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maxime tandonnet - Page 5

  • L'explosion qui vient...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré à la colère qui monte dans le pays profond face aux mesures ineptes prises par le régime macronien.

    Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l’Élysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

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    L’explosion qui approche

    Chacun sent bien que le deuxième confinement ne passe pas dans le pays. Les sondages globaux sont faussés par le climat de peur. Sous l’effet de la crainte de la mort, les sondés répondent qu’ils sont prêts à tout accepter pour sauver leur peau. Mais dans les profondeurs de la nation, les mesures autoritaristes et liberticides du pouvoir ne sont pas acceptées. Cette fois-ci, les Français vivent comme une humiliation collective les laisser-passer obligatoires pour sortir de chez soi. Ils ne supportent pas que le pouvoir leur impose, comme à des enfants immatures, sa vision des produits « essentiels » et non « essentiels ». Ils ne comprennent pas le choix arbitraire – et tellement emblématique – d’autoriser la vente de tabac mais de leur interdire d’acheter des livres en librairie. Ils n’acceptent pas le chantage permanent, puéril, du pouvoir sur « les fêtes de Noël et de fin d’année ». Ils jugent inadmissible les restrictions apportées à leur liberté de circulation et les interdictions de voir la famille. Ils ressentent comme inepte l’ordre moral imposé d’en haut par un pouvoir jupitérien et ses ingérences dans la vie privée voire intime, quant au nombre de personnes admises à table. Les contrôles et la répression envers les passants paisibles sont vécus comme abusifs et inacceptables alors que la violence se déchaîne dans l’impunité habituelle au cœur des zones de non droit. Les croyants sont indignés de l’interdiction de célébrer leur culte. Ces mesures ne passent absolument pas dans les profondeurs du pays: elles sont ressenties par la France comme inutiles, inefficaces et illégitimes. L’impression d’arrogance obtuse qui tombe de là-haut suscite un profond malaise tout comme la morgue de dirigeants incapables d’admettre leurs fautes et prompts à se défausser de leur responsabilité sur la population. La défiance touche à son paroxysme. Un grondement sourd remonte des entrailles du pays, ce grondement qu’un pouvoir déconnecté, aveuglé par des sondages mensongers, ne saurait entendre. Ne l’entendez-vous pas ce grondement? L’aveuglement, l’autoritarisme, un comportement obtus, sourd à tous les arguments de bon sens sont les signes d’un pouvoir faible, en perdition, déboussolé. La révolte commence à prendre le pas sur la peur: dans un contexte économique et social épouvantable, nous sommes à la veille ou l’avant-veille d’une violente explosion et d’une crise politique d’une exceptionnelle gravité.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 14 novembre 2020)

     

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  • La désintégration ?...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré à l'assassinat islamiste de Conflans vu comme un symptome de la désintégration accélérée de notre pays. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l’Élysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    La désintégration

    La décapitation d’un professeur d’histoire à Conflans n’est que dans la continuité d’une longue série d’attentats en cours depuis 2012. M. Paty est la 263e victime de l’islamisme. La vague se poursuit, inexorablement. Ceux qui n’ont pas la mémoire courte le savent. A chaque fois, les réactions de la société politico-médiatique française sont strictement identiques: hystérie de quelques jours, indignation furibonde, hommages solennels, marches blanches, bouquets de fleurs, grandiloquence, coups de menton, annonces spectaculaires, toujours les mêmes, expulsions, fermetures , interdictions, etc. Et toujours le même discours: « Cette fois, plus jamais pareil! » Mais rien n’y fait, la tragédie continue.

    Essayer de prendre de la hauteur, de resituer la vague sanguinaire dans son contexte historique. La France est sur la pente d’une désintégration accélérée. Les fanfaronnades de ses dirigeants, de gouvernement en gouvernement, ne doivent leurrer personne. L’Etat est débordé par la violence qui se déchaîne partout. Les flux migratoires en hausse fulgurante (asile, titres de séjour) échappent à son contrôle. Le territoire se morcelle en enclaves étrangères et se hérisse de frontières intérieures. L’école au centre de la tragédie, confrontée au chaos, n’assure plus correctement la transmission du savoir et de l’intelligence, produisant une génération en déshérence. La nature ayant horreur du vide, l’idéologie islamiste s’engouffre dans l’espace laissé vacant par la culture française. L’explosion de la dette publique (120% du PIB), est la mesure de l’impéritie et de l’incapacité des gestionnaires de la chose publique. Les principes et les repères de la nation achèvent de voler en éclat, tels que la solidarité nationale (avec 9 millions de pauvres). Amalgame? Non, tout ceci procède d’une même faillite de long terme.

    La France, au prise d’une vertigineuse poussée de l’inculture et de la bêtise, est privée de boussole, à l’image d’un bateau ivre: où est le bien, où est le mal? Les déclarations de ses plus hauts dirigeants prônent le haine de soi, la culpabilité et la repentance. La suppression emblématique de la figure paternelle à travers la « PMA sans père » n’est pas le moindre aspect de cette œuvre de destruction des repères. Les scandales, l’arrogance et le mépris du peuple sont au cœur de la décomposition. Bref, la France se désagrège, se dissout dans la médiocrité, prend l’eau de toute part et le meurtre horrible de M. Paty n’est qu’une étape supplémentaire dans ce désastre.  Aucune gesticulation, aucune pitrerie ne doit entretenir l’illusion. Remède miracle? Il n’en existe que pour les imbéciles. C’est au prix d’un changement radical de perspective et d’un effort de plusieurs décennies, peut-être de plusieurs générations, qu’un début de redressement est envisageable. Il passe à la base, par une prise de conscience, un retour à l’intelligence collective, mais nous en sommes bien loin et la pente tragique se poursuit.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 20 octobre 2020)

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  • Le nouveau monde ou l'abêtissement politique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré aux tristes caractéristiques du "nouveau monde" politique. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    Le nouveau monde ou l'abêtissement politique

    « Nouveau monde » ou « monde d’après », il est utile de se pencher sur la réalité de la vie politique aujourd’hui en France. Elle est dominée par un abêtissement général, perceptible autour d’une dizaine de paramètres:

    • La fin de l’engagement  : les partis politiques supposés, selon la Constitution concourir « à l’exercice de la démocratie », sont en voie de disparition. La dernière enquête CEVIPOF d’avril 2020 sur l’état d’esprit des Français (vague 11bis), montre qu’ils sont devenus l’institution la plus impopulaire (11% de confiance). Les taux d’adhésion s’effondrent. Or, les partis politiques servaient classiquement à faire émerger les projets et à désigner les futurs responsables politiques. Par quoi ont-ils été remplacés?
    • La courtisanerie: elle se distingue de l’engagement par sa motivation: l’intérêt carriériste, la vanité ou simplement l’éblouissement puéril. Notre époque n’a rien à envier à celle de Saint-Simon. Courtisans et lèche-bottes prolifèrent autour du prince, obsédés, au mépris de toute dignité, par leur seule place au soleil.
    • L’incarnation : le sujet essentiel qui domine tout le reste est celui de l'incarnation. La formule est sur toutes les lèvres: « qui pour incarner? » La politique est avant tout affaire d’émotion et d’affect, se limitant au choix d’une idole, un gourou, une vedette médiatique dont la mission est « d’incarner ». Incarner quoi? La question ne se pose même pas, ou à peine. Le chef est une fin en soi, l’incarnation du rêve et de l’illusion à laquelle chaque citoyen est invité à se soumettre. Ce phénomène est le plus symptomatique du climat d’asservissement général.
    • Le grand spectacle: la vie politique a vocation à se muter en spectacle déconnecté de la réalité où s’ébattent des acteurs, des artistes de l’illusion. Faute d’agir sur le monde des réalités et de gouverner, ils se livrent à une surenchère d’annonces spectaculaires, de coups de communication, de slogans et de paroles creuses, de coups de menton, de provocations censées remplir le vide laissé par leur démission. Il n’est pas d’aveu plus évident de l’impuissance et du renoncement politique que les gesticulations d’un fanfaron.
    • La déconnexion: le triomphe du grand guignol  est le signe de l’affaiblissement des courroies de transmission entre le politique et la société. Sur la dette publique, l’évolution des prélèvements obligatoires, la désindustrialisation,  la maîtrise des frontières, la poussée de la violence et de la barbarie, l’effondrement scolaire, l’autorité publique a largement intériorisé le sentiment de l’impuissance publique et de la perte de ses leviers d’action.
    • La post démocratie: le qualificatif de démocratie appliqué à la nation moderne est au cœur de la duperie. Il est admis une fois pour toute que l’élection se résume à une sorte de fête des illusions. Ce que pense le peuple n’a pas la moindre esquisse d’importance. L’avenir se prépare sans lui et en dehors de lui. Il est conçu par des forces et des individus prétendument détenteurs de la vérité, sur l’ Europe, les frontières, la sécurité, la morale, les impôts et la dette publique, l’éducation nationale, c’est-à-dire les grands sujets de l’époque.
    • L’extrémisme ou démagogie:  le néant des idées et des projets n’est en rien synonyme de tolérance, de concorde et de sagesse. C’est le contraire qui se produit. La nature ayant horreur du vide, le nihilisme se traduit par une fuite en avant dans la radicalisation et le sectarisme. Dès lors que le réel n’a plus la moindre importance, la politique devient surenchère de promesses démagogiques nonobstant les conséquences (sortie du nucléaire, revenu universel) et d’affrontement hargneux et sectaires entre fauves hystériques.
    • Le triomphe de l’indifférence: ce grand cinéma ou numéro d’illusionnisme se déroule sur fond d’indifférence générale. L’abstentionnisme (54% aux dernières législatives) est un mouvement de fond qui ne cesse de s’amplifier. La métamorphose de la vie politique en grand spectacle nihiliste pourrait susciter l’indignation et la révolte. Or ce phénomène n’est que sporadique et marginal. Le sentiment dominant est au repli individuel. Le destin collectif s’efface au profit de la quête d’une survie et la chute vertigineuse de la France, comme un radeau en perdition que le torrent entraîne vers le précipice, n’est pas la préoccupation des Français dans leur majorité.
    • L’irresponsabilité: l’indifférence générale est la porte ouverte à toutes les dérives et tous les abus. Les dirigeants peuvent faire absolument n’importe quoi aujourd’hui –  clanisme, copinage, corruption avérée, mensonges, contradictions, fautes monstrueuses aux conséquences tragiques, insultes contre la nation, trahison – les mécanismes de mise en jeu de leur responsabilité (politique, judiciaires) et de sanction sont comme neutralisés. Tout est possible et rien ne semble devoir les arrêter.
    • La culture de médiocrité: dans ce monde nouveau disparaissent les références historiques et intellectuelles. Il en faudrait sans doute peu pour démontrer la vanité, l’absurdité et la dangerosité du grand cirque. Mais elles ont disparu. L’éclat de voix  d’un footballeur, d’un présentateur de télévision d’une actrice de cinéma ou de n’importe quel pitre n’ayant jamais lu un livre vaut plus que la parole d’un écrivain du XXe siècle et n’importe quel tweet méchant écrase d’un coup de talon la pensée de Péguy ou de  Bergson. Sur ce terreau de médiocrité s’enracine le nouveau monde décrit ci-dessus.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 26 août 2020)

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  • 20 mots clés du monde d'après...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré au "monde d'après" macronien. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

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    20 mots clés du monde d'après

    Annonces: la valse des annonces: à la différence de l’action ou de la décision, « l’annonce » n’engage que ceux qui l’ont entendue.

    Brouillage des esprits : la destruction des repères  (droite/gauche, débat d’idées, partis, etc.), engendre un terreau de confusion ou s’enracine le culte narcissique.

    Courtisanerie: partout, dans la presse, les administrations ou les médias, les lèche-bottes prolifèrent comme une sorte d’anti peuple réfractaire.

    Culot (« plus c’est gros plus ça passe »): copinage et clanisme nonobstant les mises en examen de source judiciaire: rien ne doit donner le sentiment de les faire reculer.

    Don d’ubiquité: être partout à la fois courir du matin au soir, démultiplier les apparitions, et gesticuler comme des pantins pour donner l’illusion de l’action.

    Déconnexion: la question n’est pas de régler les sujets mais de les nier, les effacer (dette, chômage, violence, migrations, pauvreté), en évitant tout ce qui s’y rapporte.

    Démultiplication des « petits pains« ou des milliards: on ne sait d’où ils sortent mais ils prolifèrent 12, 70, 100; à chaque apparition son bouquet de milliards distribués.

    Grands mots vides: « le nouveau monde, la transformation, la refondation , la réinvention, le monde d’après »: en compensation de l’immobilisme et l’impuissance.

    Incantation: il suffit de pavoiser, claironner, pour prétendre avoir traité un problème: proclamer « ceci est intolérable! » en guise de mesure pour la sécurité.

    Irresponsabilité: déclencher les pires calamités commettre les fautes les plus monstrueuses n’a pas la moindre conséquence: j’y suis, j’y reste.

    Jupitérisme: où l’autorité verticale, d’autant plus implacable sur la forme que dépourvue de prestige et de confiance populaire, tourne à vide et brasse le néant.

    Mépris:  des « sans dents » aux « Gaulois réfractaires »: il est entendu une fois pour toute que la « vile populace » ne mérite que la chicote, doit être matée (avec le sourire).

    Narcissisme: le principe « d’incarnation » devenu fou quand la vie publique se confond toute entière avec l’image médiatique d’un individu.

    Nihilisme: l’ère du vide, rien ne compte, rien n’importe, ni le bien commun, ni l’intérêt public ou national, en dehors d’une fin suprême: la réélection comme but en soi.

    Provocation et polémiques: déclencher l’excitation médiatique ou l’hystérie pour donner l’illusion du mouvement et de l’action.

    Sensationnel: noyer la médiocrité, les souffrance, les préoccupation de l’époque dans une surenchère de coups médiatiques, d’événements et d’apparitions providentiels.

    Spectacle : la vie politique présentée en grand spectacle autour d’un héros de légende, Jupiter ou archange Saint Michel pour combattre les démons (« populistes »).

    Table rase: un événement chasse l’autre, la roue médiatique tourne, la mémoire se rétrécit à vue d’œil: il suffit de quelques jours pour faire oublier les pires sottises.

    Transgression: ne reculer devant rien, aucune aberration, aucune contradiction: un jour post national, le lendemain souverainiste. Et alors?

    Vanité: principe fondamental du nouveau régime narcissique, équivalent de ce qu’est   la vertu à la démocratie, l’honneur à l’aristocratie, et la crainte à la monarchie (selon Montesquieu).

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 8 août 2020)

     
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  • La crise du coronavirus, le fruit des défaillances de la France d’en haut...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur Figaro Vox et consacré à la faillite des élites, brutalement mise en lumière par la crise du coronavirus. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    Coronavirus: « La crise qui nous frappe est aussi le fruit des défaillances de la France d’en haut »

    Cette crise du coronavirus confirme une fois de plus le fossé qui sépare les élites médiatiques et dirigeantes de la majorité silencieuse et du pays profond. Le discours dominant, celui de la France dite d’en haut, proféré sur les grands médias radio-télévision, ne lésine pas sur la culpabilisation de la population. Que n’a-t-on pas entendu depuis quelques jours? «Les gens sont irresponsables, indisciplinés, inconscients, idiots.» À l’appui de ces propos, les journaux télévisés ont montré, dimanche 15 mars, des centaines de personnes avec leurs enfants rassemblées dans les parcs ou au bord de la Seine. Les mêmes médias ont accablé les foules de Parisiens à la gare, en quête d’un train gagnant la province… Et depuis peu, les queues devant les magasins ou les pharmacies et les achats massifs de personnes craignant la pénurie.

    Signes irréfutables de la panique populaire ou d’un manque de solidarité? De fait, les images accusatrices ne préjugent en rien du sentiment profond du pays. D’ailleurs, dès lors que l’état de guerre a été annoncé par les plus hautes autorités de la nation, comment reprocher à des mères et pères de famille de vouloir quitter Paris avec leur famille et de faire des provisions de vivres et de médicaments? Ne s’agit-il pas de réflexes naturels en temps de guerre? Certes, les réseaux sociaux fourmillent de petites vidéos montrant des scènes scandaleuses, comme des bagarres devant des commerces. Ces comportements caricaturaux ne doivent évidemment pas préjuger de l’état d’esprit général d’une nation.

    De fait, jusqu’à jeudi 12 mars, le discours dominant, de la part des médecins et scientifiques s’exprimant sur les médias ainsi que des autorités du pays, était plutôt à la dédramatisation. Il était question, malgré la tragédie italienne, d’une sorte de grippe sans danger pour les personnes bien portantes et de confiance a priori dans le système de soin français supposé capable de faire face à une situation de crise. Certaines personnalités s’étaient même affichées publiquement dans la foule s’offrant ainsi en exemples de sang-froid. La prise de conscience de la gravité de la situation et le changement de ton sont intervenus entre le 12 et le 15 mars.

    Peut-on reprocher à la population, ou à une partie d’entre elle de s’être trop longtemps fiée à ce message optimiste? D’avoir continué de s’entasser dans les transports en commun, rassurée par la parole scientifique et officielle? D’être sortie dans les parcs, demeurés ouverts et autorisés, pour profiter d’une belle journée printanière? La mode est aussi à fustiger les 45% de Français qui se sont rendus aux urnes dimanche et auraient ainsi fait preuve d’inconscience plutôt que de sens civique. Si l’abstention des personnes fragiles est évidemment compréhensible, il est incongru de montrer du doigt les électeurs qui ont accompli leur devoir de citoyen dès lors que le scrutin était ouvert et les conditions de sécurité annoncées comme draconiennes.

    «Toute société qui souffre a besoin de boucs émissaires à qui imputer son mal» écrit en 1983 Raoul Girardet, dans Mythes et mythologie politiques, à l’image de ces grandes épidémies de jadis qui donnaient lieu à d’effroyables chasses aux sorcières. La majorité silencieuse, anonyme, la «vile multitude», comme disait Thiers en 1850, serait-elle aujourd’hui le nouveau coupable idéal? Mais surtout, le pays dans son ensemble doit-il devenir le bouc émissaire des défaillances de la France dite «d’en haut», les élites médiatiques, scientifiques, dirigeantes, à anticiper et prévenir une catastrophe qui s’est déclenchée en Chine à la fin de l’année 2019?

    Relisons L’étrange défaite de Marc Bloch, qui n’a pas vieilli d’une ride. «Quoi que l’on pense des causes profondes du désastre, la cause directe fut l’incapacité du commandement [qui] n’a pas su ou pas voulu comprendre le rythme, accordé aux vibrations accélérées, d’une ère nouvelle. [L’ennemi croyait] à l’action et à l’imprévu. Nous avions donné notre foi à l’immobilité et au déjà fait.» Pour l’auteur de ce chef-d’œuvre, la débâcle de 1940 fut avant tout le produit du déclin intellectuel des élites dirigeantes, de l’affaiblissement de la culture générale, historique et littéraire, qui permet de disposer du recul nécessaire face aux évènements en cours et par là même, d’en lire le mécanisme, de les interpréter et d’anticiper au mieux face à l’imprévisible: «Le passé a beau ne pas commander le présent tout entier, sans lui, le présent demeure inintelligible. Pis encore peut-être: se privant délibérément, d’un champ de vision et de comparaison assez large, notre pédagogie historique ne réussit plus à donner, aux esprits qu’elle prétend former, le sens du différent ni celui du changement.» Bien entendu, la crise actuelle, par sa nature et son ampleur, ne peut être comparée avec la débâcle de juin 1940. Les deux ont cependant un point commun: à la base, une faillite intellectuelle.

    Maxime Tandonnet (Figaro Vox, 18 mars 2020)

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  • Les errements de la repentance...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Maxime Tandonnet, cueilli sur son blog personnel et consacré aux dernières déclarations du président de la République à propos de la colonisation. Ancien haut-fonctionnaire, spécialiste des questions d'immigration, et désormais enseignant, Maxime Tandonnet a été conseiller à l'Elysée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Il a donné un témoignage lucide et éclairant de cette expérience dans Au cœur du volcan (Flammarion, 2014).

     

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    Les errements de la repentance

    « Le colonialisme a été une erreur profonde, une faute de la République ». Cette affirmation du chef de l’Etat est discutable à plus d’un titre. La République n’est pas la première ni la principale responsable du colonialisme français. Celui-ci a commencé sous la monarchie, au XVIe et au XVIIe siècle (Canada, Indes, Antilles, Floride, la Réunion). La conquête de l’Algérie a débuté sous Charles X et le Second Empire de Napoléon III lui a donné une forte impulsion. De même c’est le Second Empire, et non la République, qui a amorcé les grands courants de colonisation française de l’Afrique subsaharienne (Sénégal) et de l’Asie (Cambodge). La colonisation ne peut évidemment pas se limiter à la France: l’Espagne et le Portugal, en Amérique du Sud, le Portugal en Asie et en Afrique, le Royaume-Uni dans le monde entier, furent d’autres grandes puissances colonisatrices, pour ne parler que de l’Europe.

    En outre, la République est un mode d’organisation du gouvernement pas une politique. La colonisation a pris un nouvel essor considérable sous la IIIe République (Indochine, Afrique subsaharienne) du fait de choix idéologiques des « Opportunistes » dont Jules Ferry qui déclarait à la Chambre des députés, le 28 juillet 1885: « Je soutiens que les nations européennes s’acquittent avec largeur, avec grandeur et honnêteté, de leur devoir supérieur de civilisation! » Le colonialisme avait aussi ses opposants. « L’extrême gauche » le fustigeait à travers Clemenceau. La droite dite « réactionnaire » lui était parfois hostile à l’image de la prophétie d’Albert de Broglie, dénonçant, dans la politique coloniale: « une charge qui grève la nation, qu’elle ne peut porter longtemps, et qui, avant de lui échapper, peut avoir amené la ruine à la fois de la colonie et de la métropole » (Sénat 11 décembre 1884). Ce n’est donc pas la République qui a fait le colonialisme des années 1880-1014, mais un courant idéologique bien spécifique alors majoritaire: la gauche républicaine.

    La repentance française, au cœur de l’idéologie macroniste, repose largement sur un anachronisme. La colonisation s’est effectuée dans le contexte d’une Europe globalement dominatrice du XVIe au début du XXe siècle, qui se reconnaissait une mission civilisatrice, dans un large climat de consensus. Les Français comme les Britanniques, dans leur immense majorité, vouaient jusqu’aux années 1950 une admiration sans bornes à leur Empire, sur lequel « le soleil ne se couche jamais ». Les guerres coloniales et de décolonisation ont fait couler le sang. Mais les colons ont aussi construit des routes, des villes, des hôpitaux, des écoles – d’où la place de la francophonie ou de l’anglais et de l’espagnol dans le monde. Quelle signification il y a-t-il à porter un jugement, positif ou négatif, sur un épisode clé de l’histoire de l’humanité? Faire le bilan coûts/avantages d’un demi-millénaire de colonialisme, expression d’une domination européenne et pas seulement française, au regard des valeurs contemporaines et après la grande vague de la décolonisation qui a bouleversé les équilibres planétaires depuis les années 1950, n’a évidemment aucun sens.

    Lancer des polémiques tonitruantes et stériles fait partie d’un mode de gouvernement consistant à déclencher des tollés, à attiser les passions, pour faire oublier les déceptions et les malheurs du temps et aussi faire parler de soi tout en réactivant les divisions idéologiques du pays (gauche/droite). L’histoire est généralement l’otage toute trouvée de cette pratique. Parmi les responsabilités fondamentales du chef de l’Etat figurent traditionnellement celle de garant de l’unité et de la concorde nationale et celle de la défense du prestige de la nation qu’il préside. Il faudrait en ajouter une nouvelle, la plus essentielle de nos jours: celle de garant d’un patrimoine intellectuel, d’une intelligence collective.

    Maxime Tandonnet (Blog personnel de Maxime Tandonnet, 23 décembre 2019)

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