Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 11 juillet 2017 et consacrée à la réforme du Code du travail et à ce qu'elle signifie...
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Vous pouvez découvrir ci-dessous une chronique d'Éric Zemmour sur RTL, datée du 11 juillet 2017 et consacrée à la réforme du Code du travail et à ce qu'elle signifie...
Nous vous signalons la parution récente du numéro 72 (Solstice d'été) de la revue Terre & Peuple, dirigée par Pierre Vial, dont le dossier est consacré à Dominique Venner. On trouvera également un article consacré à Jean Monnet.
Vous pouvez commander cette revue sur le site de Terre & Peuple.
Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Pascal Gauchon , historien et spécialiste de la géopolitique, publié dans le dernier numéro de la revue Conflits (n°14, juillet-août-septembre 2017), dont le thème était consacré aux populismes...
Le populisme. Flux, reflux, flux ?
Il y eut le Brexit et l’élection de Trump. Puis les élections autrichiennes où le représentant du FPÖ échoua de peu. Et les présidentielles françaises où les candidats classés comme populistes atteignirent plus de 40% des voix au premier tour. Les coups de boutoir des populistes sont-ils en train de saper les murailles de ce qu’ils appellent le « système » ?
Curieux terme que celui de « système ». Il paraît encore plus vague que celui de « populisme », il permet aux critiques d’assimiler ce dernier à un mouvement inconsistant qui part à l’assaut d’une chimère à coups d’arguments approximatifs et grossiers – une sorte de Don Quichotte monté sur Sancho Panza.
Pourtant il existe bien une convergence des intérêts et des élites. Voyez tous les scrutins que nous avons évoqués : les syndicats de patrons et de salariés, les présidents d’université et les mouvements étudiants, la grande presse et le showbiz, les obédiences maçonniques et les représentants des religions, les partis socialistes et libéraux… les voilà tous unanimes, tous mobilisés (1). Ces organisations que tout oppose parlent alors d’une même voix. N’est-ce pas avouer que le terme de «système» n’est pas dépourvu de signification ?
Tentons dès lors de le définir : une société composée d’organisations et de communautés qui, avec le temps, ont établi entre elles des compromis (les populistes parleraient de compromissions), chacune régentant un territoire comme un fief que les autres lui reconnaissent. On peut voir dans cet équilibre la preuve d’une société intégrée, apaisée et démocratique. Sauf que la grande masse de la population est censée faire confiance aux dirigeants de ces organisations – les « élites » – et rester silencieuse.
Le « système » peut se défendre. Réagissant en bloc, il avait déjà forcé Tsipras à se déjuger. Il a contenu les populistes lors des dernières élections en Europe, ainsi aux Pays-Bas ou en France, avec comme principal argument la peur de l’inconnu. Nul doute que ces résultats encourageront l’abstention, arme suprême. Au Royaume-Uni, les adversaires du Brexit n’ont pas renoncé à le faire capoter en jouant sur le temps. Aux États-Unis, les élites ont réussi à paralyser les premières initiatives de Trump – manifestations hostiles, révolte des grandes villes contre les décrets sur l’immigration, protestations des patrons de la Silicon Valley, action des juges, attaques de la presse. Et l’on a vu Donald Trump revenir sur une partie de ses engagements, du moins pour l’instant. Qu’il change encore d’avis et la procédure d’impeachment sera enclenchée. Si la menace devient trop forte, on peut toujours modifier le mode de scrutin comme certains l’ont suggéré après le Brexit. D’ores et déjà le référendum est discrédité, assimilé à la «fausse démocratie»: en 2005 le vote très clair des Français et des Néerlandais avait été modifié par un tour de passe-passe et déjà on se prépare à jeter aux poubelles de la démocratie la consultation plus modeste de juin 2016 sur la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
Le « système » peut être rassuré. Les populistes sont divisés (entre gauche et droite), leurs moyens limités, leur capacité à diriger incertaine, leurs maladresses surprenantes. Ils ont été contenus partout ou presque. Un immense « ouf ! » a retenti. Ce soulagement se double d’une arrogance qui ne se dément pas (2).
N’ont-ils pas compris que c’est ce mépris qui nourrit la colère ? Que les causes profondes du surgissement du populisme n’ont pas disparu ? Et qu’après le reflux peut revenir le flux ?
Pascal Gauchon (Conflits n°14, juillet-août-septembre 2017)
Notes :
1. La cohésion du « système » n’est pas toujours aussi nette qu’elle l’a été en France. Au Royaume-Uni, la grande presse n’est pas monochrome. Aux États-Unis, le monde des affaires s’est divisé à propos de Trump et une partie des Églises l’a soutenu.
2. Voir Jacques Séguéla sur C News, évoquant la supériorité de la France des villes – il avait d’abord parlé de « la France d’en haut ». À noter aussi Christophe Barbier expliquant que les éditorialistes sont des « tuteurs sur lesquels le peuple, comme du lierre rampant, peut s’élever » (Journal du Dimanche, 14 avril). Ou Lord John Kerr, sous le coup du Bréxit : « Nous, Britanniques de souche, sommes si stupides que nous avons besoin d’une injection de gens intelligents et jeunes venus de l’extérieur. » Ou encore James Traub dans Foreign Policies (28 juin 2016) : « Il est temps que les élites se dressent contre les masses ignorantes. » Provocation ou inconscience ?
Dans ce nouveau numéro de l'émission de TV Libertés, « Les idées à l’endroit », Alain de Benoist reçoit Aristide Leucate, docteur en droit, journaliste et essayiste, et Alexandre Franco, universitaire, professeur de philosophie au Portugal et au Brésil. Ils évoquent ensemble la figure et la pensée de Carl Schmitt, le grand juriste et philosophe politique allemand, auteur notamment de La notion de politique (Calmann-Lévy, 1972 et, en collection de poche, Flammarion, 1992).
Les éditions du Lore viennent de publier un essai de Jean-Louis Lenclos intitulé Les idées politiques d'Henry de Monfreid. Une façon de redécouvrir sous un angle nouveau l’œuvre de l'auteur des Secrets de la Mer rouge , de La croisière du hachich ou de Mes vies d'aventure.
" Cet ouvrage inédit présente le mémoire universitaire de droit soutenu par Jean-Louis Lenclos en octobre 1977, sous la direction du Professeur De Lacharrière, à l’université de Parix X- Nanterre.
Lorsqu’on consultait les proches d’Henry de Monfreid, ils répondaient invariablement : « il n’avait pas d’idées politiques, cela ne l’intéressait pas ; c’était un Aventurier ! »
Contrairement à divers fantasmes colportés, Henry de Monfreid ne fut à aucun moment cet individu louche, dénué de sens moral et de scrupules que recouvre habituellement ce terme d’aventurier.
En se penchant méticuleusement sur son œuvre littéraire prolifique, ce livre explore les idées politiques bien tranchées d’Henry de Monfreid.
Certaines de ses idées sont à rapprocher des penseurs traditionalistes tels que Louis de Bonald ou Joseph de Maistre, mais aussi Nietzsche par certains aspects.
Par ailleurs, Henry de Monfreid semble acquis à l’idée de hiérarchisation des races humaines. Plus surprenant, il vécut une extase quasi-religieuse en la présence de Mussolini…
Cette étude très bien documentée vous fera découvrir les grandes lignes politiques d’un homme qui considérait l’homme comme une créature foncièrement mauvaise et qui n’eut de cesse de s’affranchir des servitudes humaines. "
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jorge Vujic, cueilli sur Polémia et dans lequel il s'interroge sur les conditions de l'efficacité d'une action conservatrice-révolutionnaire visant à abattre le système dominant. Il rappelle notamment la nécessité de penser politiquement le « système des objets » qui enserre nos vies et conditionne nos façons de penser...
Une praxis révolutionnaire et conservatrice est-elle encore possible ?...
Trop souvent on oublie que la reconduction au pouvoir du Système dominant et de la classe gouvernementale tient plus à l’internalisation et la reproduction des modes de pensée dominants au niveau social, culturel, sur le plan individuel comme sur le plan collectif.
On se souvient que la praxis, notion philosophique théorisée par Aristote dans l’Ethique à Nicomaque et qui initialement renvoyait à l’idée d’une pratique ou une action qui, transformant le sujet, a été plus tard reprise par les marxistes, par Antonio Gramsci et les situationnistes pour lesquels la philosophie de la praxis désignait la pratique qui se reconnaît elle-même par la théorie qui découle de son action, mais qui, de par sa fonction révolutionnaire, devait transformer les esprits.
Force est de constater que depuis Mai 68, le discours libertaro-marxiste a fait bon ménage avec le capitalisme libéral qui se traduit aujourd’hui par une praxis sociétale parfois schizophrène d’hyper-individualisme festif et de domination capitaliste marchande que l’on accepte comme une fatalité irréversible. Promouvoir une politique de gauche et des valeurs de droite, employer un discours à la fois révolutionnaire et conservateur impliquerait au préalable de reconnaître, en dépit des avancées les plus fines sur le plan social et politique, l’absence d’une praxis adéquate, susceptible de transformer les rapports sociaux, les façons de sentir, de penser. En effet, face à la praxis bien rodée du marché déstructurant du social, il faudra jeter les bases d’une praxis de restructuration des valeurs. D’autre part, on oublie souvent que la technique, les gadgets omniprésents dans notre société hightech constituent de puissants vecteurs d’individuation et de socialisation et trop souvent d’aliénation plus que les principes de l’éducation familiale et scolaire. Il s’agit ici de ce que Jean Francois Dufour appelle les percipiens (le principe de sentir), l’idée de forces mécaniques pesant sur notre pensée et notre entendement et qui préexistent et façonnent notre comportement, notre agir, notre praxis. Jean Baudrillard parle de « système des objets » pour rendre compte de cette mutation dans nos sociétés postmodernes du sens et du rȏle des objets de l’utilité vers la matérialité autonome (qui annule le symbolique), indéfiniment modulables et constituant un ensemble systémique cohérent de signes.
Notre rapport au monde se réduit le plus souvent au rapport aux objets quotidiens avec lesquels nous nouons une complicité profonde entre les investissements psychologiques, souvent induits et extorqués, et les impératifs sociaux de prestige, entre les mécanismes projectifs et le jeu complexe des modèles et des séries. Pier Paolo Pasolini parlait du vrai visage du fascisme qu’il voyait dans la société de consommation, mais non plus celle d’une mécanique d’exploitation extérieure à nous-mêmes, mais d’un système de pensée et de comportement internalisé par nos sens et notre mental.
Introduire une nouvelle praxis réellement révolutionnaire et non purement expérimentale sur le plan social et culturel suppose alors de dégager un nouveau sens du social, de produire de nouvelles formes de vivre-ensemble qui remettraient en cause de façon profonde la praxis dominante de la « valeur marché », le « fonctionnement » dont parle Gilbert Simondon, qui réside, non plus dans l’usage, mais « dans sa dimension anthropologique », dans le marché en tant que valeur et mode de reproduction des rapports sociaux.
Même si les résultats des dernières élections parlementaires et présidentielles dans de nombreux pays européens confirment la poussée de mouvements anti-Système populistes de gauche comme de droite, on est loin d’une remise en cause générale et massive du Système libéral marchand dominant, susceptible de menacer l’ordre établi. Le conditionnement médiatique, la manipulation mentale et politique des masses semblent encore marcher à merveille en tant que mécanique à discréditer et à démoniser les alternatives politiques potentielles. La victoire de Macron en France, qui l’opposait au second tour de la présidentielle à Marine Le Pen, en est une parfaite illustration. L’abrutissement politico-médiatique et la production de la peur sociale principalement dans les classes moyennes déclassées permet encore de reproduire les schémas de domination et de gouvernance oligarchique. On se rappellera à ce titre du Prince de Machiavel qui renvoie à l’emploi de la ruse, de la fraude et de la corruption, les armes de la ruse du «renard », afin d’empêcher la violence de masse et les soulèvements révolutionnaires, un softpower qui constitue le moyen de domination principal de la classe gouvernante.
Pourtant ce constat d’échec nous permet de nous interroger sur l’avenir du discours anti-Système qui articule à raison le fossé grandissant qui se creuse entre l’oligarchie et le peuple, et plus précisément sur la question de l’existence et l’efficacité d’une praxis réellement révolutionnaire et son adéquation avec ce que l’on peut appeler les valeurs, le discours, le narratif conservateur. Car si une infime minorité se reconnaît dans le discours et les valeurs anti-Système, lesquelles circulent par les réseaux d’informations alternatifs, on est encore loin de l’assentiment de larges masses de citoyens qui baignent dans le breuvage quotidien des médias officiels et se contentent très bien de ce déni de vérité. « L’esprit » d’une époque dépend de l’ensemble de ses faits sociaux, y compris le développement technique. Dans ce sens, les objets techniques qui s’autonomisent de plus en plus portent avec eux un impact considérable sur la manière dont nous nous représentons le monde, même des notions très abstraites comme le temps ou l’espace. Bien sûr, le rȏle des idées et le combat des idées tiennent encore une place importante dans la transformation des esprits, mais le changement de paradigme dans la praxis sociale comme cela été le cas pour le rȏle de la technique dans les révolutions scientifiques étudiées par T. Kuhn (dans La Structure des révolutions scientifiques) sera déterminant.
Le mérite de Kuhn a été celui de développer la thèse selon laquelle une science progresse de manière fondamentalement discontinue, c’est-à-dire non par accumulation mais par ruptures. Ces ruptures, appelées révolutions scientifiques, sont selon Kuhn analogues à un renversement des représentations (ce que les psychologues de la perception appellent un gestalt switch). Appliqué à la sphère sociale et politique, ce renversement des valeurs, qui correspondrait à une rupture épistémologique de paradigmes, aboutirait donc à l’issue de cette crise de légitimation à l’avènement d’un nouveau paradigme de système de valeurs. Pourtant, nul ne sait à quel moment, dans quelle situation de crise survient ce facteur d’anomalie perturbateur qui préside à la naissance d’un nouveau paradigme révolutionnaire, processus cyclique de gestation qui peut très bien perpétuer une longue agonie avant sa pleine reconnaissance et son adoption sociale.
Alors que les grands systèmes d’idées ne mobilisent plus, il faudra s’interroger sur quelles bases praxistes et idéologiques reconstruire. Alors que l’on dit volontiers que la révolution est une nostalgie de la gauche, force est de constater que la contre-révolution, voire les nombreux mythes de la « renaissance » de la « restauration », de l’ordre, constituent aussi une certaine forme de mélancolie de la droite, dont il est difficile de faire le deuil. A ces mythes sotériologiques et holistes se sont substitués, de façon indolore, des mythes technicistes consuméristes : le mythe de l’ouverture, le mythe de la communication, le présentisme, comme celui d’une mythologie du portable beaucoup plus attrayant pour les jeunes générations que celui des grandes luttes politiques et sociales ou du mythe Sorelien de la grève générale.
Cette praxis du marché est celle de l’ostensible, du conditionnement opérant que génèrent les concepteurs de produits par la dissémination de besoins artificiels vérifiables dans le domaine numérique de la communication. Un conditionnement basé sur une stratégie de dépendance qu’on dissimule derrière le leurre d’une utilisation agréable et supposée enrichissante, pouvant préparer le terrain de l’addiction. Le facteur du libre choix et de la personnalité diminue considérablement, alors que l’emprise manipulatrice et l’autorégulation des comportements sociaux neutralisent la capacité réactive de résistance au stress social à mesure que s’amoindrissent les facultés de concentration et de l’intelligence émotionnelle. Il s’agit bien d’une praxis de la narcomanie sociétale qui fonctionne sur un mode de dépendance-approvisionnement marché/dealeur et junkies/consommateur, une oniomanie organisée et généralisée, qui se traduit par de nombreuses pathologies sociales. Cette consommation compulsive est surtout visible sur le marché du smartphone par une hausse constante de la dépendance ou l’addiction au smartphone, une cyberaddiction (dépendance à Internet), pathologie s’exprimant par un curieux mélange d’anxiété phobique, d’euphorie hystérique et de dépression.
A l’administration des choses il faudra pourtant, tout comme le soutient Bruno Latour, re-politiser le « système des objets » et substituer le gouvernement des hommes, dire que tous les objets, la technique, ne sont pas neutres et même nocifs. En effet, alors que l’on a dépolitisé les questions de nature, il conviendra de re-politiser la question de l’impact sociétal des objets Il faudra se réapproprier l’utilité et la finalité des choses et dénoncer les stratégies de l’ostensible du marché. L’homme occidental n’est plus « mobilisable » au sens de l’ « Homme-masse », il est un agent-réseau autoconstitué connectable à l’infini, volontairement soumis à une discipline de dé-virilisation, du féminisable et de l’infantilisation à outrance. En un mot, c’est un objecteur de dé-conscience né, récalcitrant à toute forme d’engagement, de conscientisation, à la fois un nomade-déserteur. Lorsque Salvador Dali parlait de la télévision comme « instrument de crétinisation universelle », il annonçait déjà l’ouverture vers une humanité « homononcule » en voie de trollisation.
Jure Georges Vujic (Polémia, 7 juillet 2017)
7/07/2017Notes
– Jean Baudrillard, Le Système des objets, Gallimard, 1968 [1978].
– Gilbert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, Aubier, Paris 1958 ; dernière réédition corrigée et augmentée, Flammarion, Paris 2012.
– Thomas Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques, Coll. « Champs/791 », Flammarion, Paris 2008.
– Bruno Latour, Enquête sur les modes d’existence : Une anthropologie des modernes, La Découverte, Paris 2012.