Les éditions Pierre-Guillaume de Roux viennent de publier un roman d'Olivier Rey intitulé Après la chute. Chercheur au CNRS et enseignant à l'école Polytechnique, Olivier Rey est l'auteur d'un essai remarquable intitulé Une folle solitude - Le fantasme de l'homme auto-construit (Seuil, 2006). Il a également contribué au dernier numéro de la revue Krisis (Sciences ?, n°39, septembre 2013).
" « Eh bien quoi, le Moyen Âge ? C’était une époque concrète. Pour manger on ne réchauffait pas de barquettes aux micro-ondes, pour faire la guerre on n’envoyait pas de missile téléguidé. Les choses avaient l’apparence de ce qu’elles étaient. Prends une épée, ou une masse d’armes : pas besoin de réfléchir pour saisir le danger ! Alors que les mines actuelles, avant que ça explose on pourrait aussi bien les prendre pour des roues de brouette, ou des essoreuses à salade. Un homme qui passait sur son cheval pouvait être érotique. Aujourd’hui, un homme qui passe dans son monospace n’a rien d’érotique. Les voitures, les bureaux, les ordinateurs, les immeubles et les pavillons, les voyages en avion, les vacances-club : rien de tout cela n’est érotique. Divorce radical entre la vie moderne et l’érotisme. En toute logique les relations sexuelles auraient dû disparaître, et les vieux interdits ont été liquidés parce qu’au point où nous en sommes, ce serait imposer un régime amaigrissant à une anorexique. »
C’est Alix, jeune doctorante en histoire médiévale, qui constate. Plus caustique qu’une Bridget Jones, seule, face au monde saturé de chiffres, de ratios et de performances en tous genres. Ce n’est plus l’homme idéal qu’elle recherche, à travers des expériences érotiques plus décevantes les unes que les autres, mais celui qui lui ferait reprendre contact avec le réel.
Olivier Rey nous entraîne au cœur d’une allégorie de l’égarement, aussi glaçante que savoureuse, qui s’étend entre l’infiniment petit d’une société hyperquantifiée et les aspirations sans limites d’une jeune femme en quête de réalité et de salut. "