Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

david engels - Page 8

  • L'Europe contre l'Union européenne...

    Nous reproduisons ci-dessous le texte d'une conférence de David Engels donnée le 3 décembre 2021 à l’occasion du colloque “How to Reform the Union for the Future of Europe” (« Comment réformer l’Union pour le futur de l’Europe »), publiée sur le Visegrad Post et consacrée aux valeurs historiques de l'Europe.

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine et président de la société Oswald Spengler, David Engels, qui vit en Pologne, est devenu une figure de la pensée conservatrice en Europe et est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

     

    Charlemagne 2.jpg

    L’Europe contre l’UE : comment ancrer les valeurs historiques de l’Occident dans la constitution d’une future confédération européenne ?

    L’Europe traverse une crise profonde, car elle est confrontée simultanément à des défis aussi divers que : mondialisation, migration de masse, désintégration de la famille, Cancel Culture, déclin démographique, déchristianisation, désindustrialisation, dégâts environnementaux, polarisation sociale, chômage, crise de la dette, guerres asymétriques, dé-démocratisation, islamisation, fondamentalisme, délabrement des infrastructures, terrorisme, hédonisme, obsolescence, relativisme juridique, ultralibéralisme, idéologie LGBTQ, augmentation des dépenses sociales, criminalité, bureaucratie dysfonctionnelle, folie des genres, etc. – pardonnez-moi cette longue énumération, mais ce n’est que lorsque nous aurons pris conscience de toute l’ampleur de notre déclin que nous pourrons réfléchir à des solutions adéquates.

    Cette crise n’est pas imposée de l’extérieur, elle est faite maison. Ce que craignaient déjà les pères fondateurs comme Robert Schuman, à savoir qu’une Europe unie ne doit pas rester une entreprise économique et technocratique, se paie aujourd’hui : il lui faut une âme, une prise de conscience de ses racines historiques. Sans identité commune, il ne peut y avoir de solidarité européenne en période de bouleversements comme aujourd’hui ; une telle identité doit toutefois se référer à autre chose qu’aux droits de l’homme universels, mais doit tenir compte de ce qui est propre à l’Europe et aux Européens : une vision occidentale de l’homme profondément enracinée dans la tradition et l’histoire. Si une telle entreprise échoue, il n’y a que deux possibilités : l’éclatement en États-nations, qui seront alors à la merci de puissances telles que la Chine, la Russie, le monde islamique ou les États-Unis, ou bien un centralisme bureaucratique et sans âme.

    Bien sûr, les partisans de l’actuelle UE politiquement correcte affirment que tout scepticisme à l’égard de l’UE est « conservateur » et donc condamnable, car il devrait automatiquement entraîner un retour au nationalisme, à l’autoritarisme d’extrême droite et finalement à la guerre et au génocide. Pourtant, le nombre de ceux qui veulent combiner patriotisme conservateur et défense de l’identité occidentale pour faire face aux nombreuses menaces intérieures et extérieures qui pèsent sur notre civilisation ne cesse de croître. Les pays de Visegrád sont sans aucun doute à la pointe de ce mouvement à l’heure actuelle, ce qui explique pourquoi il s’agit précisément d’une institution polonaise, l’Association des artistes pour la République (Stowarzyszenie Twórców dla Rzeczypospolitej), qui a pris l’initiative, sous la présidence de Zdzisław Krasnodębski, de commander en 2020 un préambule pour une future constitution d’une « confédération de nations européennes ». Cette constitution doit pouvoir servir de point de ralliement à tous les conservateurs qui veulent s’efforcer de défendre l’Occident, indépendamment des familles politiques auxquelles ils peuvent appartenir au Parlement européen. L’objectif du préambule était d’inscrire fermement dans la Constitution les valeurs conservatrices attaquées par l’UE actuelle, en éliminant les erreurs idéologiques fondamentales de l’ancien projet de Constitution de Valéry Giscard d’Estaing.

    Ce fut un grand honneur pour moi de pouvoir rédiger en ce sens ledit « préambule », qui, entre-temps, a été publié dans de nombreuses langues européennes et paraîtra également sous forme de livre dans les prochains mois, et qui s’inscrit pleinement dans la continuité de l’idéologie de l’hespérialisme telle que je l’ai développée en 2019 dans le livre Renovatio Europae. L’idée de base de l’« hespérialisme » est très simple : il est grand temps de revenir aux valeurs qui ont jadis fait la grandeur de l’Occident, si nous voulons éviter les pires scénarios. La défense de la famille naturelle, une régulation stricte de l’immigration, le retour au droit naturel, la protection d’un modèle économique socialement responsable, la mise en œuvre radicale de la subsidiarité, la renaissance des racines culturelles de notre identité et le renouvellement de notre sens de la beauté – tels sont, en résumé, les piliers d’une telle nouvelle Europe « hespérialiste ». Si l’Europe veut survivre en tant que civilisation au 21e siècle, elle doit revenir aux valeurs et traditions historiques qui l’ont façonnée depuis le Moyen-Âge et réduire drastiquement la tendance bruxelloise au centralisme. En même temps, elle doit garantir un partenariat étroit entre les nations européennes dans certains domaines politiques clés, tels que la protection des frontières, la recherche, la lutte contre la criminalité, les infrastructures, la défense, les ressources stratégiques ou les normes juridiques. L’exemple idéal d’une telle communauté d’États n’est donc pas les États-Unis ou la République fédérale d’Allemagne, mais plutôt les grands empires pré-modernes comme l’Union polono-lituanienne ou le Sacrum Imperium, le Saint Empire romain germanique.

    On peut se demander pourquoi l’Europe a besoin d’une véritable constitution, car d’une part la dernière tentative d’élaborer une constitution explicite s’est soldée par un véritable fiasco, tandis que d’autre part, les conservateurs semblent justement plutôt favorables à une réduction, voire à un démantèlement des institutions européennes et s’opposent donc généralement à toute constitution commune contraignante. Mais c’est une erreur : d’abord, l’opposition de nombreux citoyens n’était clairement pas dirigée contre l’idée générale de l’unification européenne, mais contre sa forme concrète et très problématique ; pui, la Constitution envisagée ici ne doit pas livrer les Européens encore plus qu’avant à l’administration bruxelloise et à son idéologie de plus en plus gauchiste, mais plutôt à les en protéger : notre projet est certes une Constitution « pour » l’Europe, mais une Constitution « contre » l’UE.

    Notre Constitution veut refonder une Europe forte, fière et patriotique, qui défend son identité au lieu de la salir ; qui respecte les nations au lieu de les fusionner ; qui honore son héritage historique au lieu de le soumettre au multiculturalisme ; qui combat la polarisation sociale au lieu de faire de la politique pour les élites ; qui protège et met en œuvre la démocratie au lieu de déléguer le pouvoir à des institutions internationales sans âme et non démocratiques ; qui défend l’importance de notre continent dans le monde au lieu de le brader. Cette Europe, nous devons la reconquérir – avec les citoyens, contre ses élites actuelles. L’union politique de toutes les vraies forces conservatrices et patriotiques autour d’un tel objectif commun est un premier pas dans cette voie – espérons donc que l’histoire s’écrira aujourd’hui dans ce sens.

    David Engels (Visegrád Post, 12 décembre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Réflexions sur l'Europe, le déclin et le renouveau hespérialiste...

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un entretien donné par David Engels à Ego Non et consacré au déclin de l'Europe ainsi qu'à la voie à suivre pour un renouveau de notre civilisation.

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine et président de la société Oswald Spengler, David Engels, qui vit en Pologne, est devenu une figure de la pensée conservatrice en Europe et est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

     

                                              

    Lien permanent Catégories : Entretiens, Multimédia 0 commentaire Pin it!
  • L'Union européenne contre la liberté des peuples : le cas polonais...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David Engels consacré aux menaces de l'Union européenne à l'encontre de la Pologne visant à faire tomber le régime actuel.

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine, David Engels, qui est devenu une figure de la pensée conservatrice en Europe, vit en Pologne et est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

     

     

    Crise UE - Pologne.jpg

    Le poker autour du Polexit

    Bien que la Cour constitutionnelle polonaise se soit contentée de mettre en question que la CJCE soit vraiment autorisée à remodeler la constitution polonaise même dans les domaines où l'UE n'a pas de compétence sur base des traités européens - doute déjà exprimé par maintes autres cours constitutionnelles européennes ces dernières années, y compris l'Allemagne -, cette décision est stylisée dans les médias occidentaux comme un « rejet des valeurs européennes », voire comme une dénonciation unilatérale de l'adhésion à l'UE. Dans « Der Spiegel », par exemple, Markus Becker a déclaré : « L'UE doit donc riposter avec tout ce qu'elle a, car c'est son existence même qui est en jeu. Cela signifie que la Pologne doit immédiatement couper chaque centime de fonds européens qui peut être coupé », tandis que dans les « Tagesthemen », Markus Preiß a déclaré de manière menaçante : « Depuis trop longtemps, la Commission européenne, mais aussi l'Allemagne en tant que pays le plus puissant, sont restées sans rien faire ». Ainsi, la Pologne menace « l'existence de l'UE » et l'Allemagne, en tant que « pays le plus puissant » du continent, doit enfin mettre de côté sa longanimité légendaire et contribuer à « riposter » avec tous les moyens à sa disposition et à étrangler financièrement son voisin de l'Est. Cela ne ressemble-t-il pas à une hystérie tout à fait inadaptée à la réalité, voire à une gratte dans le disque de l'histoire récente ?

    En apparence, la lutte actuelle porte sur l’accusation selon laquelle la Pologne, par sa réforme juridique, violerait les traités européens et créerait une Europe « à la carte » en ne tenant pas compte des « règles du jeu » générales en continuant pourtant à « collecter l'argent des impôts de l'Europe occidentale ». Tout cela est faux à plusieurs niveaux.

    Tout d'abord, c’est l’UE qui, ces dernières années, par une instrumentalisation inouïe de ces prétendues « valeurs européennes », a déformé les règles du jeu au point de les rendre méconnaissables : la Commission, le Parlement et surtout la CJUE en sont venus à définir des termes tels que « liberté », « égalité », « protection des minorités » ou « État de droit » de manière si large et si idéologiquement à gauche qu'ils en tirent une justification pour presque toute intervention législative dans le droit national – et ce sans aucune possibilité de recours, puisque la CJUE, profondément politisée, sous le prétexte d'une prétendue « séparation des pouvoirs », élude toute objection des autres instances. Cela n'a peut-être pas changé la lettre des traités, mais l'esprit en a été littéralement inversé : légalité ne signifie pas légitimité, comme l'ont tragiquement démontré les régimes autoritaires du XXe siècle.

    Deuxièmement, la soi-disant réforme juridique, comme cela a déjà été suffisamment débattu dans la littérature, n'était pas seulement une réaction du gouvernement actuel à la nomination illégitime et prématurée de plusieurs juges constitutionnels par le gouvernement sortant de Donald Tusk, mais découlait également de la nécessité de gérer l'héritage personnel de l'ère communiste, dont le système de patronage dans le système judiciaire polonais n'avait jamais été soumis à une véritable lustration et s'était entièrement rangé du côté des partis de gauche-libéraux. La démocratisation du système juridique polonais n'a rien fait d'autre que créer des conditions constitutionnelles qui correspondent à celles de la plupart des autres pays européens et ne menacent pas plus l'« indépendance » du pouvoir judiciaire que ce n'est le cas dans l'Allemagne actuelle, mais bien évidemment, tout cela n'a jamais été repris par les médias d'Europe occidentale : Car le vrai problème n'était pas la réforme elle-même, mais sa conséquence, à savoir le renforcement de l'élément conservateur dans le système judiciaire polonais et donc son soutien à la politique intérieure du gouvernement polonais tant détesté par l’Occident.

    Troisièmement, l'argument d’une prétendue obligation d'obéissance de la Pologne en contrepartie des aides financières reçues par l’UE est incorrect à la fois sur le plan moral et factuel. Moralement, car aucun Espagnol ou Écossais ne supposerait jamais que l'Andalousie ou les Highlands du nord-ouest auraient moins de poids national que les autres régions simplement parce qu'elles génèrent moins d'argent qu'elles n'en reçoivent en raison de leur faiblesse structurelle actuelle. Pourquoi en serait-il autrement pour la Pologne au sein de l'UE ? Objectivement, parce qu'il a été prouvé (comme, par exemple, mutatis mutandis dans le cas de l'Allemagne de l'Est) que ces fonds ne sont guère des dons désintéressés, mais représentent plutôt la contrepartie de l'ouverture de la Pologne au marché intérieur européen, où les produits d'Europe occidentale étouffent aujourd'hui encore dans l'œuf leur concurrence d'Europe orientale par des prix de dumping, où le capital d'Europe occidentale profite du marché du travail polonais, aussi bon marché que hautement qualifié, et où même les grands projets d'infrastructure financés par l'UE sont le plus souvent pris en charge par des entreprises occidentales et permettent le transport de marchandises occidentales. Ce qui en résulte est tout sauf de la charité chrétienne, mais au mieux une situation gagnant-gagnant froidement calculée.

    Mais cela explique aussi pourquoi le spectre du prétendu « Polexit » invoqué par les médias d'Europe occidentale est une déformation soit naïve, soit malveillante de la situation économique et politique réelle. Compte tenu des liens économiques étroits avec l'Ouest et de l'enthousiasme collectif pour l'intégration européenne, il n'y a absolument aucun désir en Pologne, et surtout pas au niveau gouvernemental, de quitter l'UE - et en fin de compte, il en va de même pour l'Europe occidentale et surtout pour l'Allemagne, qui, par un Polexit, perdrait un site central d'exportation, de production et d'investissement et ne peut avoir aucun intérêt à trouver des postes de douane sur l'Oder. Une rupture de la symbiose entre l'Est et l'Ouest ne toucherait finalement pas moins la Pologne que l'Allemagne, puisque les subsides « économisés » ne pourraient guère être investies avec plus de profit ailleurs que chez le voisin le plus proche, qui est après tout le cinquième partenaire commercial de l'Allemagne.

    Alors pourquoi le spectre de Polexit est-il constamment invoqué, non seulement à Bruxelles mais aussi à Berlin, et pourquoi le pays est-il littéralement poussé hors de l'UE par une agitation médiatique sans précédent ? La réponse est simple : il s'agit ni plus ni moins d'une partie de poker dont l'objectif est en « changement de régime » classique. La pression politique, médiatique et financière est destinée à agir comme des grésillons pour obliger le gouvernement polonais à céder et donc à abandonner sa politique intérieure conservatrice - ou bien, par une intimidation progressive, à amener la population à renverser le gouvernement d'une manière ou d'une autre et à provoquer de nouvelles élections. Dans le processus, l'ancien président du Conseil européen, Donald Tusk, qui est revenu à Varsovie il y a quelques mois précisément dans ce but, serait alors réélu Premier ministre polonais et ramènerait le pays sur la voie négociée à Berlin et à Paris. Le seul hic de ce calcul, c'est que tôt ou tard, ces mesures mettraient aussi l'Europe occidentale en difficulté, d'autant plus que l'Europe de l'Est s'est jusqu'à présent très bien sortie de la crise et affiche des taux de croissance extraordinaires, ce qui signifie qu'elle offre des conditions presque paradisiaques aux investisseurs occidentaux. L'UE s'appuie donc d'autant plus sur la pression concentrée des médias pour ériger une toile de fond menaçante dont la véritable cible est la population polonaise qui, après des décennies de domination soviétique, veut à tout prix appartenir à l'« occident ». Varsovie va-t-elle céder avant de se rendre compte qu'elle n'a pas de plus mauvaises cartes que ses homologues de Bruxelles et de Berlin ?

    David Engels (Tysol, 17 octobre 2021)

    Lien permanent Catégories : En Europe, Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Réquiem pour la démocratie libérale...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David Engels, cueilli sur Tysol.fr,  qui nous rappelle que la démocratie libérale occidentale est une fiction destinée à masquer la réalité oligarchique du pouvoir...

    consacré au glissement autoritaire de nos sociétés à travers l'exemple de la dénonciation des opposants au « passe sanitaire » comme « parasites sociaux »...

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine, David Engels, qui est devenue une figure de la pensée conservatrice en Europe, est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

     

    Gotham city.jpg

    Réquiem pour la démocratie libérale

    La mort de la démocratie libérale est de plus en plus souvent invoquée, que ce soit de manière apotropaïque par ses partisans, que ce soit avec une certaine satisfaction par ses opposants. Pourtant, la démocratie libérale n'a jamais existé ; en fait, elle est une contradictio in adiectum.

    Tout d'abord, il est très douteux que le mot « démocratie » puisse vraiment s'appliquer aux sociétés occidentales modernes telles qu'elles ont évolué depuis la Révolution française, car le système des partis parlementaires n'a pas grand-chose à voir avec le concept réel de démocratie. À l'origine, la « démocratie » signifiait la tentative de faire exercer le pouvoir non seulement pour le peuple, mais aussi par le peuple, et ce non pas de manière de plus en plus indirecte à travers des étapes complexes de délégation de pouvoir, mais directement, à savoir par des plébiscites et par l'élection directe de tous les magistrats ou, mieux encore, par leur désignation par le sort, comme dans le cas de la démocratie attique. Nous, en revanche, en essayant de mettre en œuvre le concept polybien de la « constitution mixte », nous avons créé un système parlementaire de représentation qui, par le mécanisme des partis, par l'invention du politicien professionnel et par la délégation du pouvoir politique du peuple aux parlements et des parlements à diverses formes d'exécutifs et d'institutions internationales, ressemble le plus à une oligarchie. En outre, si l'on considère également qu'en raison de la polarisation sociale croissante et de l'érosion de l'État-nation classique, le pouvoir réel est plus susceptible de se trouver entre les mains des Big Tech, des Big Data et des Big Business qu'entre celles des politiciens, la marge de manœuvre réelle du peuple pour façonner la politique quotidienne se réduit encore plus.

    Deuxièmement, nous devons discuter de la signification du mot « libéral » et du soupçon que son idéal a peu à voir avec la réalité pratiquée aujourd'hui. Si l'on entend par « libéral » la volonté d'assurer la plus grande liberté possible à l'individu, il faut alors se demander si cette liberté n'existait pas dans une bien plus large mesure au cours des siècles passés qu'aujourd'hui, où un procéduralisme juridique presque maniaque tue dans l'œuf toute initiative, ou plutôt, la réserve à une élite jalousement protégée et à son soutien légaliste. De plus, la surveillance de plus en plus étroite de nos données par l'État et l'économie nous transforme en un peuple transparent, et l'introduction de systèmes de crédit social dystopiques comme ceux en Chine n'est pas seulement possible en Europe, mais est déjà devenue réalité à travers des initiatives comme le passeport covid : sans que nous nous en rendions compte, le prétendu libéralisme occidental s’est transformé en économie planifiée numérique polycentrique. En outre, en ce qui concerne les prétendues « valeurs » libérales, certaines questions gênantes se posent. Car s'il doit être « libéral » d'orienter sa propre vie selon des valeurs morales individuelles arbitraires et relativistes, qui doivent seulement répondre à la condition préalable de ne pas limiter la liberté d'autrui (ou, pour reprendre les termes de Kant, de pouvoir devenir une loi générale), la vacuité de l'idée de « valeurs libérales » apparaît rapidement. En effet, en fin de compte, un tel concept de liberté ne fait que déplacer le dilemme de la prise de décision morale des anciennes communautés de solidarité pré-modernes tels que la famille, l'église, la guilde ou le village vers le législateur étatique. Ce dernier, cependant, est de plus en plus influencé par une attitude résolument anti-traditionnelle et ne compte plus accompagner l’évolution sociopolitique, mais la diriger. Ainsi, en favorisant systématiquement les minorités les plus diverses et contestables tout en critiquant directement ou indirectement les modes de vie traditionnels et majoritaires, le « libéralisme » défendu par l'État moderne correspond de plus en plus à une tentative d’« ingénierie sociale » radicale de gauche. Au terme de cette évolution se trouve, comme on le voit déjà aujourd'hui, l'idéal d'un individualisme extrême et hédoniste-matérialiste, qui n'autorise que d’infimes variations sur le thème de plus en plus étroit de la prétendue « diversité » : ainsi, la réalité quotidienne résultant de cette politique semble collectiviste plutôt que véritablement libérale et a remplacé la liberté réelle et la diversité des styles de vie, comme le connaissait encore le passé pré-révolutionnaire, par un conformisme uniforme, comme le soupçonnait déjà Tocqueville.

    De cette brève clarification des termes, qui devrait faire comprendre que les « démocraties libérales » actuelles ne sont en réalité ni libérales ni démocratiques dans le sens où l’on l’entend généralement, mais cachent une gouvernement élitaire de plus en plus matérialiste et collectiviste, découlent quelques conséquences naturelles.

    D'une part, cette évolution, qui s'est fortement accélérée au cours des deux dernières décennies, va certainement se poursuivre encore plus rapidement à l'avenir, rendant ainsi progressivement claires les conséquences ultimes de nos choix politiques, et ce même pour les citoyens qui, pendant longtemps, ont naïvement préférer fermer les yeux face aux réalités. Malheureusement pour nous, il sera probablement bientôt trop tard, du moins pour l'Europe occidentale, pour procéder à des corrections de trajectoire significatives de manière organique et pacifique, car l’enchevêtrement entre politique, grandes entreprises, médias et experts est devenu tel que les pires extrêmes semblent d'abord devoir être atteints avant qu'une véritable remise en question puisse commencer.

    D'autre part, il s'ensuit que tout mouvement dédié à la lutte contre ces conditions ne doit pas être mené au nom d'une simple restitution d'un statu quo illusoire, comme celui des années 1980 ou 1990, qui, rétrospectivement, semblent si enviables seulement parce que les problèmes ancrés dans le système des partis parlementaires ainsi que dans le libéralisme de masse y étaient encore à peu près compensés par un dernier vestige de décence et de moralité enraciné fermement dans l’époque pré-révolutionnaires. Une fois de plus, cela ne fait que démontrer la véracité du fameux paradoxe de Böckenförde, selon lequel l'État moderne vit sur base de conditions préalables qu'il ne peut garantir lui-même - et que, faut-il ajouter, il combat même activement actuellement, sciant ainsi la branche sur laquelle il est assis… et nous tous avec lui.

    Une véritable alternative ne peut donc pas venir, pour le dire exagérément, de l'esprit du « conservatisme », car il ne reste plus grand-chose qui vaille la peine d'être conservé, mais plutôt de celui de la « réaction », dans le sens d'un retour conscient à des cadres et à des conditions politiques d'un tout autre type, et qui doivent bien sûr être adaptés aux réalités de la modernité. Mais cela ne peut se faire, comme je l'ai déjà expliqué avec un collectif d'auteurs venant de toute l'Europe dans mon livre « Renovatio Europae », que par un mouvement politique auquel j'ai donné le nom d'« Hespérialisme ». Ce n'est qu’en combinant le patriotisme culturel occidental avec le désir d'un lien renouvelé avec la transcendance chrétienne qu'il peut y avoir un espoir de survie pour notre civilisation. Et de ce point de vue, le seul point de départ possible pour une Europe alternative ne réside pas dans les États-nations post-révolutionnaires ou même dans les institutions internationales modernes, mais plutôt dans les formes pré-modernes d'Etats et de sociétés comme, par exemple, le « Sacrum Imperium » ou la République polono-lituanienne qui ont tous combiné subsidiarité, pluralisme politique, résilience, patriotisme, tolérance, sécurité juridique avec un ancrage transcendant.

    David Engels (Tysol.fr, 15 septembre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Le "covidiot", nouveau bouc émissaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David Engels cueilli sur Putsch et consacré au glissement autoritaire de nos sociétés à travers l'exemple de la dénonciation des opposants au « passe sanitaire » comme « parasites sociaux »...

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine, David Engels, qui est devenue une figure de la pensée conservatrice en Europe, est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

    Vaccinattion obligatoire.jpg

    L’éternel bouc émissaire. Aujourd’hui : les « covidiots »

    Les recherches sur le totalitarisme ont montré qu’un État autoritaire, s’il veut survivre, ne peut se contenter de seulement contrôler les moyens réels du pouvoir : il doit également impliquer sa propre population dans ses crimes à un degré tel qu’elle en devienne complice et perde, en même temps que la moralité, le respect de soi et donc la volonté intérieure de résister. Ne devrait-on pas tirer la sonnette d’alarme aujourd’hui ?

    Ces jours-ci, on parle beaucoup de la « dictature covid », et il y aurait en effet beaucoup à dire sur la transformation autoritaire de nos sociétés occidentales, donnant lieu à des situations qui auraient été considérées comme des délires complotistes il y a seulement deux ans. Dans toute l’Europe, non seulement des adultes en parfaite santé, mais aussi des enfants refusant une thérapie génétique expérimentale « volontaire » contre une « pandémie » responsable pour (ou simplement concomitante à) la mort d’à peine 0,17 % de la population française (presque exclusivement des personnes âgées avec de multiples pathologies préexistantes) vont être définitivement exclus de presque tous les lieux de la vie publique et même des voyages à l’étranger – sous les applaudissements nourris de médias, de politiciens et d’« experts » qui, autrement, parlent sans cesse de tolérance et des droits de l’homme. Le fait que cette « vaccination » expérimentale ne semble pas entraver de manière significative la contagion par ou la transmission du covid-19, mais qu’elle ne ferait que renforcer le système immunitaire individuel tout en ayant des effets secondaires non négligeables, rend l’ensemble doublement surréaliste et rend la contrainte indirecte de vacciner toute une population complètement incompréhensible. Si l’on ajoute que même avant le covid-19, les démocraties occidentales n’étaient pas au mieux de leur forme, et que les « lois d’urgence » liées au covid ne sont à bien des égards que la conséquence de l’autodestruction déjà entamée de longue date de la démocratie participative, le citoyen vigilant ne peut que frémir en pensant à ce que l’avenir peut encore lui réserver.

    Dans cette situation précaire, le fait selon lequel, d’après un sondage Elabe récent, 76 % des Français soutiendraient effectivement cette évolution, apparaît comme un coup de poing dans l’estomac (https://www.ouest-france.fr/politique/emmanuel-macron/covid-19-une-majorite-de-francais-approuve-les-mesures-annoncees-par-emmanuel-macron-88d5e572-e3fa-11eb-8317-b6757a6d4184). Même si ce chiffre semble assez discutable pour plusieurs raisons, il met néanmoins en lumière un phénomène que l’on peut difficilement nier : le plaisir jubilatoire à peine dissimulé qu’il procure non seulement aux journalistes, aux politiciens et aux experts, mais aussi à de nombreux utilisateurs ordinaires des médias sociaux, de diffamer les personnes non vaccinées comme des parasites antisociaux de la santé publique, justifier la répression policière sanglante des manifestants comme étant la seule façon possible de faire face à de dangereux « cinglés », et considérer la privation permanente de leurs libertés et leur exclusion physique comme une juste punition pour l’« entêtement » et la « stupidité » des « covidiots ». Mais c’est précisément cette disposition à la haine triomphaliste et à l’oppression physique qui constitue le deuxième élément indispensable à la solidification des conditions autoritaires émergentes, à savoir la complicité d’une partie importante de la population avec le crime et donc cette co-responsabilité morale qui rend tout retour en arrière presque impossible.

    Je m’épargnerai ici une liste des commentaires vicieux omniprésents, qui reviennent tous à dépeindre ceux qui critiquent le confinement ou qui refusent, pour eux-mêmes ou leurs enfants, la vaccination « volontaire » jusqu’à ce que l’on en sache plus sur ses effets secondaires et conséquences, comme des ennemis de l’État qui doivent être contraints à l’obéissance par tous les moyens possibles.

    Et il est d’ores et déjà évident que ces « covidiots » seront désignés comme les boucs émissaires idéaux de tous les maux imaginables à l’avenir, et ce contre toute évidence : non seulement la quatrième, cinquième ou sixième vague avec les mutations attendues du virus et l’inefficacité des vaccinations, mais aussi la nécessité d’un « Grand Reset » attendu de toute manière depuis de nombreuses années, et dont les conséquences désastreuses vont évidemment être attribuées au virus et aux « covidiots ». A y regarder de près, la diffamation du corona-sceptique comme ennemi principal de l’État moderne n’est pas aussi absurde qu’il n’y paraît : car celui qui, aujourd’hui, refuse de céder à la pression conjuguée de la politique, des médias et de ses concitoyens, agira aussi de manière imprévisible et obstinée sur d’autres sujets demain. Les identifier dès maintenant comme un groupe fermé, les livrer à la haine de la majorité et, si possible, les exclure de la société, est parfaitement logique en termes de tactique de pouvoir et correspond bien à la mode de plus en plus répandue de compiler des listes des prétendus « ennemis » de la bienpensance afin de préparer les proscriptions à venir.

    La dictature n’est pas seulement fondée sur la tyrannie, mais aussi sur la complicité et la satisfaction secrète et étrange de voir que l’autre seulement est humilié et persécuté – qu’il s’agisse du Juif, du « sous-homme » slave, de l’homosexuel, du koulak, du curé, du bourgeois ou de l’aristocrate -, tandis que l’on se croit en sécurité en tant que personne « comme tout le monde », qui ne « fait pas de problèmes » et fait confiance à « ceux d’en haut » qui « ne veulent que notre bien » : une erreur de calcul épouvantable, qui n’apparaît bien sûr que dans un deuxième temps, lorsque, grâce à la dénonciation, à la malveillance, à l’arbitraire et à la terreur, les citoyens prétendument « irréprochables » en prennent également pour leur grade – et sur cette base, nous pouvons craindre avec horreur que le système de répression sanitaire actuellement en vigueur ne soit également utilisé dans quelques années pour exclure la dissidence politique, pour perpétuer le contrôle de l’État sur notre intégrité physique et enfin pour mettre en place un système de crédit social sur le modèle chinois.

    Sera-t-il possible d’éviter le pire et de retrouver non pas la « nouvelle normalité » dystopique mais l’« ancienne normalité » par une opposition courageuse ? L’ambiance incite plutôt au pessimisme – non seulement parce que l’érosion alarmante de l’État de droit par une pseudo-moralisation hystérique ne permet plus aux responsables de « revenir en arrière » sans graves conséquences juridiques, mais aussi parce que le discours public s’est tellement polarisé qu’une majorité de citoyens, pour ne pas perdre la face, se doit de continuer à affirmer la déshumanisation actuelle des prétendus « covidiots » – jusqu’à ce que sur la base de l’exclusion sélective de toute une partie de la population se lève un régime, dont les complices actuels deviendront tôt ou tard les prochaines victimes….

    David Engels (Putsch, 13 août 2021)

     

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • L’Europe et le « Grand Jeu » du XXIe siècle...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de David Engels, cueilli sur le Visegrád Post dans lequel il appelle l'Europe à donner la priorité absolue à la protection de ses propres intérêts plutôt qu’à des « droits de l’homme » évanescents.

    Historien, spécialiste de l'antiquité romaine, David Engels, qui est devenue une figure de la pensée conservatrice en Europe, est l'auteur de deux essais traduits en français, Le Déclin. La crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine (Toucan, 2013) et Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe (Blauwe Tijger, 2019). Il a également dirigé un ouvrage collectif, Renovatio Europae - Plaidoyer pour un renouveau hespérialiste de l'Europe (Cerf, 2020).

     

    Grand Jeu.jpg

    L’Europe et le « Grand Jeu » du XXIe siècle

    Lorsqu’il y a quelques jours, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a refusé de signer l’une des usuelles « déclarations préoccupées » de l’UE concernant la situation des droits de l’homme à Hong Kong, le tollé habituel a parcouru les médias occidentaux, qui y ont vu un nouvel exemple des tendances « illibérales » de l’État voyou hongrois. Loin de moi l’idée de banaliser les événements en Chine ou d’approuver les mesures prises par Pékin pour contrôler ses provinces périphériques. Toutefois, au vu des violentes émeutes aux États-Unis, en Espagne ou en France, et de la perte croissante des valeurs démocratiques fondamentales partout en Occident, la question se pose de savoir « s’il faut jeter des pierres lorsque l’on est assis dans une maison de verre », comme le dit un dicton allemand – cela est d’autant plus vrai si l’on considère la sélectivité avec laquelle l’Occident, chaque fois que cela est opportun dans les médias, se présente comme le défenseur des droits de l’homme, alors qu’en même temps, lorsque personne n’y prête attention de trop près, il conclut des contrats économiques de plusieurs milliards avec les mêmes gouvernements et est très heureux de pactiser avec des dictateurs pour autant qu’ils soient de « notre » côté. Ces considérations ne doivent pas être interprétées comme un appel cynique au relativisme moral ; au contraire, je suis plutôt préoccupé par l’idée que l’Occident devrait se mettre à une certaine cohérence idéologique afin d’être enfin crédible tant à l’extérieur qu’à l’intérieur, et d’empêcher que de nombreux citoyens tout comme nos voisins soient de plus en plus dégoûtés par le « deux poids, deux mesures » occidental, voire conspirent ensemble pour nous renverser.

    Si la politique étrangère devait se fonder uniquement sur les droits de l’homme, comme le veut l’auto-représentation actuelle de l’Europe, ces derniers devraient alors tout d’abord être véritablement mis en œuvre à l’intérieur (il y aurait beaucoup à faire dans ce domaine), puis de manière cohérente et juste à l’extérieur – avec la conséquence probable que presque toutes les relations avec l’Asie ainsi qu’avec l’Afrique devraient être complètement rompues, sans parler des conséquences catastrophiques à prévoir, notamment en matière de politique économique, étant donné que notre dépendance à l’industrie de l’Asie de l’Est fait que le développement de structures industrielles équivalentes chez nous est devenu presque impossible, du moins à court et à moyen terme. Voulons-nous payer ce prix ? Si oui, allons-y !

    Une autre solution consisterait à donner la priorité absolue à la protection des intérêts européens plutôt qu’à ces « droits de l’homme » usuellement fort sélectifs, et à fonder la politique étrangère de notre continent, du moins dans un premier temps, sur la garantie de notre indépendance stratégique et de notre autonomie économique maximale, mais en s’abstenant de cet interventionnisme verbal édenté et peu crédible, afin de pouvoir ensuite, sur une base solide et dans une position de force et de crédibilité réelles, défendre le droit et la justice également à l’étranger.

    Or, nous en sommes très loin, d’autant plus que l’élite politique européenne actuelle a perdu tout sens de la géopolitique ou s’est laissée instrumentaliser par des lobbies influents qui poursuivent leurs propres objectifs et n’ont que très rarement à cœur le bien de la civilisation occidentale dans son ensemble.

    Le monde de l’avenir, voire déjà du présent, est dominé par de grandes zones économico-politiques qui s’efforcent certes d’exercer une hégémonie relative sur leurs périphéries, mais n’ont aucune possibilité de parvenir à une véritable domination mondiale à long terme. La Chine, l’Inde, la Russie, les États-Unis et le Brésil sont devenus les cœurs de nouveaux empires multilatéraux qui, au mieux, maintiennent un équilibre précaire et ne se frottent qu’à leur périphérie, mais qui, au pire, pourraient plonger dans des conflits autodestructeurs.

    L’Europe doit reconnaître cette situation ; qu’elle le veuille ou non, elle doit se considérer comme un autre joueur dans ce nouveau « Grand Jeu » très dangereux et se doter des institutions appropriées pour jouer ce jeu activement et efficacement afin de ne pas devenir une quantité négligeable. Pour ce faire, il est bien sûr nécessaire d’éclairer ces irréductibles qui croient encore qu’une Europe de 40 minuscules États-nations en brouille permanente aurait la moindre chance dans cette situation, et de démasquer au grand jour le fait que ceux qui, aujourd’hui, prétendent protéger l’Europe vendent en fait les intérêts occidentaux au plus offrant.

    Mais cela ne peut se réaliser que par une prise de conscience collective de notre identité historique commune, car sans cette identité, l’espoir de solidarité et ainsi de cohésion politique restera chimérique. Il s’agit donc là du véritable levier du futur de l’Europe au XXIe siècle.

    David Engels (Visegrad Post, 14 mai 2021)

    Lien permanent Catégories : Géopolitique, Points de vue 0 commentaire Pin it!