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vladimir poutine - Page 8

  • La bataille pour l'Eurasie va-t-elle s'accélérer ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alexandre Latsa, cueilli sur le site de l'agence de presse Ria Novosti et consacré à la lutte souterraine mais bien réelle que les Etats-Unis et la Russie se livrent en Eurasie.

     

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     La bataille pour l'Eurasie va-t-elle s'accélérer ?


    "Les Etats-Unis s’opposeront à des processus d'intégration dans l'espace postsoviétique". Hillary Clinton - 2012

    Les récentes déclarations de la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton sur l'intention de Washington de s'opposer aux processus d'intégration dans l'espace postsoviétique lors d’une conférence tenue à Dublin le 6 décembre 2012 ont au moins un mérite, celui de démontrer que l’Union Douanière, et donc la future Union Eurasiatique sont considérés par l’administration américaine comme le mal absolu. Hillary Clinton n’a pas pris de gants, pour elle, l’union eurasiatique n’est ni plus ni moins que la réincarnation de l’Union Soviétique, et traduit donc la volonté de la Russie de vouloir reprendre le contrôle du cœur de l’Eurasie, que Russie et Occident, via l’Angleterre puis l’Amérique, se disputent depuis prés de 150 ans.

    Un retour en arrière s’impose pour comprendre ce que signifie la bataille pour le contrôle de l’Eurasie, qui est tout sauf un fantasme ou une légende. Il s’agit au contraire d’une réalité géopolitique qui constitue un volet important de la politique étrangère américaine et occidentale depuis la chute du mur de Berlin.
     
    Durant la guerre froide, la puissance américaine ne luttait pas seulement pour la victoire contre son adversaire Soviétique, elle luttait aussi pour le contrôle du monde. Ce faisant, les stratèges américains restaient fidèles à la ligne tracée par les maitres de la géopolitique anglo-saxonne, particulièrement Halford Mackinder et Nicholas Spykman. Pour ces derniers, la maitrise du monde ne pouvait passer que par le contrôle de la zone ou devait se concentrer dans l’avenir tant le gros des habitants, que le gros des ressources énergétiques de la planète: l’Eurasie, encore appelée l'Ile Monde ou Heartland.
     
    " Qui contrôle le Heartland, contrôle le monde ".  Halford John Mackinder – 1919
     
    En ce sens, la mise sous tutelle après 1945 de l’Europe de l’ouest par l’Otan n’a été rien de plus qu’une mise en application des principes de Nicholas Spykman qui jugeait lui essentiel de maitriser l’anneau périphérique (Rimland) de cette Ile monde, de ce Heartland continental. L’Europe de l’ouest représente la partie occidentale sous contrôle de cet anneau. Comme on peut le voir ici, la zone qui s’étend du pourtour de la caspienne jusqu'à l’Asie centrale constitue sa partie orientale et c’est précisément cette zone qui est visée par les propos d’Hillary Clinton.
     
    " Qui contrôle le Rimland contrôle l’Eurasie. Qui dirige l’Eurasie contrôle la destinée du monde". Nicholas J. Spykman - 1942
     
    Les tentatives avortées du GUAM (Géorgie, Ukraine, Azerbaïdjan, Moldavie) puis la tentative de prise de contrôle de ces mêmes états (membres de cet anneau périphérique) par les révolutions de couleurs planifiées aux USA doivent être comprises et vues dans ce sens: comme une étape nouvelle du containment russe, préalable essentiel au bouclage du Rimland. D’ailleurs, dans sa déclaration Hillary Clinton a insisté sur la déception profonde que représentait l’Ukraine pour le département d’état Américain, tout un symbole lorsqu’on sait l’énergie et les moyens mis en œuvre par l’administration américaine pour faire de l’Ukraine un pion essentiel de l’Otan. Un projet ancien qui prévoyait la constitution d’un axe Allemagne-Pologne-Ukraine dont Zbigniew Brezinski rêvait déjà en 1997 et qui selon lui devait servir à repousser l’influence russe le plus à l’est possible, et renforcer l’Otan au cœur de l’Europe de l’est.

    "Il est impératif qu'aucune puissance eurasienne concurrente capable de dominer l'Eurasie ne puisse émerger et ainsi contester l'Amérique". Zbigniew Brezinski - 1997
     
    Bien sur les déclarations d’Hillary Clinton ont provoqué les regrets de Leonid Sloutski, chef de la commission de la Douma pour les Affaires de la CEI. Celui-ci constatait que le potentiel croissant de regroupement géopolitique en Eurasie pourrait faire de cette région l'un des acteurs majeurs du monde. Une situation bien différente de celle qu’impliquait le monde unipolaire de 1991, qui ne laissait aucune place à la Russie.

    Beaucoup de pays occidentaux appréciaient Eltsine surtout parce qu'il était le symbole d’une Russie faible, et le symbole de leur victoire sur l’URSS. 20 ans plus tard, alors que le centre de  gravité du monde se déplace vers l’Asie et la Chine, l’Occident américano-centré traverse une crise économique qui l’a considérablement affaibli sur la scène internationale. Pendant ce temps, à mi chemin entre l’Occident et l’Asie, la Russie s’est redressée pour redevenir aujourd’hui la puissance principale d’Eurasie.
     
    Le monde multipolaire qui prend forme devrait vraisemblablement prendre l'aspect d'un monde d’alliances. Les grands états de ce monde sont tous dans des logiques de regroupements économiques, politiques et militaires, que ce soit au cœur de l’Europe, par dessus l’Atlantique, en Amérique du sud  ou encore en Asie. Ces alliances pourraient rapidement voir l’émergence de blocs souverains tant sur le plan militaire, qu’économique ou politique, et la fragmentation du monde en zones d’influences souveraines.
     
    Pourquoi les nations d’Eurasie n’auraient elle dès lors pas le droit de procéder à une intégration régionale approfondie?  Les menaces américaines contre une alliance volontaire de pays souverains semblent éloigner considérablement les possibilités d’un réel reset russo-américain. Le désaccord sur l’Affaire Syrienne, pays que l’Union Douanière envisageait du reste d’intégrer à une zone de libre échange il y a encore quelques mois, accentue encore le malaise.

    Voila donc des propos belliqueux en provenance d'Amérique et prononcés à Dublin, alors même que le chef de l’état russe a pourtant récemment rappelé que la Russie devait trouver sa place géopolitique dans le monde de façon pacifique et que l’intégration eurasiatique devait elle se faire dans le respect de la souveraineté des états. Un principe de souveraineté nationale bien mis à mal durant l’époque unipolaire mais qui constitue tant le point névralgique du développement des BRICs (lire cette analyse a ce sujet) que le cœur de la politique internationale russe, notamment en Syrie.

    Souveraineté VS interventionnisme, Unilatéralisme VS Multilatéralisme. Ces deux conceptions du monde diamétralement opposées vont-elles relancer la bataille pour l’Eurasie?

    Alexandre Latsa (Ria Novosti, 12 décembre 2012)
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  • Poutine et la place de la Russie...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, cueilli sur Voxnr et consacré à l'importance du rôle que la Russie de Poutine joue comme môle de résistance face à la puissance américaine...

     

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    Poutine et la place de la Russie

    La fin du monde n’a pas eu lieu.

    Quoiqu’il ne faille pas exclure, qu’à terme, ne se produise la fin d’un monde, celui, américano-centré, unilatéral et formidablement dangereux pour la paix, que l’on voudrait, ici, en Occident, voir s’installer durablement.

    Pourquoi pas pour mille ans !

    La récente conférence de presse de Vladimir Poutine, s’adressant durant quatre heures trente à plus de mille journalistes de toutes nations, le jeudi 20 décembre, a rappelé cette vérité qui dérange : la Russie est toujours là. Mieux : elle incarne, par sa volonté de ne pas se plier à l’hégémonie étatsunienne, la perspective d’un monde multipolaire, pluri-civilisationnel, pour l’avènement duquel d’autres nations luttent, celles notamment représentées par le BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, République Sud-africaine), mais aussi l’ALBA, en Amérique latine, ce qui démontre, à l’encontre de ce que la presse mainstreams prétend, que les Russes sont loin d’être « isolés ».

    C’est une rengaine qui révèle, chez les journalistes liés à l’Otan, une réelle absence d’imagination. Il est vrai qu’en général, l’activité propagandiste ne demande comme aptitude que celle qui consiste à se répéter pour faire pénétrer dans le cerveau assoupi des masses des « vérités » infaillibles. Encore que l’imagination soit un ingrédient indispensable pour donner du sel aux scénarios susceptibles de remplacer la réalité. Il est vrai que le matraquage manichéen a réussi avec l’Irak, la Serbie, la Libye, et que la légende d’une démocratie militante et internationaliste éradiquant le Mal dictatorial de la planète a plutôt bien marché ; ce qui révèle, pour ceux qui croient encore aux lendemains qui chantent, combien les peuples occidentaux ont vendu leur liberté pour un plat de lentilles, qui s'avèrent, par ces temps de crise, plutôt passablement avariés. Et pour le coup, ils ont abandonné aussi leur droit d’aînesse.

    Une chansonnette qui a les faveurs des salles de rédaction, en ce moment, est que la Russie serait sur le point d’abandonner « le régime de Bachar al Assad » (dixit). On s’appuie, pour étayer ce qui ressemble furieusement à des lubies arrosées d’après dîner (du Siècle ou du crif, comme vous voulez), sur de soi-disant déclarations, d’un sous-ministre ou d’un ambassadeur russes, voire de Poutine lui-même.

    En vérité, la position russe n’a jamais changé : la Russie n’appuie pas un homme, mais un Etat légitime, la nature du régime et la composition du gouvernement syrien doivent résulter du choix du peuple syrien lui-même, une conférence de conciliation doit avoir lieu, et les forces étrangères n’ont pas à intervenir dans le conflit. Rien de nouveau sous le soleil, donc !

    Contre toute évidence, nos braves Tintins de comptoirs (désirant sans doute redonner de l'espoir à des « rebelles » singulièrement étrillés) entonnent le refrain bien appris de l’armée syrienne qui perd du terrain, du régime qui s’effrite, avant de s’effondrer, de l’isolement de ses partisans, de son encerclement etc. Que les « rebelles », dont la majorité sont des membres d’Al-Qaeda, des salafistes takfriristes, des frères musulmans, des Talibans, des Tchétchènes, des Turcs, Irakiens, Libyens, Tunisiens, Marocains, des Yéménites djihadistes, qui n’ont rien à voir avec les Syriens de souche, et qui sont payés par le Qatar, soutenus pas les USA, Israël, l’Angleterre et la France, pays qui prétendent, par ailleurs, combattre le fléau islamiste, soient exterminés par la valeureuse armée républicaine syrienne, cela semble leur échapper. Ils en restent à une explication fort simple, digne d’une cour de récréation de collège : Bachar étant un méchant, les Russes, ayant une propension à la méchanceté, comme chacun sait, sont naturellement portés à lui porter leur aide. Mais, surtout, la Russie s’accrocherait à la base de Tartous, afin de maintenir sa présence en Méditerranée orientale, mais serait bien obligée de tenir compte du rapport de force défavorable. 

    Autrement dit, la presse raisonne comme si elle jouait aux dames avec un damier singulièrement étriqué, alors qu'il s’agit d’un jeu d’échecs à l’échelle asiatique, voire mondiale. Quand le sage montre la lune, dit un proverbe chinois, l’idiot regarde le doigt.

    Au lieu de prendre des vessies pour des lanternes, la presse collaboratrice devrait plutôt abandonner ses vains espoirs. D’abord parce que le « régime » syrien tient, tout simplement pour des raisons faciles à comprendre : si les fanatiques islamistes l’emportent, ce sera un génocide, les minorités ethniques et confessionnelles seront exterminées, les femmes retourneront en esclavage, et une chape de plomb s’abattra sur un pays encore indépendant et libre. D’autre part, la Russie possède largement de quoi tenir tête aux puissances militaires locales et internationales, qui se mêlent de semer la zizanie dans cette région. Non, l’ours n’est pas affaibli !

    Surtout, il est évident que si la Russie laisse le terrain à l’Occident, c’en est fini de ses rêves d’indépendance, et même de sa volonté de survie. L'ours joue ici sa peau, et il est prématuré de vouloir d’ores et déjà la vendre !

    Pourquoi ? Il n’est qu’à regarder une carte pour comprendre. Qui contrôle cette région, où aboutissent, aboutiront, des terminaux gaziers et pétroliers, lesquels sont vitaux pour des pays comme l’Iran, partant la Chine, ceux d’Asie centrale, la Russie même, qui aurait voix au chapitre en Europe occidentale, région maritime où baignent des Etats déstabilisés ou stratégiquement essentiels, parfois surarmés, où l’on a trouvé des réserves immenses de gaz, cette énergie du XXIe siècle, qui la contrôle, donc, contrôle l’avenir. La Russie sait aussi que, comme dans un jeu de dominos, perdre la partie ici entraînerait un déplacement du conflit tout près de ses frontières, dans cette Asie centrale où s’agitent déjà des intégristes musulmans. Qui occupe l'Eurasie tient les rênes de la planète.

    C’est pourquoi il est réjouissant de voir revenir, sur le théâtre international des nations, une Russie forte, fière et digne. La conférence de presse du président Poutine nous rappelle, nous, Français, celles du général de Gaulle, qui soutenait que la place de la France devait être au premier rang. La noblesse de notre histoire ne laissait pas d’autre alternative. C’était compter sans la trahison de nos « élites », qu’il pressentait néanmoins, lesquelles ont vendu notre indépendance, celle de l’Europe aussi, à ceux que Mitterrand, qui les avait portant bien installé dans notre culture, considéraient comme nos pires ennemis, les Etats-Unis d’Amérique.

    Claude Bourrinet (Voxnr, 21 décembre 2012)

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  • La Russie, puissance d'Eurasie...

    Les éditions Ellipse viennent de publier La Russie, puissance d'Eurasie, un essai d'Arnaud Leclercq. L'auteur, cadre dirigeant dans des institutions financières, a vécu plusieurs années en Russie et a de nombreux contacts au sein de son élite politico-économique. Il s'est, par ailleurs, passionné pour l'histoire et la géopolitique de ce pays.

     

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    "Après l'effondrement du soviétisme, le plus vaste pays du monde est passé de la superpuissance à l'humiliation, avant de redevenir un acteur majeur du monde multipolaire. Forte de son identité retrouvée et gorgée de richesses naturelles, la Russie dispose d'atouts considérables, comme les nouvelles routes de la soie ou celles de l'Arctique, qui feront d'elle la superpuissance eurasiatique tournée vers une nouvelle économie-monde centrée en Asie. Loin des clichés médiatiques, plongeant dans les profondeurs de l'histoire et de la géopolitique, Arnaud Leclercq nous offre une réflexion atypique et inscrite dans la longue durée, nourrie d'une connaissance intime des Russes. Il met en lumière les constantes religieuses, identitaires, politiques de la Russie et trace les perspectives d'une puissance qui, n'en déplaise à l'Occident, sera de plus en plus incontournable."

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  • Tour d'horizon... (34)

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    Au sommaire cette semaine :

    - sur Boulevard Voltaire, Jean-Yves Le Gallou dénonce une illusion politico-économique à la mode ;

    L'illusion du choc de compétitivité

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     - sur Ria Novosti, Alexandre Latsa nous rappelle ce qui différencie Vladimir Poutine des ectoplasmes qui nous gouverne en Europe de l'Ouest...

    Pourquoi Vladimir Poutine ?

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  • Bernard Arnault, Poutine et l'Etat...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, cueilli sur Voxnr et consacré aux informations relatives à la volonté de Bernard Arnault d'acquérir la nationalité belge, manifestement pour échapper à l'impôt en France...

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    Bernart Arnault, Poutine et l'Etat

    L’argent n’a ni patrie, ni odeur. En annonçant qu’il allait requérir la nationalité belge, Bernard Arnault semble confirmer cet adage, qui n’est pas sans fondement. Déjà, sous la Restauration, Stendhal dénonçait les banquiers, légitimistes ou républicains, qui finançaient la flotte d’Ali Pacha destinée à écraser l’insurrection grecque. Notre histoire donnerait maints occurrences de ces dérives antinationales ou antipopulaires d’une ploutocratie qui suit la logique du profit, d’autant mieux qu’il est particulièrement ardu de voir clair dans des stratégies financières qui demandent les vertus d’opacité, de roublardise, et d’entourloupe qui ne sont pas à la portée du premier perdreau, surtout s’il s’agit de vol de haute stratosphère, comme il s’avère avec le sieur Arnault, qui n’est pas devenu la quatrième fortune du monde, et la première d’Europe, pour rien. Si l’on prend la peine de lire sur Wikipedia l’épopée affairiste de cet artiste du fric, on a vite le tourni. Le monde de l’agent est une véritable usine à gaz, et il faut vraiment avoir le goût et le courage de s’y perdre pour s’y reconnaître.

    Quoi qu’il en soit, tout puissant soit-il, et tout en lui consentant un grand talent, Bernard Arnault renferme des petitesses, voire des mesquineries, assez insolites pour qui a l’habitude de penser à l’échelle planétaire. On veut bien croire que désirer devenir belge, ce qui, en soi, ne constitue pas une honte, pour échapper à l’impôt, ou permettre, via Monaco, à ses héritier d’obtenir de plus grandes parts de gâteaux, n’est pas glorieux, du point de vue de l’homme du commun, qui ne comprend pas comment on peut être prisonnier d’une fortune aussi colossale . Combien de vies pour dépenser 41 milliards de dollars ? A cela, on rétorquera que, justement, l’homme du commun ne peut comprendre cette ivresse, cet orgueil, comme celui par exemple du seigneur, ou du paysan, attaché, contre toute raison, à sa terre. Certaines folies sont incompréhensibles pour celui qui n’en est pas. Ayons donc l’esprit large, et ne tombons pas dans le ressentiment des gauchistes haineux et curés mal fagotés, qui reprochent seulement aux puissants d’être puissants. Au fond, si les Anciens ont condamné l’amour de l’agent, l’avarice, c’est qu’il s’agissait d’une passion qui éloignait de la sagesse, et si Jésus, et après lui, l’Eglise, ont enjoint de choisir entre Dieu et Mammon, ce n’était pas parce que les riches en soi devaient finir automatiquement en enfer, et combien de « pauvres », faux riches si envieux, devraient connaître ce sort !, mais parce qu’ils étaient trop corrompus dans leur cœur et leur esprit pour se détacher suffisamment de leur avoir, et le mettre au service d’autrui.

    Issu du patronat nordiste, si enclin au paternaliste, Bernard Arnault a très vite adopté les tares du capitalisme moderne. Son attitude présente connaît des antécédents, plus ou moins glorieux. Ami de Nicolas Sarkozy, des mains duquel il fut promu, le 14 juillet 2011, officier de la légion d’honneur, il est représentatif de ce patronat qui a pour Bernard Henri Levi, cette nullité, les yeux de Chimène, et a choisi, pour paraphraser Churchill, la voie du large, le grand large de l’Empire américain, bien sûr. C’est d’ailleurs aux Etats-Unis qu’il émigre en mai 81, durant trois ans. Craignait-il pour sa tête ? Sa propension à subventionner l’art dit « contemporain », véritable savon à vilains cosmopolite, potlatch qui donne un supplément « artistique » à une oligarchie internationale vide et avide, est l’un des signes de son attachement à une caste qui se contrefiche des racines et des identités.

    Faut-il l’admirer comme un personnage balzacien ? Lorsqu’il berne Fabius en recevant, en 1984, 2 milliard de francs du gouvernement, contre la promesse de ne pas licencier les salariés du groupe Broussac dont il vient de s’emparer, il arrive à tirer les marrons du feu, en revendant les actifs les plus importants, ce qui occasionne une restructuration, le licenciement des malheureux, et, finalement l’injonction, de la part de la Commission européenne, en 1987, de rembourser une partie des sommes reçues, obligation qui ne concerne plus, dès lors, le sieur Arnault. Bien joué, l’artiste ! Les affaires, c’est comme la guerre, qui n’a rien à voir avec la morale ! Relisons sa déclaration du 14 décembre 1984, adressée à Fabius, qui fleure bon la tartuferie politicienne de haute volée : « J'assurerai personnellement la direction de la DBSF et je procéderai à la mise en œuvre du plan industriel et social tel qu'il a été communiqué aux administrations ». Ni plus, ni moins. Il oublait de dire qu’il ne garderait pas longtemps la dite direction…

    Quoi qu’il en soit, les ténors de l’UMP peuvent crier leur indignation, et accuser Hollande de stupidité, eux qui avaient, par le bouclier fiscal, bloqué le taux d’imposition des plus riches à 50% maximum. Qui est stupide ? Est-il intelligent de laisser agir le bandit ? Imaginons que l’on donne le droit au renard de manger dix poules dans le poulailler, et que tout à coup, vous rectifiiez cette permission à la baisse, sans avoir un droit de regard sur le poulailler du voisin, qui octroie le droit de trucider douze poules… Vous allez dire que ce n’est là qu’un raisonnement par l’absurde, car il est improbable qu’un fermier abandonne ses poules à un prédateur. Et pourtant…

    Nous savons très bien, en effet, combien la Commission de Bruxelles possède un talent certain pour veiller à tout ce qui touche notre vie. Les règlements tatillons ne manquent pas, et quand on ne passe pas à la caisse, c’est notre existence qui est mise en boîte. Les lois et décrets qui instaurent le libéralisme le plus dogmatique ont aussi cours, sans que les parlements nationaux aient leur mot à dire. Et la tendance lourde de cet appareil législative s’oriente toujours dans le sens du moins disant social, vers la déréglementation, la dénationalisation, et l’aggravation de la condition des salariés. De ce côté-là règne une homogénéisation merveilleuse, qu’accentuera l’adoption de la fameuse « règle d’or » des 3%. En revanche, les règles fiscales, les passe-droits, les ponts dorés en direction des paradis fiscaux sont, en Belgique, au Luxembourg, à Monaco etc. (sans parler des facilités pour blanchir l’argent sale) à la dispositions des gens de fric. L’Europe est devenue un immense poulailler où le renard est libre comme l’air. Lui seul détient la liberté réelle, celle d’entrer, de sortir son avoir, de miser comme il veut, de subtiliser son magot, sa fortune, tandis que les peuples n’ont que cette liberté fallacieuse de se vendre, si l’on veut bien d’eux.

    D’où vient cette richesse ? N’y a-t-il pas un devoir moral, sinon civique, de rendre au pays ce qu’on lui a soutiré ? Le riche échappe-t-il à cette grande famille qu’est la patrie ?

    Encore une fois, la Russie de Poutine s’offre à nous comme modèle. Ceux que l’on a appelés les « oligarques », et qui mériteraient mieux le titre de « ploutocrates », les Khodorkhovski, qui mettaient en coupe réglée un pays livré, sous Eltsine, à l’anarchie et au vol, ont été matés par Poutine. Ce dernier ne les a pas tous fait condamner. Ceux qui croupissent en prison, notamment certains du groupe Ioukos, n’ont que ce qu’ils méritent. Ils imposaient en effet leur loi à l’Etat. Maintenant, c’est l’inverse et les choses ont vraiment changé au moment des législatives en 1999, et lors de la première campagne présidentielle de Vladimir Poutine. A la fin 2000, le Président a convoqué les principaux oligarques les plus riches de Russie et leur a proposé le contrat suivant :
    « Vous ne vous mêlez plus de politique, vous payez vos impôts et nous vous laissons faire vos affaires tranquilles. » Sous entendu, vous êtes patriotes, sinon couic !
    Ainsi l’Etat devrait-il agir avec les milliardaires qui se croient au-dessus de tout, et singulièrement de leur propre pays : « Vous faites vos affaires, vous remplissez vos devoirs, et rien de plus. »

    Encore faudrait-il rompre avec la logique mondialiste et financière. Ce n’est pas une autre histoire, c’est la même…

    Claude Bourrinet (Voxnr, 9 septembre 2012)
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  • A propos des Pussy Riot...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, cueilli sur Voxnr et consacré à l'«affaire» des Pussy Riot...

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    Pussy Riot, ce que désigne l'Occident
     
    L’art propagandiste consiste à se servir d’un événement, volontairement provoqué ou non, et de l’instrumentaliser en l’insérant dans une narration qui, la plupart du temps, est complètement détachée de la réalité, et s’apparente plutôt à une légende, noire ou rose. George Orwell a très horrifiquement décrit une société fondée en permanence sur cette dualité, qui fait penser à une sorte de schizophrénie collective, propre aux régimes dits « totalitaires ». Pour bien saisir l’importance disproportionnée que la « performance » des Pussy Riot, dûment encouragée et soutenue par l’énorme appareil de guerre idéologique de l’Occident, il faut la replacer dans une perspective sociétale. Car si ces « artistes », qui répètent de façon caricaturale et grotesque, ce que l’Occident a produit de pire en matière « culturelle », servent de pionnes à un conflit qui les dépasse, elles n’en expriment pas moins ce qu’est en vérité la nature du « Nouvel Ordre mondial » que d’aucuns voudraient voir s’étendre à l’échelle planétaire.

    Ne nous attardons pas sur les faits commis, qui relèvent du droit commun, et concernent la justice russe. Il est d’ailleurs choquant que des responsables politiques étrangers contestent un jugement qui serait exactement le même dans leur propre pays. Comme le faisait remarquer Alexandre Latsa (Pussy Riot : pourquoi une telle médiatisation? Rianovosti), l’article 322-3-1 du code pénal français punit de sept ans de prison et 100.000 € d’amende la dégradation d’un bien culturel exposé dans un lieu de culte. Rappelons aussi qu’en France existe une loi sur le blasphème, non pour protéger les religions traditionnelles, mais pour garantir la pérennité de dogmes relatifs à la shoah, vérités qu’il est interdit de discuter, et qui donne l’occasion, de ci, de là, de condamner, non pas parfois par rapport à ce qui est proféré, mais en regard de ce qu’on suppute être une opinion induite. Personne en France ne s’est élevé, dans les milieux intellectuels, pourtant si prompts à l’indignation sélective, contre cette loi inique qui a scandaleusement traîné devant les tribunaux des esprits libres, aujourd’hui si rares, parfois en assimilant outrancièrement l’antisionisme à de l’antisémitisme. Rappelons aussi en passant que nos démocrates maison, aptes à déclencher des « semaines de la haine » quand ça les arrange, ou à manier la perfidie comme d’habiles petits Goebbels qu’ils sont, ne voient aucun inconvénient à ce qu’un parti, qui drainent plus de 18% des électeurs, n’envoie à l’assemblée que deux députés. Il faut imaginer ce qu’une telle réalité politique susciterait de sarcasmes s’il s’agissait de la Russie, qui pratique en la matière la proportionnelle.

    Puisqu’il faut s’attarder sur la seule réalité qui compte, à savoir la domination sans partage d’une propagande colportée par les officines, les chancelleries, les medias, les membres du show business etc., tous acteurs de diabolisation de l’ « ennemi », et de promotion d’une société gangrénée et contrôlée par la finance apatride et cupide, il est intéressant de souligner ce qui est tu, de façon si criante, si l’on ose dire. Quoi de plus comique que lire et d’écouter les couplets des chœurs de pleureuses, rhétorique si redondante et convenue qu’on a l’impression qu’elle s’inspire du même dictionnaire, d’un glossaire qui donnerait aux comédiens de cet opera buffa tous les termes idoines du langage de l’épouvante la plus extrême. C’est tout juste si Poutine, Bachar Al-Assad, après le regretté colonel Kadhafi, ne sont pas décrits comme les réincarnations méphistophéliques de l’inestimable Nosferatu, de quelque Dracula que toute la quincaillerie clinquante et dérisoire de la société hallucinogène actuelle viserait à exorciser. Cela porterait à rire, comme dans ces théâtres de guignol qui font se pâmer les enfants de cinq ans, s’il n’y avait dans les coulisses tant de cadavres encore sanglants. Car ces idiots utiles de la bien pensance (je ne parle pas des responsables politiques qui savent très bien ce qu’ils font, en machiavels de supermarché du crime) n’ont guère été entendus quand les forces colonialistes de l’Otan ont écrasé un petit pays libre et fier, occasionnant 160 000 morts. On ne les voit pas non plus quand des civils sont massacrés par les avions des « alliés » en Afghanistan, ou que des attentats « aveugles » (préfiguration de ce qui se passerait en Syrie si les « rebelles » extrémistes l’emportaient) déciment les populations dans l’Irak « libéré ». Apparemment, certaines vies valent plus que d’autres. Où sont passées les accusations de tortures délocalisées par la CIA dans certains pays arabes ou d’Europe centrale ? Pourquoi du reste ne pas user de la même ténacité que celle qu’on emploie pour diffamer la Russie et son prétendu « Goulag », son supposé manque de liberté, pour s’en prendre aux Etats Unis d’Amérique, que l’emprisonnement dans un camp de concentration à Guantanamo de prisonniers non jugés (et à ce jour, ce camp n’est toujours pas fermé) aurait dû mettre au ban de la « communauté internationale », et qui ont légalisé la torture, conçu une loi liberticide, dite « patriot act », laquelle permet toutes les atteintes à la vie privée, à l’expression et à la circulation des gens (avec l’assentiment de la Communauté européenne, qui a accepté un contrôle policier de ses ressortissant par les Américains) ? Pourquoi ne pas dénoncer, avec toute l’ampleur et la puissance médiatiques déployées pour caricaturer la Russie et d’autres pays récalcitrants, la peine de mort dont l’application particulièrement abjecte, passe presque, ainsi que les bagnes, les prisons infâmes, inhumaines du pays du shérif Lynch, comme des traits folkloriques du pays des cow boys ? Pourquoi, du reste, ne pas reconnaître que l’action « héroïque » de ces pauvres filles, qui risquent d’ailleurs de ne plus le rester tant il leur est permis d’espérer quelque récompense de la part du milliardaire Soros, qui a toujours soutenu les entreprises de subversion visant à miner les pays de l’ex-bloc soviétique, n’aurait pas été tenue pour telle si elles avaient eu l’idée saugrenue d’envahir une synagogue pour protester contre la politique agressive, spoliatrice, criminelle d’un Etat qui mène, sans susciter de protestations majeures, et en dépit de dizaines de résolutions de l’ONU le condamnant, un nombre impressionnant d’actions, dont une seule aboutirait, pour n’importe quel autre pays, à une mise au ban de la société des nations ?

    Il n’est pas inutile non plus de s’interroger sur la nature d’un tel groupe d’agit-prop, que l’on présente comme un modèle de liberté, représentatif d’une liberté d’expression liée prétendument, comme le suggère de façon particulièrement grotesque notre ministre de la « culture », à une jeunesse qui n’aurait, comme toute ligne d’horizon, que la perspective hautement exaltante, de pratiquer des orgies avec des femmes enceintes, de se masturber avec des poulets morts, de crier « merde, merde, merde au Seigneur » dans une église, de se montrer nu et couvert de cafards, et j’en passe. On sait que, jadis, à l’époque où les rôles étaient bien départagés à l’échelle mondiale, d’un côté l’axe du Bien, l’Occident, et l’axe du Mal, le camp soviétique – un mystique, Soljenitsyne, qui, au demeurant, présentait tous les caractères d’un véritable génie littéraire et philosophique, lui, était plus ou moins accepté comme dissident pat la pars occidentalis du globe, et d’ailleurs plutôt moins que plus. Il est vrai qu’à sa façon il anticipait la nouvelle Russie qu’un Vladimir Poutine incarne, une Nation fière, indépendante, qui ne se laisse pas marcher sur ses pattes d’ours, et qui revient de plus en plus à des valeurs ancestrales, à la religion de ses pères. Ce que ne saurait tolérer un capitalisme agressif, dont la justification, qu’on appellera « philosophique », faute de mieux, repose sur la légitimation de la destruction programmée de tout ce qui fait obstacle à l’affranchissement hédoniste, expressionniste, morbide de toutes les pulsions infra-humaines, de toutes les capacités, à vrai dire infinies, des désirs égocentriques, animaux et haineux de ce qui se cache sous la conscience humaine, et qu’une société digne de ce nom doit permettre de juguler par le respect, l’éducation, et la considération pour le sacré et sa propre patrie.
    Claude Bourrinet (Voxnr, 18 août 2012)

     

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