« Nos ancêtres les Gaulois » paraissent bien jeunes par rapport à la découverte préhistorique qui vient d'être consignée dans un musée à Bad Grund, dans la région de Göttingen, en Allemagne. Des ossements humains qui y ont été trouvés datent de l'âge du bronze, mille ou deux mille avant notre ère. Et, surtout, au moins deux de leurs descendants directs vivent encore dans les environs, la preuve pour ainsi dire généalogique ayant pu être établie grâce à la comparaison de traces d'ADN. « Drôle d'impression de le regarder au fond des yeux », sourit Uwe Lange. Le géomètre de 48 ans est l'un des deux dont la filiation a été prouvée. Face à lui, il y a l'effigie de son lointain devancier, à 100 ou 120 générations de distance.
« Je voudrais bien lui demander comment il s'appelle et ce qu'il a fait dans la vie. » De l'agriculture et de l'élevage, explique Ernst Probst, un expert de l'âge de bronze qui a relaté l'affaire. Des activités de subsistance agrémentées de polygamie, de sacrifices humains et de cannibalisme… L'aventure débute en 1980, lorsque l'on découvre cinq cavités inconnues dans la grotte de Lichtenstein, connue de longue date. Les travaux de fouille démarrent en 1993. L'archéologue local, Stefan Flindt, met au jour des parures en bronze, les restes d'un foyer et les ossements d'une quarantaine d'êtres humains. Susanne Hummel, anthropologue à l'université de Göttingen, prend la relève. Par un petit miracle, il existe encore des traces d'ADN identifiables, car la substance génétique des os est particulièrement bien préservée. Les squelettes sont peu ou prou ceux des membres d'une même famille. D'où l'idée de chercher des descendants dans la région. Sur quelque 300 échantillons de salive prélevés sur des habitants qui y vivent depuis au moins trois générations, deux correspondent. Uwe Lange et Manfred Huchthausen, un enseignant de 58 ans. Séparés par un kilomètre à vol d'oiseau, réunis par des ancêtres morts ici il y a 3 000 ans.
Pierre Bocev