Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

denis collin

  • Capitalisme ?...

    Le numéro 56 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, avec pour rédacteur en chef Thomas Hennetier, vient de paraître. Cette nouvelle livraison est consacrée au capitalisme...

    Vous pouvez commander ce nouveau numéro sur le site de la revue Éléments.

    Bonne lecture !

     

    Krisis 56.jpg

    Au sommaire :

    Entretien avec Dany-Robert Dufour / « Le capitalisme ne se serait pas développé sans la libération des passions. »

    Enquête : Le capitalisme est-il indestructible ? / Réponses de Jean-Claude Michéa, Alain de Benoist, Michel Onfray, Jérôme Maucourant et Fabrizio Tribuzio-Bugatti, Dany-Robert Dufour, Denis Collin, Francis Cousin, Loïc Chaigneau, Baptiste Rappin.

    Alain de Benoist / L’argent ou l’équivalent universel.

    Christophe Petit / L’avènement de la société de prédation, conséquence du remplacement de l’homme par la machine.

    Elie Collin / Vioulac et le nihilisme capitaliste.

    Document : Walter Benjamin / Le capitalisme comme religion.

    Fabrizio Tribuzio-Bugatti / Le sacré comme anticapitalisme.

    Michel Lhomme / Du plus, du mieux et du moins cher, ou le péril du pauvre à l’ère du capitalocène.

    Alain de Benoist / Le troisième âge du capital.

    Jérôme Maucourant / Capitalisme, État et société : une alchimie funeste?

    Document : Max Scheler / L’avenir du capitalisme.

    Renaud Vignes / Penser le monde en état stationnaire.

    Le texte : Karl Marx / Le caractère fétiche de la marchandise et son secret

    Lien permanent Catégories : Revues et journaux 0 commentaire Pin it!
  • Russie-Ukraine : revenir aux principes ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Denis Collin cueilli sur le site La Sociale et consacré à la guerre en Ukraine.

    Agrégé de philosophie et docteur ès lettres, Denis Collin est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la philosophie, à la morale et à la pensée politique, dont Introduction à la pensée de Marx (Seuil, 2018), Après la gauche (Perspective libres, 2018) et  Malaise dans la science (La Nouvelle Librairie, 2022).

    Russie-Ukraine_Négociations.jpg

    Russie-Ukraine : revenir aux principes

    Il y a un débat public, pas toujours clair et généralement étouffé par la propagande de guerre, à propos du conflit en Russie et Ukraine, conflit qui remonte maintenant à près de 10 ans, les troupes russes ayant envahi la Crimée au mois de février 2014. Les accords de Minsk, signés en 2015 entre la Russie et l’Ukraine, avec l’intervention de Hollande et Merkel n’ont fait que reculer la guerre ouverte.

    Je ne veux pas m’engager dans la confrontation des récits de ces 10 dernières années, récits contradictoires : pour les uns, il s’agit d’une guerre défensive menée par la Russie menacée par l’Occident et, pour les autres, il s’agit d’une agression russe contre l’Ukraine, pour assouvir le dessein chauvin grand-russe d’un Poutine qui veut reconstituer la grande Russie, autant que possible dans les frontières de l’ex-Union soviétique. Les premiers font valoir les livres de Brzeziński, qui constitueraient le programme suivi par les États-Unis et permettraient ainsi d’éclairer le conflit, les seconds pourraient voir en Poutine celui qui accomplit le programme de Soljenitsyne de restauration de la « grande Russie », mais ils ne le font tant ils ont par le passé encensé le grand écrivain. On a vu ressurgir à cette occasion la vieille idéologie rance du « panslavisme » défendu par Alexandre Douguine, un philosophe dont la fille fut assassinée dans des conditions mystérieuses – le crime fut évidemment attribué aux services ukrainiens, mais il pourrait s’agir de règlement de comptes au sein de la caste dirigeante, le panslavisme n’étant pas, et de loin, l’idéologie dominante chez les oligarques.

    Je préfère ici m’en tenir aux quelques faits indiscutables – en évitant les récits et les spéculations des politiciens et des stratèges internationaux qui ont tendance à présenter leurs propres spéculations et leurs propres interprétations comme des vérités indiscutables. Et des faits admis, je voudrais me contenter que rappeler quelques grands principes de droit.

    On le sait bien, la discussion sur les responsabilités d’une guerre est toujours une affaire fort polémique. Hannah Arendt rapporte une boutade de Clemenceau : « Durant les années vingt, Clemenceau, peu avant sa mort, se trouvait engagé dans une conversation amicale avec un représentant de la république de Weimar au sujet des responsabilités quant au déclenchement de la Première Guerre Mondiale. On demanda à Clemenceau : “À votre avis, qu’est-ce que les historiens du futur penseront de ce problème embarrassant et controversé ?” Il répondit : “Ça, je n’en sais rien, mais ce dont je suis sûr, c’est qu’ils ne diront pas que la Belgique a envahi l’Allemagne.” » L’histoire du mensonge au XXe siècle a montré que Clemenceau était exagérément optimiste. Si on revient au cas ukrainien, le fait est que le 25 février 2014, la Russie a envahi la Crimée et organisé un référendum qui a abouti au rattachement de la Crimée à la Russie. C’est le point de départ des événements qui vont se dérouler dans le Donbass et aboutiront en 2015 aux accords de Minsk. Il y a un autre fait non moins incontestable, c’est que c’est la Russie a envahi le quart du territorie ukrainien le 24 février 2022. Savoir si la Russie avait de bonnes ou de mauvaises raisons de le faire, savoir si les États-Unis avaient ou non entrepris de déstabiliser ce pays gigantesque qui n’a plus rien à voir avec l’URSS de jadis, c’est une autre affaire.

    Du point de vue du droit international tel qu’il a été inventé en 1648 par les traités de Westphalie qui ont mis fin à la guerre de Trente ans, la Russie a juridiquement tort. On pourra difficilement déclarer Poutine irresponsable. On peut lui chercher des circonstances atténuantes ou resituer tout cela dans le récit historique ou philosophico-historique, cela ne change rien aux faits, et, comme le disait Lénine, « les faits sont têtus ».

    Il y a une autre question de principe, la question du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, revers de la médaille de la souveraineté nationale. Nous ne pouvons pas défendre la souveraineté nationale de la France et dénier celle de l’Ukraine. Même si le gouvernement de ce pays n’est pas très reluisant et s’il est fort corrompu, nous devons reconnaître la souveraineté de l’Ukraine. De la même façon que les horreurs dont s’était rendu coupable Saddam Hussein ne pouvaient justifier l’invasion de l’Irak en 2003, pour ne citer qu’un exemple. Le « droit d’ingérence » est une minable tentative faite par une bande de politiciens d’extrême-gauche ralliés aux « néocons » américains pour donner un vernis « humanitaire » aux diverses opérations militaires depuis les bombardements « humanitaires » sur Belgrade, les opérations en Afghanistan, et d’autres encore. La situation en Ukraine n’autorisait pas plus la Russie à intervenir, même si les minorités russophones et russophiles (ce n’est pas la même chose) étaient en butte à la répression organisée par les dirigeants de Kiev.

    On ne peut pas avoir des principes à géométrie variable. Je sais bien qu’il y a une vieille russophilie française qui s’entretient de la nostalgie de l’Union soviétique, du regret de son effondrement, qui expliquent que les vieux staliniens et cryptostaliniens reportent aisément les sentiments qu’ils avaient envers l’URSS sur les nouveaux maîtres du Kremlin. Mais cela ne justifie pas qu’on change de principes quand il s’agit de faits qui mettent en cause Poutine et son régime dont l’orientation de plus en plus autoritaire n’a cessé de s’affirmer.

    On n’oublie évidemment pas le double jeu et les manœuvres permanentes du gouvernement des États-Unis, qui serait fort heureux de déstabiliser complètement l’Europe pour pouvoir préparer le coup suivant : son règlement de comptes avec la Chine. Sachant tout de même que pour ce dernier enjeu, il est sûrement trop tard et que les rapports de forces internationaux sont complètement bouleversés. Les États-Unis entretiennent les conflits comme des moyens d’essayer de se maintenir à flot, alors qu’ils sont déjà entrés dans la spirale du déclin, comme l’Europe, d’ailleurs.

    Dans l’idéal, il faudrait exiger l’arrêt des hostilités, le retrait des troupes russes sur les frontières d’avant 2014 et l’organisation sous contrôle international de référendums dans les provinces du Donbass et de Crimée qui permettraient à ces peuples de choisir librement, sous la menace d’aucun fusil, ni russe, ni ukrainien, s’ils veulent rester ukrainiens – éventuellement avec un statut spécial – devenir indépendants ou rejoindre la république fédérative de Russie. Ce serait la seule solution conforme au droit international.

    Malheureusement, le droit international étant ce qu’il est, c’est-à-dire un droit sans force, cette hypothèse est fort improbable dans l’immédiat. Que pouvons-nous faire ? En vérité, peu de choses, sinon spéculer sur les intentions des uns ou des autres. Entre les exégètes de la pensée de feu Brzeziński et les kremlinologues qui lisent dans les pensées de Poutine, on ne sait plus où donner de la tête !

    Il me semble cependant qu’on peut se mettre d’accord sur des exigences minimales. La première étant celle d’un cessez-le-feu. Comme le dit Kant, il n’y aucun droit de guerre, la guerre est le contraire du droit et donc il faut l’arrêter. Pour qu’il y ait un cessez-le-feu, il faut cesser de nourrir la guerre et donc refuser de devenir « cobelligérants » en envoyant des armes, des armes dont tout le monde sait par ailleurs qu’elles ne font qu’entretenir la guerre. Si nous avions un gouvernement soucieux des intérêts du peuple, et de la paix, il ferait tout son possible pour favoriser les négociations entre les deux parties en guerre. Quitte à paraître naïf, il faut lever, au moins partiellement les sanctions contre la Russie, sanctions inefficaces qui ne favorisent que les Russes et les Américains et donc les nations d’Europe sont les premières victimes et même les seules victimes.

    L’attitude agressive à l’égard de la Russie ne sert que le régime de Poutine. Et tous les autres régimes, car l’entretien permanent de la menace guerrière est une des ressources essentielles de toutes les tyrannies. Nous aussi, nous subissons notre « quart d’heure de la haine », comme dans 1984. La guerre contre la Russie vient à point remplacer la guerre au COVID… Une politique d’ouverture, publiquement proclamée et adressée à l’opinion russe, par-delà ses gouvernants, pourrait être fort efficace pour faire reculer le pouvoir en place et ouvrir la marche vers la paix, dans le respect des principes de souveraineté nationale.

    Je lance une flèche. La ramasse qui peut.

    Denis Collin (La Sociale, 7 février 2023)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!
  • Malaise dans la science...

    Les éditions de La Nouvelle Librairie viennent de publier dans leur collection Krisis un essai de Denis Collin intitulé Malaise dans la science. Agrégé de philosophie et docteur ès lettres, Denis Collin est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la philosophie, à la morale et à la pensée politique, dont Introduction à la pensée de Marx (Seuil, 2018) et Après la gauche (Perspective libres, 2018).

     

    Collin_Malaise dans la science.jpg

    " « Qui aurait pu imaginer qu’on se donnerait un jour l’objectif de changer radicalement la nature de l’homme, qu’autrefois on se contentait de vouloir éduquer ? » Si la crise du Covid a bien montré quelque chose, c’est la soumission généralisée de l’homme au règne de l’appareil de la médecine. Certes la révolution scientifique a contribué à améliorer la qualité de la vie, mais elle s’est  d’autant plus érigée en « nouvelle religion ». Cela a aussi donné naissance au mythe de l’homme remplaçable et permis de trouver de nouvelles voies pour l’accumulation du capital.

    Dans cet essai enlevé, Denis Collin s’attaque à ce nouveau dogmatisme imposé par une partie des scientifiques pour domestiquer l’homme moderne et apporte une réflexion déterminante sur la place de cette science déshumanisante ainsi que sur ses limites. Au vu de ces « progrès », comment ne pas nourrir des regrets ? "

    Lien permanent Catégories : Livres, Science 0 commentaire Pin it!
  • Territoires ?...

    Le numéro 52 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, avec pour rédacteur en chef David L'Epée, vient de paraître. Cette nouvelle livraison est consacrée aux territoires...

    Vous pouvez commander ce nouveau numéro sur le site de la revue Eléments.

    Bonne lecture !

     

    Krisis 53.jpg

    Au sommaire de ce numéro :

    Olivier Eichenlaub / Culture et territoire, aux origines de la géopolitique
    Henry War / Le goût du territoire comme subsumation et comme annihilation
    Guillaume Travers / De la déterritorialisation de la richesse à la déterritorialisation de la terre
    Raphaël Juan / Semailles pour la fin des temps
    Jean-Philippe Antoni / Du biotope au territoire, une définition écologique de l’habitat
    David L’Épée / L’urbanisme au coeur des utopies
    Michel Lhomme / Du cauchemar climatisé du monde confiné à une politique esthétique de l’immense
    Éric Maulin / De la mondialisation à la relocalisation
    Document – Friedrich Hölderlin / Tout comme au jour de fête…
    David Cumin / Carl Schmitt et la géopolitique, la théorie du Großraumordnung
    Grégory Aymé & Jean-Philippe Antoni / Face à l’adversaire, la dimension cachée du territoire
    Denis Collin / Les territoires contre la République
    Jean-Paul Brighelli / De la responsabilité de l’école dans les dérives communautaristes
    Fabien Niezgoda / L’espace au Moyen-Âge, entre polarisation et territorialisation
    Jean-François Thull / La Grande Région, un reliquat lotharingien ?
    Laurent Schang / Nostalgie des garde-frontières
    Jacob Cohen / Une terre, un peuple : le sionisme a-t-il échoué ?
    Rémi Soulié / Les hauts lieux
    Texte – Carl Schmitt / L’homme est un être terrestre
    Les auteurs du numéro
    Lien permanent Catégories : Revues et journaux 0 commentaire Pin it!
  • Philosophie ?...

    Le numéro 52 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, avec pour rédacteur en chef David L'Epée, vient de paraître. Cette nouvelle livraison est consacrée à la philosophie...

    Vous pouvez commander ce nouveau numéro sur le site de la revue Eléments.

    Bonne lecture !

     

    Capture d’écran 2021-12-29 à 17.31.37.png

    Au sommaire de ce numéro :

    Rémi Soulié / Papillonner.

    Francis Moury / Nécessité ou contingence de l’histoire
    de la philosophie.

    Denis Collin / La philosophie est la recherche de la vérité…
    et rien que cela.

    Entretien avec Michel Onfray / « Il n’est jamais trop tôt ni jamais trop tard pour commencer à philosopher.

    André Perrin / Tombeau du philosophe citoyen.

    Vincent Citot / Petite philosophie des valeurs.

    Michel Lhomme / Le Philosophe, le Voyou et le Légionnaire.

    Entretien avec Pierre Le Vigan / « Il y a autant de philosophies européennes que de philosophes européens. »

    Francis Emmanuel / À propos de la philosophie gréco-arabe.

    Rémi Soulié / Platon (point à la ligne).

    Bruno Guigue / Hegel, le négatif dans l’histoire.

    David L’Épée / La figure de l’homme historique chez Hegel et Nietzsche.

    Philippe Granarolo / Raisons et résonances du « Gai Savoir ».

    Entretien avec Pierre-André Taguieff / « Philosopher avec Nietzsche signifie s’affirmer continuellement contre lui. »

    Gérard Guest / Heidegger en silence.

    Raphaël Juan / Abellio, philosophe méconnu ?

    Les auteurs de ce numéro

    Lien permanent Catégories : Revues et journaux 0 commentaire Pin it!
  • Le wokisme est-il un produit du marxisme ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Denis Collin cueilli sur Figaro Vox et consacré aux origines du "wokisme".  Agrégé de philosophie et docteur ès lettres, Denis Collin est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la philosophie, à la morale et à la pensée politique, dont Introduction à la pensée de Marx (Seuil, 2018) et Après la gauche (Perspective libres, 2018).

    Woke.jpg

     

    « Le wokisme est-il un produit du marxisme ? »

    L'idéologie « woke » et les différents mouvements qui s'en inspirent prennent une place croissante dans l'espace universitaire et médiatique, multipliant interdits et censures, hier contre la représentation d'une pièce d'Eschyle, le lendemain contre la statue de Colbert, réclamant la démission de professeurs « mal pensants ». Les porte-parole de ce mouvement ont table ouverte sur les radios du service dit, par habitude, public. Comme les vieux réflexes ne se perdent pas, pour dénoncer le « wokisme », il est parfois de bon ton d'y voir une nouvelle manifestation d'un marxisme, pourtant mal en point. On peut évidemment dire mal du marxisme, mais s'il est bien une accusation infondée, c'est celle qui en fait le père putatif du mouvement « woke ». En réalité, l'idéologie « woke » se présente comme une véritable arme offensive contre le marxisme (sous toutes ses formes) et contre le vieux mouvement ouvrier syndical.

    Le mouvement woke est comme le Coca-cola et halloween un produit d'importation américaine. Mais ses origines idéologiques se situent dans la « french theory », c'est-à-dire chez les philosophes français « post-modernes » ou les théoriciens de la « déconstruction » - un terme qui constitue le principal slogan du mouvement « woke ». Or, ces penseurs sont tous des adversaires résolus du marxisme. S'ils adoptent volontiers un discours « anticapitaliste », ils refusent la centralité de la lutte des classes autant que la figure de la classe ouvrière en tant sujet historique. Chez tous la classe ouvrière et ses organisations sont « ringardisés » : trop de conservatisme, trop de stéréotypes. On leur préférera les schizophrènes (Deleuze), les « taulards » (Foucault), les minorités notamment les immigrés (Badiou destitue très tôt la classe ouvrière française de tout rôle révolutionnaire au profit de la figure rédemptrice de l'immigré), les mouvements féministes, la « queer attitude » (encore Foucault). Tous ces courants, qui ont fleuri dans les années post-soixante-huit, considèrent, comme Michel Foucault, que la question du pouvoir d'État comme question centrale est dépassée et qu'il est nécessaire de s'opposer d'abord aux « micro-pouvoirs « et aux « disciplines » qui domestiquent l'individu. C'est encore chez Foucault et son élève américaine Judith Butler qu'est revendiquée la nécessité des « identités flottantes » contre les « assignations sociales » à une seule identité sexuelle. Remarquons enfin que, comme Foucault admirateur de la « révolution islamique » de Khomeiny, l'idéologie « woke » sacralise l'islam, considéré comme l'allié du mouvement contre les mâles blancs hétérosexuels.

    Cette antinomie entre marxisme et « french theory » se retrouve dans toutes les orientations du mouvement « woke ». Le marxisme est universaliste et considère que les particularités des différents peuples et des différentes religions sont appelées à passer à la moulinette du développement mondial du mode de production capitaliste. Au contraire le « woke » est relativiste et dénonce l'universalisme comme le masque de la domination « blanche ». Marx et Engels, tout en condamnant les méthodes et les exactions terribles de la colonisation y voyaient une de ces ruses de l'histoire grâce à laquelle les peuples colonisés allaient sortir de leur sommeil et prendre place dans la lutte aux côtés des autres prolétaires de tous les pays. Ils étaient franchement européo-centrés et considéraient que la civilisation européenne montrait la voie. C'est encore Lénine qui affirmait que le socialisme moderne était l'héritier de la philosophie allemande, de l'économie politique anglaise et du socialisme français, lui-même issu des Lumières. On se demande bien pourquoi les censeurs « woke » n'exigent pas le retrait immédiat des ouvrages de ces penseurs horribles.

    Les marxistes sont antiracistes et antiesclavagistes, cela va de soi. Marx rédigea l'adresse de l'Association Internationale des Travailleurs au président Lincoln, à l'occasion de sa réélection en 1864 et le qualifia d'« énergique et courageux fils de la classe travailleuse », qui sera capable de « conduire son pays dans la lutte sans égale pour l'affranchissement d'une race enchaînée et pour la reconstruction d'un monde social. » La lutte contre l'esclavage et les discriminations raciales s'inscrit pour les marxistes dans le sillage des grandes révolutions « bourgeoises » du XVIIIe siècle. Oublieux du caractère révolutionnaire de la bourgeoisie, les « woke » font de la traite négrière une tache indélébile qui condamne par avance tous les « blancs », oubliant que la plus grande traite négrière fut organisée par les Arabes et les Ottomans sous le drapeau de l'islam avec l'aide et un peu plus que la complicité des chefs des peuples d'Afrique.

    Que les divers mouvements « woke » n'aient aucun rapport avec le marxisme et la lutte des ouvriers, il suffit encore pour s'en convaincre d'écouter ses principaux héraults. Mme Houria Bouteldja, égérie du mouvement des « Indigènes de la république » ne déclarait-elle pas que l'ouvrier blanc est son ennemi ? Mme Rokhaya Diallo est une figure de la « jet-set ». Elle est une « intellectuelle organique » de la « classe capitaliste transnationale », très bien décrite voilà plus de deux décennies par Leslie Sklair. Mme Traoré est devenue la coqueluche des grandes marques à la mode. La promotion du lumpenproletariat et des petits voyous des « cités » au rang de mouvement révolutionnaire n'a rien à voir avec le marxisme : Marx et Engels disaient pis que pendre de ce « lumpen » rassemblant tous les débris des différentes classes sociales.

    Pour terminer, rappelons que les marxistes ne portaient guère dans leur cœur l'idéologie libérale-libertaire qui s'est déployée après 1968. En vieux mâle blanc hétéro, Marx condamnait le travail de nuit des femmes comme contraire à la pudeur féminine. Il ne réclamait pas l'abolition de la morale mais dénonçait le capitalisme comme un système qui balayait toutes les barrières morales !

    On peut critiquer le marxisme, en n'oubliant pas de distinguer le marxisme et le penseur Marx, mais en aucun cas, on ne peut le rendre responsable du mouvement woke. S'il y avait encore dans ce pays des marxistes sérieux, nul doute qu'ils seraient à la pointe du combat contre ces folies qui trouvent dans certains secteurs du capital une oreille complaisante mais sont dirigées d'abord contre les ouvriers, ces « salauds de pauvres, ces « beaufs » qui savent bien que le travail reste la question centrale pour nos sociétés.

    Denis Collin (Figaro Vox, 4 décembre 2021)

    Lien permanent Catégories : Points de vue 0 commentaire Pin it!