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insécurité - Page 5

  • Et la sécurité ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Xavier Raufer, cueilli sur Valeurs actuelles, dans lequel il déplore le silence des candidats à l'élection présidentielle sur la lutte contre les bandes criminelles armées et l'échec total de la «politique de la ville»... 

     

     

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    Campagne : et la sécurité ?

    Dans ce qui aura constitué le sommet de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont affrontés dans un âpre duel télévisé. Ordre du jour supposé : l’avenir de la France dans tous les domaines vitaux et, dans ce cadre, les grandes oppositions droite-gauche. Tous, vraiment ? Non, hélas, car jamais dans les 170 minutes du débat il ne fut question de sécurité.

    S’est-il seulement agi d’un incroyable et mutuel oubli ? D’un implicite (ou explicite) souci d’occulter ce qui fâche et de balayer la poussière criminelle sous le tapis ? Une criante absence en tout cas – et d’autant plus malheureuse qu’en matière de sécurité, la France n’est pas en bon état.

    Infiniment plus qu’un rabâchage convenu qui n’aura rien appris de nouveau aux Français sur les positions économiques respectives des deux finalistes de la présidentielle, deux sujets au moins auraient mérité une attention soutenue, en raison à la fois de leur gravité et de leur coût : l’explosion criminelle marseillaise et la tragique “politique de la Ville”.

    Marseille d’abord. Ces dernières décennies, l’exubérance criminelle, la dimension proprement politique du grand banditisme régional provoquaient une seule réaction des élus et officiels locaux : à chaque drame, ils bêlaient en cœur “Marseille n’est pas Chicago” puis, ce rituel de conjuration accompli, retournaient à leurs combines. Or aujourd’hui, Marseille, c’est Chicago en pire : les jours pairs, des bandits s’entre-tuent à l’aide d’un inépuisable arsenal d’armes de guerre et les jours impairs, on exhume des cadavres calcinés des futaies alentour.

    Au fait, à quand remonte le début de la tuerie ? Une amusante coïncidence se constate avec la tenue, au printemps 2010, d’un “atelier professionnel” voulu et financé par la Mairie de M. Gaudin (dite “de droite”), sur le thème “Trafic de drogue et intervention sociale dans les quartiers populaires”. Cet incroyable hymne à la culture de l’excuse produisit alors l’effet d’une hormone de croissance sur les “bandits des cités” marseillaises, présentés comme autant de victimes, dont les trafics et les exactions résultaient « de la débrouille et de la pauvreté » et constituaient (je cite toujours) « des formes d’accès aux ressources » (voir ma chronique du 11 mars 2010, "De la limite des tables rondes").

    Ce que les calamiteux élus de la “droite” marseillaise ignoraient, c’est qu’en pareil cas, les “débrouillards” se coalisent forcément en bandes pour “accéder aux ressources” sur “leur” territoire. Et qu’entre eux éclatent vite des guerres – on y est – d’autant plus meurtrières que la côte grouille d’armes libyennes, bradées par des milices tribales et des trafiquants africains.

    Partant du désastre marseillais, des échanges auraient ainsi été les bienvenus entre candidats : que faire contre cette prolifération des gangs ? Comment interdire les flux d’armes de guerre entre les deux rives de la Méditerranée ? Comment constituer un outil performant de renseignement criminel ? Mais rien.

    Autre sujet majeur – et lié au précédent : celui de la “politique de la Ville”, la pire catastrophe des trente dernières années, cogérée dans l’opacité par les partis de gouvernement. Désastre ? Et comment ! Rappelons que, dès l’origine, la très idéologique “politique de la Ville” avait pour objet exclusif de « mettre un frein à la poussée des ghettos, à la dérive insécuritaire et à la montée en puissance du Front national » (le Figaro du 23 mai 1990). On voit le résultat.

    Des milliards ont depuis lors été engloutis dans l’aventure : « Les pouvoirs publics n’ont pas ménagé leurs efforts. Des centaines de millions d’euros investis dans la rénovation urbaine pour… reconstruire des quartiers entiers » (le Monde du 4 novembre 2011). Pour 2004-2013, le “plan Borloo” aura ainsi coûté 42 milliards d’euros – ou même 45, selon les sources. Cependant, toujours plus de communautarisme, de drames et de kalachnikovs – car le syndrome marseillais tend à contaminer la périphérie d’autres métropoles. Et tous le savent, le Monde du 17 mars dernier qualifiant même cruellement la rénovation urbaine de « ghetto, mais en plus propre ». Donc, silence sur les gangs et la “politique de la Ville” : sur les banlieues, « les candidats à la présidentielle sont en panne d’idées », lisait-on dans les Échos, en mars.

    Une panne de mauvais augure, car dans cet oubli du réel et dans l’occultation systématique de ce qui fâche, un précédent existe : le face-à-face George Bush-Al Gore organisé lors de campagne présidentielle américaine de 2000. Un face-à-face qui démontre une fois de plus que, dans la société de l’information, le plus dangereux, c’est ce qu’on n’a pas pu ou pas voulu voir.

    Lors de ce face-à-face, composé de trois débats d’une heure chacun, l’ensemble des sujets vitaux pour l’avenir des États-Unis devait en effet être abordé. De la fiscalité à l’agriculture en passant par l’éducation, ils le furent tous, effectivement. Tous, sauf un, radicalement oublié : le terrorisme.Moins d’un an plus tard, le 11 septembre 2001, la foudre tombait sur New York.

     Xavier Raufer (Valeurs actuelles, 17 mai 2012)

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  • Aux Armes Citoyens !...

    Les éditions Mordicus viennent de publier Aux Armes Citoyens, un plaidoyer pour l'autodéfense signé par Paul Lycurgues. L'auteur, qui écrit sous pseudonyme, est chercheur en sciences politiques et critique gastronomique !... Les éditions mordicus sont dirigées par Emmanuelle Duverger, la rédactrice en chef de la revue Médias.

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    "Tirant le constat de l’échec absolu des politiques publiques de sécurité menées en France depuis 30 ans – avec l’augmentation continue et parallèle de la criminalité et des dépenses publiques –, l’auteur propose d’embrasser une vision individuelle de la sécurité qui viserait à responsabiliser les Français et à leur permettre, en leur rendant les droits dont ils ont été dépouillés depuis un demi-siècle, de suppléer aux actuelles défi ciences de l’État et de la police : droit à la possession et au port d’arme, sanctuarisation du domicile privé et renforcement de la notion de légitime défense, libre constitution d’associations sécuritaires et populaires."

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  • Comment rétablir la sécurité ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un excellent article de Xavier Raufer, cueilli sur le site de Valeurs actuelles, qui expose la nécessité d'une vraie politique contre le crime organisé.

     

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    Comment rétablir la sécurité

    Pour la première fois depuis longtemps, l’homicide régresse en Occident, des États-Unis à l’Europe de l’Ouest. Mais en France comme ailleurs, émerge un phénomène redoutable : la prise de contrôle des zones périurbaines par des bandes criminelles. Leur démantèlement est une priorité politique.

    Si la politique a un sens, toute grande campagne électorale est l’occasion d’un dialogue national sur les sujets clés, dans la perspective du quinquennat à venir. Or jusqu’à présent, les principaux candidats sont peu loquaces sur la sécurité. Certes, crise oblige, l’emploi est devenu, tous les sondages l’attestent, le souci quotidien des Français. Mais comment oublier que 15 millions de Français vivent dans des espaces périurbains où la violence fait désormais partie du paysage ?

    Voyez le sondage (Ifop-Paris Match-Europe 1), publié dans la Croix le 5 décembre dernier. Au printemps 2006, 40 % des sondés estimaient qu’“on ne se sent en sécurité nulle part” ; en 2010, 50 % des personnes interrogées étaient de cet avis ; ils sont aujourd’hui 56 %. L’Europe maintenant. En novembre 2011, la Direction générale de la justice et des affaires intérieures de l’Union européenne publiait un sondage sur la sécurité du continent : le crime organisé est-il un défi croissant pour l’Europe ? 48 % des Français le pensent. Dans ce domaine, la France en fait-elle assez ? Non : 48 %; oui : 39 %.

    Pour la campagne présidentielle la sécurité reste donc un enjeu fort. Peut-il être relevé ? Bien sûr, si l’on pratique le réalisme criminel, comme les États-Unis le font depuis vingt ans, au grand dédain des Diafoirus-sociologues, les nôtres et les leurs. Or, ce qui résulte de ce réalisme criminologique est énorme – on peut même parler ici du glas définitif de la “culture de l’excuse”.

    L’Amérique, le Far West plus Chicago ? C’est désormais une image d’Épinal. Alors que la crise s’installe outre-Atlantique et que ses conséquences sociales deviennent si tragiques que, selon le réputé Pew Research Center de Washington, 66 % des Américains – dont 55 % des sympathisants républicains – croient désormais qu’une “lutte des classes” oppose les riches au peuple, la criminalité s’effondre, notamment dans sa forme fatale, l’homicide. Donc, la misère ne provoque pas le crime, mais l’affaiblit, et ce, de manière significative : les très officiels Centers for Disease Control and Prevention révèlent ainsi en janvier que, pour la première fois depuis quarante-cinq ans, l’homicide n’est plus l’une des quinze causes majeures de mortalité aux États-Unis. En 2010, l’homicide était quinzième et dernier de la liste – le voici remplacé en 2011 par… la pneumonie des vieillards !

    Crime : la dialectique du local et du mondial

    À l’ère de la mondialisation, la question n’est plus seulement de maintenir classiquement l’ordre public dans les quartiers, c’est de frapper à la tête le crime organisé international et les banditismes locaux qui fonctionnent en réseau avec les grands trafics transcontinentaux (êtres humains, stupéfiants, etc.). Selon l’Onu, le marché mondial des stupéfiants, quelque 235 milliards de dollars par an pour la vente en gros (celle qui enrichit les cartels et mafias), est devenu, en effet, le troisième marché au monde, après ceux (licites) du pétrole et des armes de guerre. En 2009 (dernières données disponibles), le “chiffre d’affaires” du crime mondial (organisé ou non) s’est élevé à environ 1 570 milliards d’euros, soit 3,6 % du produit brut mondial (PBM). Là-dessus, l’argent criminel blanchi (donc réinjecté dans l’économie licite) est de 1 200 milliards d’euros, 2,7 % du PBM. Or seulement 1 % environ de cet argent a été mondialement confisqué par les services concernés.

    C’est sur ce sujet d’abord et surtout que les candidats devront répondre par des constats réalistes et des propositions pertinentes. Et ce, d’autant qu’en cette période de rigueur obligatoire, le crime coûte cher. Une étude récente de l’Institut pour la justice (“Que coûte l’insécurité ? ”, avril 2010) a décompté, de juillet 2008 à juin 2009, les coûts directs et indirects de tous les crimes et délits, sauf infractions au code de la route : préjudices financiers et moraux pour les victimes, dépenses publiques et privées de sécurité, etc.). Total pour la France : 115 milliards d’euros (5,6 % du PIB). Pour ce qui relève du crime organisé, la facture annuelle approche les 70 milliards d’euros.

    France : un problème criminel inquiétant, les bandes

    Depuis des années, la France connaît un problème massif de “criminalité de rues” provoquée par des bandes : règlements de comptes, racket, braquages, agressions violentes, cambriolages, incendies volontaires, etc. Or l’entrée dans ces bandes a lieu très jeune : 12 ans, 10 parfois. Chaque année, environ 150 000 mineurs sont poursuivis par le parquet, dont 50 000 d’entre eux seulement sont présentés à un juge des enfants.

    Les violences urbaines et suburbaines affectent surtout 26 départements métropolitains. Au milieu d’une nuée de mineurs “à problème”, les acteurs essentiels de cette criminalité sont des individus jeunes (16-25 ans), agressifs et dangereux, agrégés en “noyaux durs”. Les données disponibles montrent qu’ils sont assez peu nombreux, quelques milliers d’individus pour toute la France.

    Pas plus ? Non, car la criminologie contemporaine a révélé un type criminel hyperactif, le “prédateur violent”, qui, le plus souvent en “meute”, commet une énorme masse d’infractions.

    Des statistiques d’Île-de-France montrent ainsi que 5 % des malfaiteurs commettent la moitié des méfaits ; avant 18 ans, ces criminels en série – qu’une loi pénale naïve et surannée tient encore pour des “enfants” – sont déjà connus pour 50 infractions et plus ! S’agit-il pour autant de “paumés” ? de malheureuses victimes de l’exclusion ? Non : ces “criminels d’habitude” usent d’innombrables pseudos, vivent sous de fausses identités et n’habitent évidemment jamais à l’adresse indiquée sur leurs papiers.

    Or la plupart de ces hyperactifs du crime ont déjà été condamnés – et devraient donc être incarcérés – mais sont en liberté. Environ 80 000 peines de prison exécutoires, dont quelque 7 000 de plus d’un an, sont, de fait, non exécutées par la justice ! Un fait vivement regretté par la préfecture de police de Paris qui arrête parfois des braqueurs condamnés à cinq ans de prison. Libres comme l’air, ils poursuivent paisiblement leur business illicite après avoir déménagé !

    Ces quelques milliers de bandits aguerris sont-ils des inconnus ? Évoluent-ils dans la clandestinité ? Nullement. À domicile, ils sont célèbres, passant leur vie entre le commissariat et le bureau du juge. À force de rédiger des procès-verbaux à leur propos, les brigades anticrimes de banlieue en savent localement la liste par coeur.

    Bandes, prédateurs violents, hyperactifs du crime…

    Justice, travail social, “politique de la ville” : en amont même du travail éducatif, préventif ou répressif, les dysfonctionnements sont graves et les chantiers immenses.

    D’abord, que faut-il réformer ? Un aveu affligeant du ministère de la Justice donne, en creux, la marche à suivre : 80 000 peines de prison, on l’a vu, ne sont pas exécutées, celles prononcées étant pudiquement dites “en attente d’exécution”. Traduisons : par milliers, des bandits sont dans les rues, prêts à voler, voire à tuer. Où cette situation est-elle le pire ? Dans les ressorts de justice les plus populaires que sont Bobigny, Évry, Pontoise, Marseille, Lille, etc.

    D’où la question de la validité de la “politique de la ville” menée à coups de milliards depuis plus de vingt ans. À la fois pharaonique et ruineuse, cette politique, qui a pour seul objet de resocialiser les habitants des “quartiers sensibles” en améliorant leur habitat, leur accès à l’emploi et aux prestations sociales, est parfaitement inopérante en matière criminelle. Elle doit donc être totalement refondée. Sur l’un de ses territoires favoris, la Seine-Saint- Denis, on compte un vol à main armée par jour, week-end inclus. De sorte que plus on s’acharne à gaspiller des milliards, plus on aboutit à créer un paradigme de l’agriculture soviétique : pas moins de chômage ni de misère, et toujours plus de crime.

    Quelles solutions pour demain ?

    D’abord, il faudra élaborer en surplomb une stratégie anticrime proactive, du type de celles adoptées aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, et même désormais aux Pays-Bas, c’est-à-dire inspirée d’une conception criminologique réaliste selon laquelle la seule origine réelle et palpable du crime, c’est le criminel lui-même. Partant, quels outils efficaces utiliser ? Le renseignement criminel et l’injonction civile.

    Le renseignement criminel. Ayant pour cibles les gangsters et pour double objectif l’aide à la décision et la procédure judiciaire, il repose sur deux piliers : l’anticipation et l’articulation stratégique entre recherche et analyse.

    On sait ainsi que les criminels hyperactifs, imperméables à tout travail social, récidivent le plus souvent, dès qu’ils sont sortis de réinsertion. Ici, un renseignement criminel ciblé les neutralise efficacement, comme le prouve une expérience menée en 2001 : avant le passage à l’euro et ses multiples convois de billets de banque, la police a précisément ciblé les gangs de braqueurs de fourgons ; elle a anticipé leurs actions, ne les a pas lâchés. Résultat : un braquage de fourgon dans l’année, contre, d’ordinaire, deux par mois ! Faute de renseignement criminel pointu et précoce, la criminalité ne pourra qu’empirer : au plus tôt, l’État doit en savoir le plus possible sur l’activité, les effectifs, les projets et préparatifs des gangs commettant l’essentiel des crimes. Objectif : les surprendre en flagrant délit afin de les mettre pour de bon hors d’état de nuire.

    Une politique qui fait office de dissolvant antibandes

    L’injonction civile. Sous cette anodine appellation technique, voici une arme de destruction massive pour les gangs. Inventée aux États-Unis, désormais pratiquée en Grande-Bretagne, cette injonction prononcée par un juge interdit à des voyous organisés de fréquenter, à partir d’un jour J, certains quartiers et d’y rencontrer leurs comparses. En termes clairs, plus moyen pour le gang de se réunir une fois l’injonction prononcée – et surtout plus dans son fief. Utilisée en conjonction avec le renseignement criminel, cette politique d’injonction est le plus puissant dissolvant antibande jamais mis en oeuvre. Encore faut-il le vouloir et s’en donner les moyens.

    Tout programme électoral sérieux devra donc considérer ces indéniables réalités criminologiques, en gardant à l’esprit ce qui peut advenir si on ne se décide pas à réagir : la prise de contrôle total d’un territoire par des armées criminelles organisées, comme le feraient celles d’un État au sens traditionnel.

    Exagération ? Ce qui se passe aujourd’hui à la frontière américano-mexicaine devrait nous convaincre de prendre le phénomène au sérieux. Pour la première fois dans l’histoire contemporaine, à notre connaissance, l’“armée” purement criminelle des Zetas, mégagang encadré et dirigé par des déserteurs de l’armée et de la police mexicaine, a “libéré” un territoire au nord du Mexique, à la frontière même des États-Unis. Les Zetas y règnent seuls depuis la fin 2010 : tout militaire ou fonctionnaire mexicain y est assassiné, sitôt repéré. Une base criminelle géante, grande comme le Koweït, s’est implantée à quelque deux cents kilomètres de l’agglomération de San Antonio au Texas (2 millions d’habitants). Nous n’en sommes heureusement pas là en France. Mais n’est-ce pas la raison d’être des politiques que d’anticiper les évolutions à partir des ingrédients qui, chez nous, donnent déjà à réfléchir ?

    Xavier Raufer (Valeurs actuelles, 23 février 2012)

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  • Une gifle qui ne passe pas !...

    Elisabeth Lévy, qui, avec Eric Naulleau, remplace Eric Zemmour pendant quelques jours dans sa chronique matinale sur RTL, nous livre un billet d'humeur consacré à l'affaire de la gifle administrée par un maire à un jeune qui l'avait insulté...

     


    "RTL Opinions" : "La gifle qui ne passe pas !" par rtl-fr

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  • "Tout le monde se fout de notre sort"...

    Nous reproduisons ci-dessous un article cueilli dans le quotidien Le Monde, daté du 7 décembre 2011, et consacré au sentiment d'abandon qui envahit les Français des nouvelles classes populaires, qui subissent au quotidien les effets de l'immigration et de l'insécurité...

     

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    M. Jean, dans une cité de la région parisienne : "Tout le monde se fout de notre sort"

    C'est une cité sans renommée, dans une petite ville de la banlieue parisienne. Des immeubles proprets, de quatre ou cinq étages, pas plus. Il y a un arrêt de bus où les bus s'arrêtent encore. Il y a quelques commerces de proximité, un centre social et un poste de la police municipale. Le centre-ville est à 300 mètres à peine, mais c'est déjà un autre monde. "Ici, monsieur, nous vivons dans une bulle. Nous sommes abandonnés à nous-mêmes."

    M. Jean, 75 ans, et Mme Françoise, 64 ans, habitent à quelques numéros l'un de l'autre. Une fois obtenue la promesse de ne pas être reconnus ("Ça peut être risqué pour nous"), la parole se débonde en un flot ininterrompu, pendant plusieurs heures.

    M. Jean, un ancien photograveur, est arrivé ici, avec sa femme et son enfant, à la fin des années 1960. La construction des immeubles n'était pas encore achevée. Les voisins étaient alors des fonctionnaires de La Poste ou d'autres administrations, des militaires, des ouvriers de l'usine voisine. "Tout le monde travaillait. On se connaissait. On laissait la porte ouverte." "On causait les uns avec les autres", poursuit Mme Françoise, employée trente-huit ans dans un grand magasin et qui a emménagé en 1986.

    "ENTASSÉS DANS DES F3"

    Quand tout cela a-t-il commencé à déraper ? "C'est difficile à dire. Quand on s'aperçoit des choses, c'est trop tard." M. Jean situe tout de même le basculement dans les années 1980. La cité a commencé à accueillir des familles délogées des squats de Paris qui entravaient les projets immobiliers de prestige dans la capitale. "Elles ont commencé à s'installer à un bout de la rue et puis ont remonté à chaque appartement libéré. On mettait quatre personnes dans un logement et on en voyait d'autres arriver avec des valises d'on ne sait où. Très vite, les gens se sont entassés dans des F3."

    Quand il s'agit de décrire les nouveaux venus, le discours s'embarrasse un peu, les mots deviennent encombrants, le vocabulaire forcément connoté. Alors on cherche, on change : les étrangers, les immigrés, les Noirs, les Africains, les Arabes, les Maghrébins. Les anciens habitants, eux, sont partis, appartement après appartement.

    Autres circonvolutions, contorsions de langage pour décrire cette population en fuite : les Français, les Gaulois, les Blancs. Mme Françoise et M. Jean sont restés.

    L'ancien photograveur décrit la paupérisation croissante du voisinage. "Plus personne ou presque ne travaille, décrit cet homme investi de fonctions associatives qui lui permettent de pousser les portes fermées. Quand on entre dans certains appartements, y compris ceux des Français qui restent, on voit des choses incroyables, des gens entassés, de la misère."

    DROGUE CACHÉE DERRIÈRE LES COMPTEURS

    Depuis les années 1990, les petits trafics ont gangrené le voisinage, les cambriolages n'ont cessé de se multiplier. "Je vois des jeunes circuler à bord de voitures comme jamais je ne pourrais en avoir alors qu'ils sont officiellement au RSA. Ici, c'est tout petit. On connaît la situation de chacun." Mme Françoise dit retrouver régulièrement de la drogue cachée derrière les compteurs. Elle ne descend plus seule dans sa cave. Même si sa cité a été épargnée par les émeutes de 2005, elle voit régulièrement de ses fenêtres des voitures brûler sur le parking, notamment au Jour de l'an.

    "Grande gueule", comme elle se décrit elle-même, Mme Françoise n'a jamais hésité à expulser les jeunes qui investissaient le hall. Cela lui vaut des déboires. Il y a un mois, sa guimbarde, vieille de 20 ans, a été vandalisée. En mai, elle a été agressée en bas de chez elle, s'est retrouvée avec des points de suture à la tête. "Régulièrement, je me fais insulter."

    "Les gamins jouent en toute impunité à des choses qu'ils voient à la télévision ou entendent avec le rap, explique M. Jean. Ils refont l'histoire. Pour eux, on reste les colons. Chez les parents, c'est la loi du silence. Ils n'osent rien dire. Ils ont peur de leurs enfants ou peur de la police parce qu'ils sont en situation irrégulière."

    Il y a peu, les deux témoins voient également la religion musulmane prendre la rue. "Depuis un an ou deux, les femmes sortent maintenant avec le voile. La fille de ma voisine s'est mise à le porter, il y a six mois. Ça m'a fait un choc. Les hommes se laissent pousser la barbe et s'habillent à la pakistanaise." Une salle de prière devrait bientôt ouvrir dans la cité.

    EN DÉCALAGE

    Alors, Mme Françoise et M. Jean ont commencé à se sentir en décalage, pour ne pas dire esseulés. "Nous nous retrouvons enfermés dans un ghetto", résume M. Jean. Ils se sentent intrus dans "leur" cité. "On me conseille de partir, on me dit que je n'ai pas à occuper seule un appartement de 60 m2, dit Mme Françoise, qui a perdu son mari. Je ne demande pas mieux que de me barrer mais je n'en ai pas les moyens."

    La veuve dont la retraite est de 1 250 euros, paye 506,95 euros de loyer pour son F4. "Je ne pourrais jamais trouver ça ailleurs avec mes revenus." M. Jean touche 2 100 euros de retraite avec sa femme, et paye un loyer de 652 euros pour un appartement de 82 m2. " Si je pouvais partir, pensez bien que je le ferais. Mais j'ai passé l'âge d'acheter." Alors M. Jean a fait une demande de logement social dans le Var qu'il renouvelle chaque année, sans grand espoir.

    "Tout le monde se fout de notre sort", estime M. Jean. C'est sans doute le plus cruel. "La police nous dit qu'elle n'ose pas intervenir car elle craint de mettre le feu aux poudres." Le bailleur social, lui, a ses bureaux dans les beaux quartiers de Paris. "Quand vous vous retrouvez autour d'une table avec ces gens-là, vous sentez que vous n'êtes rien." Un constat amer que ne confirment pas exactement les importants travaux de rénovation entrepris par le bailleur et la municipalité ces dernières années.

    "LES POLITIQUES NOUS ONT OUBLIÉS"

    Quant aux hommes politiques... Mme Françoise explose d'un rire sardonique. "Ils nous ont oubliés. La cité ne vote pas. La participation atteint à peine 30 %. Alors nous n'intéressons personne." Les deux voisins avaient choisi Nicolas Sarkozy en 2007. "J'y ai vraiment cru", assure M. Jean. Il éprouve aujourd'hui plus que de la déception, de la révulsion pour "cet homme qui nous a trompés, qui a dit qu'il s'occuperait de nous et qui ne s'est occupé que de ses amis les riches".

    Aujourd'hui, affirme Mme Françoise, "ce qui se passe à la télé, ce qu'il dit à l'Elysée, on s'en balance, ça ne nous concerne plus". Ils iront quand même voter puisqu'ils l'ont toujours fait. Mme Françoise a arrêté son choix : "Sarkozy ? Il n'y a pas de risque que je me fasse avoir à nouveau. A gauche, il n'y a personne qui puisse vraiment changer les choses. Alors, pour moi, je vous le dis tout net, ce sera Marine Le Pen et tant pis si ça pète."

    M. Jean, ancien syndicaliste chrétien, ne peut se résoudre à ce choix. "C'est contraire à mes convictions. Je ne me suis pas encore fixé. Je regrette que le vote blanc ne soit pas comptabilisé." Il soupire. "Pourquoi ces gens-là ne sentent-ils pas que nous n'en pouvons plus ?"

    Benoît Hopquin (Le Monde , 6 décembre 2007)

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  • Une colère sourde...

    Nous reproduisons ci-dessous un article particulièrement éclairant, publié dans le quotidien le Monde daté du 7 décembre 2011 et consacré à la colère des classes moyennes qui sont frappées de plein fouet par la crise et l'insécurité...

     

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    La colère sourde des français "invisibles"

    Les politologues sont convaincus que la clé de l'élection de 2012 est détenue par une population rurale et périurbaine. Exposée à la mondialisation et abandonnée par la démocratie.
     
    La société française se fissure, une partie fait le constat d'un " abandon démocratique ".
    C'est la " France des invisibles ", la " France d'à côté ", celle qu'on n'entend pas, dont on ne relaie pas les colères et qui se sent de moins en moins représentée. Avec des outils d'analyse différents, des sociologues, des géographes, des politologues et des spécialistes de l'opinion travaillant pour des institutions différentes et parfois concurrentes arrivent au même diagnostic. A cinq mois de l'élection présidentielle, ils partagent la même conviction : la clé de l'élection se trouve dans la réponse que les candidats sauront apporter à cette partie de l'électorat, de plus en plus nombreuse, qui oscille entre colère sourde et résignation rageuse.
    " Une rupture d'ordre existentiel  s'est produite ", affirme le sociologue et sondeur François Miquet-Marty, qui vient de publier Les Oubliés de la démocratie (Michalon, 304 p.). Des franges de plus en plus larges de la population ont le sentiment que ce qu'elles vivent n'est relayé par personne. Alain Mergier fait le même constat. En 2006, cet ancien professeur de sémiologie avait publié, avec le sociologue Philippe Guibert, une enquête sur les milieux populaires dont le titre avait marqué les esprits : Le Descenseur social (Plon, Fondation Jean-Jaurès). Cinq ans plus tard, le regard qu'il porte sur la société française est beaucoup plus inquiétant. Plus que jamais, explique-t-il, s'est installée l'idée que " deux France suivent des chemins opposés ".
    L'image n'est plus, comme il y a encore quelques années, celle d'une " société à deux vitesses ", dont une partie profiterait plus que l'autre des fruits de la croissance. Désormais, " une partie de la société a le sentiment qu'elle fait marche arrière parce que l'autre fait marche avant ", explique M. Mergier. Comme si le bonheur des uns ne pouvait passer que par le malheur des autres.
    Ce sentiment de " faire marche arrière ", combien sont-ils au juste à le partager ? " Jusqu'au milieu des années 2000, on pouvait dire que c'était l'apanage des milieux populaires ", répond M. Mergier. Grosso modo la France du " non ", celle qui avait voté non aux référendums européens de 1992 et 2005, parce qu'elle se sentait perdante dans la mondialisation. " Aujourd'hui, une partie des classes moyennes est touchée ", ajoute-t-il, tout en convenant qu'une définition socio-économique est insuffisante.
    Plus encore que le niveau de revenu en tant que tel, c'est l'image que se font les individus de leur place dans la société qui importe. " La puissance des marchés a engendré un malaise existentiel et diffusMême certains cadres sont touchés : ils ont le sentiment de subir aujourd'hui une perte de leur valeur personnelle, car l'obligation de rentabilité à court terme remet en cause leur travail ", explique M. Mergier.
    Pour cerner les contours de cette société hantée par la perte d'identité et la crainte du déclassement, Christophe Guilluy dessine des cartes. Coauteur d'un Atlas des nouvelles fractures sociales (Autrement, 2004), ce géographe distingue deux France. La première est celle des " 25 grandes métropoles qui profitent de la dynamique de la mondialisation ". Elles vivent un double phénomène d'embourgeoisement et d'immigration. La seconde France inclut l'essentiel du monde rural et périurbain, mais aussi de très nombreuses villes moyennes, touchées par la désindustrialisation et les plans sociaux à répétition.
    Selon M. Guilly, cette " France périphérique ", caractérisée par " une part plus importante des ouvriers et des employés dans la population, un taux de chômage et d'emploi partiel supérieur à la moyenne nationale et un revenu moyen inférieur au revenu médian ", concentrerait environ 65 % de la population. Elle accueille des natifs, mais aussi des migrants qui n'ont pu trouver leur place dans les grandes métropoles.
    L'Ouest, par exemple, a connu récemment d'importants mouvements de population, mais " c'est une géographie qui va se figer, car les logiques foncières sont très fortes : une fois que vous avez quitté la ville, vous n'y revenez plus ", explique le géographe. C'est la raison pour laquelle il ne croit plus à la notion de classes moyennes. " On assiste à la réémergence des classes populaires, à qui on répète depuis vingt-cinq ans qu'elles vont profiter de la mondialisation et qui, en réalité, sont en situation de précarité sociale, éloignées des endroits importants et de l'offre scolaire la plus qualifiée. Si l'usine du coin ferme, elles dégringolent. La crise valide leur crainte de la mondialisation ", ajoute Christophe Guilly qui, comme Alain Mergier, fait partie des auteurs du récent Plaidoyer pour une gauche populaire (sous la direction de Laurent Baumel et François Kalfon, Le Bord de l'eau, 118 p.).
    Que fera, en 2012, cette " France qui se sent reléguée, à tous les sens du terme " ? Pour qui voteront ces quelque 40 % d'électeurs qui affirment aujourd'hui ne se reconnaître ni dans la gauche ni dans la droite ? Le vivier est stratégique : si elles ne sont pas reconquises, ces quelque 16 millions de voix peuvent se réfugier dans l'abstention ou le vote Front national. Anne Muxel, chercheuse au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), rappelle que les cinq dernières élections - législatives de 2007, municipales de 2008, européennes de 2009, régionales de 2010 et cantonales de 2011 - ont enregistré des records d'abstention. Bouder les urnes devient de plus en plus une façon de sanctionner l'offre politique.
    Cependant, depuis le choc du 21 avril 2002, plus personne ne sous-estime le pouvoir d'attraction du Front national dans l'électorat populaire. Son haut niveau aux cantonales de mars - y compris dans certains secteurs de cette France de l'Ouest où le FN était jusque-là inexistant - est souligné par tous les observateurs. " Politiquement, il s'est produit quelque chose dans cet électorat, un point de rupture ", soulignent Alain Mergier et Jérôme Fourquet qui, par des chemins différents, en sont arrivés à la même conclusion : pour une partie de l'électorat populaire, le vote FN n'est plus un vote de sanction ou d'avertissement mais un vote d'adhésion (Le Point de rupture, Fondation Jean-Jaurès, 86 p.)
    C'est que la crise de la dette a un effet ravageur : elle sape la légitimité des gouvernants qui semblent courir derrière les marchés. Elle n'est pas appréhendée par le biais des discours politiques mais à travers l'expérience personnelle du surendettement. " L'idée prévaut que c'est une dette pharaonique, qui ne peut trouver de solution dans le cadre économique actuel.  Pour rompre le noeud, il faut trancher. Pour beaucoup, cela passe par la sortie de l'euro ", observe M. Mergier. Chez les ouvriers et les employés, plus de la moitié des électeurs souhaite la disparition de la monnaie unique, alors que ce sentiment n'est partagé que par un tiers de l'ensemble de l'électorat.
    Des entretiens réalisés par Alain Mergier, mais aussi de la récente enquête publiée par François Miquet-Marty, un mot surnage : l'insécurité. Physique, économique, identitaire, liée au vécu et, tout aussi important, à la conviction qu'il s'est produit une rupture dans les règles du jeu. " Quand vous n'avez pas de réseaux, la notion de règle du jeu est vitale, explique M. Mergier. Elle renvoie à la question des habitudes qui, lorsqu'elles sont brisées, induisent la menace de l'imprévisible. "
    C'est parce qu'ils ont l'impression que les règles du jeu sont faussées que " les milieux populaires  détestent  les profiteurs du bas, ceux qui trichent avec les prestations sociales et qui travaillent au noir ", explique le chercheur. Et c'est parce qu'ils ont l'impression de subir un processus de destruction des règles de vie commune que " le terme le plus porteur dans leur discours est celui d'islamisation, qui renvoie à la peur d'une hégémonie ", assure M. Mergier. " Les milieux populaires sont ceux qui ont été les plus exposés à la mondialisation et au multiculturalisme. Or on ne les a pas armés pour ", confirme M. Guilluy.
    Pour les candidats qui veulent reconquérir l'électorat populaire, la conjugaison de la question identitaire et de la question sociale est redoutable, car celle qui fait le lien entre les deux problématiques est précisément Marine Le Pen. " Elle colle à la demande. Elle a calé son programme sur la nouvelle sociologie du FN. Elle est passée du libéralisme à l'étatisme ", constate M. Guilluy. Dans la revue Etudes, Dominique Reynié, directeur général de la Fondation pour l'innovation politique (proche de l'UMP) et auteur du livre Populismes, la pente fatale (Plon, 280 p.), qualifie le discours de la présidente du FN d'" ethno-socialiste ".
    " La question de l'extrême droite n'est pas seulement une question politique posée à la droite, c'est aussi une question sociale posée à la gauche ", confirme Pascal Perrineau, directeur du Cevipof, qui insiste sur le parallélisme avec l'évolution des extrêmes droites européennes. " Le protectionnisme culturel s'est prolongé d'un ralliement au protectionnisme économique et d'une remise en cause du credo néolibéral du début ", dit-il. Pour M. Miquet-Marty, " le grand danger de la période a un nom : le populisme ".

    Françoise Fressoz et Thomas Wieder ( Le Monde, 7 décembre 2011)
     
     
     
       
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