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réactionnaire

  • L’homo reactus, le progressiste et le conservateur...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Valentin Fontan-Moret, cueilli sur Philitt et consacré au conservatisme face au tempérament réactionnaire et au progressisme...

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    L’homo reactus, le progressiste et le conservateur

    Confondus à tort et à dessein dans le langage médiatique, le réactionnaire et le conservateur ont pourtant de quoi nourrir une querelle d’importance. Leur rapport au temps et à l’Histoire les distingue en même temps qu’il structure leur comportement politique et esthétique.

    Rien n’est moins évident que de définir le réactionnaire, et nombreux sont ceux qui continuent d’entretenir le flou. Si Joseph de Maistre et Louis de Bonald sont parfois présentés comme les réactionnaires archétypaux, ils ne répondent pourtant pas à cette définition communément admise, qui est aussi la nôtre, selon laquelle le réactionnaire souhaite un retour en arrière. Ces penseurs dont la téléologie était avant tout chrétienne, ont laissé la place à un vague héritier que nous appellerons homo reactus. Réactionnaire contemporain manifestement plus influencé par la pensée moderne, idéaliste et républicaine héritée des Lumières, que par la tradition eschatologique catholique, à l’image de messieurs Onfray et Zemmour. Ceux-là n’en ont guère après la Révolution française, mais bien plus après la très bourgeoise et parodique révolte de mai 68. Et pendant que l’homo reactus s’écharpe avec son pendant progressiste, le conservateur s’impose, avec une vision nouvelle de l’Histoire, comme une alternative salutaire.

    L’Homo reactus au pays du progrès

    En réalité, la petite armée des réactionnaires médiatisés valide à son insu les postulats de ses adversaires. La modernité, dans laquelle la Révolution française nous a jetés en donnant corps aux idées des Lumières, repose sur une téléologie moralisée, héritée de la pensée d’Hegel. La pensée moderne conçoit l’Histoire de façon linéaire : des âges sombres de la nuit des temps, l’humanité progresserait sans cesse vers la « fin de l’Histoire », soit vers le triomphe des Lumières libérales et rationalistes. Le temps qui passe serait synonyme de croissance irrépressible, inévitable et nécessaire du Dieu Progrès. Le sort de l’humanité serait la convergence de tous les êtres qui, unis dans le même Esprit – au sens hégélien du terme, et selon cette idée que la raison de l’homme est semblable à celle de Dieu – peuplent la Terre. Ainsi pour Hegel, l’absolu progrès est incarné par Napoléon Ier, porteur de la lumière révolutionnaire universaliste et républicaine, entrant majestueux dans Iéna en 1806 : là est la fin de l’Histoire, le progrès absolu qui gagnera le monde entier à force de conquêtes. À l’horizon se dessine l’avènement de l’État universel et homogène rêvé par le commentateur et continuateur d’Hegel Alexandre Kojève.

    Telle est l’idée qui continue d’alimenter la logique des progressistes de tout crin. La téléologie, d’imprégnation chrétienne, a paradoxalement gagné le camp de l’athéisme en contaminant, des Lumières jusqu’au marxisme, des philosophies anti-chrétiennes. Mais telle est aussi la conception que les réactionnaires contemporains valident, en s’affirmant en hommes du passé portant des idées du passé. Des idées révolues en somme, dépassées par la marche du prétendu progrès, confondue avec celle du temps, à laquelle ils assistent hagards et néanmoins contents de leur impuissance qui pare leurs propos d’un tragique dont ils goûtent l’amertume.

    Le rapport dialectique qui oppose le progressiste à l’homo reactus ne joue résolument pas en faveur de ce dernier, à moins que sa quête ne soit qu’esthétique. Lui qui valide la téléologie dominante et se place du côté des destitués, des perdants, de l’obsolescence, ne peut rien attendre du présent. Son discours est comme inopérant, inapte à influencer le cours des choses. Tout juste pourra-t-il convaincre quelques-uns de ses auditeurs les moins rongés par la morale médiatique du caractère aussi dramatique qu’inévitable de la marche du temps. Mais n’a-t-il pas tort sur ce point ?

    De Burke à Mohler : une philosophie alternative de l’Histoire

    Si le triomphe de la philosophie linéaire déchristianisée de l’Histoire est à dater de la Révolution française et de la controverse qu’elle a suscité dans toute l’Europe, on ne peut pas faire l’impasse sur l’intuition d’Edmund Burke, contemporain de ce grand chambardement, qui structure la pensée conservatrice. Contre l’obsession révolutionnaire de la mise à mort de l’ordre ancien au profit d’un progrès compris comme une sorte de deus ex machina, Burke croit à l’évolution. Pierre Glaudes parle de « sédimentation » : le présent se nourrit du passé et l’Histoire apparaît donc comme un mouvement de réforme ou de restauration permanente. C’est l’exact inverse de l’idéologie révolutionnaire et néo-idéaliste qui consiste en une dialectique de la destruction et de la reconstruction, le présent se construisant contre le passé.

    Plus radicaux, les auteurs de la Révolution conservatrice allemande prolongent l’intuition de Burke en rupture totale avec cette conception résolument moderne de l’Histoire. Armin Mohler, disciple d’Ernst Jünger et historien de la Révolution conservatrice, nous invite à considérer l’Histoire non pas de façon linéaire, ni même purement cyclique, mais sphérique, à la suite de Friedrich Nietzsche. Si l’idée hégélienne que nous avons définie autant que la conception cyclique de l’histoire sont frappées d’un certain fatalisme, concevoir le temps comme une sphère revient à considérer que toutes les bifurcations sont toujours possibles. Il n’y a plus de sens inévitable, de début ni de fin, de progrès ou de déclin contre lesquels toute tentative humaine serait vaine ! Le cycle n’a pas non plus totalement disparu, mais c’est une infinité de cycles différents que la sphère représente.

    Il y a donc une place pour l’inattendu, autant dire pour la volonté, chère aux nietzschéens. Ainsi Robert Steuckers, disciple d’Armin Mohler, écrit : « Cela signifie que l’histoire n’est ni la simple répétition des mêmes linéaments à intervalles réguliers ni une voie linéaire conduisant au bonheur, à la fin de l’histoire, au Paradis sur la Terre, à la félicité, mais est une sphère qui peut évoluer (ou être poussée) dans n’importe quelle direction selon l’impulsion qu’elle reçoit de fortes personnalités charismatiques. » L‘hypothèse de la résignation s’abolit totalement dans cette philosophie de l’Histoire, et il revient aux hommes de bonne volonté de donner forme au lendemain. Car la Révolution conservatrice allemande ne s’en remet guère à Dieu, à la Providence, ni à une vague idée de l’évolution de la société. Mais elle croit à l’incarnation et aux figures, au héros et aux chefs charismatiques.

    D’un côté, lenthousiasme béat et autodestructeur des progressistes dont « les conceptions linéaires dévalorisent le passé, ne respectent aucune des formes forgées dans le passé, et visent un télos, qui sera nécessairement meilleur et indépassable » (Steuckers). De l’autre, la passivité mortifère des réactionnaires qui peut conduire au nihilisme. Par contraste, on comprend que le conservatisme est un art de l’action et de l’appréhension du réel, et non pas seulement de la réflexion philosophique. Le conservatisme est une attitude qui convient à la réalité du temps présent et à la nécessité du choix, et non pas une posture contemplative.

    L’attitude conservatrice ou l’agir dans l’Histoire

    Le conservateur n’est pas figé dans le passé (ou dans le futur, dans la fuite en avant incarnée par le progressisme), mais bien ancré dans le présent. Non pas qu’il se contente bêtement d’approuver toute nouveauté, au contraire, son attitude consiste à préférer le familier à l’inconnu, la réalité du présent au futur incertain. Mais lorsque l’inévitable se produit, le conservateur refuse la résignation. Ainsi Michaël Oakeshott, dans Du Conservatisme, tente de décrire l’attitude conservatrice : « En outre, être conservateur ne signifie pas simplement être hostile au changement (comportement qui peut être idiosyncrasique) ; c’est également une manière de s’accommoder aux changements, activité imposée à tous. »

    L’exemple de la technique dans les années 1930, après le traumatisme causé par la Première Guerre mondiale, est frappant. Le réactionnaire s’insurge, vocifère contre cette technique aliénatrice et destructrice, prométhéenne et dégénérée… À croire qu’il envisagerait qu’on puisse la dés-inventer ! Face à cette réaction sans doute légitime mais néanmoins absurde, le conservateur avise : Ernst Jünger qui, mieux que quiconque, a vu la technique destructrice en action, fait naître quelques années plus tard l’idée d’une technique dite mobilisatrice. De même que Carl Schmitt s’appropriera l’idée de démocratie. Au régime parlementaire bourgeois, il oppose sa vision d’un lien fort entre la race et les chefs qu’elle se choisit. Du socialisme au bolchévisme, des sciences à la technique, la Révolution conservatrice allemande reprend toutes les innovations de son époque à son compte. 

    Le conservateur ne rejette pas par principe toute nouveauté. Il ne pourrait d’ailleurs la rejeter qu’intellectuellement, mais en aucun cas effectivement. Il l’admet, et se l’approprie. Il ne considère pas d’abord le changement comme foncièrement bon ou, à l’inverse, comme profondément mauvais, mais il entend le subordonner à des valeurs qu’il croit éternelles. Là est l’objet de sa démarche : conserver l’ordre élémentaire des choses dans l’Histoire en soumettant les réalités de son époque à quelque chose qui les transcende. Le conservateur ne s’oppose pas au temps qui passe, il s’oppose à la dégénérescence, au péril et à l’incertitude. Il n’entend pas conserver le temps passé, les idées du passé, les réalités du passé, mais simplement ce qui constitue le centre de gravité de cette sphère qu’est l’Histoire. C’est l’idée qu’un certain nombre de choses ne doit pas disparaître, à cause de la négligence, du mépris et du détachement et surtout pas de la destruction volontaire. Les progressistes l’ont dans le dos, les réactionnaires en pleine face, mais tous deux sont dans le vent. Paisible, le conservateur rit des agités des deux camps : lui, bâtit l’avenir les deux pieds dans le présent.

    Valentin Fontan-Moret (Philitt, 26 octobre 2015)

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  • En territoire ennemi...

    Les éditions Les Belles Lettres viennent de publier En territoire ennemi, de Didier Goux. Journaliste et auteur de romans populaires, Didier Goux est également un réactionnaire qui s'assume sur son blog intitulé Didier Goux habite ici...

     

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    " Voir le monde se lézarder et menacer ruines en même temps que sa propre jeunesse est une expérience douloureuse, mais partagée par nombre de consciences malheureuses et isolées. Fort heureusement, la souffrance ressentie devant un pays familier, maternel, se muant rapidement en un territoire hostile, n'empêche nullement l'humour, l'ironie ni le sarcasme ; pas plus que la tendresse ou la nostalgie, voire le désir d'en découdre avec la bêtise satisfaite et péremptoire.
    En une centaine de textes courts, écrits dans une langue dont l'élégance ne bride jamais la verve, En territoire ennemi dresse la carte de la société que l'on cherche à nous imposer, évidemment pour notre plus grand bonheur. L'auteur s'appuie sur ce qui fut, littérature, morale, traditions, histoire pour dévoiler plus crûment ce qui s'abîme sous nos yeux. Avec aussi, çà et là, quelques vivants espoirs de reconquête.
    Et si Didier Goux se montre parfois cruel, c'est que, dans la grande nurserie que l'on aménage pour les hommes de demain, la cruauté redevient nécessaire. La cruauté et le rire, ces armes jumelles. "

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  • La vie des hommes...

    La maison d'édition L'Editeur vient de publier La vie des hommes, un recueil d'essais d'Olivier Bardolle. Essayiste et observateur grinçant du monde contemporain, Olivier Bardolle a rassemblé dans cet ouvrage son Petit traité des vertus réactionnaires (L'Editeur, 2010), La vie des jeunes filles (L'Editeur, 2011), L'agonie des grands mâles blancs sous la clarté des halogènes (L'Editeur, 2012) et Des ravages du manque de sincérité dans les relations humaines (L'esprit des péninsules, 2006).

     

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    « Oui, un autre monde va être possible, et même inéluctable, mais il ne ressemblera probablement pas à ce que les altermondialistes avaient imaginé. C’est au décryptage des signes annonciateurs de ce monde en voie de dissolution que je me suis attelé depuis une dizaine d’années, ce qui s’est traduit par la parution des textes ici rassemblés. La dissolution comme solution, telle est bien la volonté secrète qui sous-tend les faits et gestes des Occidentaux qui, fatigués d’eux-mêmes jusqu’à la nausée, n’aspirent plus qu’à se débarrasser une fois pour toutes de leur responsabilité historique. En somme, hâtons-nous de tout oublier et qu’on n’en parle plus. C’est ainsi que la vie des hommes, tels que nous la connaissons depuis quelques milliers d’années, est en train de prendre fin pour laisser la place à autre chose. Autre chose à laquelle nul n’est tenu de collaborer, et pour laquelle il n’est pas non plus obligatoire de se réjouir. Libre à chacun de pratiquer la suspension du jugement et de rechercher l’ataraxie en solitaire, tout en profitant des derniers instants de liberté dont il dispose encore pour se délecter de ces moments exquis, si caractéristiques des fins de civilisation, en accrochant à sa face s’il le souhaite – et pour faire bonne figure – le sourire reposant du Bouddha. »
     

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  • Étrangleurs et réactionnaires...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue mordant de Christian Combaz, cueilli sur son blog. Ecrivain, Christian Combaz a récemment publié Gens de Campagnol (Flammarion, 2012), une chronique de la France des invisibles...

     

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    Etrangleurs et réactionnaires

    Nombre d'entre nous se souviennent du temps où leurs amis les plus lâches ou les mieux intentionnés leur suggéraient de surveiller une fâcheuse tendance à la Réaction.

    Le temps où la Réaction sera elle-même assez tendance est pourtant imminent. En effet, les bêtises accumulées par les donneurs de leçons font croître la gêne et la réprobation chez leurs partisans selon une courbe tellement exponentielle que des voix commencent à s'élever sur le thème : cette cacophonie, ce manque de coordination, ces réformes superflues "vont finir par donner raison aux réactionnaires".

    Les réactionnaires, personnages honnis entre tous, pourraient donc avoir raison, mais sans que le mérite leur en revienne, puisque ce sont leurs adversaires, à en croire les commentaires, qui perdent des points dans l'opinion, et non leurs idées qui en gagnent.

    Mais le plus grave, s'ils parviennent un jour à séduire le Peuple, est qu'ils ne s'excuseront pas. C'est fini.  Tout semble indiquer que la précaution liminaire du style "Je sais que je vais passer pour réactionnaire, mais j'aimerais souligner que...", cette ultime politesse du débatteur qui mesure la vanité de ses efforts avant d'affronter la meute, cette concession permanente faite à l'esprit du temps et qui commence par "au risque de faire vieux réac ", appartiennent à une époque révolue.

    Avant d'évoquer celle qui nous attend, il n'est  pas inutile de rappeler les caractéristiques de celle que nous quittons. Depuis 1917 et singulièrement en France depuis 1968, le mot réactionnaire s'emploie pour désigner celui qui prétend échapper à la fatalité révolutionnaire. La Réaction est ce réflexe petit-bourgeois qui consiste à vouloir tordre le bras de celui qui vous étrangle. Si vous ne voulez pas rejoindre le camp des étrangleurs, si vous ne voulez pas étrangler les autres en leur nom, vous perdez vos privilèges, vos amis, votre charme. Fonctionnaire, vous végétez sans avancement. Militaire, vous êtes coiffé par un vrai démocrate. Journaliste, vous êtes voué  à la rubrique auto-moto. Ecrivain, cinéaste, vous n'avez plus de talent.  Chanteur, vous êtes interdit de plateau ou livré à quelque animateur payé trente fois le smic pour vous étrangler en direct sur Canal Plus. Ce système s'est tellement généralisé que pour surnager, les hommes politiques les moins révolutionnaires ont dû donner des gages aux étrangleurs, ont dû les nommer partout, leur laisser nombre de leviers, et se plier à leur vocabulaire.

    C'est là que nous voyons ressurgir le mot réactionnaire dans le pire contexte, celui d'une crise généralisée, où les étrangleurs continuent à patrouiller la vie sociale comme des drones,  mais en vain,  car le stratagème qui consiste à jeter l'opprobre sur les réacs ne fonctionne plus. Pendant que l'on réforme tout et n'importe quoi, le mariage, le vocabulaire, la famille, l'histoire, et pendant que les révolutionnaires créent des SCI pour échapper à l'impôt sur la fortune, le Peuple vient de se rendre compte qu'il aura mille euros par mois de retraite et quand on lui parle de Réaction, pour la première fois depuis la Guerre, il a envie d'étrangler quelqu'un.

    Christian Combaz ( Blog de Christian Combaz, 7 février 2013)

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  • Le bac, un droit pour tous ?...

    85,6 % de reçus au baccalauréat ! Trop fort ! Ca déchire grave !... Mais ce rabat-joie de Pierre Jourde vient casser l'ambiance et rappeller quelques cruelles vérités dans un texte publié sur son blog Confitures de culture...

     

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    Le bac, un droit pour tous

    Donc, le cru 2011 du bac s’avère excellent : 85, 6 % de reçus. On est bien contents.

    Un peu avant ces résultats, absolument inattendus, chaque année, ça ne manque pas, dans tous les médias, les marronniers fleurissent. Chaque année, c’est le même feuilleton haletant : comment bien réviser? Comment se préparer à la terrible épreuve? Chaque année, de doctes professeurs viennent expliquer dans le poste qu’il ne faut pas bachoter la veille mais se reposer et se détendre (contrairement au travail acharné auquel s’adonne le lycéen moyen au cours de son année). Chaque année, de doctes médecins viennent conseiller la même poudre d’ailes de chauve-souris qui boostera les facultés cérébrales pour affronter la terrible épreuve. Chaque année, micro en main, les grands reporters, n’écoutant que leur courage, font la sortie des centres d’examen et demandent aux rescapés si l’épreuve n’a pas été trop terrible.

    Et, à la fin, imperturbablement, 85,6 %.

    Ce brillant résultat appelle quelques remarques.

    D’abord, est-il absolument nécessaire de rejouer sans cesse, année après année, le même feuilleton à suspens et frissons, lorsqu’on sait que le happy end est inéluctablement au bout ? ça finit par ressembler à une comédie que le pays se donnerait pour se faire croire qu’il y a un enjeu. Comédie coûteuse.

    D’autre part, 14,4 % de recalés, cela signifie en gros que n’ont pas leur bac, mettons 10 % de gens qui ont commis des efforts désespérés dans le but de ne strictement rien foutre.( Ce qui ne garantit à personne, néanmoins, de ne pas l’obtenir.) Reste le petit 4,4% incompressible de ce que Coluche appelait les mal comprenants.

    Il y a là une injustice qui saute aux yeux : ce n’est pas parce qu’on est débile ou fainéant qu’on n’a pas le droit d’avoir son bac. Les crétins sont des hommes comme les autres. Inscrivons le droit inaliénable au bac dans la constitution!

    Ce qui nous amène à une première conclusion, qui a l’avantage d’allier la justice sociale et l’économie, ce qui n’arrive pas tous les jours : pourquoi ne pas tout simplement donner le bac à tout le monde ? Enfin, disons, allez, à tous ceux qui auront fini leur année de terminale ? Ce ne sont pas 14,4 % de reçus en plus qui changeront grand-chose à la qualité globale du recrutement.

    De nombreux experts estiment que la France doit produire plus de diplômés. Voilà un moyen bien simple d’en produire, moyen que l’on pourrait utilement étendre à tout le cursus universitaire, puisque l’idée, que dis-je le mot même de sélection est une sorte d’obscénité aux yeux des responsables politiques et des syndicats universitaires ? Jusqu’à présent, l’université s’emploie hypocritement à faire semblant de délivrer des diplômes au mérite, alors qu’il s’agit en réalité, réforme après réforme, de trouver tous les moyens possibles de les délivrer en très grande quantité. Soyons au moins cohérents, et donnons-les à tout le monde (disons à tous les étudiants assidus, sauf certificat médical, comme de juste). Là encore, le droit à la licence est en passe de devenir une conquête sociale fondamentale.

    Qu’il faille plus de diplômés, tout le monde en est d’accord. Reste le problème suivant: une longue pratique de la première année d’université permet de réaliser qu’une proportion notable d’étudiants, heureux titulaires du bac, disons, à vue de pays, un bon 50 % (à affiner, certes):

    - Ne saurait pas situer l’Irak sur un atlas. Ni la Tchéquie, d’ailleurs.

    - Ne parle couramment aucune langue vivante, après sept années à en étudier une ou deux.

    - Ne connaît rigoureusement rien des dogmes d’aucune religion.

    - Est convaincu que Napoléon a vécu au XVIIe siècle.

    - Ignore en quel siècle a vécu Mahomet et qui diable pouvait bien être Luther (un chanteur? )

    - Possède quatre cents mots de vocabulaire.

    - N’a lu aucun livre entièrement.

    - Commet 10 fautes par page.

    Seulement, si je dis ça, je suis réactionnaire. Ce qu’il faut que je dise, c’est qu’il est nécessaire que tout le monde soit diplômé, et qu’en outre les diplômes mesurent une vraie compétence. Là, je suis sympathique et moderne. Bon, alors d’accord.

    Tout de même, je voudrais bien comprendre, parfois, ce qui est arrivé à ces étudiants pendant leur parcours scolaire.

    Mais je préfère ne pas y penser, je ne veux pas être réactionnaire.

    Pierre Jourde (Confitures de culture, 16 juillet 2011)

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  • Petit traité des vertus réactionnaires...

    Déjà auteur de plusieurs essais corrosifs comme De l'excès d'efficacité des systèmes paranoïaques ou De la prolifération des homoncules sur le devenir de l'espèce, Olivier Bardolle revient à la charge avec un Petit traité des vertus réactionnaires, publié chez l'Editeur et préfacé par le critique Eric Naulleau... A déguster ! 

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    "En Occident, depuis près d'un demi-siècle, les idées progressistes tiennent le haut du pavé. Il semblerait pourtant que l'on redécouvre aujourd'hui certaines vertus à la pensée réactionnaire. Ne serait-ce qu'une capacité de résistance certaine aux ravages de l'hypermodernité et aux bienfaits immodérés de la pensée unique. Sans tomber dans le manichéisme propre à l'époque, ce petit traité, particulièrement tonique, dénonce les fausses valeurs avec jubilation et poussera chacun, qu'il se prétende de droite ou de gauche, à réviser son catéchisme idéologique. C'est ainsi qu'Eric Naulleau, réputé de gauche, n'a pas hésité à préfacer ce texte en toute indépendance d'esprit. A lire sans modération."

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