Laurent Schang, déjà auteur d'une biographie de Maître Morihei Ueshiba, le fondateur de l'Aïkido, aux éditions Pygmalion (2004) ainsi que d'un excellent recueil de nouvelles, Le constat d'Occident, aux éditions Aléxipharmaque, a récemment publié aux éditions Le Mort-Qui-Trompe, un roman de géopolitique-fiction intitulé Kriegspiel 2014 - Un livre dont Vladimir Poutine est le héros...
"Décembre 2014. Une escadrille de bombardiers stratégiques chinois pénètrent dans l’espace aérien taïwanais et survolent T’ai-pei à basse altitude. La Chine et le Japon sont à couteaux tirés. Au même moment, à des milliers de kilomètres, un commando russe s’apprête à prendre le pouvoir au Turkménistan. Le 26 décembre, les Supergrands en viennent aux mains sans préambule diplomatique ni coup de semonce.
En quelques jours, le pourtour du continent eurasiatique - « l’arc d’instabilité » des géopolitologues du 21e siècle -, Ukraine, Caucase, Asie centrale, Sud-est asiatique, est devenu le théâtre d’un conflit mondial aux multiples enjeux (énergétiques, ethniques, politiques et économiques).
La Quatrième Guerre mondiale vient de commencer. Qui en sortira vainqueur ?"
Il est possible de télécharger un extrait du livre pour se faire une idée du style de l'auteur :
" [...]Takeo Terasaki, 21 ans, dont quatre passés au collège militaire d’Edajima, était assis aux commandes de son chasseur F-2A. Absorbé par la danse des aiguilles sur les cadrans, son visage poupin bruni sous le casque ne trahissait aucune expression. Il lui semblait avoir attendu cet instant toute sa vie. Les formidables tirs de barrage n’entameraient pas sa détermination. Enfin, après onze minutes de vol, les côtes de Taiwan se découpèrent dans le lointain. Tout en étirant ses jambes, Terasaki releva la manchette de son gant de cuir noir pour voir l’heure à sa montre. « Descente à 500 pieds / vitesse 450 noeuds maintenue. »
Midi. Le destroyer n’allait pas tarder à apparaître au radar. La cible dessinait un point lumineux grandissant sur l’écran. Il vérifia une dernière fois les données du tableau de bord. Pour mener sa mission à bon terme, il fallait que l’exercice de simulation fût calculé au chiffre près. « Check. »
Bourré d’électronique, ses quatre missiles antinavires ASM-2 arrimés, un dilettante aurait dit du Junichi Sasai, un Mitsubishi F-2 de la classe A, la copie conforme du mythique chasseur F-16. Sauf qu’un seul de ces appareils coûtait trois fois plus cher en dollars et qu’avec ses onze mètres d’envergure, ses quinze mètres de longueur et ses cinq mètres de haut, le volume du F-2 était de 25 % supérieur à celui de son homologue états-unien.
Cloué au sol, le F-2A tenait moins du cygne sauvage, qu’on voit l’hiver descendre des monts de Sibérie en direction des tropiques, que du grand albatros, disgracieux et empesé. Mais là-haut, une fois libéré de la pesanteur, ses 22 200 kilos de poussée faisaient de lui le plus redoutable des prédateurs volants. Le soleil avait maintenant atteint son zénith. D’une main, le pilote rabaissa la visière de son casque ; de l’autre, il arma le système de tir optique, les 250 obus de son canon de 20 mm Vulcan au bout de la gâchette.
Ainsi, serait-ce donc
que j’appartiens aux cieux ?
Rester concentré : économie de gestes, pléthore de moyens, sa volonté ne devait fléchir sous aucun prétexte, la trajectoire de son jet tendue vers un unique objectif, celui qui l’avait guidé jusqu’ici, à l’intérieur de ce cockpit blindé, ce 12 décembre 2014 demain historique. Il n’aurait pas droit à un second passage, il le savait, sa déjà solide expérience lui ayant démontré que, malgré toutes les heures d’entraînement, les ordinateurs les plus sophistiqués, les événements ne se déroulent jamais comme prévu. Rien du kamikaze fantasmé par nos esthètes femelles chez le sous-lieutenant Takeo Terasaki, fan des films de Wesley Snipes et amateur de soccer dans le civil, non, juste une raideur, un certain port de tête, qu’on attribuera tantôt à la fierté de l’uniforme, tantôt aux séances de kendo.[...]"