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nicolas gauthier - Page 6

  • Le confinement, un test de docilité grandeur nature ?...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque les choix gouvernementaux face à la crise sanitaire. Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017) et Contre le libéralisme (Rocher, 2019).

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    Alain de Benoist : « Même au Moyen Âge, le confinement des bien-portants n’a jamais permis d’endiguer une épidémie ! »

    Aujourd’hui que les choses paraissent en voie d’apaisement, peut-on dire que le gouvernement, même si manifestement pris de court, en a trop fait ou pas assez face à l’épidémie, ou juste fait comme il pouvait ?

    Il n’y a pas d’autre mot pour le dire : la réaction des pouvoirs publics face au Covid-19 a été proprement calamiteuse. Cinq mois après le début de l’épidémie, nous n’avons toujours pas atteint la capacité de dépistage que nous aurions dû avoir lorsque les premiers morts sont apparus. Le gouvernement s’est d’abord réfugié dans le déni (ça ne viendra pas chez nous, c’est une grippette), après quoi nous avons assisté à un incessant défilé de cafouillages, de consignes contradictoires et de mensonges d’État. Rien n’avait été prévu, alors que des voix nombreuses s’étaient élevées, ces dernières années, pour laisser prévoir une nouvelle pandémie venue d’Asie. La cause première réside dans l’incapacité des pouvoirs publics à raisonner au-delà du court terme. Mais la cause la plus fondamentale est que, pour se conformer aux règles de l’idéologie libérale, on a voulu soumettre le secteur de la santé publique à des principes de rentabilité, de concurrence et de gestion à flux tendu qui ont entraîné la fermeture de milliers de lits, la destruction de stocks de réserves, la précarisation croissante d’un personnel déjà sous-payé. En d’autres termes, nous avons intégré au système du marché un domaine qui est, par définition, hors marché. Le résultat a été un effondrement généralisé des capacités de l’hôpital public.

    Ce n’est certes pas une révélation. Cela fait des années que le personnel hospitalier multiplie les alarmes, sans jamais être entendu. Aujourd’hui, Macron et ses clones se confondent en remerciements envers les soignants. Il aurait mieux valu leur donner les moyens de travailler et faire droit à leurs justes revendications.

    Même au Moyen Âge, le confinement des bien-portants n’a jamais permis d’endiguer une épidémie. De ce point de vue, le confinement généralisé a d’abord été un aveu d’impuissance : on a confiné tout le monde parce que l’on n’avait ni masques (qu’on a d’abord décrétés « inutiles », avant d’en rendre le port quasiment obligatoire), ni tests de dépistage, ni matériel de réanimation, ni outillage d’assistance réanimatoire. En Europe, les pays les mieux équipés sont aussi ceux qui ont le moins confiné. Puis, quand on a commencé à déconfiner, on a adopté toute une série de réglementations punitives parfaitement loufoques. Plutôt que de faire face, le gouvernement s’est retranché derrière l’avis des « scientifiques », alors que ceux-ci n’étaient pas d’accord entre eux. Bref, on a subi. Et ce n’est sans doute pas fini.

    Au-delà des considérations techniques, n’avons-nous pas assisté à un nouveau pas en direction d’une sorte de société de la trouille généralisée, avec l’intériorisation du principe de précaution, lequel peut avoir tendance à nous faire troquer un semblant de sécurité contre des privations de libertés autrement plus tangibles ?

    Depuis que l’on a posé comme synonymes le bonheur et l’allongement de la vie, il est bien connu que les gens sont prêts à accepter presque n’importe quoi en échange d’une promesse de sécurité. Sans tomber dans le conspirationnisme, il est clair que le confinement a aussi constitué un test de docilité grandeur nature. On a pu évaluer dans quelles conditions il était possible d’amener les gens à devenir leurs propres geôliers. Parallèlement, en prétextant l’état d’urgence sanitaire, on a adopté de nouvelles mesures de surveillance et de contrôle qui ont toutes chances d’être pérennisées en étant intégrées au droit commun. Les mesures adoptées dans le passé pour lutter contre le terrorisme ont pareillement fini par concerner toute la population. Chaque donne ainsi l’occasion de donner un tour d’écrou.

    Nombre de commentateurs glosent sur le « monde de demain ». Pensez-vous qu’une simple épidémie puisse suffire à remettre en cause les fondements du système actuel ? En d’autres termes, le capitalisme mondialisé devra-t-il revoir son logiciel ou a-t-il encore assez de ressources pour se perpétuer sans rien changer à son fonctionnement historique ?

    Aucune épidémie ne peut, à elle seule, provoquer une révolution politique, et moins encore la disparition d’une idéologie dominante. Il est, d’autre part, évident qu’on rêve debout quand on s’imagine que « rien ne sera plus comme avant ». Ceux qui souhaitent que rien ne change disposent de moyens énormes pour y parvenir. Mais la remise en route ne va pas se faire aisément. Ici, ce n’est pas l’épidémie qui compte, mais ce qui va se produire ensuite. Des secteurs entiers de l’activité économique sont d’ores et déjà sinistrés, et beaucoup ne vont pas s’en remettre. Le gouvernement indemnise pour l’instant le chômage partiel, mais cela n’aura qu’un temps. Durant l’année qui vient, ou plus probablement les deux années qui viennent, on peut s’attendre à d’innombrables faillites et plans de licenciement. Le chômage va remonter en flèche. La crise économique et sociale peut, elle-même, déboucher sur une crise financière de première ampleur. L’Europe est déjà entrée en récession, et pour éponger les aides d’urgence auxquelles il a dû consentir, l’endettement de l’État va atteindre une hauteur stratosphérique. Tout cela devrait aboutir à une colère sociale en comparaison de laquelle le mouvement des gilets jaunes apparaîtra rétrospectivement comme peu de choses.

    Vivant moi-même plus ou moins confiné depuis plus de trente ans, le confinement n’a pas changé grand-chose à mon mode de vie ! Mais pour les classes populaires, qui se sont retrouvées assignées à résidence pendant deux mois, le confinement a été insupportable. Ce sont ces mêmes classes populaires qui ont permis au pays de continuer à fonctionner, ce qui a permis de constater, une fois de plus, que ce sont les fractions les plus indispensables de la population qui sont aussi les plus mal payées. La crise économique qui s’annonce va aussi les frapper de plein fouet. Les conséquences sont encore imprévisibles, mais elles devraient être énormes.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 26 mai 2020)

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  • Déconfinement, le jour se lève…

    Assigné à résidence, le bipède social dépérissait. Il attendait le feu vert du gouvernement pour se dégourdir de nouveau les jambes et la langue. C’est fait. Déconfinons-nous avec la rédaction d’Éléments, à l’occasion de son rendez-vous hebdomadaire sur TV Libertés. Retrouvez Christophe A. Maxime qui en appelle au retour des grands ancêtres. Nicolas Gauthier, le Monsieur bons plans du post-confinement. David L’Épée et le coronavirus dans les films de zombies…

     

                                         

     
     
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  • Le feu qui couve sous le couvre-feu...

    Le confinement vire à la réclusion forcée. Rompons-la avec la rédaction d’Éléments. Retrouvez ses rédacteurs à l’occasion de leur rendez-vous hebdomadaire sur TV Libertés. François Bousquet et les « métiers de merde » à l’épreuve de la crise. Christophe A. Maxime et l’incroyable beauté de Paris sans âmes qui vivent. Nicolas Gauthier et les bons plans du confinement…

     

                                           

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  • Covid-19 : Macron s'en va-t-en guerre, Eléments fait le bilan !...

    En congé forcé pour cause de confinement, Le Plus d'Éléments n'en est pas pour autant au chômage partiel. Retrouvez ses journalistes pour un rendez-vous hebdomadaire sur TV Libertés. Billets d'humeur et nouvelles perspectives sont au programme avec dans ce numéro, Nicolas Gauthier, François Bousquet et Bruno Lafourcade !

     

                                  

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  • De l'Iran au Mali : regard sur l'arc des crises...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il évoque l'actualité politique internationale sur l'arc des crises, de l'Iran au Mali... Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017) et Contre le libéralisme (Rocher, 2019).

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    Alain de Benoist : « Face à l’Iran, les Israéliens seront toujours prêts à mourir jusqu’au dernier Américain ! »

    Après l’assassinat du général Qassem Soleimani, l’un des personnages-clés les plus populaires de la scène politique iranienne, dans l’une de ces « frappes ciblées » dont les États-Unis ont le secret, beaucoup s’attendaient à une rapide montée aux extrêmes. La riposte iranienne a pourtant été plutôt modérée. Mise en scène ou jeu de dupes ?

    L’assassinat du général Soleimani était pourtant un acte de guerre. Et même si les mots ont un sens, un crime de guerre – ce qui ne l’a pas empêché d’être accueilli avec jubilation par Jaïr Bolsonaro et par Matteo Salvini, président du fan-club des supporters italiens de Netanyahou. Ce meurtre, organisé à partir de la base américaine de Ramstein, en Allemagne, grâce à des renseignements fournis par le Mossad à la CIA, est aussi un événement historique, car c’est la première fois que les États-Unis revendiquent ouvertement l’élimination d’un dirigeant de premier plan d’un État souverain avec lequel ils ne sont pas officiellement en guerre. Rien à voir, par conséquent, avec l’élimination de Ben Laden ou d’Abou Bakr al-Baghadi. Pour trouver un précédent, il faut remonter à l’assassinat de l’amiral Isoroku Yamamoto, en avril 1943, mais c’était dans le cadre de la guerre du Pacifique. Depuis, ce sont plutôt les services secrets qui tuent dans l’ombre ceux qu’ils veulent éliminer. Pour en avoir une bonne idée, lisez Lève-toi et tue le premier, le livre que vient de faire paraître Ronen Bergman, journaliste au quotidien israélien Yediot Aharonot, qui dresse une liste de 2.700 assassinats ciblés perpétrés, depuis sa création, par le Mossad (plus que la CIA et le KGB réunis).

    À cet assassinat, les Iraniens ont en effet répondu de façon somme toute modérée, en faisant savoir à l’avance aux Américains, par l’intermédiaire des Irakiens, qu’ils allaient frapper une de leurs bases situées en Irak, ce qui a permis l’évacuation des soldats qui s’y trouvaient. Il est probable que l’ a bien compris que Trump voulait avant tout séduire ses électeurs « sionistes évangéliques » et qu’il n’avait pas l’intention de s’engager dans une nouvelle guerre avant l’élection présidentielle de novembre prochain. Cela dit, le Proche-Orient étant ce qu’il est, Trump, avec sa brutalité et son mépris du droit international habituels, a pris des risques considérables car, dans cette région du monde, le moindre accident peut facilement dégénérer. Attendons la suite, car il y en aura une. Face à l’, les Israéliens seront toujours prêts à mourir jusqu’au dernier Américain.

    Lorsque Emmanuel Macron a tenté de jouer les intermédiaires entre Téhéran et Washington, Ali Khamenei, le Guide suprême iranien, a déclaré que le Président français était un naïf ou un complice de l’Amérique. La voix de la France semble ne plus être entendue au Proche-Orient. Pourquoi ?

    Parce qu’elle n’est plus audible et surtout parce qu’elle n’est plus crédible. Depuis qu’elle a abandonné toute « politique arabe », c’est-à-dire depuis que les néoconservateurs atlantistes font la loi au Quai d’Orsay, la France ne cessé de se discréditer au Proche-Orient, où elle était autrefois respectée et écoutée. Elle a assisté, sans mot dire, au démantèlement de l’Irak de Saddam Hussein. Elle a pris une part active au lynchage de Kadhafi et s’entête à soutenir, en Libye, le gouvernement fantoche de Fayez el-Serraj. Alors que, depuis l’ère Obama, les États-Unis semblaient avoir amorcé un désengagement, au moins partiel, dans la région, tandis que les Anglais s’embourbaient dans leurs affaires intérieures, au lieu de tenter d’exploiter la situation à notre profit, nous avons rompu toute relation avec Damas pour soutenir objectivement des groupes terroristes hostiles au gouvernement syrien (Al-Nosra, aujourd’hui Hayat Tahrir al-Cham). Vis-à-vis de la Turquie, nous ne savons pas sur quel pied danser. Au lieu de soutenir les chiites dans leur lutte contre les sunnites, nous n’avons pas réagi à des sanctions contre l’Iran qui nous visaient indirectement aussi, et nous nous sommes aplatis devant la prétention américaine à faire reconnaître par le monde entier la monstrueuse extraterritorialité de leurs réglementations juridiques et commerciales. Plus récemment encore, Macron n’a rien trouvé à redire au plan Donald Trump pour la « paix au Proche-Orient », qui n’était qu’une déclaration de guerre aux Palestiniens destinée à conforter dans ses positions un Netanyahou menacé d’être jugé pour corruption aggravée. Alors que Vladimir Poutine est, aujourd’hui, devenu l’incontournable maître du jeu au Proche-Orient, parce qu’il est le seul à pouvoir parler avec les mollahs iraniens comme avec Netanyahou, avec les Américains comme les Syriens, avec Erdoğan comme avec les pays du Golfe, nous n’avons plus personne comme interlocuteur et nous n’avons quasiment plus de renseignements sur quoi que ce soit.

    Et la guerre qui se poursuit au Sahel ? Peut-elle être gagnée ?

    Compte tenu de la disproportion des forces engagées (quelques milliers d’hommes censés « pacifier » un territoire aussi grand que l’Europe), elle ne peut l’être en aucun cas. On peut, en revanche, gagner du temps et espérer stabiliser la situation pour qu’elle ne s’aggrave pas. Mais encore faut-il se demander au profit de qui. Cette guerre n’aura, en effet, aucun sens aussi longtemps que l’on n’aura pas compris que le problème est avant tout politique, et non pas militaire, et que l’agitation « islamiste » dans la région n’est que la surinfection de conflits ethniques séculaires opposant, dans les pays de la bande saharo-sahélienne, les agriculteurs sédentaires du sud et les pasteurs nomades du nord (Peuls et Touaregs). Aussi longtemps que nous n’imposerons pas aux gouvernements que nous aidons – ce dont ils ne nous sont guère reconnaissants, d’ailleurs – de procéder aux réformes politiques qui, seules, permettraient d’apaiser ces conflits, nous perdrons notre temps et mettrons la vie de nos soldats en danger pour rien. Le drame est que l’opinion publique, qui ne comprend pas que la politique extérieure est, sur le long terme, la seule qui compte, ne connaît pas plus ce dossier qu’elle ne connaît les autres – puisqu’elle prend la Crimée pour une partie de l’Ukraine et les séparatistes de Hong Kong pour des militants « pro-démocratie » !

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 24 février 2020)

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  • Le mystère Macron...

    Nous reproduisons ci-dessous entretien avec Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire, dans lequel il fait le point sur la présidence Macron à mi-parcours de son mandat. Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Ce que penser veut dire (Rocher, 2017) et Contre le libéralisme (Rocher, 2019).

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    Alain de Benoist : « La descente aux enfers d’Emmanuel Macron est-elle forcément une bonne nouvelle pour Marine Le Pen? »

    Nicolas Gauthier : Le quinquennat Macron n’avait pas trop mal commencé avec l’épisode du Louvre. Mais l’état de grâce n’a pas duré très longtemps et la situation ne cesse de se dégrader, alors même qu’Emmanuel Macron avait affirmé que s’il ne réussissait pas, un ou une populiste lui succéderait à l’Élysée. Cela en prend-il le chemin ?

    Alain de Benoist : En matière d’élection présidentielle, vous le savez bien, toute prédiction faite plus de trois mois avant le scrutin n’a aucune valeur. On peut, en revanche, dresser un rapport d’étape. Tout le monde a longtemps répété qu’en 2022, on allait assister à la répétition de ce qui s’est passé en 2017 : un duel Macron-Marine Le Pen au second tour, avec le résultat qu’on sait. Inutile de s’interroger : c’était plié d’avance. Mais deux nouvelles questions se posent : Macron sera-t-il à nouveau candidat en 2022 ? Et s’il se représente, sera-t-il présent au second tour ? Nous n’en savons rien, bien sûr, mais le simple fait qu’on puisse se poser ces questions montre que beaucoup de choses ont changé. Les gilets jaunes sont passés par là, les grèves aussi. Pour faire adopter ses réformes, Macron a été obligé de passer en force. Après avoir voulu séduire tout le monde, il a déçu partout. On parle régulièrement de sa « baisse de popularité », mais on n’en est même plus là. Nous avons un Président qui ne peut plus mettre un pied en dehors de l’Élysée sans se heurter à des manifestants qui exigent sa démission en brandissant, en effigie pour l’instant, sa tête au bout d’une pique ! Chirac, Giscard, Hollande, Sarkozy ont pu être impopulaires. Macron n’est pas seulement impopulaire, il est détesté, exécré, haï des Français à un degré rarement vu. Il n’est donc pas certain qu’il veuille (ou puisse) se représenter, ni qu’il soit présent au second tour s’il le faisait. Ajoutons, puisqu’il a été mis en place pour adapter la France aux exigences de la mondialisation libérale, que ceux qui l’ont patronné se disent peut-être aussi qu’ils n’ont pas misé sur le bon cheval et qu’il serait peut-être temps d’en trouver un autre.

    Est-ce une bonne nouvelle pour Marine Le Pen ? Je ne le pense pas. Elle a tout intérêt, en effet, à avoir face à elle, au second tour, un homme discrédité et détesté par le peuple plutôt qu’un concurrent qui, n’ayant jamais accédé à la charge suprême, aura toujours la possibilité de multiplier les promesses et de ratisser large entre les deux tours. Un Xavier Bertrand, une Ségolène Royal, un Yannick Jadot, une Rachida Dati, un François Baroin ou n’importe quel(le) autre candidat(e) de ce calibre l’emporterait sans doute plus facilement contre Marine Le Pen que ne le ferait Macron, même si le « plafond de verre » auquel elle s’est longtemps heurtée a déjà commencé à se lézarder. D’où une troisième question : du point de vue de Marine Le Pen, quelle est la personnalité, mis à part Macron, face à laquelle elle pourrait avoir le plus de chances de l’emporter ?

    Emmanuel Macron prétendait aussi être le candidat du « nouveau monde ». Maintenant qu’il a dépassé son mi-mandat, qu’avons-nous appris sur ce monde-là et sur lui-même ?

    J’ai déjà eu l’occasion de le dire : il y a un mystère Macron. Chirac, Sarkozy, Hollande, chacun dans son style, n’avaient rien de mystérieux. Il suffisait de les observer un peu pour savoir à quoi s’en tenir sur leur compte. Avec Macron, c’est autre chose. Ses ressorts intimes sont cachés, et l’on ne sait pas, au fond, ce qui le meut. Même ses relations avec sa maternelle épouse sont un mystère. Sous la surface lisse comme une image de synthèse, on ignore tout de sa machinerie intérieure et de ses évidents troubles de la personnalité. On peut lui trouver une tête de gendre idéal, lui reconnaître une bonne mémoire et une excellente connaissance technique des dossiers, voire un certain talent oratoire, on ne parvient pas à trouver qu’il était taillé pour le poste, alors qu’il serait parfait derrière un guichet de banque ou dans le rôle d’un DRH chargé d’annoncer au personnel un nouveau plan de licenciements. L’impression qui domine est que la politique, au fond, lui est tout aussi étrangère que la culture du pays qu’il est censé diriger. Que ce soit en France ou dans le monde, cet homme à la fois hautain, méprisant et bavard ne comprend pas ce qui se passe. Il gère (mal), il communique (mal), il réprime (brutalement), il supprime la liberté d’expression (efficacement) mais il ne gouverne pas.

    C’est un Président narcissique qui n’a ni ami ni homme de confiance – puisqu’il ne fait confiance à personne. Qui a de l’influence sur lui ? Brigitte peut-être, personne d’autre. Entouré de députés inconsistants et de ministres de circonstance, il ne sait pas choisir ses collaborateurs, comme en témoignent l’affaire Benalla et la multiplication des départs au sein de son entourage. Mieux encore, c’est le premier président de la République qui n’a pas su attirer à lui la moindre personnalité dotée d’une carrure d’homme d’État. Il s’est entouré d’une majorité de transparents anonymes condamnés à le rester (Cédric O, Franck Riester), parmi lesquels bon nombre de médiocres et d’incultes, de ridicules ou de grotesques, de François de Rugy (« Homard m’a tué ») à Benjamin Griveaux (« Paris m’habite ») en passant par Agnès Buzyn (coronavirée), le Castaner de l’Intérieur ou la Belloubet de la Justice, sans oublier Sibeth. Qui peut prendre au sérieux pareille équipe de Branquignols ?

    Peut-on néanmoins mettre à son crédit une esquisse d’ambition politique européenne, que ce soit avec l’Allemagne ou la Russie, l’Iran ou les États-Unis ?

    Il en est resté, précisément, au stade de l’esquisse, qui chez lui prend la forme d’une série d’hésitations et se traduit par des inconséquences. C’est la marque d’une absence totale de vision des choses. En Europe, où il s’est brouillé avec la moitié des gouvernements, après avoir cherché à associer Angela Merkel à ses projets de « refondation » européenne, il n’a cessé de se heurter aux rebuffades de la chancelière, qui a vite évalué le personnage, mais il n’en a pas tiré les leçons. Il a fait sensation en déclarant l’OTAN en état de « mort cérébrale » sans comprendre que l’OTAN pèse toujours de tout son poids et que c’est bien, plutôt, l’Union européenne qui est en état de mort cérébrale. Il a paru comprendre qu’il était de l’intérêt de la France de se rapprocher de l’axe Moscou-Damas-Téhéran, mais il n’a pas fait le moindre geste pour s’opposer aux sanctions absurdes qui frappent ces trois pays. Tout récemment, il est encore allé en Allemagne pour dénoncer les entreprises de « déstabilisation » qu’il attribue à la Russie, montrant par là qu’en dépit de ses divergences avec Trump, il reste plus que jamais le fidèle vassal des Américains. Comment s’étonner, là encore, qu’on ne le prenne au sérieux ni à Moscou ni à Washington ni à Pékin ?

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 23 février 2020)

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