime (Boréal, 2017) ou L'empire du politiquement correct (Cerf, 2019).

     

                                              

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  • Tout le pays est rouge...

    Les éditions de La Nouvelle Librairie viennent de publier un nouveau polar de Frédéric Rouvillois intitulé Tout le pays est rouge.

    Professeur de droit public à l’université Paris-Descartes, Frédéric Rouvillois est l'auteur de plusieurs ouvrages d'histoire des idées comme Histoire de la politesse (2006), Histoire du snobisme (2008),  tous deux disponibles en format de poche dans la collection Champs Flammarion, L’invention du progrès (CNRS éditions, 2010), Être (ou ne pas être) républicain (Cerf, 2015) ou Liquidation - Emmanuel Macron et le saint-simonisme (Cerf, 2020).

    Il a également dirigé avec Olivier Dard et Christophe Boutin, le Dictionnaire du conservatisme (Cerf, 2017), le Dictionnaire des populismes (Cerf, 2019) et le Dictionnaire du progressisme (Cerf, 2022).

    Enfin, il a publié récemment un roman, Les fidèles (Pierre-Guillaume de Roux, 2020) et deux polars, Un mauvais maître (La Nouvelle Librairie, 2020) et Le Doigt de Dieu (La Nouvelle Librairie, 2021), avec les mêmes enquêteurs.

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    " Pour quelles raisons obscures un sinologue septuagénaire a-t-il été égorgé dans son modeste trois pièces de la rue des Martyrs, retrouvé dans un désordre indescriptible mais sans effraction apparente ? Pourquoi la victime, un certain Régis Signoret, n’a-t-elle laissé aucune trace sur Internet en dépit d’une carrière politique tumultueuse et d’amitiés nouées avec quelques-unes des personnalités les plus en vue du monde des médias et des affaires ? C’est pour répondre à ces questions que le commissaire Lohmann et sa (charmante) partenaire la capitaine Morin, forts de leurs enquêtes dans les arcanes de l’université et de l’art contemporain, sont appelés à la rescousse. Ils vont effectuer une plongée dans le petit monde des révolutionnaires en peau de lapin, passés sans regret « du col Mao au Rotary », tous auxiliaires du capitalisme contemporain : des personnages d’autant plus à l’aise dans leur époque qu’ils entretiennent le plus grand secret sur ce qu’ils ont pu faire durant leur jeunesse, au nom du Grand Timonier et de la révolution prolétarienne. À l’époque où le Petit livre rouge était le livre de chevet de la jeunesse dorée. "

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  • En Ukraine, l’inaudible réalisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexis Feertchak, cueilli sur Geopragma et consacré au nécessaire retour au réalisme dans l'approche du conflit russo-ukrainien. Alexis Feertchak est journaliste au Figaro et membre fondateur de Geopragma.

     

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    En Ukraine, l’inaudible réalisme

    Avec d’infinies nuances, deux politiques s’opposent grossièrement depuis 1991 au sein du bloc occidental à l’endroit de Moscou. La première consistait à voir dans la Russie post-soviétique une menace persistante, qu’il fallait continuer d’endiguer et de contenir, et ce dès la fin de la Guerre froide. Non pas qu’elle constituait alors un péril, mais parce qu’il fallait anticiper le retour, dans un avenir proche, d’une puissance toujours tentée par la forme impériale, par le primat de la force sur le droit, par un révisionnisme mâtiné d’idéologie et par une jalousie séculaire vis-à-vis de son Ouest. Cette politique a globalement été celle de l’Alliance atlantique, des Etats-Unis et des pays d’Europe de l’Est, trop heureux de s’être séparés du communisme et de la tentation envahissante historique de la Russie. A grands traits, l’on pourrait résumer cette première position par la formule latine : «si vis pacem para bellum». Un exemple jusqu’au-boutiste de cette logique est l’appel de Lech Walesa, l’ancien président polonais, à «ramener la Russie à moins de cinquante millions d’habitants» (contre 144 aujourd’hui) en la «décolonisant». «Même si l’Ukraine va gagner cette guerre, dans cinq ans nous allons avoir la même chose, dans dix ans on verra un autre Poutine surgir», a asséné le fondateur du mouvement Solidarnosc.

    La seconde, qui a longtemps été dominante en France et qui a également existé sous une forme plus géoéconomique outre-Rhin, plaidait pour un rapprochement progressif avec la Russie, par russophilie parfois, par anti-américanisme souvent, mais plus fondamentalement pour éviter le piège circulaire de la violence qui engendre la violence ad libitum. Il ne s’agissait pas de rejeter en bloc la formule «si vis pacem para bellum», mais de faire assaut de prudence car, à trop préparer la guerre, celle-ci éclate nécessairement, par un terrible jeu de miroirs qui fait que chacun voit luire dans le regard de l’autre l’éclat guerrier redouté. En un sens, si tu veux la paix, il faut certes préparer la guerre, mais il faut aussi, en parallèle, préparer bel et bien la paix elle-même, et ce pour couper court à toute prophétie de malheur autoréalisatrice.

    Mort-née, l’initiative de la «confédération européenne» proposée par François Mitterrand dès 1988 et qui devait, en réponse au projet de «maison commune» de Gorbatchev, s’étendre à l’URSS incluse, fut l’incarnation la plus pure de cet esprit qui revenait, d’une autre manière, à contenir la violence, mais sans endiguer la Russie elle-même. Cette position, dont les tenants se qualifient de «réalistes» et qui s’inspirent de la théorie des relations internationales du même nom, est toujours défendue mordicus par de grands noms de l’histoire politique française récente comme Jean-Pierre Chevènement, Hubert Védrine ou Dominique de Villepin. Leur idée n’est pas d’absoudre la Russie qui a envahi un pays, mais de se demander si le bloc de l’ouest, en maintenant une logique de Guerre froide à l’issue de celle-ci, n’a pas co-construit ce que, précisément, elle voulait éviter, et qui s’étend désormais sous nos yeux. «Le Poutine de 2022 est largement le résultat, tel un monstre à la Frankenstein, des errements, de la désinvolture et des erreurs occidentales», résumait ainsi Hubert Védrine dans Le Figaro.

    C’est aussi le discours d’un autre diplomate français, Maurice Gourdault-Montagne, conseiller diplomatique de Jacques Chirac, qui rappelle dans ses mémoires, publiées en novembre 2022, cet autre projet français avorté : «Nous fîmes, à l’initiative du président Chirac, une tentative, vite mort-née, pour proposer une solution concernant la sécurité de l’Ukraine. Chirac m’envoya en novembre 2006 […] tester auprès des Russes la proposition suivante : ‘Pourquoi ne pas donner à l’Ukraine une protection croisée assurée par l’Otan et la Russie ? Le Conseil Otan-Russie en assurerait la surveillance’». Mais voilà, une telle proposition ne pouvait trouver grâce aux Etats-Unis, qui ont torpillé l’initiative, raconte l’ancien secrétaire général du Quai.

    Depuis le 24 février, ce discours réaliste, régulièrement qualifié d’esprit de Munich, apparaît comme largement inaudible. Il l’est d’autant plus depuis trois mois que ce sont désormais les Ukrainiens qui sont à la manœuvre militaire et que la Russie s’empêtre face à un adversaire dont elle a sous-estimé la force. Dès le mois d’avril, l’armée russe a dû se replier de la région de Kiev, face à l’impossibilité de prendre ou même d’assiéger la capitale ukrainienne. Puis, en septembre, les Ukrainiens ont repoussé de la région de Kharkiv – deuxième ville du pays – les Russes, qui n’ont certes guère résisté, mais qui ont bien été obligé, là encore, de plier bagage face à la contre-attaque. Et une troisième fois, en novembre, les Russes ont dû se replier sur la rive gauche du Dniepr après avoir abandonné Kherson, perdant au passage tout espoir de transformer leur tête de pont de l’autre côté du grand fleuve ukrainien. En procédant à une mobilisation partielle de 300.000 hommes, les Russes vont peut-être réussir à conserver le reste de leurs gains territoriaux et même à grappiller quelques territoires dans l’oblast de Donetsk autour de Bakhmut, mais même cela n’est pas sûr. Les Ukrainiens pourraient tenter une nouvelle poussée dans l’oblast de Lougansk, voire lancer une contre-offensive dans la région de Zaporijjia ou le sud du Donetsk. En pareil cas, la Crimée pourrait être derechef coupée du reste du territoire russe, ce corridor terrestre le long des rives de la mer d’Azov étant le principal – voire le seul – gain stratégique russe réalisé depuis le 24 février. En Russie, l’on commence déjà à évoquer l’hypothèse du lancement, d’ici quelques mois, d’une nouvelle vague de mobilisation.

    Ceux qui voulaient à tout prix préparer la guerre face à la Russie triomphent. Non seulement ils ont eu raison sur la menace que représentait Vladimir Poutine, mais, en plus, contre tous les sceptiques, l’Ukraine parvient à renverser la vapeur. Et eux, à l’adresse des réalistes, de reprendre en cœur les mots que Winston Churchill n’a en réalité jamais lancés à Neville Chamberlain, premier ministre, après la signature des accords de Munich en 1938 : «Le gouvernement avait le choix entre la guerre et le déshonneur ; il a choisi le déshonneur et il aura la guerre». En apparence, le réel semble en effet leur donner raison.

    Et, pourtant, aussi difficilement entendable que cela puisse paraître, la logique des réalistes n’a pas été prise en défaut par la guerre en Ukraine, bien au contraire, mais si elle laisse apparaître des faiblesses intrinsèques. La première considération est la suivante : le réel donnerait aujourd’hui raison à ceux qui prophétisaient que la Russie était une menace. D’un point de vue logique, cet auto-satisfecit de ceux qui criaient au loup ne tient pas. Car le discours que l’on tient sur l’avenir a un impact causal sur l’avenir lui-même : la Russie aurait-elle envahi l’Ukraine en 2022 si la solution mise en avant par Maurice Gourdault-Montagne en 2006, celle de garanties de sécurité otano-russes croisées, avait été suivie, s’il avait été clairement décidé que l’Ukraine n’intégrerait pas l’Alliance atlantique, plus largement si une autre politique, plus proche de celle défendue par François Mitterrand, avait été mise en œuvre dès 1991 ? En toute logique, rien ne permet de l’affirmer. Quand Lech Walesa appelle à réduire la Russie à moins de cinquante millions d’habitants pour se prémunir d’un conflit à venir dans cinq, dix ou quinze ans, ne le prépare-t-il pas en disant cela ? Le drame est que nous n’aurons jamais le contre-factuel : il n’est pas possible de réécrire l’histoire et de savoir ce qui aurait été si ces erreurs occidentales n’avaient pas été commises. Et c’est en même temps la grande faiblesse du discours des réalistes aujourd’hui : les faits semblent les condamner, et ils ne peuvent se raccrocher qu’à des «et si…» dont l’empreinte existentielle est par nature bien légère face au réel.

    Cette première faiblesse est d’ordre épistémique. Mais il en est une seconde, d’ordre pratique. Les réalistes voulaient éviter la guerre en faisant en sorte que les conditions qui la produiraient ne soient pas réunies. C’était vertueux… mais, une fois que celles-ci le sont et que celle-là a éclaté, que faire ? Le prophète de malheur – le vrai, celui qui annonce une catastrophe à venir de telle sorte qu’elle ne se produise pas, en évitant le piège de la prophétie auto-réalisatrice – est utile tant que la catastrophe n’a pas eu lieu. Il fallait ainsi éviter la guerre en adoptant collectivement une attitude qui n’augmente pas les risques de son déclenchement. Mais une fois qu’elle est là face à nous ? Les faits ont donné raison au prophète de malheur, et c’est bien là son problème : par là même, il a échoué dans son office.

    Reste que la guerre n’est pas terminée, loin de là. Ceux qui croient que les forces de Kiev auront repris militairement le Donbass et la Crimée dans quelques mois pèchent probablement par zèle ukrainien, et ceux qui s’attendent à une grande offensive de Moscou par zèle russe. L’on ne peut bien sûr exclure une victoire militaire décisive d’un côté ou de l’autre, mais, à en écouter même les Américains, cette hypothèse paraît aujourd’hui la moins probable. L’issue, bien sûr dépendante du rapport de force militaire sur le terrain, sera donc politique. Et la même question se posera comme après chaque guerre : cette issue politique préparera-t-elle les guerres de demain ? Ou une sortie par le haut sera-t-elle possible ? Dans un cas, un mur s’érigera quelque part dans l’est de l’Ukraine, solide un temps, mais constituera le ferment de conflits futurs. Dans l’autre, peut-être finira-t-on par remettre sur le tapis, sous une forme renouvelée, l’idée française de « garanties de sécurité croisées » enterrée en 2006. Elle finirait par aboutir, mais au prix d’une guerre qui aura fait des centaines de milliers de morts. Qui a donc dit que les réalistes avaient eu tort ?

    Alexis Feertchak (Geopragma, 5 décembre 2022)

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