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  • De la bataille contre le système...

    Nous reproduisons ci-dessous un article cueilli sur le site Entrefilets et qui  constitue une analyse passionnante du système et de ses failles. L'auteur est un ex-journaliste repenti, spécialiste du Moyen-Orient, et propose, au travers de son site, une relecture de l'actualité internationale qui fait l'économie de la narrative officielle. 

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    Essai : de la bataille contre le système

     

    Récemment, un ami ulcéré par une situation dont j’ignore encore aujourd’hui le détail, s’était plongé dans La Guerre de guérilla du Che avec une énergie combattante. Je lui avais alors humblement fait remarquer que l’hyper-puissance technologique et communicationnelle du Système rendait désormais impossible toute révolution par des moyens classiques, fussent-ils aussi honorablement inspirés que ceux du Che, et qu’il fallait plutôt réfléchir à la rédaction d’un nouveau manuel de guérilla qui viserait non plus à l’affrontement armé, mais à un travail de termites en quelque sorte, avec pour objectif l’effondrement du Système sur lui-même, sa dissolution. Pragmatique, il me demanda de lui donner l’ABC de ce nouveau manuel, ce dont je fus bien incapable. Mais cela devait amorcer le texte ci-dessous, où figurent quelques pistes.  

    La narrative

    1. Les démocraties libérales représentent la forme la plus élevée et indépassable des formes possibles d’organisation sociale. Il n’y a pas d’alternative.

    2. Les valeurs occidentales sont le fruit d’un héritage historique obtenu de haute lutte après des siècles de barbarie. Ces valeurs sont les plus élevées qui soient, les plus respectueuses et bénéfiques pour les collectivités et les individus.

    3. L’Occident est soucieux de permettre à tous les peuples de la terre de sortir de la pauvreté et d’accéder à la liberté grâce à la promotion de son modèle démocratique.

    4. L’Occident œuvre pour la paix dans le monde.

    5. L’évolution de notre civilisation tend toujours vers le mieux.

    6. Le capitalisme et son économie de marché ne sont pas parfait, mais ils sont perfectibles et sont de toute façon le seul modèle viable, il n’y a pas d’alternative.  

    Les quelques énoncés ci-dessus sont a priori indiscutables. Ils résument à peu de chose près le regard que portent sur eux-mêmes les Occidentaux. L’homos-occidentalus moyen adhère à ces « évidences » avec l’intime conviction d’être le dépositaire d’un héritage glorieux, convaincu que « sa » civilisation est lumière dans les ténèbres du monde. Il est persuadé que cette conviction est le fruit de sa raison, d’une libre pensée nourrie de sa propre observation et de son analyse.Or ces énoncés sont au mieux contestables, au pire faussaires. Car si le glorieux héritage invoqué ici n’est bien sûr pas sans fondement, l’Occident est aujourd’hui prisonnier d’un Système (américaniste, occidentaliste, anglo-saxon comme on voudra, mais que par commodité nous ne nommeront ici que par le terme générique de « Système ») qui instrumentalise désormais ses idéaux dont il ne conserve que les slogans après en avoir détruit la substance.

    Passage en revue.

    La narrative à l’épreuve du réel

    - La démocratie-libérale, modèle indépassable  Dans l’écrasante majorité des démocraties occidentales, le régime en place, idéal sur le papier, est un leurre où deux ailes d’un parti unique simulent l’affrontement des idées. Le peuple est donc l’otage d’un simulacre de démocratie. Dans les faits, chaque camp gouverne sous la dictature des marchés, se pliant aux lois d’un Système régi par les seules lois darwiniennes de l’économie.

    - Les valeurs occidentales sont les plus élevées qui soient  C’est faire peu de cas des ravages de la colonisation et de l’esclavagisme, ces deux sanglantes mamelles qui ont permis hier à l’Occident de financer son industrialisation et qui lui permettent, aujourd’hui encore, de financer son train de vie puisque toutes deux n’ont fait qu’évoluer sans disparaître. Grâce à la globalisation, le Système permet en effet aujourd’hui à l’Occident de faire travailler ses esclaves dans leur pays d’origine, et l’OMC, le FMI ou la BM assurent la poursuite d’une colonisation sans faille des pays en voie de développement par un mécanisme d’endettement forcé.

    - L’Occident soucieux de la pauvreté et de la liberté des peuples Là encore, les faits démentent la narrative puisque l’Occident continue à piller les richesses naturelles des pays pauvres tout en leur refusant un commerce équitable, ce qui a pour effet premier de bloquer leur développement et d’accroître leur pauvreté. Les multinationales ont fait main-basse sur « l’agro-business », affamant des régions entières pour maximaliser leur profit (prise en otage des paysans grâce aux OGM, monocultures intensives, rachat de concessions d’eau qu’on laisse à l’abandon pour forcer l’achat d’eau en bouteilles etc. etc Notons encore que l’essentiel des capitaux qui tournent autour de l’agro-business sont spéculatifs.). Le Système maintient ainsi artificiellement et à dessein l’essentiel de la planète dans la pauvreté pour garantir sa richesse. De plus, puisqu’il se pense universaliste, le Système est un formidable destructeur de cultures. Il assimile, nivelle, dissous les identités et les spécificités culturelles, les dilue, les absorbe, les digère, les uniformise, les reformate.

    - L’Occident œuvre pour la paix dans le monde  Rien n’est plus faux. Les seules boucheries de masse perpétrées depuis 20 ans sur cette planète (Irak-Afghanistan) l’on été et le sont encore au nom de la démocratie et des droits de l’homme par les armées occidentales, du Système donc. Dans des pays d’Afrique sub-saharienne où le sous-sol est riche en hydrocarbures, le Système et ses groupes pétroliers fomentent ou entretiennent des guerres pour endetter et donc asservir les pays concernés et empêcher par tous les moyens un scénario de type bolivien. Au Proche-Orient, la tête de pont occidentale en territoire barbare, Israël donc, est soutenue dans toutes ses boucheries depuis 60 ans par le Système. Dans sa nouvelle doctrine nucléaire, Washington menace même les pays qu’il jugera « proliférateurs » de frappes nucléaires préventives, même si ces derniers ne disposent pas de l’arme atomique (1). En clair, puisque la menace nucléaire iranienne est un conte, le Système est désormais théoriquement prêt à faire usage de l’arme atomique pour imposer son modèle aux récalcitrants trop turbulents.

    - L’évolution de notre civilisation tend toujours vers le mieux  Certes, à l’intérieur de la civilisation occidentale, on ne torture plus physiquement, on n’emprisonne plus les gens pour leurs idées (José Bové soutiendrait toutefois le contraire). Mais le Système opère un contrôle de plus en plus inquisiteur sur les individus sous couvert de sécurité, et l’on voit les prémices d’une répression « soft » mais grandissante de toute pensée non-conformiste à mesure que les contradictions du Système apparaissent. L’illusion de la liberté, et finalement de la vie pourrait-on dire, ne provient essentiellement que de l’accès d’apparence libre mais en réalité imposé (comment y échapper ?) à toutes les formes de saturations sensorielles. Simulacre d’exaltation par une sur-stimulation des sens donc, mais qui ne s’adresse toutefois jamais qu’à « nos passions tristes ». Ce qui caractérise le mieux la civilisation occidentale aujourd’hui, est le constat de la perte complète du sens. Intuitivement, on pourrait avancer que la raison n’a finalement jamais réussi à combler le vide laissé par le meurtre de Dieu (1789 : naissance de la seconde civilisation occidentale). Dans le Système occidentaliste, l’individu lutte en permanence contre une sensation de vertige, de vide, qu’il est sensé combler par un acte d’achat répété jusqu’à l’hystérie et/ou la nausée (Ô mon Dieu, mais quand va donc enfin sortir la nouvelle version du dernier MacdoPhoooone ?). En définitive, l’homo-occidentalus ne sait plus vraiment pourquoi il vit.

    - Le capitalisme n’est pas parfait, mais il est perfectible et de toute façon, il n’y a pas d’alternative Arrivé désormais à sa pleine maturité, le système capitaliste dans sa version néo-libérale se révèle une machine monstrueuse, nihiliste à l'extrême, anthropophage dans sa nature profonde. Les licenciements de masse font s’envoler les actions des entreprises; les catastrophes naturelles sont considérées comme des aubaines pour relancer l'économie; le principe de précaution est sacrifié aux exigences du profit immédiat; c’est le règne du court terme ; la privatisation et la manipulation du vivant n'est qu'une perspective de plus d'enrichissement ; on préfère laisser crever des millions d’Africains plutôt que de baisser le prix des trithérapies. Au final, le capitalisme dans sa version ultime corrompt tout ce qu'il embrasse, de l’esprit à la biosphère, se dévorant finalement lui-même à coups d’OPA agressives, imposant aux sociétés qui lui sont soumises la décadence des mœurs, le desséchement de la pensée et de l'âme, le meurtre de l’environnement. Comme l’écrit Esther Vivas  « Le capitalisme a démontré son incapacité de satisfaire les besoins fondamentaux de la majorité de la population mondiale (un accès à la nourriture, un logement digne, des services publics d’éducation et de santé de bonne qualité) tout comme son incompatibilité absolue avec la préservation de l’écosystème (destruction de la biodiversité, changement climatique en cours). » En ce sens, le capitalisme est tout simplement une dynamique destructrice du vivant. Même dans sa « zone de privilège », l’Occident donc, le capitalisme ne gouverne que par la violence : docilisation des masses par la précarisation ; paupérisation ; enfermement des individus dans les dettes pour achever de verrouiller leur dépendance au Système. Mais le capitalisme s’avère aussi incapable de résoudre ses contradictions (à qui vendre mes voitures puisque je mets mes acheteurs potentiels au chômage pour délocaliser et produire à moindre coûts etc…). Là encore, la narrative se fait d’autant plus agressive qu’il faut masquer une impasse de plus en plus visible.  

    La manipulation des psychologies  

    Et pourtant, l’Occident ne se pense qu’au travers de l’image parfaite et honorable dont il s’est doté comme une entreprise se dote d’une identité visuelle, de ce masque de vertu dessiné par sa machine de communication et qui est si prompt à se sentir outragé par la barbarie de l’« autre ».

    Comment est-ce possible ?

    C’est là qu’entre en jeu la fantastique puissance communicationnelle du Système. Un machine non pas de propagande (le propagandiste sait qu’il trompe), mais de création d’une réalité virtuelle.

    La distinction est importante. Car le Système ne peut fonctionner que sous certaines conditions, dont l’une des principales est la sujétion volontaire des masses au Système. En l’absence de cette sujétion volontaire, le Système serait en effet contraint de révéler sa nature profonde, qui est totalitaire, et s’exposerait alors à être contesté, puis combattu, ce qui serait contre-productif, donc contraire aux buts du Système.

    Or, là où la propagande s’attaque à la pensée et tente d’asséner des mensonges mille fois répétés pour en faire des vérités (cf Goebbels), la machine à réalité virtuelle du Système manipule la psychologie. C'est-à-dire le point de contact le plus intime entre le Système et l’individu. L’élément subtil par lequel l’individu perçoit, ressent le Système, et par lequel le Système touche au plus profond de l’individu.

    Et seule la manipulation de la psychologie peut susciter la sujétion volontaire recherchée.

    C’est pourquoi nonobstant une poignée de marionnettistes, tout ce qui fait la communication du Système, c'est-à-dire l’élite politique mais aussi, bien sûr, la presse-Pravda, les plumitifs du prêt-à-penser, le tout Hollywood et ses avatars, croit généralement au caractère indiscutable des énoncés cités en préambule, croit en la pureté intrinsèque du Système (n’est pas meilleur menteur que celui qui croit dire la vérité…).

    Chacun des hérauts du Système défend donc la réalité virtuelle ainsi créée avec d’autant plus de hargne qu’il lui est vital d’y croire pour son équilibre psychologique justement, au point qu’on peut même soutenir qu’il désire intensément être trompé, par paresse, conformisme et peur de l’inconnu bien sûr, par crainte de perdre ses privilèges sûrement, par angoisse du vide sans doute.

    On constate d’ailleurs que ces dociles communicateurs ne combattent jamais avec autant de rage toute contestation de Leur Vérité, que lorsqu’ils en suspectent tout à coup malgré eux l’éventuelle fausseté (l’exemple nous est donné ici par la violence avec laquelle sont traités ceux qui contestent la version officielle des attentats du 11 Septembre.)

     L’individu sous perfusion permanente

     A l’heure de l’hyper-technologie, la puissance du flux communicationnel du Système est désormais telle qu’il est bien difficile d’y résister, et impossible d’y échapper.

    La télévision est bien sûr le principal vecteur des valeurs du Système, de sa réalité virtuelle donc. Là où l’on fait globalement sans cesse l’éloge des valeurs de l’Occident, de la justesse de ses croisades, des bienfaits du libre-marché, et c’est là aussi que directement ou implicitement on désigne l’ennemi, on caricature l’autre et les valeurs de l’autre, le barbus fanatique, l’insondable et menaçant bridé, le nègre sauvage et sanguinaire.

    Or un français de plus de 4 ans passe, par exemple, en moyenne 3,36 heures devant sa télévision chaque jour. C'est-à-dire qu’en un an, il reste assis à fixer une petite boîte diffusant les messages du Système durant…. 54 jours sans discontinuer, soit presque… deux mois jours et nuits par an.

    Dans la presse, considérée généralement comme plus critique, les valeurs citées en préambule ne sont jamais fondamentalement remises en question (sauf éditos alibis s’entend). Ajoutons donc à cela le temps de lecture. Et puis les messages publicitaires qui jonchent les rues et célèbrent les vertus du consumérisme, de la joie de posséder, c'est-à-dire qui célèbrent la plus haute vertu proposée par le Système, l’orgasme marchand : l’achat.

    Bref, l’individu moyen est quotidiennement soumis aux stimuli du Système et à sa réalité virtuelle. Il est sous perfusion quasi permanente.

    L’avantage de la réalité virtuelle sur la propagande, c'est-à-dire l’avantage de manipuler les psychologies plutôt que la pensée est donc évident. Car au lieu d’avoir des individus qui ânonnent sans y croire les vertus d’un système en le honnissant (cf ex-URSS), l’homo-occidentalus fait l’apologie du Système en étant persuadé de le faire de son plein gré en fonction d’un raisonnement libre, juste et bon.

    L’individu se confond avec le Système qui a pénétré sa psychologie (2).

     La liberté dans les interstices des rouages

     Reste que cette manipulation en profondeur, malgré son caractère apparemment « soft » puisqu’elle vise une sujétion non contrainte, reste d’une violence terrible pour les psychologies. Difficile en effet de faire croire sans conséquences sur le long terme que le noir est blanc, que le bas est en haut, que la bassesse puisse être vertu.

    Instinctivement, nombreux sont donc ceux qui ressentent intuitivement un malaise au spectacle de cette réalité virtuelle : « on sent bien que quelque chose cloche, mais quoi… »

    C’est que le réel, un peu comme lorsque l’image d’une télévision est secouée par des parasites, fait régulièrement irruption dans la narrative du Système, sans que celui-ci puisse l’empêcher.

    Crise économique majeure qui oblige le Système à se sauver lui-même en reportant la dette des spéculateurs sur les peuples ; boucherie puis débandade militaires masquées en opération de libération et en victoire (Irak), manipulations trop grossières sur les buts de guerre (cf. la fable des armes de destructions massives irakiennes) ; le réel entre parfois trop brutalement en contradiction avec la narrative du Système et en démasque au moins brièvement la supercherie.

    Nombreux sont donc ceux qui, en proie à ce malaise, y cherchent une explication et sont donc réceptifs à d’autres informations, dissidentes ou alternatives comme on voudra, que le Système, et c’est là sa principale faiblesse, ne peut pas filtrer sans se désavouer lui-même puisqu’il s’affirme comme un espace de liberté. En ce sens, on constate que la narrative du Système est en même temps sa prison. 

    L’on pourrait donc caricaturer en disant que la vraie liberté se situe aujourd’hui dans les interstices des rouages du Système, dans ces espaces que le Système est contraint de laisser ouverts s’il veut lui-même fonctionner.

    Internet est truffé de ces espaces là. Il est bien sûr un outil formidable de communication au Service du Système, mais sa nature ubuesque a aussi ouvert une faille béante dans sa narrative car, pour la première fois, l’information échappe au contrôle du Système.

    De plus en plus de sites dissidents gagnent ainsi en audience et jouent un rôle « d’éveilleur » que le Système ne peut combattre frontalement. La presse-Pravda tente bien sûr désespérément de jouer l’opposition entre le mythe d’une info vérifiée, professionnelle, sérieuse contre le tout et n’importe-quoi qu’Internet produirait essentiellement. Mais c’est un baroud d’honneur.

     Vers l’esprit de résistance

     Et c’est là que l’on discerne les premières clés d’un nouveau manuel de guérilla possible, qui obéit grosso modo aux règles de la guerre de 4ème génération, c'est-à-dire ce que l’on appelle la guerre du faible au fort. Une guerre de harcèlement donc où, passez-moi l’expression, une poignée de moustiques peut efficacement s’employer à piquer le cul de l’éléphant jusqu’à le pousser à la faute, ou à le rendre fou. Les principes sont anciens (retourner les armes de l’adversaire contre lui, exploiter les failles dans sa défense, susciter la discorde chez l’ennemi), mais les moyens nouveaux.

    Il s’agit d’attaquer le Système dans sa narrative, de le marquer à la culotte, de le démasquer, d’en révéler au jour le jour les supercheries, les sophismes, les manipulations. L’objectif étant bien sûr de discréditer le Système et ses zélateurs par la mise en concurrence acharnée de sa réalité virtuelle et du réel.

    Ce combat en est au stade embryonnaire pour l’instant, et il est prévisible que le Système cherchera la parade par des astuces technologiques ou législatives.

    Mais au final, le combat est engagé. Et l’on pourrait dire que le champ de bataille se situe aujourd’hui dans cet espace infime et gigantesque à la fois que constitue le doute, la malaise que fait ressentir aux psychologies la manipulation du Système. Ce malaise est comme une faille qu’il faut élargir pour que s’y engouffre le réel. Ensuite, il appartiendra au dormeur de se réveiller en acceptant le vertige du réel, pour que puisse naître en lui l’esprit de résistance, le désir du combat.

    En attendant le coup de pouce de l’Histoire

    Aujourd’hui, le Système est profondément malade de ses contradictions. La supercherie est de plus en plus difficile à masquer. Les crises se multiplient et les seuls remèdes que sont capables de proposer les élites du Système sont de nature cosmétique bien sûr. Car le Système ne peut ni ne veut être réformé en profondeur, car ce serait admettre sa faiblesse, son inadéquation au réel. La seule préoccupation du Système est donc de protéger sa narrative, d’imposer à tous le déni du réel. Alors une crise succède à une autre crise, qui en abrite elle-même cent autres. Car le réel est là, comme un volcan, qui couve sous la cendre.

    Nous l’avons dit, la narrative du Système est en même temps sa prison. Sa force est donc sa faiblesse. Il est contrait de sauver les apparences, et sauver les apparences, c'est-à-dire la réalité virtuelle, lui impose des limitations terribles de ses capacités. Par exemple, sa machine de guerre, capable de renvoyer n’importe quel pays à l’âge de pierre, peut être réduite à l’impuissance à cause de cette narrative justement. En Afghanistan, on observe ainsi que les bavures, dès qu’elles sont connues, ont pour premier effet de compromettre les opérations en cours en obligeant le Système à clouer son aviation au sol, au moins le temps de faire oublier les crimes, de rétablir la narrative. S’en suit une suite interminable de « surge » qui ont tous ont la prétention d’être « la grande opération finale » et qui s’achèvent systématiquement en fantastiques ratages. De par les contraintes de la narrative, l’hyper-puissance militaire devient donc souvent impuissance avec, là encore, un désordre permanent qui s’installe. La hiérarchie militaire du Système se retrouve alors à hésiter sans cesse entre le désir d’atomiser les talibans, ou celui de les intégrer au gouvernement.

    C’est que le Système s’avère désormais lui aussi incapable de résoudre ses contradictions. Le Système est en crise car la structure même du Système le conduit inéluctablement vers la crise.

    Toutes les conditions sont donc réunies pour l’effondrement final. Mais à notre avis, seul un événement majeur pourra permettre aux peuples d’Occident de se libérer définitivement du Système. Un événement qui ne peut être qu’une fracture, un schisme, coup d’envoi de la dernière phase de l’effondrement attendu, à l’implosion, à la dissolution.

    Or il se trouve que la crise du Système rencontre aujourd’hui une autre crise, celle des Etats-Unis, matrice du Système justement. C’est là en effet que le monstre a été conçu, nourri, là où il a pris son envol, a déployé ses ailes.

    Notre thèse est donc que cet événement majeur tant attendu, le schisme, la fracture, pourrait prendre la forme d’une fracture transatlantique à la faveur de l’effondrement en cours de la puissance américaine.

    L’effondrement du Système américaniste et/ou occidentaliste qui enchaîne les esprits et les nations depuis la fin de la Seconde guerre mondiale pourrait donc être, pour l’Europe et l’Occident en général, le moment tant attendu de sa vraie libération, de sa renaissance.

    Encore faudra-t-il que suffisamment de dormeurs se soient réveillés d’ici là pour prendre les commandes de ce nouveau départ, et éviter que l’Histoire ne bégaie.

    C’est à notre sens l’enjeu du combat d’aujourd’hui. 

    Entrefilets (19 avril 2012)

     

    Notes :

    (1)   « J’estime que le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) contient un message très ferme tant pour l’Iran que la Corée du Nord, a déclaré le secrétaire à la Défense américain, Robert Gates en présentant la nouvelle doctrine nucléaire américaine. Ce qui signifie que si vous acceptez de jouer selon les règles nous entreprendrons la mise en œuvre de certaines obligations envers vous; si vous devenez des « proliférateurs », alors toutes les options sont sur la table

    (2)   On sait que la CIA a expérimenté (faut-il parler au passé ?) des techniques de torture psychologique qui consistent à asséner de manière répétée des chocs sensoriels aux individus pour « laver leur psychologie ». Non pas pour y inscrire des messages nouveaux (ça c’était la technique obsolète du lavage de cerveau), mais pour en faire en quelque sorte une page blanche qui puisse être dès lors ouverte et réceptive à de nouvelles perceptions (cf Naomi Klein, La Stratégie du choc).

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  • Chevènement, le PS et la doxa néolibérale...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien de Bernard Poulet avec Jean-Pierre Chevènement, publié sur le site de L'Expansion, dans lequel ce dernier revient sur la conversion du PS au néolibéralisme

     

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    Pourquoi les socialistes se sont-ils convertis au néolibéralisme peu après être arrivés au pouvoir, en 1981, se demande Jean-Pierre Chevènement dans son dernier livre, La France est-elle finie ? (Fayard, 315 pages, 19 euros). A l'approche de la présidentielle, l'ancien ministre socialiste explique pour L'Expansion les raisons de ce tournant dont ses anciens camarades ne sont jamais revenus. Au passage, il en étrille quelques-uns.

    Pourquoi pensez-vous que la gauche doit réévaluer l'histoire du tournant économique du début des années 80 ?

    A chaque étape, la gauche n'est repartie qu'en se mettant au clair avec elle-même. Or, en 1981, à l'instar de Christophe Colomb, la gauche française a cru découvrir les Indes - le socialisme -, et elle doit réaliser qu'elle a trouvé l'Amérique - le néolibéralisme. Même si l'environnement international n'était pas favorable, rien n'obligeait les socialistes français à opérer ce tournant néolibéral, ni à aller aussi loin : l'Acte unique européen, négocié par Roland Dumas, et la libération totale des mouvements de capitaux, y compris vis-à-vis de pays tiers, ou l'abandon de la clause d'harmonisation fiscale préalable qui figurait dans le traité de Luxembourg. Ou encore le Matif [Marché à terme international de France], créé en 1984, et la loi de libéralisation financière, en 1985. Tout cela était une manière de mettre Margaret Thatcher au coeur de la construction européenne, d'accepter d'abandonner l'Europe, pieds et poings liés, au capitalisme financier. En critiquant ces choix, je n'ignore pas l'existence du monde extérieur, mais on n'était pas obligé d'appliquer toutes les règles de la doxa néolibérale. On aurait pu maintenir quelque chose ressemblant à une économie mixte. L'Etat pouvait garder la maîtrise de quelques mécanismes de régulation essentiels. L'idéologie néolibérale a fait admettre comme vérité d'évangile que, grâce à la désintermédiation bancaire, les entreprises s'alimenteraient à plus faible coût sur les marchés financiers. L'entrée dans une mécanique irréversible en souscrivant à toutes les dérégulations prévues par l'Acte unique, la libéralisation des mouvements de capitaux, l'interdiction des politiques industrielles et des aides d'Etat, l'introduction de la concurrence dans les services publics, tout cela, personne ne nous le demandait vraiment.

    Quels ont été les motifs des architectes de cette politique ?Robert Lion et Jean Peyrelevade, qui dirigeaient alors le cabinet du Premier ministre Pierre Mauroy, Philippe Lagayette, qui était aux manettes de celui de Jacques Delors aux Finances, comme tous les hiérarques du ministère de l'Economie et des Finances, Michel Camdessus, directeur du Trésor, Renaud de La Genière, gouverneur de la Banque de France, et plus tard Jean-Claude Trichet, lui aussi à la tête du Trésor, ou Pascal Lamy, directeur de cabinet du président de la Commission européenne (1), tous croyaient fermement à la théorie de l'efficience des marchés. Ils étaient convaincus que tout ce qui était réglementation devait disparaître pour sortir de ce qu'ils appelaient l'"eurosclérose" et libérer l'économie des contraintes bureaucratiques qui l'empêchaient de se développer. Comment tant d'hommes dont je ne puis suspecter l'honnêteté ont-ils pu opérer pareille conversion ? Cette énigme doit être résolue.C'étaient des représentants de la haute fonction publique...

    Haute fonction publique qui avait, pour l'essentiel, sa carte au Parti socialiste, où, il est vrai, elle était plutôt orientée "deuxième gauche". Personne parmi eux n'était résolu à mener une politique un tant soit peu volontariste. Tout s'est passé comme s'il leur fallait user la gauche au pouvoir et l'amener au "tournant libéral" que la technocratie bien-pensante avait, déjà avant 1981, imaginé pour elle. On les appelait "les rocardiens" ; en fait, ils étaient partout, et Rocard n'y était pour rien ! Tout cela a été conçu par des gens qui savaient où ils allaient et qui étaient décidés à se faire un allié de la puissance des marchés. Jacques Delors était cohérent. Il a passé consciemment un pacte avec ce qu'il appelle "les vents dominants" de la mondialisation. Très peu de gens dans l'administration, en dehors de ceux qui étaient avec moi à l'Industrie, s'opposaient à ce courant dominant, et la plupart de ceux qui avaient la charge d'appliquer le programme sur lequel François Mitterrand avait été élu, en 1981, n'y croyaient tout simplement pas. Il y avait une sorte de frénésie idéologique qui voulait que plus on libéralisait, plus on était "moderne".

    Mais où était le Parti socialiste ?

    Le Parti socialiste était presque absent sur les questions industrielles, monétaires et de régulation, qui lui paraissaient très techniques. Il estimait qu'il s'agissait d'une parenthèse qui ne changeait pas les orientations fondamentales, à commencer par le souci prioritaire de l'emploi. Le premier secrétaire du PS d'alors, Lionel Jospin, s'est porté garant de cette continuité politique et de l'absence de tournant réel, d'autant que François Mitterrand affirmait haut et fort ne pas avoir changé d'orientation. Le Parti communiste n'intervient pas non plus en 1983. Car il ne veut pas apparaître comme le parti de la dévaluation. L'affaire ne se joue finalement qu'entre un très petit nombre d'hommes.

    C'est donc Jacques Delors qui a joué le rôle clé ?

    Il était lié à François Mitterrand depuis les années 60. C'était un militant chrétien social, l'homme du dialogue social au cabinet de Jacques Chaban-Delmas. Je le reconnais comme un maître en idéologie. Il a toujours agi avec une bonne conscience inaltérable. Son discours pieux déconnectait parfaitement l'économique et le social, et, avec son disciple Pascal Lamy, il était sans doute convaincu que l'autorégulation des marchés tendait à favoriser la croissance. J'aime ces deux-là. Leur dogmatisme libéral sans peur et sans reproche, tout enrobé de bonne conscience chrétienne moralisante, fait plaisir à voir !

    Delors jouait dans les médias le rôle de saint Sébastien, criblé de flèches par ses camarades de parti, alors qu'il organisait le désengagement de l'Etat et la désintermédiation bancaire. Mystification conceptuelle qui conduisit en fait à l'explosion des revenus financiers. Mais je ne crois pas qu'il ait bien vu monter le capitalisme financier à l'horizon de la société. A l'époque, très peu de gens avaient compris qu'on avait tourné la page de l'ère du New Deal et du keynésianisme. Ne mesurant sans doute pas ce qu'il faisait, c'est lui qui a mis en place la dérégulation sur le continent. Il a fait la politique que Margaret Thatcher et Ronald Reagan appliquaient en Angleterre et aux Etats-Unis.

    Mitterrand n'y comprenait pas grand-chose, mais il souhaitait un accord européen, car il ne voulait pas que la France soit "isolée". Il raisonnait comme si elle était toujours le n° 1 en Europe. Quand il poussera à l'adoption de la monnaie unique, il ne verra pas non plus que la réunification allait faire de l'Allemagne le pays central, gouvernant l'euro comme un "mark bis".

    Depuis, la conversion au néolibéralisme ne s'est plus démentie, puisque c'est Dominique Strauss-Kahn, ministre des Finances de Jospin, qui autorisera le rachat d'actions par les entreprises. Comment l'expliquer ?

    Dominique Strauss-Kahn a théorisé la non-intervention de l'Etat dans l'économie lors d'un séminaire tenu à Rambouillet en septembre 1999. Je fus alors le seul, avec Martine Aubry, à le contredire. Deux semaines plus tard, Lionel Jospin dira que "l'Etat ne peut pas tout faire". Ce qui se jouait, c'était l'idée que l'Etat n'avait plus rien à faire dans l'organisation de l'économie et que les décisions de structures devaient être laissées à des autorités indépendantes. Dominique Strauss-Kahn en fut le théoricien, ce qui l'amena, par exemple, à liquider les dernières participations de l'Etat dans Usinor.

    Si vous lisez son rapport à Romano Prodi en 2004, il est à mes yeux proprement confondant d'irréalisme. Il propose littéralement de former une nation européenne, de faire des listes plurinationales aux élections, de créer des médias transnationaux. On y sent à l'oeuvre la volonté de gommer la nation et d'en faire disparaître les repères. Comme chez Jean Monnet, qui est quand même, dès 1943, le grand inspirateur de cette construction d'une Europe par le marché. Vision purement économiciste, où la souveraineté populaire disparaît, happée par celle de l'empire (en l'occurrence américain).

    Mitterrand ne s'est-il pas servi de la construction européenne comme d'un prétexte pour cacher ses abandons ?

    Un prétexte, peut-être, mais aussi, chez lui, une conviction sincère. Je n'arrive d'ailleurs pas à rejeter sa vision, au moins quant à l'objectif final. L'idée que les peuples d'Europe doivent se rapprocher toujours plus me semble juste, surtout quand on est coincé comme aujourd'hui entre la Chine et les Etats-Unis. Le problème, ce sont les modalités de la construction européenne. Je ne crois pas que celle-ci impliquait un ralliement aussi complet au néolibéralisme. Pour construire une Europe "européenne", il ne fallait pas faire l'impasse sur les peuples, qui sont du ressort de la démocratie.

    Pour vous, le socialisme n'a plus de sens aujourd'hui...

    Je n'ai jamais beaucoup cru à l'autogestion. Mais je crois en la citoyenneté. Le socialisme, aujourd'hui, ça veut dire la perfection de la république, bref, la république sociale, comme l'avait pressenti Jean Jaurès. Le socialisme comme modèle de société toute faite dans laquelle on entrerait comme on enfile ses chaussures ne me séduit pas. Je n'aime pas me gargariser de formules dont je ne comprends pas le sens. Je suis viscéralement hostile à tout millénarisme et ne me range pas dans la catégorie des socialistes utopistes. "Aller à l'idéal, oui, mais comprendre le réel", disait Jean Jaurès.

    Pourquoi les socialistes n'ont-ils pas refait cette histoire ?

    Sans doute parce qu'ils restent prisonniers d'une confusion entre l'idée européenne et le logiciel néolibéral présent dans les traités qu'ils ont signés. Ils sont du parti du "Bien". Ils se veulent avant tout de "bons européens". L'Europe les sanctifie. Ils ne se rendent pas compte que l'Europe telle qu'ils l'ont façonnée est régie par des règles essentiellement néolibérales.

    Ils ne sont pas idiots, quand même ?

    Non, ils ne sont pas idiots, mais ils n'osent pas penser. Et puis leur ciment, c'est leur attachement au pouvoir. Etre "européen", c'est ce qui fait leur crédibilité vis-à-vis de gens qui ne pensent pas comme eux. François Mitterrand l'avait compris d'emblée en 1972 : je fais le Programme commun, disait-il, mais je suis européen, alors vous pouvez quand même me faire confiance.

    Jean-Pierre Chevènement

    Propos recueillis par Bernard Poulet (L'Expansion, 6 juin 2011)

    (1) Jacques Delors à partir de 1984.

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  • Fontenoy ne reviendra plus...

    Les éditions Stock viennent de publier Fontenoy ne reviendra plus, ouvrage de Gérard Guégan consacré à Jean Fontenoy, journaliste, aventurier et romancier des années 30, passé du communisme au fascisme, qui s'est suicidé à Berlin en avril 1945, désespéré par la défaite de l'Allemagne.

    L'auteur, qui a créé les éditions Champ libre avec Gérard Lebovici, est une des figures de l'ultra-gauche des années 70 et est, notamment l'auteur de Debord est mort, Le Che aussi. Et alors ? Embrasse ton amour sans lâcher ton fusil (Librio, 2001).

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    "« Comme je viens d’une époque, voire d’un monde, où chacun jurait de rester éternellement fidèle à ses convictions, je me suis souvent demandé pourquoi tant de figures énergiques avaient ensuite, et sans trop tarder, tourné la page de leur jeunesse. Cette question – qu’est-ce qui pousse un homme à changer de camp, à passer, par exemple, de la gauche la plus enragée à la droite la moins clémente ? – a fini par m’obséder. J’aurais pu en tirer la matière d’un pamphlet si ce n’est que je voulais toucher au-delà du cercle des convaincus. Aussi ai-je ressuscité un écrivain du siècle dernier, Jean Fontenoy, qui, pour reprendre le mot de Malraux, fut partout où cela comptait, tout du moins dans ses 20 ans : la Grande Guerre, Dada, Octobre, Maïakovski, Lénine et Trotski, Moscou et Shangai, etc. Or, lui qui était né pauvre, que l’école de la République avait su distinguer et dont les livres avaient séduit aussi bien Kessel que Colette, Blanchot que Céline, voilà que, contre toute attente (il avait dénoncé le nazisme dès 1933), il se fit soudain fasciste. Quelques années plus tard, non sans logique (et aussi par haine de la lâcheté), il ne lui resterait plus qu’à partir se suicider dans Berlin assiégée par l’Armée rouge. 
    Reste que je n’ai écrit Fontenoy ne reviendra plus que pour comprendre de quoi nous sommes faits et à quoi tiennent nos destinées. Et nos refus. » Gérard Guégan

    Ni récit ni biographie, le nouveau livre de Gérard Guégan est porté par une figure si romanesque au destin si tragique qu’il ressemble et se situe avant tout en littérature. C’est le roman de Fontenoy. Ses engagements, ses amours, ses obsessions, ses déguisements, l’histoire d’un homme qu’on rêverait tout à la fois de rencontrer et de fuir, d’aimer et de quitter, comme il n’aura cessé de se quitter lui-même. 
    C’est sans doute bien Brice Parain qui aura donné avant Gérard Guégan sur Fontenoy le sentiment le plus juste : « Il y a eu Jean (Fontenoy). Je n’ai pas eu d’autre ami parce que les autres que j’ai connus étaient ou sont moins honnêtes que lui, je veux dire plus arrangeurs au fond. Arrangeur, il l’était comme vous le dites, mais il n’a pas triché avec la littérature, ou la poésie, comme vous voudrez, il a préféré devenir une crapule plutôt qu’un protégé de Paulhan, c’est tout de même beaucoup. »"

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