Nous reproduisons ci-dessous, à la suite de la publication par le Nouvel Observateur d'un dossier grotesque signé par Renaud Dély sur les "néo-fachos", la réponse de Pascal Eysseric, rédacteur en chef de la revue Eléments, qui, une nouvelle fois, a eu droit aux attentions de la police de la pensée...
Stop ! Voilà plus de trente ans que Le Nouvel Observateur se sert de la revue Éléments comme d'un épouvantail à fascistes auprès de ses lecteurs. Entre deux plateaux télés, un commentaire sur le PSG et une blague graveleuse sur Carla Bruni, Renaud Dely a pris la plume cette semaine pour confectionner son marronnier de rentrée : « les néofascistes sont entrés dans Paris ». Le directeur du Nouvel Observateur y dénonce la revue Éléments qui récupère les « grands intellos » et plus particulièrement Jean-Claude Michéa qui « se dit de gauche ». Lire, voilà un soupçon qu'on aura du mal à formuler à propos de Renaud Dély. Trop occupé à feuilleter France Football, Dély n'a certainement plus le temps de lire les « grands intellos » comme il dit. Dans le dernier livre de Michéa, il aurait appris que ce dernier récuse justement ce terme de « gauche ». L'Équipe ou Le complexe d'Orphée, il faut choisir ! Si quelqu'un nous avait dit un jour que Thierry Roland dirigerait Le Nouvel Observateur… Le journaliste nous accuse également d'annexer Philippe Muray pour en faire une « caution » présentable du « combat identitaire ». Sauf que l'article d'Éléments dit exactement le contraire, et prend ses distances avec l'auteur de Festivus, Festivus… Renaud Dély ne fait pas seulement un blocage avec les « grands intellos », il en fait un aussi avec les tout-petits, qui pullulent dans son hebdomadaire. Ainsi le pontifiant Jean-Claude Guillebaud, qui asperge Éléments avec son eau bénite et son gros sel avant de le décortiquer, nous reproche lui d'être « aussi permissifs » que « la gauche libérale-libertaire ». Comprenne qui pourra !
En réalité, la haine du Nouvel Observateur à l'égard d'Éléments vient de loin. Elle a débuté en 1979. En ce temps-là, les devanciers de Renaud Dely nous reprochaient notre compagnonnage avec le flamboyant Guy Hocquenghem, qui s'était rebellé contre ceux, majoritaires au Nouvel Observateur, qui étaient passés du col Mao au Rotary. Il fit un « bout de chemin » avec nous et fut dûment dénoncé pour cela. Aujourd'hui, la direction du Nouvel Observateur fustige notre proximité avec le philosophe Jean-Claude Michéa. Nous l'assumons. Comme notre proximité intellectuelle avec Alain Caillé, Régis Debray, Serge Latouche, Jean-Pierre Le Goff, Jacques Sapir, Robert Guédiguian, etc. Si ceux-là devaient attendre que le patron du Nouvel Observateur les lise… Les rotatives des imprimeurs auront rouillé d'ici-là.
Pauvres « grands intellos » de gauche ainsi récupérés pour les méchants neo-droitistes ! Oui, nous les avons « annexés », oui nous les avons lus, oui nous les avons commentés comme il est de coutume dans une revue d'idées (Éléments est une des plus anciennes de France d'ailleurs). Aussi curieux que cela puisse paraître pour un arriviste comme Dély, nous allons même jusqu'à commenter des auteurs qui nous sont hostiles. C'est la raison pour laquelle le philosophe Edgar Morin (encore un « grand intello » que nous avons «annexé»?) a dit prendre du plaisir à lire Éléments. Faut-il le compter parmi les tenants du combat identitaire ? Pas sûr en revanche que le philosophe en ait beaucoup pris à lire Brèves de Football, le dernier «ouvrage» signé Renaud Dély. Publiée avant l'été dans le numéro 144, notre dossier sur la Diabolisation était prémonitoire : il annonçait une «conjuration des imbéciles dans les grands médias avant la fin de l'année». Renaud Dély a été pile à l'heure.
Pascal Eysseric
Rédacteur en chef
Revue Éléments
Pour vous découvrir les méthodes des Renaud Dély (Nouvel Observateur), Sylvain Bourmeau (Libération), Nelly Kaprièlian (Les Inrocks), et autres Thénardiers du paysage intellectuel français, lisez le numéro 144 d'Éléments…
Disponible ici : La diabolisation continue !