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eléments - Page 4

  • Chaos ?...

    "Par opposition au Kosmos, ordonné et d'essence divine, les Anciens Grecs nommaient « Chaos » un état de l'univers dépourvu de forme et indifférencié, où rien n'est déterminable ni concevable. pour la pensée grecque, le Kosmos nait de «la mise en forme » du Chaos. Toujours susceptible de reprendre le dessus, le Chaos n'est donc pas un état antérieur mais un état intérieur. Il perdure à l'intérieur du Kosmos."

    Jean-Sylvestre Mongrenier, Dictionnaire géopolitique de la défense européenne

     

     

    Le numéro 35 de la revue Krisis, dirigée par Alain de Benoist, vient de paraître. Le thème retenu est celui du chaos... Le sommaire est, comme toujours, particulièrement riche.

    Le numéro est disponible à la commande sur le site de la revue Eléments ou sur le site des Amis d'Alain de Benoist.

    Bonne lecture !

     

     

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    Au sommaire :

    • Jean-François Gautier / « Khaos », l’impensable fondamental

    • Pierre Le Vigan / Empédocle et la systémique du chaos

    • Document : Jaime Semprun / L’abîme se repeuple (extraits)

    • Alain de Benoist / Multitude ou chaos ? Sur les thèses de Michael Hardt et Antonio Negri

    • Eric Werner / Jusqu’où ne pas aller trop loin : sur l’avant-guerre civile

    • Entretien avec Alain Bauer / Chaos, insécurité et décèlement précoce des menaces

    • Document : Georges Sorel / La violence révolutionnaire : de la paix sociale au chaos régénérateur (1908)

    • Michel Drac / Le chaos monétaire

    • Entretien avec Philippe Simonnot / L’étalon-or pour sortir du chaos monétaire ?

    • Jean-François Gautier / De « Khaos » à « Chaos »

    • Jean-Louis Harouel / Le chaos du modernisme artistique

    • Entretien avec Bernard Lugan / L’Afrique noire est-elle vouée au chaos ?

    • Le texte : Martin Heidegger / Critique de la volonté de puissance. À propos du nihilisme

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  • La tyrannie de la transparence...

    Les éditions L'AEncre viennent de publier La Tyrannie de la transparence, un recueil de textes de Pierre Le Vigan, préfacé par Arnaud Guyot-Jeannin. Pierre Le Vigan, dont on peut lire les articles et les carnets dans la revue Eléments, a déjà publié Inventaire de la modernité avant liquidation (Avatar éditions, 2007) et Le Front du cachalot. Carnets de fureur et de jubilation (Dualpha, 2009).

     

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    " La transparence est le grand mot d’ordre de notre temps. Un problème se pose ? Il faut être plus transparent, disent les politiques et les communicants. Le droit à l’intime est contesté, le droit à l’épaisseur des êtres aussi. L’exigence de transparence devient une tyrannie, facilitée par le fait que beaucoup de gens sonnent creux, et que les projets politiques peuvent être d’autant plus transparents qu’ils sont vides. Se libérer de la tyrannie médiatique de la transparence, comme de quelques autres tyrannies issues de l’esprit du temps et de l’esprit des lois, c’est ce pour quoi plaide Pierre Le Vigan, dans ces textes où on reconnait son pas de marcheur de grand chemin dans la forêt des idées.

    Né en 1956, Pierre Le Vigan a grandi en proche banlieue de Paris. Il est urbaniste et travaille dans le domaine du logement social. Collaborateur de nombreuses revues depuis quelque 30 ans, il a abordé des sujets très divers, de la danse à l’idéologie des droits de l’homme, en tentant toujours de s’écarter des pensées préfabriquées. Attentif tant aux mouvements sociétaux, aux mœurs qu’aux idées philosophiques, il a publié de nombreux articles dans “Éléments, la revue des idées”. Il collabore aussi à “Flash Infos magazine” depuis sa création."

     

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  • A droite et à gauche... (1)

    Une nouvelle rubrique pour Métapo infos, intitulée "A droite et à gauche...", dans laquelle nous ferons figurer des citations variées, cueillies au fil de nos lectures du moment...

     

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    " Restons un pays ouvert, qui accueille de nouvelles cultures et tire profit du métissage. Et si par ailleurs il y a des enjeux d'intégration dans notre pays, c'est notamment à l'école et avec les enseignants qu'il faut les aborder."

    Laurence Parisot, « Restons un pays ouvert qui profite du métissage », Le Monde (17-18 avril 2011)

     

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    " Notre politique de l’emploi est aberrante. La France vient d’adopter une directive européenne dont le but est d’« attirer les ressortissants de pays tiers aux fins d’emplois hautement qualifiés ». Or de nombreux diplômés français s’exilent chaque année à l’étranger, où leurs talents sont reconnus. Mieux vaudrait endiguer la fuite de nos cerveaux ! Autre exemple : la signature en 2008 d’un accord d’immigration entre la France et le Sénégal. Il s’agit d’ouvrir le marché du travail français aux ressortissants sénégalais dans cent huit métiers, dont beaucoup ne sont pas très qualifiés : des emplois qui pourraient trouver preneurs en France, à niveau de compétence égal ou moyennant la formation de chômeurs.On estime à 4 millions le nombre des demandeurs d’emploi, si l’on tient compte des chômeurs qui ne sont pas inscrits à Pôle emploi et des salariés à temps partiel subi. Peut-on tout à la fois supporter la charge du chômage et recourir à une immigration de travail massive ? Ce n’est pas seulement une question financière, c’est une question de dignité : priver d’emploi des hommes et des femmes capables de travailler, c’est les condamner à l’exclusion sociale. "

    Malika Sorel, « La France fait trop de concessions », Valeurs actuelles (21 au 27 avril 2011)

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    " La gauche convenable - et nous partageons avec elle bien des valeurs et des combats - estime infâme, contraire à l'éthique, de s'interroger sur une éventuelle diminution de l'immigration légale? Mais pourquoi diable? Pourquoi cette gauche convenable se rallie-t-elle avec une facilité déconcertante à l'idéologie inspirée par le Medef, qui exige toujours plus d'immigrés nouveaux surexploités et sous-payés, tellement plus malléables que ces immigrés installés en France depuis quelques années déjà, qui ont pris conscience de leurs droits sociaux et qui, parfois, ont l'audace de revendiquer, de protester, d'occuper ? Alors, osons émettre une hypothèse dérangeante : la gauche convenable ne s'aligne-t-elle pas, une nouvelle fois, sur l'idéologie CAC 40 du grand patronat ? Se soucierait-elle moins du sort des immigrés que de la défense des intérêts de la finance ? "

    Maurice Szafran, Le droit à la complexité, Marianne (16 au 22 avril 2011)

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    " La France connaît donc aujourd'hui une immigration de peuplement, conséquence directe du regroupement familial. Mais les immigrés constituent plus que jamais l'armée de réserve du capital. On ne peut qu'être frappé de voir comment les réseaux « sans-papiéristes » de l'extrême gauche, qui croient trouver dans les immigrés un prolétariat de substitution, servent les intérêts du patronat. Réseaux mafieux, passeurs d'hommes et de marchandises, grands patrons, militants « humanitaires », employeurs « au noir»: tous sont adeptes de l'abolition des frontières par le libre-échangisme mondial. Olivier Besançenot, Laurence Parisot, même combat ! "

    Alain de Benoist, Immigration, l'armée de réserve du capital, Eléments n°139 (avril-juin 2011)

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    " Les politiques n'ont jamais eu le courage de s'attaquer vraiment au problème des banlieues quand les premières émeutes ont commencé à se généraliser au début des années quatre-vingt-dix. La droite parce que c'est elle qui a autorisé le regroupement familial dans les années soixante-dix et parce qu'elle avait besoin de ces populations pour faire tourner les usines, le bâtiment, tout en maintenant les salaires très bas dans un contexte de mondialisation croissante, et la gauche parce qu'elle était confronté à un " bug » de son système idéologique: les pauvres et les immigrés ne peuvent pas être coupables, c'est impossible voyons, c'est forcément la faute aux autres (blancs et riches si possible). "

    Pierric Guittaut, En direct de nos banlieues à Beyrouth-sur-Loire, Eléments n°139 (avril-juin 2011)

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    " Aujourd'hui, ce n'est plus l'avenir qui est bouché, c'est le présent qui se défait. L'idée n'est plus que l'on est en train de descendre mais que l'on est bel est bien descendu, que l'on touche le fond. Dans ce contexte, les récentes annonces de hausses des prix (gaz, pétrole, électricité) sont ressenties violemment : les gens ne parlent que de ça. On n'est plus dans une crise du lendemain, mais dans une crise du quotidien, qui se traduit par un sentiment d'insécurité permanente.
    [...] Avant la présidentielle de 2007, les milieux populaires pensaient que l'on allait s'intéresser à eux. La preuve : ils ont voté massivement pour Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy au second tour. Bref, ils y ont cru. Leur déception est à la mesure de leurs attentes. Ils pensent s'être fait avoir. J'irai même plus loin : ils estiment que la relégation qu'ils subissent est volontaire. Ils pensent que, pour s'enrichir, les représentants de l'" oligarchie financière ", qui sont les acteurs de la mondialisation, doivent délibérément les précariser et les appauvrir. Cette relation de cause à effet entre mondialisation et fragilisation est au coeur du discours de Marine Le Pen. Voilà pourquoi sa voix porte tant.
    [...] Nicolas Sarkozy est complètement décrédibilisé. Il est non seulement vu comme celui qui n'a pas tenu ses promesses mais comme celui dont les amis sont au CAC 40 et qui, justement, incarnent cette mondialisation génératrice d'insécurité générale. On ne le croit plus capable de jouer contre son camp, celui de l'" oligarchie financière ".
    Dominique Strauss-Kahn est lui aussi l'objet d'une forte suspicion. Quant à la gauche, elle est perçue comme très molle sur la mondialisation. Reste un Mélenchon, mais il donne l'impression de ne pas prendre vraiment en compte la question de l'intégration des étrangers. Or celle-ci est centrale dans le discours des milieux populaires.
    [...] La situation actuelle est perçue comme un noeud gordien, trop complexe, trop enchevêtré pour être dénoué fil à fil. Le seul moyen pour se libérer est, comme dans le mythe grec, de trancher le noeud. Or, Marine Le Pen est la seule à être perçue comme capable de vraiment trancher. Comme si les gens se disaient : « Elle, au moins, contrairement à tous les autres, on ne l'a pas essayée »."

    Alain Mergier, « Les milieux populaires pensent s'être fait avoir », Le Monde (22 avril 2011)

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    " Aux États-Unis, le maire libéral de New York dans les années 1930 exhorte ouvertement la police à obtenir des truands arrêtés des aveux par tous les moyens. Et un chroniqueur judiciaire de décrire les séances de tabassage dans les commissariats et aussi de « fraisage »forcé chez un dentiste proche des policiers dans un livre au titre sans ambiguïté. Au début des années 1950, un auteur universitaire américain synthétise : « On trouve difficilement une seule brutalité physique infligée par la Gestapo que les policiers américains n'ont pas quelque fois utilisée »."

    Dominique Inchauspé, Garde à vue ? Garde à vous !, Chroniques d'actualité n°1 (mars 2011)

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    " Le 17 février 2011, la police croate a terminé l'exhumation, dans une fosse de la banlieue de Zagreb, de centaines de corps de victimes allemandes, civiles et militaires, abattues par la résistance communiste en 1945. Il y a deux ans, à Harmica, un charnier contenant 5000 corps (4500 soldats de la Wehrmacht et 500 officiers) avait déjà été mis au jour. Il y aurait encore 200 sites de cette nature à explorer, selon le ministre croate de l'Intérieur. "

    Guerres et histoire n°1 (1er trimestre 2011)

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    " Or l'eugénisme ne se limite pas à une simple sélection des naissances. Toutes sortes de questions connexes s'y rattachent, à peine soulevées encore, malgré leur urgence. Quelle doit être, par exemple, l'attitude de fond à adopter, vis-à-vis des groupes ethniques fixés ou décidément peu progressifs, par l'aile marchante de l'Humanité ? La Terre est une surface fermée et limitée. Dans quelle mesure doit-on y tolérer, racialement ou nationalement, des aires de moindre activité ? - Plus généralement encore, comment faut-il juger les efforts que nous multiplions, pour sauver, dans les hôpitaux de toutes sortes, ce qui n'est souvent qu'un déchet de vie ? Quelque chose de profondément beau et vrai (je veux dire la foi en la valeur irremplaçable et aux ressources imprévisibles contenues dans chaque élément personnel) se cache évidemment sous cette opiniâtreté à tout sacrifier pour sauver une existence humaine. Mais cette sollicitude de l'homme pour son prochain individuel ne devrait-elle s'équilibrer d'une passion plus haute naissant de la foi en cette autre personnalité supérieure qui est attendue, nous le verrons, de la réussite terrestre de notre évolution ? Jusqu'à quel point le développement du fort (si tant est qu'on puisse clairement définir celui-ci) ne devrait-il pas primer la conservation du faible ? Comment concilier dans un maximum d'efficience le soin à prodiguer aux blessés avec les nécessités supérieures de l'attaque ? En quoi consiste la vraie charité ? "

    Pierre Teilhard de Chardin, L'Energie humaine, cité par Jacques Arnould, Teilhard de Chardin (Tempus, 2009)

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  • Libye : ni BHL, ni Munich...

    Nous reproduisons ci-dessous un texte de Ludovic Maubreuil consacré à la guerre de Libye, cueilli sur le site de Causeur, la revue d'Elisabeth Lévy. Ludovic Maubreuil, qui est l'auteur récent d'un Bréviaire de cinéphilie dissidente, tient, par ailleurs, la chronique "Cinéma" dans le magazine Eléments.

     

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    Libye : ni BHL, ni Munich

    Ce conflit n'est juste pas le nôtre

    Pas facile de faire entendre une voix qui ne donne ni dans le trémolo martial béhachélien ni dans le chuchotis de couard autarcique, autrement dit une voix qui ose admettre qu’elle ne parle pas au nom de la Raison, de la Morale et du Progrès réunis, mais qui pour autant ne rechigne pas à prendre parti.

    Prendre parti dans un conflit qui n’est pas le nôtre, cela suppose une certaine pudeur et un certain style, cela suppose surtout de savoir qui nous sommes, quelles sont nos valeurs et quelle est notre cohérence, une question d’identité en somme, n’ayons pas peur des gros mots. Kadhafi n’est-il donc un dictateur que depuis le début de ce mois ? N’avait-il participé à aucun attentat ni jamais emprisonné aucun opposant du temps où il était reçu, et avec tous les honneurs, en France ? Il ne s’agit pas ici de protéger des civils affolés et des insurgés désorganisés − mais au sein desquels des hommes remarquables existent puisque BHL les a remarqués −, de les soustraire à la folie meurtrière de fous surarmés soutenant le Fou suprême, il ne s’agit pas de laisser tout un peuple mourir sous les balles d’un clan mafieux, il s’agit de comprendre qu’il s’agit là d’une guerre civile, que les « milices » qui soutiennent Kadhafi font partie du peuple libyen, qu’on le veuille ou non, et que ceux qui veulent le renverser ne sont pas nécessairement, par ce simple projet, des démocrates modérés propres sur eux. Le principe des frappes aériennes exclusives est donc au mieux un mensonge, au pire une illusion.

    Une fois de plus cependant, sans pudeur et sans style, l’universalisme occidental, drapé dans ses principes intangibles mais n’intervenant jamais que là où ses intérêts économiques sont en péril, vient faire la leçon, comme s’il lui revenait de droit de stopper net, en tous lieux, le sang et les larmes.

    Alors, aider à renverser Kadhafi, pourquoi pas, mais pour aider qui ? L’idée que tout peuple soit épris de liberté est une belle idée, mais le fait qu’il puisse devenir républicain ou démocrate parce qu’il s’est libéré de l’oppression n’est qu’une croyance occidentale, voire un leurre savamment entretenu. Il ne suffit pas de renverser les tyrans, il faut encore que le peuple qui y parvient en fasse une histoire personnelle, qu’à travers les mythes, les exploits et les faits ordinaires de sa révolte, il conquière son propre destin, et de massacres en réconciliations, s’arme pour la suite. Il y a diverses façons d’aider celui qui est en train d’écrire son propre récit, mais lui tenir la main en jouant les matamores est une lourde responsabilité qui peut conduire ensuite aux troubles identitaires, au suivisme comme à la rancœur.

    Il est pas interdit d’entendre ceux qui, parmi les révoltés libyens, refusent l’aide occidentale ; il n’est pas inutile de comprendre le positionnement de la Ligue arabe ; il n’est pas scandaleux d’écouter l’Allemagne dont la logique n’est pas moins économiste que ceux qui, aujourd’hui, se font les hérauts de ce peuple-là, tout en détournant les yeux d’autres qui, ailleurs, sont tout aussi à feu et à sang. C’est la cohérence qui nous sauvera des pièges conjoints de l’ingérence emphatique et de la faiblesse munichoise. Nous ne sommes pas la source de tous les maux comme tant de professionnels du ressentiment voudraient nous le faire croire, mais nous ne sommes pas davantage la résolution inespérée du moindre conflit.

    Comment devenir une voix singulière qui ne serait le porte-parole d’aucune faction ni d’aucun empire, être sans crainte un recours opportun, savoir sans honte se tenir en retrait ? La meilleure façon de trouver sa place est encore de n’avoir plus peur de tenir son rang. Embarrassées et irrésolues, la France comme l’Europe ne savent plus qui elles sont, et de ce fait alternent la frilosité et l’emportement, n’hésitant plus qu’entre deux versions, deux pôles qui les nient : tantôt conglomérats de communautés monades, tantôt championnes de l’universalisme abstrait.

    Quand donc mènerons-nous à bien notre propre révolution ?

    Ludovic Maubreuil (Causeur, 12 avril 2011)

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  • Oublier l'occident...

    Nous reproduisons ci-dessous l'éditorial de Robert de Herte (alias Alain de Benoist), publié dans le numéro 139 (avril - juin 2011) de la revue Eléments, actuellement en kiosque. Le magazine des idées bénéficie d'une nouvelle présentation que nous vous conseillons de découvrir.

    Nous rappelons qu'il est est possible de se procurer directement ce numéro sur le site de la revue : http://www.revue-elements.com

     

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    Oublier l'Occident

    L' « Occident»? Raymond Abellio avait observé que « l'Europe est fixe dans l'espace, c'est-à-dire dans la géographie», tandis que l'Occident est « mobile». De fait, 1'« Occident» n'a cessé de voyager et de changer de sens. Au départ, le terme évoque seulement la terre du Couchant (Abendland), par opposition au pays du soleil levant (Morgenland). A partir du règne de Dioclétien, à la fin du IIIe siècle de notre ère, l'opposition entre Orient et Occident se ramène à la distinction entre l'empire romain d'Occident (dont la capitale fut Milan, puis Ravenne) et l'empire romain d'Orient installé à Constantinople. Le premier disparaîtra en 476, avec l'abdication de Romulus Augustule. Occident et Europe se confondent ensuite, durablement. Cependant, à partir du XVIIIe siècle, l'adjectif « occidental» se retrouve sur les cartes maritimes en référence au Nouveau Monde, appelé aussi « système américain », par opposition au « système européen» ou à 1'« hémisphère oriental» (qui comprend alors aussi bien l'Europe que l'Afrique et l'Asie). Dans l'entre-deux guerres, l'Occident, toujours assimilé à l'Europe, par exemple chez Spengler, s'oppose globalement à un Orient qui devient à la fois un objet de fascination (René Guénon) et un repoussoir (Henri Massis). Durant la guerre froide, l'Occident regroupe l'Europe occidentale et ses alliés anglo-saxons, Angleterre et États-Unis, pour s'opposer cette fois au « bloc de l'Est» dominé par la Russie soviétique. Cette acception, qui permet aux États-Unis de légitimer leur hégémonie, survivra à la chute du système soviétique (ainsi chez Huntington).

    Aujourd'hui, l'Occident a encore changé de sens. Tantôt il reçoit une définition purement économique: sont « occidentaux» tous les pays développés, modernisés, industrialisés, aussi bien le Japon et la Corée du Sud que l'Australie, les anciens« pays de l'Est », l'Amérique du Nord ou l'Amérique latine. « Ex Oriente lux, ex Occidente luxus », disait plaisamment l'écrivain polonais Stanislaw Jerzy Lee. L'Occident perd alors tout contenu spatial pour se confondre avec la notion de modernité. Tantôt, il s'oppose globalement à la dernière incarnation en date de la furor orientalis aux yeux des Occidentaux: l'islamisme. Dans cette vision, une fracture essentielle opposerait l' « Occident judéo-chrétien» à 1'« Orient arabo-musulman », certains n'hésitant à prédire que la lutte finale de « Rome» et d' « Ismaël» -la guerre de Gog et de Magog - débouchera sur l'ère messianique.

    En réalité, il n'existe pas plus d'« Occident» unitaire que d'« Orient» homogène. Quant à la notion d'« Occident chrétien» elle a perdu toute signification depuis que l'Europe a majoritairement versé dans l'indifférentisme et que la religion y est devenue une affaire privée. L'Europe et l'Occident se sont totalement disjoints - au point que défendre l'Europe implique bien souvent de combattre l'Occident. Ne se rapportant plus à aucune aire géographique ni même culturelle particulière, le mot « Occident » devrait en fait être oublié.

    Parlons donc plutôt de l'Europe. En inventant l'objectivité, c'est-à-dire le décentrement par rapport à soi, en cherchant à statuer objectivement sur le vrai, le juste et le bien, l'Europe a voulu d'emblée accéder à l'universel, souci que l'on ne retrouve pas dans les autres cultures. Jean-François Mattéi parle très justement de « regard théorique de l'universel ». Ce souci de l'universel a ensuite dégénéré en universalisme, religieux d'abord, puis profane (il y a autant de distance entre l'universel et l'universalisme qu'entre la liberté et le libéralisme). L'universalisme se résume dans l'idéologie du Même, dans la recherche de la Mêmeté au détriment de la Différence, dans l'affirmation du primat de l'Un sur le Multiple. Mais c'est aussi un ethnocentrisme masqué, dans la mesure où tout souci de l'universel reflète inévitablement une conception particulière de l'universel. Au départ, on avait voulu comprendre les autres à partir des autres, non à partir de soi-même, ce qui était aussi louable que nécessaire. Après quoi, on a renoncé à être soi, ce qui s'est révélé dramatique.

    L'Europe paraît aujourd'hui en déclin sur tous les plans. La construction européenne elle-même se liquéfie sous nos yeux. L'Europe n'est pas seulement 1'« homme malade de la planète économique» (Marcel Gauchet). Elle connaît une crise sans précédent de l'intelligence et de la volonté politique. Elle aspire à sortir de l'histoire, portée par l'idée que l'état présent des choses - l'illimitation du capital et de la technoscience - est appelé à se maintenir indéfiniment, qu'il n'en est pas d'autre possible, et surtout qu'il n'en est pas de meilleur. S'abandonnant à un mouvement qui en a fait l'objet de l'histoire des autres, elle s'exonère d'elle-même. Entre destitution du passé et peur de l'avenir, elle ne croit plus qu'à une morale abstraite, à des principes désincarnés qui lui épargneraient d'avoir à persister dans son être - fût-ce en se métamorphosant. Oubliant que l'histoire est tragique, croyant pouvoir rejeter toute considération de puissance, recherchant le consensus à tout prix, flottant en état d'apesanteur, comme entrée en léthargie, non seulement elle paraît consentir à sa propre disparition, mais elle interprète cette disparition comme la preuve de sa supériorité morale. On pense évidemment au « dernier homme» dont parlait Nietzsche. C'est pourquoi la seule chose qui ne décline pas, c'est l'interrogation sur le déclin - qui se décline partout. Cette interrogation ne relève pas simplement de la tradition du pessimisme culturel. Il s'agit de savoir si l'histoire obéit à des lois intrinsèques excédant l'action des hommes. S'il y a déclin de l'Occident, en tout cas, ce déclin vient de loin et ne saurait se ramener à la conjoncture actuelle, la mondialisation par exemple. Le destin d'une culture est contenu dans son origine. Sa fin même est déterminée par l'origine, car c'est cette origine qui détermine sa trajectoire, sa capacité narrative et le contenu de sa narrativité. Historiquement, l'idée occidentale s'est d'abord exprimée sous une forme métaphysique, puis idéologique, puis « scientifique». Elle s'épuise aujourd'hui, de toute évidence. L'Occident a exprimé tout ce qu'il avait à dire, il a décliné ses mythèmes sous toutes les formes possibles. Il s'achève dans la dissolution chaotique, l'épuisement des énergies, le nihilisme généralisé.

    Toute la question est de savoir s'il existe une autre culture qui, s'étant déjà approprié la modernité, puisse proposer au monde une nouvelle forme de maîtrise de l'universel théorique et pratique, ou si la culture occidentale, parvenue en phase terminale, donnera d'elle-même naissance à une autre. Quand une culture s'achève, en effet, une autre peut toujours la remplacer. L'Europe a déjà été le lieu de plusieurs cultures, il n'y a pas de raison qu'elle ne puisse pas être encore le foyer d'une culture nouvelle, dont il s'agit alors de déceler les signes avant-coureurs. Cette nouvelle culture fera suite à la précédente, mais n'en sera pas le prolongement. Plutôt que de verser dans des lamentations inutiles, il vaut mieux avoir le regard assez aigu pour voir où - dans quelles marges - croît ce qui permet de garder espoir. On en revient à Spengler, mais avec un correctif: ce qui s'achève annonce un nouveau commencement.

    Robert de Herte

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  • Eléments : 40 ans et toutes ses dents !...

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    Une très belle nouvelle formule de la revue Eléments vient de paraître !

    Sur le front du combat des idées depuis 40 ans, le magazine, pour son numéro 139, s'offre une nouvelle jeunesse avec notamment une maquette plus nerveuse, un retour en force des illustrations et des articles à la fois plus nombreux et plus courts.

    Le contenu concocté par le nouveau rédacteur en chef, Pascal Eysseric, qui succède à Michel Marmin, est à la hauteur des attentes avec un dossier consacré au déclin de l'Occident, dans lequel on peut découvrir les signatures de l'historien Dominique Venner, du philosophe Jean-François Mattéi, de l'essayiste Hervé Juvin, de l'économiste et ancien ministre libanais George Corm et du penseur italien Costanzo Preve.

    Au sommaire, outre les excellentes pages Cartouches, on trouve aussi l'analyse coup de poing d'Alain de Benoist sur « l'immigration, armée de réserve du capital », un entretien avec Pierrick Guittaut pour son polar Beyrouth-sur Loire, un article de François Bousquet sur Malaparte, de Thibaud Isabel sur l'ordre moral néo-bourgeois, de Ludovic Maubreuil sur le cul militant, de Jean-François Gautier et aussi de Frédéric Guchemand sur Wagner et de Robin Turgis sur Céline... Bref que du bon !

    Le magazine peut être acheté en kiosque ou commandé sur le site Eléments. Il est possible de s'abonner au prix de 25 euros pour 5 numéros.

    Contact : http://www.revue-elements.com/index.php

     

     

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