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complot - Page 3

  • Les puissances de l'ombre ?...

    Les éditions du CNRS viennent de rééditer en collection de poche Les puissances de l'ombre - La théorie du complot dans les textes, une passionnante anthologie réalisée par Emmanuel Kreis. L'auteur, spécialiste du complotisme, est professeur à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes. 

     

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    X-files, 11-Septembre, Da Vinci Code... La théorie du complot est de retour. Un phénomène d'engouement collectif inquiétant que cette anthologie permet de décrypter en revenant aux sources du "conspirationnisme". Pour la première fois, voici donc réunis en volume les textes fondateurs de cette tradition, de la Révolution française aux lendemains du régime de Vichy. La théorie du complot repose sur une vision paranoïaque de la société. Ramenant tous les faits à une causalité unique et malveillante, elle propose un système d'explication totale de l'histoire. Complot maçonnique, juif, communiste, spirite ou occultiste, complot contre l'Eglise ou complot de l'Eglise, menées ténébreuses orchestrées par la Synarchie, la Trilatérale ou les "200 familles"... Ou comment, depuis la fin du XVIIIe siècle, la hantise de l'"ennemi intérieur" alimente la violence politique et la persécution des minorités. Un instrument savant pour mieux connaître, et mieux combattre, les discours de haine propagés par les adeptes du complotisme.

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  • Le 11 septembre a-t-il eu lieu ?...

    Les éditions Le Retour aux Sources viennent de publier un ouvrage collectif intitulé Le 11 septembre n'a pas eu lieu, dans lequel on retouve des contributions de Michel Drac, d'Alain Soral et de Pierre Dortiguier notamment. Il s'agit de réfléchir, à l'écart des "vérités" assénées par le système médiatique, à cet événement dont les répercussions géopolitiques ont été considérables...

     

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    "Le 11 septembre 2001 fut une journée historique : voilà un point sur lequel tout le monde s’accorde. Mais quant au sens de cette journée et à la nature réelle de l’évènement qui eut lieu aux USA ce jour-là, il n’existe plus aujourd’hui de consensus.

    Il n’en est pas toujours allé ainsi. Sur le coup, la retransmission télévisuelle imposa le fait avec une telle puissance d’impact que nos esprits furent en quelque sorte sidérés. Personne, au fond, ou disons presque personne, ne pensa immédiatement le 11 Septembre comme un simulacre. Il fallut attendre quelques semaines, et la publication en France du livre de Thierry Meyssan, « L’Effroyable Imposture », pour que l’idée surmonte la fausse évidence de l’image.

    Dix ans plus tard, l’image a perdu son pouvoir de fascination. La place existe, à nouveau, pour l’idée.

    Pour notre part, nous n’en déduisons pas nécessairement que l’on puisse aujourd’hui savoir précisément ce qui s’est passé ce jour-là. Mais une chose nous paraît claire : à tout prendre, les versions alternatives évoquées par les détracteurs de la version officielle ne sont pas plus délirantes que cette dernière. A vrai dire, elles ne peuvent pas être plus délirantes, car avec ses avions de ligne capables d’accomplir des manœuvres physiquement impossibles, ses passeports ignifugés et ses immeubles s’effondrant sans raison architecturalement valables, la version officielle implique un scénario que même Hollywood rejetterait comme ridicule.

    Dans ce contexte, il nous a paru intéressant de proposer au public une sorte de photographie des points de vue dissidents, en France, à l’heure actuelle. Que disent, au juste, les détracteurs de la version officielle ? Comment appréhendent-ils la question ? Quels enjeux posent-ils ? Quelles réponses croient-ils pouvoir apporter, et dans quelle mesure osent-ils avouer leur ignorance ?

    Il ne s’agit pas pour nous de prendre parti. C’est pourquoi nous avons approché des intervenants représentant un éventail aussi large que possible, de la gauche internationaliste à la droite nationaliste, chrétiens, musulmans, religieux ou irréligieux. Si certaines plumes fameuses sont absentes de cet ouvrage, ce n’est pas parce que nous les avons oubliées, mais parce qu’elles n’ont pas trouvé le temps de contribuer à notre démarche.

    A l’exception des questions légales et du classique travail éditorial sur la forme, nous n’avons rien censuré. Il en résulte que des formulations abruptes subsistent ici ou là, au fil des pages. Tant mieux : nos lecteurs doivent s’attendre à être choqués.

    Au moins cet ouvrage aura-t-il ainsi le mérite de permettre aux dissidents, issus de courants très divers, de se découvrir mutuellement. C’est en tout cas l’ambition que nous lui avons assigné."

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  • L'holywoodisation de la politique...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par François-Bernard Huyghe au site Info Syrie dans lequel il analyse les méthodes de désinformation utilisées par l'Occident.

     

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    "On assiste à une hollywoodisation de l'information..."

    -La désinformation a longtemps été considérée, chez nous, comme une réalité essentiellement soviétique. Quand commence-t-on à prendre conscience d’une désinformation « à l’occidentale » ?

    -F.-B. Huygue : La désinformation soviétique était une désinformation de services secrets et s’exerçait via des supports classiques comme la presse écrite, ou les documents écrits – qu’on se souvienne par exemple des faux carnets secrets d’Hitler ; la désinformation occidentale a, bien sûr, toujours existé. On a en simplement réalisé toute l’ampleur avec la première guerre du Golfe où il y avait, via CNN, un monopole américain de la représentation du conflit : en bref, si les Irakiens voulaient se voir mourir, il fallait qu’ils regardent CNN. Les autorités américaines tenaient là leur revanche de la guerre du Viet Nam, où ils avaient, en quelque sorte, été trahis par leur propre presse, qui relayait à l’envi toutes les atrocités et bavures commises par l’armée américaine, et qui se livrait, dans les faits, à une véritable campagne de démoralisation de cette armée. Rien de tel en Irak où la presse a collaboré avec l’institution militaire, qui délivrait les accréditations aux journalistes « embeded » – intégrés aux unités militaires et littéralement commandés par les « communication officers« . On s’est vite rendu compte que l’énorme couverture médiatique de cette guerre n’a absolument pas empêché la floraison – et la diffusion mondiale – des bobards de guerre, comme le plus gros canon (irakien) du monde, la marée noire provoquée par Saddam, les bébés koweiti sous couveuse débranchés par les soldats irakiens, sans parle du statut flatteur de « quatrième armée du monde » décerné à l’unanimité de la presse occidentale aux troupes de Saddam Hussein. Au même moment – 1990-91 -, le bloc de l’Est s’effondre, ce qui donne à l’Ouest, et singulièrement aux Américains, le monopole de la désinformation d’échelle universelle.

    Bien sûr, toutes ces manip’s ont été assez vite décelées, dénoncées, analysées ; j’ai moi-même participé à nombre de colloques où l’on s’est penché sur cette désinformation made in USA. Ce qui n’a pas empêché l’intox de se poursuivre, notamment lors de la deuxième guerre du Golfe en 2003 avec les fameuses et imaginaires « armes de destruction massive  » de Saddam. De toute façon, la désinformation, ça ne marche qu’a une seule et unique condition : si elle répond aux attentes du récepteur ; bref, la désinformation ne peut se faire qu’avec le consentement de l’opinion, qui n’a ni le temps ni l’envie de remettre en cause ses préjugés sur telle ou telle question. Et plus le public aura été préparé psychologiquement par les médias, plus il réagira comme le souhaitent les manipulateurs : on est donc là en présence d’un cercle assez vicieux.

    La désinformation est, aujourd’hui et maintenant, essentiellement liée à ce que mon maître Régis Debray désigne comme « vidéosphére » : tout passe par l’oeil de la caméra qui a de plus en plus tendance à « scénariser » l’information, avec ce qu’il faut de drames, de « gentils » évidents et de « méchants » indéfendables. On assiste depuis vingt ans, sous l’influence des moyens et de l’idéologie des Américains, à une hollywoodisation de l’actualité, où l’Amérique et ses alliés sont, bien sûr, les bons et des gens comme Saddam Hussein, Milosevic, Ahmadinejad, Kadhafi – Poutine dans une certaine mesure – et, plus récemment, Bachar al-Assad sont les méchants de ce film.

    Ce phénomène est porté encore par deux grands événements : d’abord la démocratisation de l’information par internet pour faire circuler, ou même fabriquer, de l’information, ou de la désinformation. Tout le monde peut se connecter à tout le monde en un  temps record. Ca peut donner les mots d’ordre et convocations à des manifs politiques lancés par de jeunes Tunisiens et Egyptiens sur Facebook et Twitter. Evidemment, l’impact du message d’un individu va être néanmoins fonction des moteurs de recherche, ou des communautés disposées à relayer ce message.

    Ensuite il y a ce phénomène contemporain que j’appellerai le scepticisme de masse : s’il se passe par exemple un événement comme le 11 septembre, il peut se trouver beaucoup de gens pour nier sa réalité, parler de complot et de trucage. Cette négation, cette méfiance sont nourris par la désidéologisation, la fin des grands récits idéologiques (communisme, libéralisme triomphant), le discrédit des discours officiels. L’atomisation des sources de l’information – on n’est plus à l’époque où le 20 heures de Poivre d’Arvor était une grand-messe fédératrice de l’information – facilite les discours et interprétations dissidents : l’internaute est seul devant son écran, séparé du monde par lui et il peut, plus facilement, se fabriquer son propre univers, sa propre info.

    On aurait pu croire que cette méfiance, cette prise de distance d’avec les vérités médiatiques assénées aurait un effet positif, dans le sens d’un meilleur esprit critique du citoyen, qui n’accepterait plus les bobards d’antan. Eh bien pas du tout ! Les bobards existent plus que jamais, et si d’aventure ils sont découverts, il est trop tard, comme en Irak. Et surtout, il existe une désinformation par le scepticisme : on nie les évidences, au profit de thèses conspirationnistes ou carrément fantaisistes, impliquant jusqu’aux extra-terrestres.

    Et puis il y a internet, arme à double tranchant ; d’un côté on a, notamment aux Etats-Unis, des enquêteurs du web très consciencieux et sérieux : ce sont par exemple des internautes américains qui ont démonté la supercherie de la liesse populaire au moment du renversement de la statue de Saddam à Bagdad, en montrant les camions qui avaient acheminé la poignée de manifestants encadrés par les G.I.’s. Mais d’un autre côté, ce scepticisme de masse peut être exploité par une foultitude de complotistes et de détraqués pour qui, comme dans la série des X-Files, « la réalité est (forcément) ailleurs« .

    Et puis, bien sûr, des puissances politiques ont intérêt à la désinformation. En cette ère de l’image, il est devenu essentiel de décrédibiliser les images fournies par le camp opposé. L’exemple qui me vient à l’esprit est celui de cet enfant palestinien tué dans les bras de son père par des balles israéliennes au cours de la seconde intifada ; cette image terrible est devenue une icône pour la cause palestinienne ; à tel point que des spécialistes des services israéliens se sont acharnés à la décrédibiliser en faisant une sorte de révisionnisme, en affirmant que les images de la mort de l’enfant ont été truquées en arguant de l’angle de tir, de la nationalité palestinienne du cameraman ayant filmé la scène, en parlant d’ombre impossible, etc.

    La vérité devient d’autant plus difficile à cerner et à imposer que, dans un monde divisé et compliqué, il peut y avoir de vrais complots, de même qu’un paranoïaque peut faire l’objet d’une vraie persécution ! Et puis, circonstance aggravante de la confusion, on peut mentir pour une cause vraie ou justifiée : il y a certainement eu des bilans exagérés de morts du côté palestinien, il n’empêche que Tsahal tue des civils palestiniens et que la cause palestinienne est éminemment défendable.

    -Voilà qui nous amène à la Syrie, avec cette histoire de lesbienne damascène persécutée par le pouvoir qui se révèle être un Américain barbu de 40 ans installé en Ecosse..

    -FBH : Exactement, ce type en substance a expliqué qu’il avait menti, mais pour témoigner d’une réalité vraie ! On pourrait bien sûr parler de la fausse démission de l’ambassadeur de Syrie dont on a (mal) imité la voix. Et les fameux réseaux sociaux sont souvent des amplificateurs de trucages ou de fausses nouvelles. On ne peut pas dire que la corporation des blogueurs sorte renforcée de cette histoire. En ce qui concerne les journalistes professionnels qui répercutent ces montages, il faut dire à leur décharge relative qu’ils travaillent souvent dans des conditions d’urgence, avec des moyens limités, qui ne leur permettent pas de vérifier dans les délais voulus l’authenticité d’une nouvelle.

    -Mais, tout de même, il y a des ressorts idéologiques ou géopolitiques à la désinformation, en Syrie comme ailleurs…

    -FBH : Bien sûr ! L’idéologie, c’est quand les réponses précèdent les questions, comme disait Althusser. L’idéologie, c’est une interprétation de la réalité, qui nous structure, et la vie serait probablement invivable sans idéologie. En Occident, la majorité des gens fonctionnent avec ce que j’ai pu appeler la « soft-idéologie », minimaliste car réduite aux droits de l’homme et à une liberté abstraite, et basée sur le principe qu’il n’existe pas d’alternative au système et à ses valeurs. Du coup, en Syrie, comme en Tunisie ou en Egypte, le consommateur d’infos occidental va spontanément se ranger du côté des manifestants luttant pour la « liberté », surtout si ces manifestants par leur côté jeune et branché ou au moins « démocrate » ont un air de parenté avec les Occidentaux, et que les régimes auxquels ils s’opposent paraissent dictatoriaux, archaïques ou au moins psychorigides. L’identification est d’autant plus facile chez l’internaute français ou anglais qu’il lui suffit d’un clic pour s’associer, sans trop de risque, au mouvement. Et puis on ne sait pas – et on ne réfléchit pas – au type de régime que pourraient mettre en place ces manifestants : il se peut, en Egypte comme en Tunisie – comme en Syrie aussi – que les insurgés portent finalement au pouvoir des islamistes du type Frères musulmans, pas vraiment « cools » d’un point de vue jeuniste occidental !

    Mais si on objecte ça l’opinion dominante a tôt fait de vous faire passer pour un salaud soutien des dictateurs, ou désinformateur au service du Baas (par exemple), risque que je prends moi-même en ce moment en vous disant ceci sur votre site (rires). Mais encore une fois, on est confronté à un phénomène d’hollywoodisation de l’info, les blogueurs, mais aussi les médias »sérieux », étant de plus en plus dans le storytelling, la belle histoire avec une fin édifiante qui verrait la victoire des « gentils » sur les « méchants ». Et tant pis pour le manichéisme, le refus de la complexité du monde.

    -Il y a aussi certainement chez les journalistes un tropisme du changement, une forme de « bougisme » appliqué à l’actualité internationale…

    -FBH : Sans aucun doute. Mon ami le chercheur en médiologie Daniel Bougnoux a résumé le problème des médias par cette formule trinitaire : « l’argent-l’urgent-les gens ». L’argent, c’est l’exigence de la rentabilité et d’un bon taux d’audience ; l’urgent, c’est la disponibilité réduite, brève, de l’attention du public, et la brièveté croissante du délai d’enquête ou de vérification dont dispose le journaliste, dans un monde de concurrence exacerbée et accélérée ; les gens, c’est les journalistes, milieu réduit et fort différent, dans son mode de vie et ses opinions, du reste de la population : il y a une déformation globale et importante de la vision du monde et de la société qu’a la caste médiatique par rapport à celle de la population « moyenne ».

    -Pour en revenir à la Syrie, percevez-vous dans le traitement médiatique de l’actualité de ce pays des zones d’ombre, de la désinformation d’obédience ou d’origine américaine ? La version « standard » de manifestants à mains nues affrontant un pouvoir surarmé et brutal est-elle crédible ?

    -FBH : Moi, je ne doute pas que le régime baasiste soit capable d’ordonner à sa police de tirer. Cela dit, il est évident que des questions se posent, et des remarques s’imposent. D’abord, c’est une révolte contre des chiites, ce qui fait bien l’affaire de certains pays, musulmans mais pas chiites, surtout quand des tentatives de déstabilisation de l’Iran ont fait long feu. Tout ça ne prouve pas que Damas soit victime d’un complot saoudien ou américain, mais il est permis de se poser des questions. Et puis il y a ce problème récurrent, en Occident, du « deux poids, deux mesures » : on s’indigne de la répression en Syrie, et on passe sous silence celle pratiquée au Bahrein par l’armée saoudienne qui a étouffé le mouvement populaire menaçant la dynastie alliée à Ryad (et à Washington).

    -Que pensez-vous des affirmations du gouvernement syrien faisant état de la mort de militaires et policiers tués par des insurgés armés ? On a vu des cadavres en uniforme, à Jisr al-Choughour, dans le nord du pays…

    -FBH : Il m’est difficile d’être affirmatif, chacun fait sa propagande. Maintenant il n’est pas du tout impossible que les troupes de Damas se soient heurtés à des insurgés armés islamistes. Et si groupes armés il y a, ils sont forcément soutenus par des puissances étrangères : mon père a été résistant, il recevait ses armes des Anglais ! Mais pour les médias occidentaux, il vaudra mieux – toujours dans le cadre du storytelling édifiant et politiquement correct – tourner l’objectif vers des civils jeunes et désarmés, plutôt que sur des barbus en armes. Dans le cas des soldats apparemment tués à Jisr al-Choughour, on se retrouve dans le cas de figure suivant : la méta-propagande occidentale dit que les images syriennes sont de la propagande ! Ca me rappelle tout à fait cet épisode de la guerre de l’OTAN contre la Serbie quand Milosevic a reçu Ibrahim Rugova, figure de proue des Albanais du Kosovo, et dont les médias occidentaux avaient fait une sorte de Gandhi balkanique. Quand la télévision serbe a diffusé les images de cet entretien, pourtant bien réel, entre le « Gandhi » albanais et l’ »Hitler » serbe, l’OTAN a décrété qu’il s’agissait d’un montage, Rugova étant certainement au fond d’une geôle serbe : toujours ce besoin de décrédibiliser les images de l’adversaire.

    Il est vrai qu’il est de plus en plus difficile au citoyen-téléspectateur moyen de s’y retrouver, la confusion et les contradictions, sinon l’imposture, sont partout : regardez Barak Obama, que nos médias ont « vendu » comme un mix de John Kennedy et Martin Luther King, on lui a décerné le prix Nobel de la Paix, moyennant quoi il envoie 50 000 G.I.’s en Afghanistan, avant ensuite d’annoncer un début de retrait américain dès cet été. A propos de l’Afghanistan, tout le monde sait, à commencer par les militaires, que c’est une guerre perdue. Mais les Etats occidentaux continuent officiellement d’entretenir la fiction d’une mission démocratique difficile, certes, mais qui doit être poursuivie. Ca aussi c’est de la désinformation, ou de la fuite en avant.

    -Depuis le temps que vous travaillez sur les médias et les manipulations qu’ils peuvent relayer, n’êtes-vous pas découragé ? La vérité, ou la dénonciation du mensonge, enseignent-elles vraiment ? Il y a eu l’Irak (deux fois), la Serbie, l’Iran, la Côte d’Ivoire et, aujourd’hui, la Libye et la Syrie, pays qui ont en commun d’être ou d’avoir été en butte à l’hostilité occidentale et d’avoir suscité un discours officiel et unanimiste dans les médias, dont beaucoup des termes se sont avérés faux. Bref, la désinformation continue, en dépit des travaux et colloques, en dépit de la contre-information parfois disponible sur internet…

    -FBH : Oui, la désinformation continue, parce que c’est une arme politique et géopolitique. En ce qui concerne les médias, on doit incriminer, comme je l’ai déjà dit, les exigences d’un métier confronté de plus en plus à la concurrence et à la rapidité ; on doit aussi pointer la paresse et le conformisme idéologique de nombre de journalistes. Au fond qui fabrique l’info, en matière de politique étrangère ? Il y a les conseillers de la Maison Blanche, les « spin doctors » qui donnent souvent le la aux chancelleries – et aux médias – occidentaux. Et parfois ces spin doctors n’agissent pas, ou pas seulement, pour la grandeur et la sécurité de l’empire américain : entre autres, le conseiller aux affaires étrangères du candidat républicain John MacCain était payé par les Georgiens, des alliés stratégiques de Washington dans le Caucase. Et Dick Cheney, l’éminence grise néoconservatrice de George Bush Jr, un des grands artisans de la guerre d’Irak, avait des intérêts dans les entreprises travaillant à la reconstruction du pays, après la chute de Saddam Hussein…

    Reste que, en dépit de tous les moyens employés à faire passer le message officiel dans les opinions, les promoteurs de la propagande disons « occidentale » sont soumis aux aléas de la démocratie d’opinion sur laquelle ils s’appuient : en clair, les « croisés de la Vertu », en Libye, en Afghanistan ou ailleurs, ont des obligations de résultats rapides. Car l’opinion occidentale se lasse vite, et pratique, comme les journalistes d’ailleurs, le « zapping » géopolitique. Si Kadhafi tient encore deux ou trois mois, par exemple, que pourra faire la coalition ? Pour en revenir au dossier syrien, on est bien obligé de constater une absolue concordance entre les buts géostratégiques américains et les mots d’ordre, campagne de presse et discours qu’on nous assène, de laCôte d’Ivoire à la Syrie en passant par l’Iran, le Soudan ou la bande de Gaza.

    -Une dernière question : quel pourrait être le prochain pays à susciter une désinformation ?

    -FBH : L’Iran me paraît demeurer un bon « client » pour ça.

    -François-Bernard Huyghe, nous vous remercions.

     

    Propos recueillis par Info Syrie (23 juin 2011)

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  • La théorie du complot...

    Daniel Vernet, ancien directeur de la rédaction du Monde et spécialiste des relations internationales, publie ces jours-ci aux édition Alphée, dans la collection Manipulation & désinformation, un ouvrage intitulé La théorie du complot - une histoire américaine, dans lequel il revient sur l'usage systématique du mensonge et de la désinformation qu'ont fait les Etats-Unis dans la conduite de leur politique étrangère depuis le XIXe siècle.

     

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    "Le mensonge d’Etat est une manière de gouverner, pratiquée et parfois justifiée par de nombreux officiels américains, y compris des présidents.
    L’auteur nous montre à travers l’histoire des USA combien ce procédé est récurrent depuis le déclenchement de la guerre du Mexique au XIXe siècle, jusqu’à celui de la « Guerre » de Bush fils au XXIe siècle ! En spécialiste de la politique internationale il nous dévoile comment sont parfois présentés les évènements, en les auréolant d’un mythe, au mépris de leur véritable réalité. Ainsi l’accord de Yalta supposé marquer l’aboutissement des principes des Pères fondateurs appliqués à la politique internationale, alors qu’en réalité, il ouvre la voie à un monde coupé en deux blocs idéologiques et militaires.
    Sont évoqués la persécution des « China Hands » par les ­maccartystes, l’affaire de la baie des Cochons masquant un accord secret entre ­Kennedy et Krouchtchev, les faux incidents du golfe du Tonkin qui, en août 1964, serviront de justification à l’extension de la guerre du Vietnam, l’Irangate, sans doute l’opération de politique extérieure la plus ­spectaculaire des deux mandats de Ronald Reagan, jusqu’au lancement de la guerre en Irak par Bush junior pour terminer le travail de son père, et sous prétexte d’armes de destruction massive. Toutes ces affaires ont été montées en marge de toute légalité, et ont impliqué les plus hautes autorités américaines dans une entreprise systématique de mensonge."

     

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  • La nature du pouvoir...

    L'historien italien Luciano Canfora, spécialiste de l'antiquité et auteur d'une biographie de César intitulée Le dictateur démocrate, publie chez Les Belles Lettres un ouvrage de réflexion polémique sur la démocratie, intitulé La nature du pouvoir. Il dénonce, en particulier, l'existence, derrière le paravent démocratique, de groupes oligarchiques qui détiennent la réalité du pouvoir...

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    "Le livre fait se croiser des mythes classiques avec des événements et des personnalités de l'histoire contemporaine, en une démarche cohérente et raffinée. Se saisissant de Périclès, Staline, Démosthène, Napoléon et beaucoup d'autres, Canfora propose une vision de l'antiquité grecque et romaine qui forge des archétypes valables en tout temps, et aide à la compréhension de la dynamique politique contemporaine.
    Son analyse commence par une question - où est le pouvoir ? Est-il véritablement incarné par des personnalités publiques connues de tous ou par d’autres cachées, invisibles ? Et, par conséquent, où nous mène l’affirmation de l'existence d'une dichotomie entre un pouvoir visible et un pouvoir occulte. C'est-à-dire, d’un côté, il y aurait la liturgie "de la démocratie», avec tous les styles, de propagande, de dialectique et de célébration des élections législatives, et de l’autre, le pouvoir des lobbyistes et d’une élite privée. Le principe qui imprègne la voie tracée par Canfora est que chaque État, qu’il soit tyrannique ou démocratique, est fondé sur la force et est, comme Gramsci l’a écrit dans son essai sur la mort de Lénine, «dictature». En outre, ajoute notre auteur, sous quelque forme de gouvernement et même en démocratie, le pouvoir réel est caché de la plupart des gens et est arbitré dans les coulisses, loin des projecteurs de la scène de la politique officielle, par certaines minorités mues par des intérêts particuliers .
    Par conséquent, en citant la critique de la démocratie de Ugo Spirito, Canfora déclare qu '«il n’existe pas de régime démocratique, mais qu’il existe autant de types de démocraties qu'il y a de minorités capables de guider les majorités » : démocraties ploutocratique, démocraties cléricales, démocraties militaires, démocraties syndicalistes, jusqu’à un produit contemporain typiquement italien, la démocratie fondée sur la parole télévisuelle et la transformation du citoyen en "objet-consommateur-frustré» (pp. 62-63). La tyrannie, note Canfora, ne diffère pas beaucoup de ces démocraties élitistes : en effet, que ce soit un régime tyrannique ou démocratique, le pouvoir est de plus en plus la domination de quelques-uns sur tous. Les tyrans, dit l'auteur, ne sont pas des personnages isolés que la cupidité, l'ambition personnelle ou un désir effréné du pouvoir a conduit à dominer les autres. Ils sont plutôt le résultat et l'expression d'une élite - sociale, financière ou militaire qui le détient, et qui, en grande partie, l’utilise pour poursuivre ses intérêts particuliers. C'est pourquoi le tyrannicide continue Canfora, est totalement inutile et se révèle souvent contre-productif. « Le vrai problème est que le tyran est une invention, une création politico-littéraire. »
    Quand sa puissance se révèle durable, on doit raisonnablement admettre que le «tyran» (terme imprécis et hyperbolique) a un poids plus ou moins grand sur la société. Donc le problème est de le vaincre politiquement et non de détruire l'individu. Le Tyrannicide est, à bien y regarder, un sous-produit du «culte de la personnalité», de l’évaluation disproportionnée d’une seule personne (p. 52).
    A l’appui de sa thèse, Canfora cite deux exemples classiques du tyrannicide: le meurtre d'Hipparque, qui est devenu un mythe fondateur de la rhétorique démocratique athénienne, et le complot contre Jules César. Dans les deux cas, l'élimination physique du tyran présumé n'a pas comblé les attentes des conspirateurs, ni n’a permis à l'état de revenir aux conditions sociales et politiques qui ont précédé le début de la tyrannie. Lire l'essai de Canfora semble suggérer que la figure du tyran ne doit pas être considérée toujours et nécessairement comme «négative», de même que la démocratie parlementaire, en tant que forme possible d'une élite, ne doit pas être considérée toujours et nécessairement comme «positive» . C'est un argument fort, à bien des égards problématique, qui a donné et continuera de donner lieu à des réactions et des débats, et qui, par conséquent, a le mérite de stimuler, une fois de plus, la réflexion et l'échange d'idées."
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  • Sous la Cagoule...

    Le éditions Dualpha semblent entamer la réédition des Cahiers Libres d'Histoire de Jean-Claude Valla. Cette bonne idée permet d'ores et déjà de retrouver en librairie le premier tome de la collection qu'il avait consacré à la Cagoule. Avec La Cagoule  1936-1937, Jean-Claude Valla resitue l'histoire de cette organisation secrète de résistance au communisme dans le contexte complexe de la crise politique du milieu des années 30. Les portraits qu'il dresse de ses dirigeants, des patriotes, qui s'étaient généralement illustrés au cours de la guerre de 14-18, sont passionnants. On retiendra, en particulier, celui d'Eugène Deloncle, son organisateur, qui mourra le 7 janvier 1944 sous les balles de la Gestapo.

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    "Que sait-on de l’Organisation Secrète d’Action Révolutionnaire Nationale (OSARN), plus connue aujourd’hui sous le nom de Comité Secret d’Action Révolutionnaire (CSAR) ? Quels objectifs poursuivait son fondateur, Eugène Deloncle ? Faut-il distinguer une « Cagoule civile » d’une « Cagoule militaire » ? Y a-t-il eu manipulation de la part du Deuxième bureau de l’État-major ? Les cagoulards n’ont-ils été que des comploteurs maladroits et mythomanes ?

    Rares sont les ouvrages consacrés à cette organisation secrète créée au début de l’été 1936. Et tous s’en tiennent peu ou prou à la thèse, soutenue par Marx Dormoy, ministre de l’Intérieur du Front populaire, d’un gigantesque complot ourdi contre la République et si brillamment déjoué… Pendant l’Occupation, surtout après l’assassinat de Marx Dormoy, cette thèse fut relancée par une poignée de socialistes résistants qui accusèrent les cagoulards d’avoir réussi en 1940, dans l’ombre de Pétain et grâce à la victoire allemande, le coup d’État qu’ils avaient raté en 1937.

    L’histoire de la Cagoule est ainsi déformée. Bien entendu, Deloncle et ses amis n’étaient pas des enfants de chœur. Ils détestaient le Front populaire dont ils estimaient que la politique affaiblissait la France, et n’avaient que mépris pour la démocratie. Mais c’étaient d’ardents patriotes. Le seul complot qui les ait obsédés est celui dont ils prêtaient l’intention aux communistes et qu’ils espéraient écraser dans l’œuf avec le concours de l’Armée.

    Cette hantise d’une révolution bolchevique a de quoi surprendre aujourd’hui, parce que nous savons, grâce aux archives soviétiques, que Staline n’avait pas l’intention, à ce moment-là, de prendre le pouvoir en France. Mais, à l’époque, toute la presse de droite, alors puissante et influente, ne cessait de dénoncer le danger d’un putsch communiste.

    Voilà pourquoi l’histoire de la Cagoule méritait d’être revisitée. Jean-Claude Valla le fait sans concession à l’idéologie dominante et avec un grand souci d’objectivité. Il démontre comment les historiens, prisonniers des mythes et se recopiant souvent les uns les autres, ont réussi à renverser la perspective et à travestir la vérité."

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