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daoud boughezala

  • Transhumanisme : la grande accélération...

    Pour cette nouvelle édition de "Cette année-là",  sur TV Libertés, Patrick Lusinchi, avec Xavier Eman, Olivier François, Daoud Boughezala et Christophe A. Maximeremonte le temps jusqu’en en 2020 et plus particulièrement au numéro d’Éléments consacré au "transhumanisme", à ses thuriféraires, à ses projets plus ou moins fous et aux nombreuses interrogations et inquiétudes qu’il soulève. Des craintes qui ne font que grandir à l’heure où ce qui n’était encore, il y a cinq ans, que des prévisions ou des anticipations devient une réalité concrète, notamment au travers de la robotique de pointe et de l’intelligence artificielle.

     

                                                

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  • Le retour des dieux ou comment réenchanter le monde...

    Dans cette émission du Plus d’Éléments, diffusée par TV Libertés, l'équipe du magazine, autour d'Olivier François, à l’occasion de la sortie du nouveau numéro, se penche sur la renaissance des religions autochtones païennes, notamment à l’Est de l’Europe, où elles sont à la fois une affirmation identitaire locale et une réponse au nihilisme matérialiste de la post-modernité.

    Au menu également : un focus sur la débâcle française en Afrique et le "tour de France des 14 écoles de journalisme", pouponnière du politiquement correct, à l’occasion de la sortie du livre de Xavier Eman, "Formatage continu"…

    On trouvera sur le plateau Xavier Eman, rédacteur en chef, Patrick Lusinchi, directeur artistique, ainsi que Daoud Boughezala et Christophe A. Maxime...

     

                                                   

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  • Comment expliquer la "Trump mania" des droites ?...

    Pour cette nouvelle édition de "Cette année-là",  sur TV Libertés, Patrick Lusinchi, avec François Bousquet, Olivier François, Daoud Boughezala et Rodolphe Cartremonte le temps jusqu’en 2005, quand Éléments consacrait un numéro aux Etats-Unis : "Quand l’Amérique était belle". L’occasion d’interroger la fascination française pour cette nation-continent, entre admiration et rejet de son hégémonie culturelle et politique. Une ambivalence devenue encore plus manifeste avec l’irruption de Donald Trump sur la scène politique. Comment cet outsider, incarnation d’une Amérique à contre-courant de ses élites, a-t-il capté l’attention des Français, au point de séduire les droites identitaires ?...

     

                          

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  • Tolga Bilener : « Historiquement, la Turquie a toujours profité de l’affaiblissement de l’Iran »...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien de Daoud Boughezala avec Tolga Bilner, directeur du Centre de recherches stratégiques de l'université Galatasaray (Turquie),cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la victoire stratégique obtenue par la Turquie en Syrie.

     

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    Tolga Bilener : « Historiquement, la Turquie a toujours profité de l’affaiblissement de l’Iran »

    ÉLÉMENTS : Début décembre, au terme d’une offensive éclair, les rebelles syriens menés par le groupe islamiste Hay’at Tahrir-Cham ont chassé Bachar al-Assad du pouvoir. Quels liens la Turquie entretient-elle avec les divers mouvements qui ont pris le pouvoir à Damas ?

    TOLGA BILENER. Ankara entretient des relations complexes avec une multitude d’organisations sur le terrain. Les troupes turques sont présentes sur le sol syrien depuis 2016 et la Turquie était l’une des puissances garantes de la zone démilitarisée d’Idleb. Donc effectivement, les responsables turcs étaient en contact permanent avec divers groupes rebelles. Pourtant, l’allié principal de la Turquie était l’Armée nationale syrienne (ANS), Hayat Tahrir al-Cham restant qualifié jusqu’ici de terroriste par Ankara. La relation entre HTC et l’ANS étant quelque peu complexe, avec une certaine hostilité mais aussi une porosité, Ankara ne s’est finalement pas opposé aux attaques menées contre Alep par des groupes dirigés par Hayat Tahrir al-Cham fin novembre et l’a soutenu en fournissant essentiellement du renseignement.

    ÉLÉMENTS : C’est donc une victoire militaire, diplomatique et idéologique pour Recep Tayyip Erdoğan…

    TOLGA BILENER. Il s’agit surtout d’une victoire diplomatique, sans oublier la dimension de politique intérieure : le président turc avait besoin de cette victoire pour la présenter à son électorat. Depuis 2011, la Turquie a souhaité le départ d’Assad et elle a beaucoup investi en ce sens. Il faut savoir aussi qu’il existe une continuité dans la politique étrangère turque : Ankara a toujours considéré la Syrie comme une sorte d’affaire intérieure.

    ÉLÉMENTS : Entre agenda intérieur et ambitions géopolitiques, quels objectifs le président turc poursuit-il en Syrie ?

    TOLGA BILENER. Tout d’abord, il faut éviter le démembrement de la Syrie. Deuxièmement, il faut ne pas avoir un gouvernement hostile au pouvoir à Damas. Troisièmement, il y a les intérêts économiques : la Turquie voudrait obtenir la part du lion dans la reconstruction du pays. Quatrièmement, la lutte contre le terrorisme du PKK/PYD et des organisations affiliées, pour faire en sorte que le territoire syrien ne serve pas de base arrière à des militants armés kurdes qui frapperaient la Turquie. Enfin, il y a la question des réfugiés syriens. La Turquie abrite à ce jour 3,7 millions de Syriens. Si une partie de ceux-ci rentrait chez eux, ce serait déjà pas mal. Pour résumer, l’objectif de la Turquie est de faire en sorte que la Syrie soit un pays stable qui n’exporte pas ses problèmes.

    ÉLÉMENTS : C’est aussi une préoccupation d’Israël. Tout en dénonçant les crimes de guerre perpétrés à Gaza, Erdoğan a-t-il bénéficié des conséquences géopolitiques du 7 octobre 2023 (écrasement du Hezbollah, chute d’Assad…) ?

    TOLGA BILENER. La Turquie s’est montrée critique vis-à-vis d’Israël depuis le début des opérations militaires à Gaza. Elle a d’abord proposé sa médiation, ensuite elle a dénoncé le sort réservé aux Palestiniens et dernièrement, elle a décidé de se joindre à la requête sud-africaine devant la Cour internationale de justice contre Israël. Cependant, Ankara ne va pas non plus se plaindre de l’affaiblissement des proxys de l’Iran. Historiquement, et là, je remonte aux temps impériaux, la Turquie a toujours profité dans la région de l’affaiblissement de l’Iran, et vice-versa. Cela n’est que le reflet des complexités des relations régionales. L’ennemi de mon ennemi ne devient pas forcément mon ami.

    ÉLÉMENTS : À la faveur du changement de pouvoir à Damas, certains observateurs craignent une partition à la libyenne, ou à l’irakienne, avec un État failli confronté à des guérillas locales. Quel type de régime serait capable de tenir les rênes de cette société morcelée ?

    TOLGA BILENER. Toutes les options sont sur la table en Syrie et il est trop tôt pour savoir quelle trajectoire prendra ce pays. L’idéal serait évidemment une Syrie qui préservera son intégrité territoriale, non menaçante pour ses voisins et capable d’assurer la sécurité et le bien-être de ses citoyens. Mais il ne faut pas oublier que l’on est au Proche-Orient. Les problèmes fondamentaux de la région ne sont pas du tout réglés, à savoir la question palestinienne, les rivalités géopolitiques, les problèmes économiques, le déficit démocratique, la pression démographique… Je ne vois pas comment la Syrie pourrait surmonter ses problèmes dans un avenir proche. De toute façon, qu’on le veuille ou non, ce n’est pas à Damas que tout se décidera. La Syrie est un pays si important que l’on ne va pas laisser aux seuls Syriens les décisions concernant leur destin. L’avenir de ce pays dépendra des tractations et des rivalités entre les pays de la région, ainsi que des grandes puissances dans les années à venir.

    ÉLÉMENTS : La capitulation de l’armée syrienne et le départ d’Assad semblent d’ailleurs avoir été négociés entre puissances…

    TOLGA BILENER. On entend souvent dire que la chute de Bachar al-Assad a été fulgurante. Il est vrai que la toute dernière phase n’a pris que 12 jours, mais c’est quand même 13 ans + 12 jours. Le changement du régime syrien a été un processus lent, sanglant et alambiqué dans son ensemble. Il est pour le moment impossible de savoir exactement quelles ont été les négociations menées pour aboutir au résultat final. Néanmoins, j’ai du mal à croire que tout cela serait négocié uniquement entre les pays que vous avez évoqués, sans l’implication, directe ou non, des États-Unis, d’Israël, des pays européens qui sont présents sur le terrain avec leurs forces spéciales, mais aussi avec leurs services de renseignement… Il serait plus raisonnable de penser qu’il y a eu plusieurs négociations en parallèle à différents niveaux avec différentes parties prenantes.

    ÉLÉMENTS : Malgré l’ancrage d’Ankara de l’OTAN et ses divergences d’intérêt avec Moscou et Téhéran, ces trois puissances ont-elles forgé un partenariat eurasien ?

    TOLGA BILENER. Les relations entre la Turquie, l’Iran et la Russie ont un arrière-plan historique d’au moins six siècles. Ce sont trois pays dont les intérêts sont tantôt divergents, tantôt convergents. Il serait exagéré de dire qu’ils ont constitué un partenariat, car il existe un frein naturel à cela : la Turquie fait partie du système d’alliance occidentale. C’est un pays membre de l’OTAN, de l’OCDE, du Conseil de l’Europe et candidat à l’adhésion à l’UE. Cela n’empêche évidemment pas la Turquie de se coordonner avec la Russie et l’Iran sur certains dossiers, car elle n’a tout simplement pas le luxe d’ignorer ces pays ou de les antagoniser en permanence. D’ailleurs, la Turquie vise à renforcer son dialogue avec tous les acteurs extra-occidentaux ces dernières années tout en demeurant dans les structures occidentales, comme on peut le constater par son intérêt vis-à-vis des BRICS+. Il est évident qu’Ankara souhaite renforcer son autonomie stratégique, multiplier ses partenaires économiques, devenir un acteur capable de parler à tous ; et son ancrage dans le système occidental ne l’empêchera pas de coopérer avec d’autres pays au cas par cas. Rester alliée de l’Occident mais pas alignée… Ajoutez à cela l’ambition turque de développer une industrie militaire robuste, les projets de centrales nucléaires pour réduire sa dépendance à l’extérieur en vue de renforcer son autonomie stratégique… Peut-être, après tout, la Turquie ne fait que mettre en œuvre une version turque de la politique étrangère gaulliste ! Ce n’est pas le pire des modèles.

    ÉLÉMENTS. Grande pourvoyeuse de drones, la Turquie possède aussi des infrastructures d’acheminement des hydrocarbures. La chute d’Assad relance-t-elle les projets de gazoducs entre la Turquie et Israël ou entre le Qatar et la Turquie ?

    TOLGA BILENER. Il existe une véritable « guerre des corridors » dans la région : les nouvelles routes de la soie, le projet IMEC de l’Inde, ainsi de suite. La Turquie développe ses propres projets en la matière, comme celui du « Corridor central » (Orta Koridor) qui a pour objectif de renforcer la connectivité entre le continent européen et la Chine via l’Asie mineure. Ensuite, il existe le projet de la Route du développement (Kalkinma Yolu) qui vise à construire des infrastructures autoroutières et ferroviaires reliant la Turquie et l’Irak, jusqu’à Bassorah.

    Le projet de gazoduc entre le Qatar et la Turquie, est une idée vieille de 20 ans, et des itinéraires alternatifs sont à l’étude. Est-ce qu’on pourra passer par le territoire saoudien et syrien, ou est-ce qu’il serait plus avantageux d’utiliser le Kalkinma Yolu (NDLR : projet de corridor logistique aussi appelé « route du développement » reliant l’Irak à la Turquie puis à l’Europe) pour cela ? À suivre.

    Quant à un éventuel gazoduc/oléoduc entre la Turquie et Israël, tant que Netanyahu reste au pouvoir et que la question palestinienne reste ce qu’elle est actuellement, je vois mal comment ce projet pourrait être mis en place. Ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui l’Azerbaïdjan est un fournisseur important de pétrole pour Israël via la Turquie, à travers l’oléoduc BTC. Par ailleurs, pour une nouvelle infrastructure en Méditerranée orientale, il faudrait aussi régler les différends concernant le partage des espaces maritimes autour de Chypre. Vaste sujet !

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  • Les questions génocidaires...

    Dans cette émission du Plus d’Éléments, diffusée par TV Libertés, l'équipe du magazine, autour d'Olivier François, à l’occasion de la sortie du nouveau numéro, se penche sur l’interminable conflit israélo-palestinien, ses racines et ses enjeux, là-bas et ici, où la critique décoloniale remet en cause la singularité historique de la "Shoah" et la légitimité morale et politique d’Israël.

    Au menu également : la sortie du nouveau numéro de la revue Krisis, sur le thème  Islam(s) ?, et le dossier consacré au centenaire du surréalisme…

    On trouvera sur le plateau François Bousquet, rédacteur en chef, Patrick Lusinchi, directeur artistique, Daoud Boughezala et Rodolphe Cart...

     

                                                

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  • L’Azerbaïdjan a-t-il engagé une guerre hybride contre la France ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné au site de la revue Éléments par Tigrane Yégavian et consacré à l'entreprise de guerre hybride menée par l'Azebaïdjan contre la France. Chercheur au Centre français de recherche sur le renseignement, spécialiste de l’Arménie ainsi que des mondes turc et arabe, Tigrane Yégavian a récemment publié Géopolitique de l’Arménie (Bibliomonde, 2023).

     

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    « L’Azerbaïdjan a engagé une guerre hybride contre la France »

    Éléments : Le gouvernement et les médias français dénoncent les ingérences de l’Azerbaïdjan en Nouvelle -Calédonie. Via des usines à trolls, Bakou diffuserait de fausses nouvelles ayant aggravé le climat insurrectionnel local. Pourquoi Bakou voudrait-il affaiblir Paris ?

    Tigrane Yégavian. Rien ne va plus entre Paris et Bakou depuis la guerre des 44 jours (automne 2020) et la disparition du Groupe de Minsk. Jusqu’à alors, la France, en sa qualité de co-présidente, était tenue à une neutralité absolue. Depuis novembre 2020, les relations franco-azerbaidjanaises se sont considérablement dégradées, à mesure que Paris a accru son soutien politique, diplomatique et bientôt militaire à Erevan. Paris justifie son soutien à la défense de l’Arménie en référence à l’occupation par l’Azerbaïdjan de près de 200 km² de territoires souverains de la République d’Arménie. Or, Bakou crie à l’hypocrisie car Paris n’a jamais dénoncé les quatre résolutions de l’ONU qu’elle avait votées en 1993 soutenant la souveraineté azerbaïdjanaise sur l’ensemble de l’oblast du Haut-Karabagh et des districts l’entourant.  L’évolution de la position française a suffi à susciter l’ire du régime des Aliyev qui, depuis, a engagé une guerre hybride contre la France.

    Éléments : Quelles formes ce conflit prend-il ?

    Tigrane Yégavian. Cette conflictualité d’un type nouveau s’exprime par la création de faux comptes sur les réseaux sociaux (X, Facebook, etc.) destinés à distiller des fake news contre la France notamment. L’objectif est clair, il s’agit déstabiliser Paris à la veille des Jeux olympiques.

    Dès le 15 mai 2024, VIGINUM, le service technique et opérationnel de l’État français, chargé de la vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères, a détecté la publication d’un premier visuel présentant, d’un côté, un homme armé d’une carabine à verrou en position de tir et, de l’autre, un manifestant kanak décédé. Sur ce montage photo, on lit en langue française ou anglaise : « La police française est meurtrière. Les meurtres des Algériens continuent… » Reprise à l’identique dans les publications servant de support au visuel, cette phrase s’accompagne de la suite de hashtags suivante : « #RecognizeNewCaledonia #EndFrenchColonialism #FrenchColonialism #BoycottParis2024 #Paris2024 ».

    L’Azerbaïdjan a aussi été accusé, en décembre 2023, d’avoir envoyé des journalistes « connues pour leur proximité avec les services de renseignement azerbaïdjanais » pour suivre le déplacement en Nouvelle-Calédonie du ministre français des Armées, Sébastien Lecornu. Leur objectif : « Écrire des articles avec un angle anti-France », assure Europe 1, qui a révélé l’affaire.

    Par ailleurs, en avril dernier, un mémorandum de coopération a été signé entre le Congrès de Nouvelle-Calédonie et l’Assemblée nationale de l’Azerbaïdjan, suscitant des protestations dans les rangs loyalistes calédoniens. Objectif du parlement de Bakou : sensibiliser la communauté internationale sur le droit du peuple de la Nouvelle-Calédonie à l’autodétermination.

    Éléments : La Nouvelle-Calédonie ne semble pas être l’unique terrain de jeu ultramarin de Bakou. La députée (LIOT) de Mayotte Estelle Youssoufa accuse l’Azerbaïdjan d’exciter des sentiments antifrançais sur l’île et dans l’ensemble des outremers qui seraient notre « maillon faible ». Disposez-vous d’éléments étayant cette thèse ?

    Tigrane Yégavian. Absolument. En juillet 2023, le Groupe d’initiative de Bakou (GIB) a été fondé en marge d’un sommet des pays non-alignés, dont l’Azerbaïdjan était le chef de file. Le GIB organise des conférences en ligne avec les séparatistes ultramarins, couvrant les frais des déplacements de leurs représentants qui font le voyage à Bakou. En novembre dernier, à la réunion du GIB, le président Ilham Aliev en personne avait prononcé un discours aux forts accents anticoloniaux lors duquel il a fait référence plus de 20 fois à la France. Il accueille même depuis octobre un groupe de soutien au peuple corse, qui a publié, début février, un communiqué pour dénoncer « la dictature macroniste ». Il faut dire que les militants ultramarins ne sont pas très regardants sur la nature du régime qui leur accorde son soutien. Par le passé, les Kanaks ont été aidés par la Libye du colonel Kadhafi. Tout appui est bon à prendre tant que ça peut donner un levier au niveau des forums multilatéraux. En cela, ces militants qui empochent les subsides de Bakou sont les idiots utiles de la dictature azerbaïdjanaise.

    Éléments : Certes, le régime d’Aliyev est une dictature. Mais au sein du fameux « Sud global », les standards occidentaux ne valent pas tripette. Tout à la fois allié de la Turquie, d’Israël et de la Russie, Bakou mène une stratégie diplomatiques tous azimuts. Y a-t-il une cohérence derrière son réseau d’alliances ?

    Tigrane Yégavian. L’Azerbaïdjan pratique une politique étrangère de multi-alignement semblable à celle de l’Inde dans la mesure où ce pays n’appartient à aucune alliance régionale tout en engrangeant des bénéfices colossaux. En sa qualité de partenaire géostratégique d’Ankara, Bakou est de fait une annexe de l’Otan. Ce qui ne l’empêche pas de se procurer les bonnes grâces de la Russie de Poutine avec qui Aliyev a scellé un partenariat stratégique à la veille de l’invasion de l’Ukraine. Ainsi, l’Azerbaïdjan est devenu une voie majeure de contournement des sanctions internationales contre la Russie dans la mesure où le pétrole et le gaz azerbaidjanais que l’Europe achète au prix fort est en réalité en grande partie… d’origine russe. Enfin, l’Azerbaïdjan sert de proxy à Israël contre l’Iran ce qui explique la tension avec Téhéran et la poursuite des livraisons d’armements à haute valeur ajoutée par les Israéliens à leurs partenaires azerbaidjanais en échange de pétrole – Bakou fournit environ un tiers de la consommation israélienne…

    Éléments : Le grand producteur d’hydrocarbures qu’est l’Azerbaïdjan tient-il l’Europe par ses besoins énergétiques ?

    Tigrane Yégavian. Non. On estime à moins de 4 % la consommation européenne des hydrocarbures azerbaidjanaises, ce qui est sensiblement moins que l’Algérie et la Norvège. Bizarrement, l’Union européenne a la naïveté de croire que les Azerbaidjanais sont disposés à rejoindre l’axe euro-atlantique via la Turquie et à se débarrasser de la présence russe dans leur arrière-cour caucasienne. C’est un mauvais calcul qui sous-estime la proximité des liens qui unissent la famille Aliyev aux arcanes du Kremlin depuis la fin des années 1960. Il faut croire que la diplomatie du caviar demeure une force de frappe redoutable pour acheter de l’influence. Sinon, comment expliquer l’alignement de l’Unesco à Bakou alors que l’on attend l’envoi d’une mission chargée d’enquêter sur l’état du patrimoine plurimillénaire arménien grandement menacé, si ce n’est déjà partiellement détruit ? Et comment expliquer que l’Azerbaïdjan, un des pays les plus pollueurs de l’Eurasie accueille, toute honte bue, la COP 29 en novembre prochain ?

    Éléments : En fin de compte, trois ans et demi après sa victoire dans le Haut-Karabakh, quels sont les objectifs militaires et politiques de Bakou ?

    Tigrane Yégavian. Après avoir procédé au nettoyage ethnique du Haut-Karabagh en septembre dernier, l’Azerbaïdjan poursuit une guerre de basse intensité contre l’Arménie. Bakou pratique la stratégie du salami en grignotant des portions de territoires arméniens souverains, 250 km² du territoire national étant à ce jour sous occupation azerbaidjanaise. Ainsi, le projet de Bakou vise-t-il à conclure une paix d’humiliation à l’Arménie en la forçant à céder sur plusieurs points :

    • Un corridor extraterritorial dans le sud ultrastratégique pour avoir une liaison terrestre avec la Turquie via l’exclave du Nakhitchevan ;

    • De nouvelles concessions territoriales dans le sud et l’est du pays ;

    • Le renoncement définitif à toute autonomie pour les Arméniens du Haut-Karabagh.

    Bref, à long terme, l’Azerbaïdjan tente de dévitaliser l’Arménie pour le pousser à ne plus être un Etat-nation viable, sur le plan démographique, économique et régalien.

    Alors que Bakou et Erevan ont amorcé un processus de délimitation du millier de kilomètres de frontière commune, se développe un mouvement de contestation populaire amorcé par le primat du diocèse de la région du Tavush où des positions et des villages stratégiques doivent être cédés à l’Azerbaïdjan. De son côté, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, qui s’est considérablement rapproché des Occidentaux, crie à la manipulation par la Russie et les partisans de l’ancien régime honni.

    Tigrane Yégavian, propos recueillis par (Site de la revue Éléments, 21 mai 2024)

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