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  • Dominique Venner - Une pensée, une œuvre, un destin... (3)

    Vous pouvez découvrir ci-dessous le deuxième volet d'un long entretien avec Dominique Venner, réalisé par Philippe Conrad, Philippe Milliau et Jean-Yves Le Gallou entre le 27 et le 28 février 2013.

    Dans cette partie, Dominique Venner évoque avec Philippe Milliau l'esprit qui animait les créateurs d'Europe-action...

     

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  • « Le malheur identitaire est plus grave que le malheur économique »...

    Nous reproduisons ci-dessous le deuxième partie de l'entretien avec Hervé Juvin, publiée sur le site du Figaro et consacrée à la question de l'identité.

    Première partie de l'entretien : La fin de la mondialisation

     

    Ecologie des civilisations.jpg

    «Le malheur identitaire est plus grave que le malheur économique»

    Figarovox: Vous défendez une «écologie des civilisations». Il faudrait donc protéger la diversité des peuples comme on assure la protection des espèces menacées? N'est-ce pas artificiel?

    De plus en plus de voix s'élèvent pour défendre la biodiversité végétale et animale au nom d'un principe essentiel: quand on supprime des espèces, pour ne plus cultiver que la variété qui vous semble la plus performante, on s'expose au risque de la voire disparaitre. C'est la diversité qui fait la survie. Si on réduit cette diversité, on s'expose au risque de la disparition de l'espèce. Je ne vois pas pourquoi on n'aurait pas la même réflexion au sujet de la diversité des espèces humaines.

    Peut-être parce que les humains ne sont pas des plantes, et que distinguer entre différentes espèces humaines conduit au biologisme le plus douteux…

    Je ne suis pas essentialiste ni racialiste. Je crois que les tribus, les sociétés, les civilisations, peuvent évoluer. Et elles évoluent, même celles que l'on disait «primitives» ; mais elles mettent le temps. Elles ont aussi parfaitement le droit de conserver leurs modes de vies. Mais ce qui est propre à notre époque, c'est qu'on oblige l'évolution de force, par le haut, au nom de l'irréductible marche en avant du «Progrès», et non pas par une évolution spontanée. J'ai eu la chance de pouvoir fréquenter des sociétés qui, tout en restant en marge de l'économie monétaire telle que nous la connaissons, vivent dans un parfait équilibre et une harmonie avec leur environnement. Au nom de quoi les ferait-on basculer brutalement dans un modèle qui ruine leurs structures sociales, leur insuffler des rêves de 4x4, d'air conditionné et de grands écrans?

    La culture met du temps. Est-ce un drame si tous les Français parlent anglais dans un siècle? Je ne sais pas. Ce qui est un drame en revanche, c'est d'obliger des salariés français à Paris aujourd'hui dans les grandes entreprises à parler anglais. C'est accepter la colonisation anglo-américaine. Ce qui est grave, c'est le rapport du conseiller d'Etat Tuotqui demande aux Français de s'adapter aux nouveaux venus. Partout dans le monde c'est à celui qui rentre dans une maison de s'adapter aux mœurs de cette maison! Je suis personnellement opposé au port du voile dans l'espace public français, mais pas une minute je n'imaginerais exiger d'une femme qu'elle circule non voilée en Iran! De la même manière je dénie tout droit à l'Arabie saoudite et à l'Iran de se mêler de la manière dont on s'habille en France!

    Le multiculturalisme est-il forcément une illusion dangereuse qui conduit à la violence?

    Pierre-André Taguieff a montré récemment que le multiculturalisme, présenté comme le modèle obligatoire de toute société -de manière assez agressive par les Américains - peut aussi engendrer la violence. Regardez les taux de criminalité au Brésil, société multiculturelle par excellence. Idem pour l'Afrique, première zone au monde pour l'immigration intérieure: 100 à 180 millions d'Africains vivent hors de leur pays natal, expulsés par la guerre, la misère, la nécessité de trouver un travail. Résultat: l'Afrique est un des continents les plus violents au monde. Regardez ce qui se passe au Liban! Les sociétés multiculturelles sont les plus violentes au monde.

    A l'occasion du Mondial de foot, on a pu assister en France à des manifestations d'appartenance de la part d'Algériens français, ce qui a été très mal vécu par les «indigènes»…Que vous inspire cette situation française?

    Que des gens défilent avec le drapeau algérien par fierté de la victoire, c'est parfaitement compréhensible, mais la casse et la délinquance sont inexcusables. Il y a eu des bâtiments publics où des drapeaux français ont été remplacés par des drapeaux algériens.

    La solution n'est pas de supprimer la double nationalité, question complexe dont toute solution brutale créerait des drames familiaux et des déchirements personnels terribles - et serait inapplicable. N'oublions pas que l'Algérie, c'était quatre départements français! Le problème est ailleurs ; comment rendre plus attractive «l'identité de la France», sinon en reparlant de puissance et d'indépendance? Depuis des décennies, aucun parti de gouvernement n'ose parler de l'identité de la France, des frontières de l'Europe, du fait que s'il y a des gens qui peuvent légitimement aspirer à devenir français ou européens, il y a aussi des gens qui n'ont pas leur place en Europe. Pour le général de Gaulle, Léon Blum et Jaurès, le mot «français» avait un sens. Aussi bien la gauche que la droite ont fait l'impasse sur ce sujet.

    Très clairement je comprends des affirmations identitaires choquantes comme celles des algériens français ou de l'islam: si on a un islam conquérant en France, que des jeunes français et de jeunes françaises se convertissent à l'islam radical, que des jeunes des cités sortent dans la rue avec des drapeaux algériens, c'est parce que ce sont les seuls vecteurs d'affirmation collective face à la faiblesse identitaire des affirmations chrétiennes et françaises. Je rapporte dans mon livre cette anecdote: une jeune fille de 12 ans, interpellée par les conversions de ses camarades d'école qui choisissent le voile, demande à sa mère «Et nous, nous sommes quoi?» La mère, cadre supérieure d'une entreprise bancaire lui répond, spontanément: «Nous, nous ne sommes rien», voulant dire par là qu'elles étaient laïques, ne dépendant d'aucune religion, libres. Mais ce rien est significatif. La nature a horreur du vide. Et l'Islam est une réponse forte à cette souffrance identitaire qui nous hante.

    Un nombre significatif de français se sentent «exilés de l'intérieur», ont le sentiment que leur identité même est en jeu. Or le malheur identitaire est plus grave que le malheur économique. Beaucoup de peuples vivent dans une relative pauvreté, mais à partir du moment où il existe une forte fierté nationale et une forte identité collective, ces peuples vivent bien.

    Par exemple?

    La Russie. On peut dire ce qu'on veut du président Poutine, reste qu'il a des taux de popularité à faire pâlir d'envie la plupart des dirigeants occidentaux: si il y avait une élection aujourd'hui il serait élu par 80 % des Russes! Il a su restaurer la fierté patriotique et les Russes lui en sont très reconnaissants! L'homme le plus détesté de Russie, c'est Gorbatchev, qui a bradé l'empire, et la personne la plus respectée, c'est Staline… De quoi réfléchir sur la permanence de l'aspiration à la puissance et la liberté des peuples!

    Certes, mais Poutine a surtout sorti la Russie de 10 années de désastre économique et su renouer avec la croissance… Ne sous-estimez-vous pas le facteur économique, et notamment l'impact de la crise économique en Europe?

    Je ne sous-estime pas le facteur économique, je crois au contraire que l'ultra-libéralisme économique est un facteur décisif de destruction des structures sociales. Depuis les années 90, on va vers une paupérisation de la classe moyenne, et le marché du travail internationalisé est en train de casser les situations protégées, la concurrence internationale se traduisant par une baisse des rémunérations. Nous ne sommes qu'au début de ce nivellement par le bas. Jusqu'où ira-t-il? Pas jusqu'à l'alignement des salaires de l'ouvrier français sur l'ouvrier indien: les peuples ne se laisseront pas faire. Nous sommes en train de vivre un retour de l'esclavage pensé et organisé par le grand capital (expression qui peut paraitre désuète mais qui est toujours appropriée). Le capitalisme financier aspire à faire des hommes des marchandises comme les autres, sans revenu minimum ni protection sociale.

    L'immigration de masse servirait donc les intérêts du capitalisme…

    L'ultra-libéralisme a besoin de l'immigration. Le capitalisme mondialisé est favorable à la libre circulation des capitaux, des biens et services et aussi des hommes, qui sont une marchandise comme une autre. L'Europe est la région du monde la plus ouverte, aux mouvements des capitaux, des biens et aussi des hommes: il est plus dur d'avoir un visa pour les Etats-Unis que de pénétrer l'espace Schengen! Parce qu'elle est incapable de définir son identité, l'Europe a renoncé à définir ses frontières.

    Outre le marché, vous dénoncez l'emprise hégémonique du droit dans nos sociétés, devenu l'unique moyen de la reconnaissance. En quoi le droit accompagne-t-il ce projet de grande séparation?

    Aujourd'hui l'individu se définit d'abord comme un détenteur de droits. C'est une évolution assez récente. C'est dans les années 70-80 qu'on a commencé à vouloir traduire en droit positif les droits de l'homme. Jusque-là, la déclaration des droits de l'homme et du citoyen était de nature purement symbolique, personne ne se souciait de leur donner une application concrète. La rupture, en France date de la décision du conseil constitutionnel du 16 juillet 1971, qui fait du juge constitutionnel le garant des libertés fondamentales qui acquiert ainsi la capacité de se poser en censeur de loi votée par le parlement français. La représentation populaire peut vouloir une loi, la décider, que le Conseil constitutionnel peut censurer au nom des «droits de l'homme». C'est un recul de souveraineté et de démocratie considérable.

    Mais n'a-t-on pas besoin des droits de l'homme pour se garantir de la «tyrannie de la majorité»?

    Je suis tout à fait d'accord pour ne pas donner à une majorité le droit de persécuter les minorités. Il faut qu'il y ait des garde-fous. Mais de garde-fous en garde-fous, on est allé trop loin, jusqu'à accorder des droits à l'individu contre la société et contre toute communauté. On a déifié l'individu et affaibli l'Etat. Or, les droits de l'individu ne peuvent être respectés que si il existe une société politique pour les protéger. Il n'y a pas d'individus s'il n'y a pas de Léviathan pour garantir leurs droits. Si on détruit la société, l'Etat, il n'y aura plus de droits de l'homme parce qu'il n'y aura plus d'autorité pour les honorer. C'est le retour à la jungle, qui est le lot d'une partie du monde économique actuel. On a vu des ouvriers envoyer des messages d'appel à l'aide sur des étiquettes de jeans qu'ils fabriquent à des prix scandaleux. Le trafic d'organes, les mères porteuses, les millions de réfugiés prêts à travailler pour des salaires de misère: tout cela traduit un retour effectif de l'esclavage dans nos sociétés, où au nom des droits illimités de l'individu, l'Etat disparait au profit de la loi du plus fort. L'individualisme absolu aboutit à son contraire: un recul en arrière des libertés concrètes et un retour de l'esclavage. Je n'en doute pas, refaire la Nation, refaire le régalien, fait partie des tâches politiques les plus urgentes pour éviter la détresse identitaire et sociale, qui conduit toujours à la violence.

    Hervé Juvin (Figarovox, 4 juillet 2014)

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  • Névrose psy ?...

    Les éditons Favre viennent de publier Névrose psy, un essai d'Alain Valterio. Psychologue et analyste suisse d'obédience jungienne, l'auteur déclare chercher à faire avancer ses patients et récuser toute forme d'aide qui maintient l'individu dans un état de dépendance et exacerbe son ego dans la plainte, au lieu de lui fournir les outils pour s'en sortir.

    On peut écouter un entretien avec l'auteur sur LFM, une radio de Lausanne : Et si la psychanalyse nous rendait malade ?

     

     

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    " La thérapie est partout, dans la boîte de médicaments qui est sur notre table de nuit, dans le vocabulaire que nous employons, dans le séminaire sur la motivation dispensé dans le cadre de notre entreprise, dans nos lectures, dans les jugements que nous émettons sur les autres, dans notre manière d'analyser les situations, dans le regard que nous portons sur la vie..., en un mot elle est dans notre tête. Tout le monde est plus ou moins thérapeute ! Il semble bien que cette névrose psy (baptisée psyrose pour dénoncer son caractère angélique et complaisant), soit le fait d'une catégorie d'adultes qui ont peur de grandir et se font un devoir absolu d'écouter avant tout " l'Enfant " : à la fois celui qu'ils sont censés éduquer mais aussi leur propre " Enfant Intérieur ". Avec la psyrose, le plus faible a toujours raison, avec pour conséquence qu'il est définitivement victimisé et privé de l'énergie d'apprendre à se défendre. Le problème, c'est que maintenant tout le monde veut en croquer de cette bienveillance en toute circonstance ! Il n'y a donc plus grand-chose que les jeunes gens sont prêts à accepter de leurs supérieurs, parents, enseignants car on leur a trop bien appris qu'ils devaient " s'affirmer ", " savoir dire non ", et " se faire respecter ". On a fait que de gonfler leur susceptibilité et ils en payeront le prix en futures désillusions, car on ne construit rien sans cadre et sans effort."

     

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  • Qui sont les véritables privilégiés ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré aux grèves dans les transports et au mécontentement qu'elles suscitent ...

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    Grévistes SNCF ou milliardaires du CAC 40 : qui sont les véritables privilégiés ?

    Les grèves, sujet qui divise l’opinion publique, surtout s’agissant de celles des transports… Entre ceux qui voudraient pouvoir aller travailler ou passer leur bac et les autres, qui défendent – c’est selon – leur outil de travail ou leurs privilèges, réels ou supposés, comment faire la part des choses ?

    Tout d’abord, un rappel. La loi Le Chapelier du 14 juin 1791 ayant interdit le droit de coalition des métiers et les grèves, les syndicats n’ont été légalisés en France qu’en 1884, à l’initiative de Waldeck-Rousseau. En 1886, voit le jour la Fédération nationale des syndicats, d’inspiration guesdiste ; en 1892, la Fédération des Bourses du Travail marquée par le syndicalisme révolutionnaire de Fernand Pelloutier. C’est ce dernier courant qui prendra le contrôle de la CGT lors de l’adoption en 1906 de la célèbre Charte d’Amiens. Georges Sorel, théoricien du syndicalisme révolutionnaire, fait alors de la grève générale le « mythe mobilisateur » par excellence – tandis que Clemenceau fait tirer sur les grévistes ! Le droit de grève est aujourd’hui inscrit dans la Constitution, et il n’y a pas à le regretter.

    Être victime d’une grève n’est agréable pour personne, et je suis le premier à comprendre que les usagers soient en colère. Il m’arrive de l’être aussi. Mais personne ne fait la grève pour le plaisir. Une grève se fait pour soutenir des revendications. Quelles étaient celles des cheminots ? Contrairement à ceux qui les ont décrétées « illisibles » (mais qui n’ont surtout pas cherché à se renseigner), elles ne visaient pas seulement à défendre des statuts qu’on peut juger « protégés ». Il s’agissait avant tout de protester contre le projet de réforme de la SNCF défendu par le gouvernement. Ce projet d’inspiration libérale, conforme aux directives de l’Union européenne, consiste à démanteler le service public, à séparer la gestion de l’infrastructure ferroviaire de l’exploitation des services de transport, de façon à scinder l’activité entre un secteur rentable et un secteur non rentable, ce qui permettrait d’ouvrir le premier à la privatisation voulue par Bruxelles. Un tel projet est-il souhaitable ? Les cheminots ont au moins eu le mérite de poser la question.

    L’exemple de la privatisation des chemins de fer britanniques (Railways Act), décidée en 1994, qui fut en Europe le premier exemple de privatisation d’un service public ferroviaire d’importance nationale, donne à réfléchir. À l’époque, les financiers prétendaient que le secteur privé fournirait un service plus efficace, moins cher et de meilleure qualité, sans compter les investissements considérables dont les chemins de fer ont besoin. Résultat : les tarifs augmentèrent, les investissements chutèrent en flèche, deux tiers des emplois cheminots furent supprimés et les coûts de maintenance furent réduits en deçà du minimum. S’exerçant au détriment de la sécurité, jugée « trop onéreuse », la volonté de rentabiliser à tout prix fut cause d’une centaine de déraillements, dont certains firent des morts. Ce qui n’empêcha d’ailleurs pas le gouvernement travailliste de Tony Blair, après son arrivée au pouvoir en 1997, de s’engager dans la même voie. Alors que la privatisation était censée réduire le fardeau que représentait pour l’État le financement du réseau ferré, la subvention totale de l’État est passée de 1,9 milliard d’euros à 6,7 milliards en 2006 !

    Toujours à propos de privilèges, ceux de certains gros actionnaires ou de grands patrons du CAC 40 ne seraient-ils pas plus exorbitants que ceux de nos cheminots ?

    La réponse est dans la question. Dividendes, bonus, stock options, retraites chapeaux, la rémunération des patrons du CAC 40 ne connaît pas la crise. En 2013, le total de leurs salaires atteint 89,9 millions d’euros, soit une moyenne de 2,25 millions d’euros par dirigeant. Plus de 10 millions d’euros pour le PDG de Renault, 8,6 millions pour le PDG de Sanofi, 8,5 millions pour le PDG de L’Oréal, 4,5 millions pour Maurice Lévy, président de Publicis, 3,7 millions pour Georges Plassat, PDG de Carrefour (40 % d’augmentation par rapport à 2012 !). Comparez avec les salaires des cheminots. Par ces temps d’austérité pour tous, où sont les privilégiés ?

    Mais bien sûr, de même qu’il est plus facile de s’indigner des agissements des « racailles » que de ceux des grands prédateurs en col blanc, il est plus facile de s’en tenir à la rhétorique poujadiste dirigée contre les méchants grévistes qui, pour des motifs « archaïques », empêchent les braves gens de travailler (« pour un oui ou non, on nous prend en otages », « y en a marre », etc.), sans être apparemment gêné d’obéir ainsi aux injonctions de Bruxelles et de conforter le gouvernement dans ses positions. Là comme ailleurs, soit on fulmine des anathèmes, soit on réfléchit un peu.

    Le débat aura peut-être eu le mérite de faire bouger nombre de lignes, ne serait-ce qu’au Front national : Florian Philippot qui soutient les grévistes alors que Jean-Marie Le Pen les condamne…

    C’est là un fait nouveau dont on n’a pas assez souligné l’importance. Florian Philippot a très précisément déclaré : « Il y a sûrement des motivations corporatistes pour certains – et il faut les combattre –, mais pour d’autres je pense qu’il y a des motivations de bonne foi, d’intérêt général et je ne veux pas criminaliser par avance un mouvement social […] On peut être usager et perturbé par une grève, et avoir en même temps le souci du service public. » Le projet de réforme gouvernemental, a-t-il ajouté, est profondément nuisible car « les lignes TGV vont être libéralisées en 2019 et les lignes régionales en 2022 », ce qui entraînera « plus d’insécurité, moins de dessertes rurales, moins de dessertes pour nos villes moyennes ». Cette position me paraît raisonnable. Florian Philippot a apparemment compris que lorsque l’on prétend défendre le peuple français, la première tâche est de ne pas perdre de vue la justice sociale, surtout à une époque où l’exclusion, la précarité, la dé-liaison sociale et la pauvreté tous azimuts sont plus grandes que jamais.

    Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 26 juin 2014)

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  • La France contre Paris...

    Le magazine Causeur vient de sortir un bon numéro d'été sur le thème « La France contre Paris ». Vous pourrez y trouver notamment un entretien sur ce thème avec le géographe Christophe Guilluy, auteur de l'essai intitulé Fractures françaises. Vous pourrez également découvrir un dossier sur l'art contemporain ainsi qu'un entretien sur le football avec le philosophe Jean-Claude Michéa. De quoi patienter en attendant la parution du numéro d'été d’Éléments...

     

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    "« L’été sera chaud, dans les t-shirts, dans les maillots… » Pour l’instant, la prévision d’Eric Charden tombe à l’eau vu la météo ; heureusement  le cru 2014 de notre traditionnel numéro d’été a de quoi vous faire bouquiner pendant les orages. Elisabeth Lévy démarre en fanfare avec un éditorial au Karcher : « Sarkozy l’injusticiable » : « Est-il si fréquent de placer sur écoute l’un des principaux responsables de l’opposition, sur la foi de soupçons hasardeux – le présumé « financement libyen » – que rien n’est venu étayer à ce jour ? Il y a d’excellentes raisons de combattre Nicolas Sarkozy. A condition qu’il s’agisse d’un combat à la loyale… ».

     

    Après ce réquisitoire contre la justice d’exception, Causeur vous ouvre les portes de son dossier central : « La France contre Paris. 65 millions de provinciaux ». Et là encore, Elisabeth Lévy annonce la couleur franchement : il y a dans ce pays une fracture, non pas simplement sociale mais territoriale, culturelle et symbolique entre Paris la ville-monde et « la périphérie » provinciale, péri-urbaine ou grand-banlieusarde. La première vit en vase clos, ne connaissant manif pour tous et vote frontiste que de nom pendant que le reste du pays « n’est pas en guerre contre Paris (…) mais a décidé de vivre sa vie contre Paris ».

     

    Deux pays en un seul ? À force de gloser sur le tracé de la réforme territoriale, dans notre « vieux pays dans lequel l’Etat a précédé et construit la nation », on en oublie que la décentralisation crée bien souvent des jacobinismes à échelle réduite. Il n’empêche, c’est à l’échelon local que les politiques peuvent encore transformer le quotidien des gens, nous dit François Bayrou dans un long entretien. Le nouveau maire de Pau dresse un constat implacable : « nous ne sommes pas loin de la rupture » entre les élites parisiennes et le pays réel qui n’en peut mais.

     

    Un tableau encore noirci par les analyses décapantes du géographe Christophe Guilluy, lui aussi interviewé en ces pages, qui rappelle la dure réalité des chiffres : la France des « 60% d’exclus » est bien celle des campagnes et zones pavillonnaires, à l’écart du dynamisme des grandes métropoles. Il n’en existe pas moins une anti-Paris : Marseille, ville du Mistral et de Guillaume Nicoulaud, qui nous sert de guide dans ce mille-feuille identitaire, au bord de la syncope les soirs d’exploits footballistiques de l’Algérie, d’après notre envoyé spécial sur le Vieux port Pascal Bories. « Paris, je ne t’aime plus », chantait le poète, mais la mésentente entre la capitale et la province ne date pas d’hier, si l’on en croit Frédéric Rouvillois, qui retrace la petite histoire de l’anti-parisianisme à travers les âges. Comme les patois connaissent une seconde jeunesse sous l’égide de l’administration, outre une incursion occitano-toulousaine, vous saurez tout sur le néo-breton lyophilisé grâce à l’analyse d’André Markowicz et de Françoise Morvan.

     

    Mais abrégeons la revue de détail et passons à l’avant du navire, dans les filets de notre séquence actualités. En cette fin de Coupe du monde qui réjouit tous les anti-footeux, à commencer par l’auteur de ces lignes, Jean-Claude Michéa nous livre ses réflexions sur le Mondial, le sport marchandisé, les suppporters et ce qu’il reste de common decency dans l’univers du ballon rond. Sans jouer sur les peurs ni participer à l’irénisme ambiant, Slimane Zeghidour revient sur les débordements qu’on a observés dans les rues des grandes villes de France après les victoires de l’équipe d’Algérie. Le point de vue des Algériens du « bled » sur leurs cousins de la diaspora se révèle aussi piquant qu’une bonne harissa. Du Maghreb aux confins de la Mésopotamie en passant par nos banlieues, le danger salafiste se déploie dans toute son horreur. Samir Amghar, spécialiste de la question, établit le portrait-robot des différents types de salafistes, du jihadiste de Bruxelles aux barbus non-violents, en décryptant la prégnance du discours antisémites chez ces prêcheurs de haine. Et pour refermer le chapitre du vivre-ensemble, je me suis rendu chez nos voisins belges – peut-être devrais-je dire flamands – d’Anvers, observer la coexistence entre immigrés musulmans, juifs orthodoxes et flamingants de souche. D’un continent l’autre, Théogène Rudasigwa, ancien bras droit de Paul Kagamé, nous fait part de son expérience du génocide rwandais, sans ménager son ancien mentor, qui a aujourd’hui beau jeu de poser en redresseur de torts.

    Pour nouer le tout, une ribambelle de chroniques vous attend au tournant, dont les habituels Alain Finkielkraut, Basile de Koch, Cyril Bennasar, Roland Jaccard, Félix Groin, flanqués d’un petit nouveau, Louis Lanher, notre œil de Moscou immergé dans le Boboland. Joint à notre dossier culturel sur l’art officiel dans la mondialisation, ces papiers d’humeurs conjuguent éclectisme et (parfois, mauvais) esprit. Vous savez ce qu’il vous reste à faire : lisez sous la pluie !"

     

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  • Les derniers fidèles d'une austère religion...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de Dominique Venner cueilli dans la revue Item en 1977 et consacré à l'armée comme refuge de valeurs essentielles à la vie de la cité.

     

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    Les derniers fidèles d'une austère religion

    Je me sens peu de goût pour défendre les militaires indéfendables. Leurs insuffisances sont les causes premières de l'antimilitarisme. Il me suffit d'éveiller mes propres souvenirs. Durant les trente mois passés sous l'uniforme pendant la guerre d'Algérie, j'ai connu peu d'hommes de qualité. En fait de guerriers, j'ai surtout rencontré des fonctionnaires timorés. Cette armée était une remarquable machine à tuer les vocations. Chez les cadres, en dehors de fulgurantes exceptions, la mollesse du caractère, l'apathie intellectuelle et même le débraillé physique semblaient la règle. En dessous, se traînait en maugréant un bétail sale et aviné. Cette caricature d'armée était à l'image de la société. Les choses ne se sont pas améliorées.

    Mais il y avait des exceptions. Là, battait le cœur véritable de l'Armée. Les paras n'étaient pas seuls à donner le ton. Il arriva qu'au sein du régiment « cul de plomb » le plus loqueteux, une compagnie, voire une section tranchât, par la seule grâce d'un officier ou d'un sous-officier différent. Ceux-là avaient transformé les bidasses en hommes.

    Tel est le miracle de la société militaire, si malade fût-elle. Tout y est possible pour des tempéraments forts et imaginatifs.

    Depuis trente ans et plus, l'armée propose aux lecteurs de ses affiches « un métier, un avenir ». Du temps de Montluc ou du Maréchal de Saxe, les rutilants sergents-recruteurs promettaient l'aventure et la gloire. Rien n'interdirait d'actualiser. Quand elle a des chefs capables, l'Armée offre aux jeunes hommes tout juste sortis de l'adolescence les grandes vacances des servitudes civiles. Plus de profs, plus de patrons, plus de factures ni de percepteur. L'anti-« métro-boulot-dodo ». Le plaisir d'être jeunes, souples, agiles et forts. Le régiment, c'est la bande, avec ses rites et ses lois.

    Dans les sociétés industrielles bourgeoises ou socialistes qui sécrètent un égal ennui, l'homme de guerre, dans son isolement, son insolence, est seul à porter une part de rêve.

    A condition d'être lui-même, le soldat de métier exerce une fascination à laquelle même ses détracteurs n'échappent pas. Mais qu'il s'abandonne au courant, à la faiblesse d'être ordinaire, qu'il dépose ses orgueilleuses prérogatives, il n'est plus qu'un fonctionnaire de statut médiocre et méprisé. Les militaires qui veulent assumer leur condition se trouvent nécessairement en rupture avec l'esprit des sociétés utilitaires soumises aux seuls impératifs économiques. Les hommes de guerre viennent d'un autre temps, d'un autre ciel. Ce sont les derniers fidèles d'une austère religion. Celle du courage et de la mort.

    Ils sont de l'espèce qui se rase pour mourir. Ils croient à la rédemption de l'homme par la vertu de l'exercice et du pas cadencé. Ils cultivent la forme physique et la belle gueule. S'offrant le luxe de réveils précoces dans les matins glacés et des marches harassantes pour la joie de s'éprouver. Ce sont les derniers poètes de la gratuité absolue.

    Le privilège moral de l'armée réside tout entier dans une différence acceptée, entretenue, cultivée. Sa philosophie tragique ne tourne pas aux vents de la mode ou des majorités politiques. Elle ne varie jamais. Elle est propre à son état, à sa destination qui est la guerre. Guerre classique ou guerre subversive, car sa vocation est de veiller sur la Cité, même quand celle-ci s'abandonne.

    Les divisions sibériennes qui brisèrent l'offensive allemande devant Moscou, en- décembre 1941, ne devaient rien à Marx, mais beaucoup à Clausewitz. Si les troupes nord-vietnamiennes ont conquis Saïgon, ce n'est point le fait de leurs vertus communistes, mais de leurs qualités militaires. En revanche, on peut juger des effets de la mode permissive du libéralisme avancé sur la risible et inutile armée hollandaise.

    De bons apôtres nullement innocents prêchent, au nom des mœurs nouvelles, la répudiation par l'Armée de ce qui lui reste d'esprit militaire. C'est bien visé. De cette façon, il n'y aurait plus de Défense.

    Plus la société change, plus l'Armée évolue dans ses armements, sa stratégie, son organisation, plus l'esprit militaire doit être renforcé. Il est la seule réponse jamais inventée par l'homme face à la guerre. Pour les gardiens des empires et des nations, Sparte la divine, chère au vieil Homère, reste le maître étalon.

    Dominique Venner (Item, décembre 1977)


     

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