Les éditions Le Retour aux sources viennent de publier Oliganarchy, un roman de Lucien Cerise. Auteur principal de l'essai décapant intitulé Gouverner par le chaos (Max Milo, 2010), Lucien Cerise est un esprit libre dont on peut découvrir les idées dans un excellent entretien publié dans le dernier numéro de la revue Rébellion.
" Du groupe de Bilderberg au Bohemian Club, entre les lobbies de Washington et de Paris, William Bergman, un spin-doctor de la Maison-Blanche, travaille à l’élaboration du Nouvel ordre mondial, parachèvement de la lutte des classes au bénéfice du Capital. Ingénierie sociale, reality building, crises provoquées dans tous les domaines, gouvernance par le chaos et l’anarchie, telles sont ses armes. Pendant ce temps, un Français déprimé commence à se réinformer sur Internet et à comprendre pourquoi il va si mal… et le monde également.
« La leçon la plus importante que William avait retenue de son père était la suivante. Depuis des siècles, les guerres entre peuples et nations servaient de paravent à une guerre beaucoup plus discrète, une guerre cognitive que les élites dirigeantes de toutes les époques et de tous les pays avaient déclarée aux populations qu’elles administraient. C’était une guerre parfaitement légitime, une guerre de survie. Les élites dominantes étant minoritaires par rapport à la majorité dominée, elles avaient toujours été menacées de disparaître sous la pression du nombre et des soulèvements populaires. Elles avaient donc le droit de se défendre, comme elles avaient le droit à la vie, ainsi que le stipulait l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. La meilleure défense étant l’attaque, elles étaient donc moralement fondées à mettre en pratique des frappes préventives sous la forme d’opérations psychologiques de manipulation visant à désarmer mentalement le peuple et à rendre ainsi impossible toute révolte ou révolution de sa part » "
Commentaires
Un roman n'est jamais une démonstration, ne démontre jamais rien. Dire après-coup "admirable comme ce roman était prémonitoire !" démontre par contre qu'il n'a rigoureusement servi à rien, sinon à occuper un moment ses lecteurs. Par contre un roman peut très bien faciliter la résignation. Après coup, on dit "pas étonnant, c'était écrit, inévitable, Tartempion l'avait bien raconté".
Vous êtes un impuissant, complètement passif ? Lisez un roman !
Les Français ont du choix : 900 romans sont édités chaque année en France. De quoi tuer le temps.
Bien au contraire ! Le vrai roman est politique, à l'égal des Déracinés de Maurice Barrès. Certaines choses qui ne peuvent être exprimées dans un essai prennent une autre profondeur dans un roman. C'est en tout cas ce qui se passe avec Oliganarchy. J'avais lu et vraiment apprécié Gouverner par le chaos, que j'ai fait lire autour de moi à une vingtaine de personnes : je n'ai eu que des retours positifs. J'ai lu Oliganarchy, et je trouve que Lucien Cerise va encore plus loin dans son décryptage des méthodes d'ingénierie sociale appliquées. Entrer dans la peau de divers personnages permet de cerner la psychologie des prédateurs froids qui nous gouvernent. Ce roman n'est pas à prendre comme un "roman", mais plutôt comme un essai romancé, un approfondissement de Gouverner par le chaos. Mais je pense qu'avant d'avoir émis vos critiques, vous aviez pris la peine de le lire...
L'éditeur a oublié d'indiquer en première couverture : Roman pas à prendre comme un roman. Y a-t-il aussi des essais pas à prendre comme un essai ?
Une oeuvre de fiction n'a jamais rien prouvé. Elle donne d'abord du plaisir à son auteur, il s'amuse, il s'occupe. Même chose pour ses lecteurs qui préfèrent fauteuil ou chaise longue à l'action, ce sont des impuissants, des culs-de-jatte.
Autre remarque, on peut avoir un grand plaisir à lire une oeuvre de fantaisie, et une grande souffrance à lire un rapport sérieux sur une situation donnée. Lequel des deux se vendra le mieux ? C'est comme les MacDonald : la preuve qu'on y mange le mieux, c'est qu'ils ont le record de fréquentation, pas vrai ?