Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

cerf

  • Sur la piste du cerf...

    La Fondation François Sommer et les Editions Glénat viennent de publier le numéro 17 de la revue semestrielle Billebaude, consacrée aux usages et représentations de la nature. Ce nouveau numéro est consacré au cerf. En revenant sur les mythes et les symboles dont ses bois ont été affublés, il explore en quoi le cerf est une figure centrale de l’imaginaire du sauvage en Occident, et ce depuis l’Antiquité. Il montre comment ces représentations, renouvelées dans le contexte écologique contemporain, s’entremêlent à l’histoire de la présence réelle du cerf dans les forêts européennes et françaises en particulier.

     

    Billebaude 17.jpg

    " Sur la place de brame, à la tombée du jour, le spectacle commence. Jumelles en mains, dissimulé dans un affût, le groupe fait silence, dans l’espoir que retentisse le cri profond du cerf en rut. Comment comprendre ce qui se joue chaque automne dans cette attente du brame ? Dans notre imaginaire occidental du sauvage, le cerf semble tenir une place centrale. Largement représenté dans l’art pariétal, puis associé aux divinités anciennes – Cernunnos, le dieu cornu, dont le culte semble attesté à l’âge du Fer, Artémis/Diane, déesse de la chasse – il deviendra l’emblème du pouvoir royal et l’incarnation du Christ, apparaissant sous les traits d’un cerf blanc, croix dressée entre les bois.

    Cet imaginaire trouve en partie sa source dans l'histoire de la pratique cynégétique. Gibier essentiel au Paléolithique, le cerf, contrairement à d’autres espèces, n’a pas été domestiqué au Néolithique mais déplacé et introduit par les humains, pour la chasse, dans certains écosystèmes. La poursuite de cet animal, réservée aux seigneurs, puis au roi, fait l’objet de rituels analysés par l’anthropologue Charles Stépanoff dans les traités de vénerie publiés régulièrement entre le 13e et le 18e siècle. Il y a relevé la présence insolite d’un « os corbin », qui finit par disparaître des traités à la Renaissance. Dans le geste consistant à réserver cet os au corbeau pour le remercier de son aide pendant la chasse, il voit « les vestiges d’un rapport animique à la forêt dans un Moyen Âge chrétien, par ailleurs plutôt caractérisé par une forme de relation hiérarchisée avec le reste du vivant dans laquelle l’humain est au centre de la Création ». Revenir sur les mythes et les rituels liés à la chasse et au monde sauvage, dans lesquels le cerf joue un rôle de premier plan, permet de comprendre l’évolution des rapports aux animaux et à la nature en Occident, et notamment ce qu’ils étaient avant l’ère chrétienne et la modernité scientifique. Un autre système symbolique éclairant à ce titre est celui du « sang noir », analysé par l’anthropologue Bertrand Hell qui décrit la puissance ambiguë de ce flux vital circulant entre les chasseurs et certains animaux sauvages par l’intermédiaire de la consommation du gibier. Hell identifie une continuité des cultes associés au sang noir et rendus à ceux qu’il appelle les « Maîtres du Sauvage » – Cernunnos, Artémis / Diane et enfin saint Hubert, patron des  chasseurs et guérisseurs de la rage, dans une version christianisée. Par là, ce numéro cherche à donner une profondeur historique à nos représentations et notre sensibilité contemporaine au vivant dans un contexte où différentes visions de l’animal et de la nature s'opposent frontalement. 

    Ce parcours passe aussi par la littérature, avec un dossier d’extraits de textes sélectionnés par Anne Simon, spécialiste d’écopoétique, qui met en scène, mais aussi en jeu, l’imaginaire de la puissance sauvage et sexuelle associée à cet animal. On la retrouve chez Pascal Quignard (Les Désarçonnés), où le cerf « passe son temps à vivre dans la forêt du monde, à lancer son sperme dans l’hiver », au contraire du cerf semi-domestiqué, « moitié bête et moitié arbre », de Giono (Que ma joie demeure) dont on voit « luire les yeux doux, mais mâles » (!). Claudie Hunzinger, dans Les Grands Cerfs, s’attarde, elle, sur le moment, au milieu de l’hiver et jusqu’au printemps, où « le clan se cache ». Un moment de fragilité où les cerfs, dépourvus de bois et vulnérables, « marchent avec précaution entre les troncs des arbres ». Une part essentielle de cet animal nous échappe si l’on ne prête attention qu’aux attributs spectaculaires de sa puissance. Cela est frappant lorsque l’on s’intéresse à son comportement. « Il y a beaucoup de fantasmes à propos du cerf », explique David Pierrard, gestionnaire du domaine de Belval dans les Ardennes. « Le premier d’entre eux étant la taille des bois », lié à la tradition du trophée. Si depuis le Moyen Âge, les combats entre cerfs sont érigés en modèle de virilité chevaleresque, en réalité, souligne-t-il, c’est plutôt l’évitement qui est de mise, tant le coût énergétique et le risque de blessure sont élevés. À travers les récits sensibles et nourris de longues observations proposés par Georges Gonzalez, spécialiste du comportement et de l’écologie du cerf, nous essayons de restituer le monde tissé d’habitudes, de relations de compagnonnage et d’évitements entre mâles, biches et juvéniles, au fil des saisons. On sent bien, enfin, la tension entre la puissance du cerf et sa forme de vie inquiète de grand herbivore ruminant en écoutant Virgile Parpinelli, champion d’Europe de brame, qui, dès l’automne venu, en forêt, appelle les mâles en rut : « Une forme de relation s’installe parfois, le cerf va nous regarder et ça donne des frissons. Ils ont de ces bouilles et de ces mimiques ! On dirait qu’ils ont des têtes de bébé, on a trop envie de les caresser. » "

    Lien permanent Catégories : Revues et journaux 0 commentaire Pin it!
  • Bestiaires du Moyen Âge...

    Les éditions du seuil viennent de rééditer en collection de poche un essai de Michel Pastoureau intitulé Bestiaires du Moyen Âge.  Michel Pastoureau est un spécialiste de l'histoire des couleurs, de la symbolique, des armoiries et de l'héraldique. Il est l'auteur de nombreux essais comme L'étoffe du diable (Seuil, 1991), Une histoire symbolique du Moyen-Age occidental (Seuil, 2004), L'ours - Histoire d'un roi déchu (Seuil, 2013) ou Le loup - Une histoire culturelle (Seuil, 2018).

     

    Pastoureau_Bestiaires du Moyen Age.jpg

    " Le cerf vit mille ans. Le sanglier porte ses cornes dans sa bouche. Les papillons sont des fleurs qui volent. L'écureuil est un animal diabolique, paresseux, lubrique, avaricieux. La zoologie médiévale n'est pas la zoologie moderne. Plusieurs notions qui nous sont aujourd'hui familières sont alors inconnues : insecte, mammifère, cétacé, domestication, etc. En outre, la frontière est floue qui sépare les animaux réels des animaux chimériques et les animaux domestiques des animaux sauvages.
    Le Moyen Age est très bavard sur l'animal. Et, à cet égard, les bestiaires enluminés en sont de riches témoignages. Agrémenté de 62 illustrations, cet ouvrage s'intéresse à la composition des bestiaires médiévaux et engage une étude thématique des espèces où sont décrites leurs propriétés physiques et morales, leur dimension symbolique et religieuse, mettant en lumière différentes histoires, croyances ou anecdotes les concernant. "

    Lien permanent Catégories : Livres 0 commentaire Pin it!
  • L'esprit du cerf !...

    Les éditions Le Bord de l'Eau ont récemment publié L'esprit du cerf - La forêt au coeur de l'imaginaire occidental, un petit essai d'Antoine Peillon. Journaliste, Antoine Peillon a beaucoup travaillé sur les questions liées à l'environnement et se veut aussi un naturaliste chevronné.

    esprit-du-cerf.gif

    "En cette « Année internationale des forêts » (ONU - 2011), L’Esprit du cerf entend ressusciter la puissance imaginaire d’un élément naturel - la forêt – présent dans l’esprit humain depuis la préhistoire, et faire prendre conscience du rapport quasi-vital qui nous lie toujours à ce symbole par excellence de la nature. Cette enquête d’anthropologie historique confirme, en effet, combien la sylve est le milieu originel des rêves et des représentations de la civilisation occidentale, de son imaginaire fondamental, combien nos contes et légendes, nos mythes, notre pensée et nos sentiments, voire nos mœurs sont enfants des bois.
    De plus, au-delà de l’enjeu de la connaissance, l’état catastrophique du monde nous commande, aujourd’hui, de recevoir à nouveau l’enseignement de cet imaginaire, d’en comprendre le sens, de s’en inspirer, mais aussi de l’entendre comme prescription de nouvelles façons de vivre, de travailler et d’aimer selon le « principe Responsabilité ». Ce livre participe ainsi au projet de ré-enchantement du monde, condition sine qua non d’un avenir durable de l’Humanité.
    En suivant les aventures du dieu gaulois Cernunnos, du mage Merlin ou du chevalier courtois Perceval le Galois, en méditant sur l’amour auprès de Bernard de Clairvaux ou de François d’Assise, en galvanisant notre liberté dans la trace cavalière de Descartes, ou en laissant, avec Bergson, poindre dans tout notre être l’intuition de la durée, nous marchons toujours en forêt, en leur bonne compagnie, de sentiers en clairières, de fourrés en lisières, laissant jouer amoureusement la lumière avec l’ombre, l’esprit avec la matière, le passé avec le présent, notre avenir avec l’espoir.
    L’« esprit du cerf » nous conduit vers une nouvelle alliance entre les hommes et l’ensemble du cosmos. Enchanteur, il prophétise la sortie de l’unidimensionnalité de l’homme qui n’est pas que raison et la fin du règne matérialiste de la quantité. Il exige révolte contre la violence, volonté de partage, éthique de la discussion, responsabilité vis-à-vis de toutes les créatures, choix de la vie et don de l’amour."

    Lien permanent Catégories : Livres 0 commentaire Pin it!