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  • Qui est Dieu ?...

    «Je l'aimais bien, Michel Onfray. [...] Mais voilà que, dans son plaidoyer pour Jean Soler, il dévoile une face cachée de son personnage. Les juifs le gênent.» Marek Halter

    «Tout y est, monsieur Onfray, et vous tout entier: votre "génie" sans talent, le drapé de vos postures, la Barbarie de vos grandes orgues, les rengaines que vous remettez au goût du jour. Ce que vous dites à mots à peine cachés est terrible de responsabilité envers les esprits faibles qui risqueraient de vous croire : "[Le judaïsme] suppose une violence intrinsèque exterminatrice, intolérante, qui dure jusqu'aujourd'hui." Malheureusement, c'est l'antisémitisme "qui dure jusqu'aujourd'hui", et celui des intellectuels n'est pas moins violent que celui des nervis de telle ou telle mouvance.» Rabbin Haïm Korsia

    «L’article publié par Michel Onfray dans un récent numéro du Point (le 7 juin) pose un problème très grave. Prétendant rendre compte d’une étude de Jean Soler sur la Bible, il donne à l’esprit de vengeance sa plus redoutable expression en l’appliquant à ce qui focalise le ressentiment contemporain, le judaïsme, autant qu’à l'ensemble monothéiste qui en est issu.» Gérard Bensussan , Alain David, Michel Deguy et Jean-Luc Nancy

    «Mais je ressens un plus grand malaise encore de voir un journal aussi sérieux que Le Point laisser passer des allégations aussi médiocres et mal à propos, au point de se demander si on lit du Onfray ou un avatar d’une médiocre littérature antijuive qu’on croyait dépassée, le tout dans un climat français où assassiner un Juif à bout portant ou le tabasser est devenu chose possible.» Rabbin Yeshaya Dalsace

     

    Les éditions De Fallois ont publié récemment Qui est Dieu ? , un essai de Jean Soler consacré à la découverte du dieu de la Bible. Ancien diplomate, l'auteur est un érudit qui a déjà écrit plusieurs essais sur la question des monothéismes comme La violence monothéiste (De Fallois, 2009). Vous pouvez lire ci-dessous le commentaire élogieux qu'a fait Michel Onfray du dernier livre de cet auteur dans l'hebdomadaire Le Point. Un article qui a suscité un déferlement concerté de commentaires particulièrement violents...

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    Jean Soler, l'homme qui a déclaré la guerre aux monothéismes

    La France est riche d'une école exégétique biblique vieille de quatre siècles : de Richard Simon, son inventeur, un contemporain de Bossuet, jusqu'à Jean Soler, un savant bientôt octogénaire auquel notre époque a scandaleusement tourné le dos, en passant par le curé Meslier, le baron d'Holbach, l'anarchiste Proudhon, le laïc Charles Guignebert, Paul-Louis Couchoud ou Prosper Alfaric, qui nie l'existence historique de Jésus, il existe une école française remarquable de lecture des textes dits sacrés comme des textes historiques, ce que, bien sûr, ils sont. Le silence qui accompagne cette ligne de force scientifique s'explique dans un monde imprégné de judéo-christianisme.

    Qui est Jean Soler ? Un diplomate érudit, un homme qui a passé sa vie à lire, traduire, analyser et éplucher dans leurs langues originales les textes fondateurs du monothéisme. Diplomate, il le fut huit années en Israël, où il a été conseiller culturel et scientifique à l'ambassade de France. Il a également travaillé en Algérie, en Pologne, en Iran et en Belgique. Depuis 1993, ce défenseur des langues régionales vit en pays catalan et travaille dans un petit bureau-bibliothèque lumineux comme une cellule monacale, entre mer et montagne, France et Espagne.

    L'homme ne se répand pas, il va à l'essentiel. Son oeuvre dense concentre le résultat d'années de travaux solitaires et de recherches loin du bruit et de la fureur. Voilà pourquoi le fruit de ses études se trouve ramassé dans Aux origines du Dieu unique, un essai en trois volumes : L'invention du monothéisme (2002), La loi de Moïse (2003) et Vie et mort dans la Bible (2004). En 2009, il ajoute un opus intitulé La violence monothéiste.

    Dynamiteur

    Cet agrégé de lettres classiques déconstruit les mythes et les légendes juifs, chrétiens et musulmans avec la patience de l'horloger et l'efficacité d'un dynamiteur de montagne. Il excelle dans la patience du concept, il fournit ses preuves, il renvoie avec précision aux textes, il analyse minutieusement. Il a toutes les qualités de l'universitaire, au sens noble du terme ; voilà pourquoi l'université, qui manque de ces talents-là, ne le reconnaît pas.

    Cette patience de l'horloger qui ne convainc pas l'université se double donc de l'efficacité du dynamiteur qui pourrait plaire aux journalistes. Mais, si l'université ne doit pas aimer chez lui l'usage des bâtons de dynamite, les journalistes, eux, n'apprécient probablement pas sa méticulosité conceptuelle. Voilà pourquoi cet homme est seul, et sa pensée révolutionnaire, méconnue.

    Certes, il a pour lui la caution d'un certain nombre de pointures intellectuelles du XXe siècle : Claude Lévi-Strauss, Jean-Pierre Vernant, Marcel Detienne, Maurice Godelier, Ilya Prigogine, mais aussi Edgar Morin, Claude Simon, René Schérer, Paul Veyne lui ont dit tout le bien qu'ils pensaient de son travail. Mais rien n'y fait, le nom de Jean Soler ne déborde pas le cercle étroit d'une poignée d'aficionados - même si ses livres, tous édités aux éditions de Fallois, se vendent bien.

    Jean Soler vient donc d'avoir la bonne idée de faire paraître Qui est Dieu ?. Le résultat est un texte bref qui synthétise la totalité de son travail, pourtant déjà quintessencié, un petit livre vif, rapide, dense, qui propose un feu d'artifice avec le restant de dynamite inutilisé... C'est peu dire qu'il s'y fera des ennemis, tant le propos dérange les affidés des trois religions monothéistes.

    Six idées reçues

    Jean Soler démonte six idées reçues. Première idée reçue : la Bible dépasse en ancienneté les anciens textes fondateurs. Faux : les philosophes ne s'inspirent pas de l'Ancien Testament, car "la Bible est contemporaine, pour l'essentiel, de l'enseignement de Socrate et des oeuvres de Platon. Remaniée et complétée plus tard, elle est même, en grande partie, une oeuvre de l'époque hellénistique".

    Deuxième idée reçue : la Bible a fait connaître à l'humanité le dieu unique. Faux : ce livre enseigne le polythéisme et le dieu juif est l'un d'entre les dieux du panthéon, dieu national qui annonce qu'il sera fidèle à son peuple seulement si son peuple lui est fidèle. La religion juive n'est pas monothéiste mais monolâtrique : elle enseigne la préférence d'un dieu parmi d'autres. Le monothéisme juif est une construction qui date du Ve siècle avant l'ère commune.

    Troisième idée reçue : la Bible a donné le premier exemple d'une morale universelle. Faux : ses prescriptions ne regardent pas l'universel et l'humanité, mais la tribu, le local, dont il faut assurer l'être, la durée et la cohésion. L'amour du prochain ne concerne que le semblable, l'Hébreu, pour les autres, la mise à mort est même conseillée.

    Quatrième idée reçue : les prophètes ont promu la forme spiritualisée du culte hébraïque. Faux : pour les hommes de la Bible, il n'y a pas de vie après la mort. L'idée de résurrection est empruntée aux Perses, elle apparaît au IIe siècle avant J.-C. Celle de l'immortalité de l'âme, absente de la Bible hébraïque, est empruntée aux Grecs.

    Cinquième idée reçue : le Cantique des cantiques célèbre l'amour réciproque de Dieu et du peuple juif. Faux : ce texte est tout simplement un poème d'amour. S'il devait être allégorique, ce serait le seul livre crypté de la Bible.

    Sixième idée reçue : Dieu a confié aux juifs une mission au service de l'humanité. Faux : Dieu a célébré la pureté de ce peuple et interdit les mélanges, d'où les interdits alimentaires, les lois et les règles, l'interdiction des mélanges de sang, donc des mariages mixtes. Ce dieu a voulu la ségrégation, il a interdit la possibilité de la conversion, l'idée de traité avec les nations étrangères, et il ne vise pas autre chose que la constitution identitaire d'un peuple. Ce dieu est ethnique, national, identitaire.

    Le dieu unique : un guerrier

    Fort de ce premier déblayage radical, Jean Soler propose l'archéologie du monothéisme. À l'origine, les Hébreux croient à des dieux qui naissent, vivent et meurent. Leurs divinités sont diverses et multiples. Yahvé a même une femme, Ashera, reine du ciel, à laquelle on sacrifie des offrandes - libations, gâteaux, encens. Pour ramasser cette idée dans une formule-choc, Jean Soler écrit : "Moïse ne croyait pas en Dieu." Le même Moïse, bien que scribe de la Torah, ne savait pas écrire : les Hébreux n'écrivent leur langue qu'à partir du IXe ou du VIIIe siècle. Si Yahvé avait écrit les Dix Commandements de sa main, le texte n'aurait pas pu être déchiffré avant plusieurs siècles.

    Le dieu unique naît dès qu'il faut expliquer que ce dieu national et protecteur ne protège plus son peuple. Il y eut un temps bénit, celui de la sortie d'Égypte, de la conquête de Canaan, de la constitution d'un royaume ; mais il y eut également un temps maudit : celui de la sécession lors de la création de la Samarie, un État indépendant, celui de son annexion par les Assyriens, à la fin du VIIIe siècle, et de la déportation du peuple, celui de la destruction de Jérusalem par le roi babylonien Nabuchodonosor au début du VIe siècle.

    Le monothéisme s'impose dans la seconde moitié du IVe siècle. Le dieu des Perses, qui leur est favorable, devient le dieu des juifs, qui souhaitent eux aussi obtenir ses faveurs. Ce même dieu favorise l'un ou l'autre peuple selon ses mérites. On cesse de nommer Yahvé, pour l'appeler Dieu ou Seigneur. Les juifs réécrivent alors le premier chapitre de la Genèse.

    Menacé de disparition physique, le peuple juif cherche son salut dans l'écrit. Il invente Moïse, un prophète scribe qui consigne la parole de Yahvé. Il se donne une existence littéraire et se réfugie dans les livres dont le contenu est arrêté par des rabbins vers l'an 100 de notre ère. Les juifs deviennent alors le peuple du Livre et du dieu unique.

    Le dieu unique devient vengeur, jaloux, guerrier, belliqueux, cruel, misogyne. Jean Soler associe le polythéisme à la tolérance et le monothéisme à la violence : lorsqu'il existe une multiplicité de dieux, la cohabitation rend possible l'ajout d'un autre dieu, venu d'ailleurs ; quand il n'y a qu'un dieu, il est le vrai, l'unique, les autres sont faux. Dès lors, au nom du dieu un, il faut lutter contre les autres dieux, car le monothéisme affirme : "Tous les dieux sauf un sont inexistants."

    Invention du génocide

    "Tu ne tueras point" est un commandement tribal, il concerne le peuple juif, et non l'humanité dans sa totalité. La preuve, Yahvé commande de tuer, et lisons Exode, 32. 26-28, trois mille personnes périssent sur son ordre. Dans Contre Apion, l'historien juif Flavius Josèphe établit au Ier siècle de notre ère une longue liste des raisons qui justifient la peine de mort : adultère, viol, homosexualité, zoophilie, rébellion contre les parents, mensonge sur sa virginité, travail le jour du sabbat, etc.

    Jean Soler aborde l'extermination des Cananéens par les juifs et parle à ce propos d'"une politique de purification ethnique à l'encontre des nations de Canaan". Puis il signale que le Livre de Josué précise qu'une trentaine de cités ont été détruites, ce qui lui permet d'affirmer que les juifs inventent le génocide - "le premier en date dans la littérature mondiale"... Jean Soler poursuit en écrivant que cet acte généalogique "est révélateur de la propension des Hébreux à ce que nous nommons aujourd'hui l'extrémisme". Toujours soucieux d'opposer Athènes à Jérusalem, Jean Soler note que la Grèce, forte de cent trente cités, n'a jamais vu l'une d'entre elles avoir le désir d'exterminer les autres.

    En avançant dans le temps, Jean Soler, on le voit, ouvre des dossiers sensibles. La lecture des textes dits sacrés relève effectivement de la politique. Il interroge donc la postérité du modèle hébraïque dans l'histoire et avance des hypothèses qui ne manqueront pas de choquer.

    Le judaïsme, écrit-il, a été en crise cinq fois en mille ans. Il l'est aux alentours de l'an 0 de notre ère. D'où son attente d'un messie capable de le sauver et de lui redonner sa splendeur. Il y a pléthore de prétendants, Jésus est l'un d'entre eux. Ce sectateur juif renonce au nationalisme de sa tribu au profit de l'universalisme. Dès lors, il n'y a qu'un dieu, et il est le dieu de tous. Plus besoin, donc, des interdits qui cimentaient la communauté tribale appelée à régner sur le monde une fois régénérée.

    Si Jésus séparait bien les affaires religieuses et celles de l'État, s'il récusait l'usage de la violence et prêchait un pacifisme radical, il n'en va pas de même pour l'empereur Constantin, qui, en son nom, associe religion et politique dans son projet impérial théocratique. Sous son règne, les violences, la guerre, la persécution se trouvent légitimées - d'où les croisades, l'Inquisition, le colonialisme du Nouveau Monde. Pendant ce temps, les juifs disparaissent de Palestine et constituent une diaspora planétaire. L'islam conquiert sans discontinuer et la première croisade, précisons-le, se trouve fomentée par les musulmans contre les chrétiens.

    Le schéma judéo-chrétien s'impose, même à ceux qui se disent indemnes de cette religion. Jean Soler pense même le communisme et le nazisme dans la perspective schématique de ce modèle de pensée. Ainsi, chez Marx, le prolétariat joue le rôle du peuple élu, le monde y est vu en termes d'oppositions entre bien et mal, amis et ennemis, l'apocalypse (la guerre civile) annonce le millénarisme (la société sans classes).

    Une oeuvre qui gêne

    De même chez Hitler, dont Jean Soler montre qu'il n'a jamais été athée mais que, catholique d'éducation, il n'a jamais perdu la foi. Pour Jean Soler, "le nazisme selon Mein Kampf (1924) est le modèle hébraïque auquel il ne manque même pas Dieu" : Hitler est le guide de son peuple, comme Moïse ; le peuple élu n'est pas le peuple juif, mais le peuple allemand ; tout est bon pour assurer la suprématie de cette élection ; la pureté assure de l'excellence du peuple élu, dès lors, il faut interdire le mélange des sangs.

    Pour l'auteur de Qui est Dieu ?, le nazisme détruit la position concurrente la plus dangereuse. Jean Soler cite Hitler, qui écrit : "Je crois agir selon l'esprit du Tout-Puissant, notre créateur, car, en me défendant contre le juif, je combats pour défendre l'oeuvre du Seigneur." Les soldats du Reich allemand ne portaient pas par hasard un ceinturon sur la boucle duquel on pouvait lire : "Dieu avec nous"...

    On le voit bien, Jean Soler préfère la vérité qui dérange à l'illusion qui sécurise. Son oeuvre gêne les juifs, les chrétiens, les communistes, les musulmans. Ajoutons : les universitaires, les journalistes, sinon les néonazis. Ce qui, convenons-en, constitue un formidable bataillon ! Faut-il, dès lors, s'étonner qu'il n'ait pas l'audience que son travail mérite ?

    Accusation

    L'accusation d'antisémitisme, bien sûr, est celle qui accueille le plus souvent ses recherches. Elle est l'insulte la plus efficace pour discréditer le travail d'une vie, et l'être même d'un homme. En effet, Jean Soler détruit des mythes juifs : leur dieu fut un parmi beaucoup d'autres, puis il ne devint unique que sous la pression opportuniste ethnique et tribale, nationaliste. Toujours selon Jean Soler, le monothéisme devient une arme de guerre forgée tardivement pour permettre au peuple juif d'être et de durer, fût-ce au détriment des autres peuples. Il suppose une violence intrinsèque exterminatrice, intolérante, qui dure jusqu'aujourd'hui. La vérité du judaïsme se trouve dans le christianisme qui universalise un discours d'abord nationaliste. Autant de thèses iconoclastes !

    À quoi Jean Soler ajoute que la Shoah ne saurait être ce qui est couramment dit : "Un événement absolument unique, qui excéderait les limites de l'entendement humain. Effort désespéré pour accréditer à tout prix, jusque dans le pire malheur, l'élection par Dieu du peuple juif ! En réalité, l'existence de la Shoah est la preuve irréfutable de la non-existence de Dieu." Soler inscrit la Shoah dans l'histoire, et non dans le mythe. Il lui reconnaît un rôle majeur, mais inédit dans la série des lectures de cet événement terrible : non pas événement inédit, mais preuve définitive de l'inexistence de Dieu - quel esprit assez libre pourra entendre cette lecture philosophique et historique ?

    Renaissance grecque

    Jean Soler, on le voit, a déclaré une guerre totale aux monothéismes. Bien sûr, il ne souhaite pas revenir au polythéisme antique, mais il propose que nous nous mettions enfin à l'école de la Grèce après plus de mille ans de domination judéo-chrétienne. Une Grèce qui ignore l'intolérance, la banalisation de la peine de mort, les guerres de destruction massive entre les cités ; une Grèce qui célèbre le culte des femmes ; une Grèce qui ignore le péché, la faute, la culpabilité ; une Grèce qui n'a pas souhaité l'extermination massive de ses adversaires ; une Grèce qui, à Athènes, où arrive saint Paul, avait édifié un autel au dieu inconnu comme preuve de sa générosité et de son hospitalité - cet autel fut décrété par Paul de Tarse l'autel de son dieu unique, le seul, le vrai. Constantin devait donner à Paul les moyens de son rêve.

    Nous vivons encore sous le régime de Jérusalem. Jean Soler, solitaire et décidé, campe debout, droit devant deux mille ans d'histoire, et propose une Renaissance grecque. Le déni étant l'une des signatures du nihilisme contemporain, on peut décliner l'invitation. Mais pourra-t-on refuser plus longtemps de débattre de l'avenir de notre civilisation ? Avons-nous les moyens de continuer à refuser le tragique de l'histoire pour lui préférer la comédie des mythes et des légendes ? Nietzsche aurait aimé ce disciple qui va fêter ses 80 ans. Et nous ?

    Michel Onfray (Le Point, 7 juin 2012)

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  • La Nouvelle droite et la réflexion historique...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue intéressant de Dominique Venner, cueilli sur son site personnel et consacré à Alain de Benoist et à son intérêt pour la réflexion historique.

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    La Nouvelle droite et la réflexion historique

    Le 30 mai dernier, j’avais publié ici une critique élogieuse de Mémoire vive (Editions de Fallois), livre d’entretiens d’Alain de Benoist, fondateur et principale figure intellectuelle de la Nouvelle Droite (ND). J’avais fait une seule réserve, m’étonnant de l’absence de toute réflexion historique dans les brillantes analyses intellectuelles de ce livre testament.

    Réagissant à mon propos, un correspondant me fait parvenir un article publié par Alain de Benoist dans la revue Le Spectacle du monde n° 584 de décembre 2011, qui montre un intérêt nouveau pour l’histoire. Après divers développements sur la naissance de la pensée historique dans l’Antiquité grecque (Hérodote et Thucydide) puis  son détournement comme auxiliaire de la théologie chez saint Augustin ou Bossuet, sa dénaturation ensuite par les théoriciens du progrès jusqu’à Marx, Alain de Benoist consacre une place à sa lecture d’un de mes ouvrages récents, prouvant chez lui une évolution intéressante. Je cite :

    « Dans son dernier livre, Le Choc de l’Histoire (Via Romana), Dominique Venner proteste contre l’idée d’une histoire écrite par avance et que l’on ne pourrait prévoir. “L’histoire, écrit-il, nous montre que rien n’est jamais inéluctable […]. L’imprévu est roi et l’avenir imprévisible : personne en 1910 ne prévoyait 1914, et personne en 1980 n’avait prévu 1990 pour la Russie. […] C’est pourquoi je ne crois pas aux fatalités historiques. Pas plus à celles qu’imaginait Spengler qu’à celles de Marx ou de Fukuyama.” […]

    « Dire que l’histoire est imprévisible est une chose, commente A. de Benoist, dire qu’elle ne se répète jamais en est une autre. Si l’histoire est imprévisible, connaître le passé ne permet pas de prévoir l’avenir. Réfléchis sur le passé peut éclairer le présent, dit encore Venner. Cela implique évidemment que le passé soit porteur de leçons, et donc qu’il ait un sens. »

    Plusieurs considérations suivent rappelant que si un événement est promu à la dignité de fait historique, cela résulte d’un choix fait par l’historien. Ce choix dépend naturellement de sa vision du monde, des influences qu’il a subies, de l’époque où il s’exprime. Ce qui permet à l’auteur de conclure : « Dominique Venner souligne, lui aussi, que “l’histoire n’est pas seulement la connaissance du passé, elle est aussi le reflet des préoccupations du présent”. »

    Je me réjouis de voir Alain de Benoist, qui a parfois réfléchi sur l’identité, reprendre par ailleurs une thématique que je n’ai cessé de développer : « S’interroger sur son identité, c’est implicitement s’interroger sur sa provenance, sa langue, ses coutumes – bref, sur des éléments qui viennent de loin et qui ont joué un rôle fondateur. C’est en cela que, pour un peuple ou une communauté politique, la connaissance de l’histoire est indispensable. […] L’histoire, conclut Alain de Benoist, d’une façon assez nouvelle pour lui, c’est la conscience qu’un peuple prend de lui-même. À quoi sert l’histoire ? À donner son assise au présent. » On ne saurait mieux dire !

    Dominique Venner (Site de Dominique Venner, 19 juillet 2012)

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  • La France, un pays sous influence ?...

    « L'influence est une relation consciente ou inconsciente qui permet de faire agir ou penser autrui selon ce que veut l'émetteur de l'influence. Il est d'usage d'ajouter : sans exercice de la force ni paiement. »

     

    Les éditions Vuibert viennent de publier La France, un pays sous influence ?, un essai de Claude Revel. Après avoir été haut-fonctionnaire, l'auteur poursuit son activité professionnelle dans le domaine du conseil en commerce et relations internationales et publie de nombreux articles sur le thème des stratégies d'influence et de l'intelligence économique.

     

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    "Normes mondiales de la bonne université, du bon pays où investir, louanges puis critiques des biocarburants, États sous contrôle d’agences privées, rôle de Facebook et Twitter dans les révolutions arabes, succès mondial du concept de développement durable… ces quelques exemples parmi d’autres, illustrent les jeux de ce pouvoir invisible qu’est l’influence. Celle-ci a déjà complètement redistribué les cartes de la puissance depuis une trentaine d’années. Certains - États, entreprises, ONG - ont su saisir cette opportunité ; d'autres, non. Qu'en est-il de la France ?

    Soft power, advocacy, lobbying, think tank, storytelling, public et business diplomacy… pour exercer l’influence, point n’est besoin d’aller chercher des manœuvres occultes. La gouvernance qui s’est mise en place au niveau mondial facilite et légitime des influences de toutes sortes, qui agissent directement sur nos règles de vie et sur la formation de nos opinions.

    Cet ouvrage à la rigueur implacable décrypte et analyse toutes les influences qui nous façonnent et nous manipulent. Au-delà, il plaide pour la recherche d’un monde à la pensée non standardisée en donnant des pistes et des instruments pour réagir."

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  • Les Satellite Sisters de Dantec...

    Vous pouvez visionner ci-dessous la bande-annonce de Sattelite Sisters, le nouveau roman de Maurice G. Dantec, qui constituera une suite de Babylone Babies, de La sirène rouge et des Racines du mal...

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  • Polémiques et polémistes...

    Les éditions de Synthèse nationale ont récemment publié le Dictionnaire des polémistes - D'Antoine de Rivarol à François Brigneau, un ouvrage de Robert Spieler. Ancien député et fondateur du mouvement régionaliste Alsace d'abord, Robert Spieler est chroniqueur à l'hebdomadaire Rivarol.

    Le livre est disponible à l'adresse suivante :

    Synthèse nationale 116, rue de Charenton 75012 Paris

    18, 00 € l’exemplaire (+ 3 € de port)

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    "Tout au long de l’année 2011, Robert Spieler a proposé aux lecteurs de Rivarol, l’hebdomadaire de l’opposition nationale et européenne, une série d’articles consacrés aux polémistes qui marquèrent l’histoire de la presse depuis la Révolution française, jusqu’au milieu du XXe siècle. Il reprend ainsi le travail effectué par Pierre Dominique dans son ouvrage publié au début des années 60 (et aujourd’hui épuisé) Les Polémistes français depuis 1789.

    Ce Dictionnaire des polémistes rassemble tous ces articles. Vous retrouverez ici les grands noms qui, en leur temps, marquèrent les esprits. Ils n’hésitaient pas à dénoncer les puissants du moment. Beaucoup parmi eux payèrent très cher leur engagement. Aujourd’hui, la liberté d’expression se heurte encore aux ukases du politiquement correct et, comme hier, des lois liberticides, beaucoup plus insidieuses sans doute, empêchent les vrais polémistes de s’exprimer…"

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  • La guerre à venir...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, cueilli sur Voxnr et consacré à la guerre qui vient...

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    La guerre à venir et la civilisation
     
    Les périodes qui précèdent les grands conflits, ceux auxquels le XXe siècle nous a habitués, qui ne laissent espérer presque aucun refuge, sont des moments étranges, où la vie semble continuer comme toujours, et, où, tout en sachant, l’on ne prend pas conscience de l’arrivée imminente de l’orage, comme s’il était relégué dans quelque création romanesque, à l’état de fiction, entre un Jules Vernes et un Pierre Benoît. A cette singulière cécité lucide s’allie, dans une improbable promiscuité, une aussi délirante confiance en soi, qui s’incarne dans le mirage de la guerre fraîche et joyeuse, la sensation de se trouver dans une vacance de l’Histoire. Comme le faisait remarquer Céline, la malédiction de l’homme, c’est qu’il n’a pas assez d’imagination pour penser son propre cadavre. Ou peut-être en a-t-il trop, pour ne pas saisir la pesanteur rude du réel, qui ne laisse aucune concession.

    Si, en 14, les chapeaux melons et les ombrelles ont pu faire bon ménage avec le gaz moutarde et la grande tranchée sanglante du désastre, si, en 39, les congés payés et le music hall ont croisé la ruée des panzers et les stukas, en attendant mieux, de nos jours, ce sont les embouteillages estivaux, l’odeur huileuse des plages, la rumeur olympique et des tripatouillages de tweeter qui entortillent, agrémenté des inévitables publicités tapageuses, cet objet visible et invisible à la fois, aussi cousu de gros fil qu’une série américaine, mais qui, comme un refoulé, ne doit pas, ne veut pas être vu, pensé, accepté. La parade festive et rieuse sur un volcan donne encore l’illusion que même la catastrophe appartient au scénario haletant du parc d’attraction planétaire.
    Or, le grand conflit mondial, le troisième, peut-être le dernier, a débuté dès les années 90. Les guerres du Golfe, le dépeçage de la Yougoslavie, les diverses « révolutions colorées », les attaques destructrices de l’Afghanistan, de la Libye, l’instrumentalisation du terrorisme, la mise au pas des « alliés » par l’hyperpuissance américaine (laquelle, jusqu’à maintenant, n’a jamais reçu en retour les désastres qu’elle avait prodigués aux autres), l’aide décisive des grandes monarchies pétrolières et de la Turquie, les menaces apocalyptiques d’Israël, l’agression présente contre la Syrie, les bruits de bottes qui se font de plus en plus audibles au Proche et au Moyen Orient, les tentatives de résistance des pays qui sont sur la liste noire, et en particulier de la Russie, qui joue son destin, sa survie, ne laissent guère de doute sur la trame historique qui est en train de se jouer actuellement, et qui est aussi fatale qu’une tragédie grecque. La guerre est inévitable, elle vient, elle est déjà là.
    Depuis la fin du service militaire, la mort sur le champ de bataille paraît une hypothèse surréaliste, comme un archaïsme qu’on ne voit plus qu’au cinéma. La guerre n’est plus, dans les pays développés, qu’un service technique assuré par des professionnels, comme la plomberie ou la gestion de centrales nucléaires. Le citoyen, ou plutôt le consommateur, est en droit, puisqu’il paye des impôts, d’être protégé. D’ailleurs, il bénéficie aussi du sérieux des services spéciaux, de même que des caméras de surveillance et des brigades d’investigation cybernétiques. Les dégâts humains et matériels, Dieu merci, ne sont à déplorer que sur un terrain qui est assez lointain, à quelques heures de charter, pour ne devenir qu’un spectacle inoffensif, assez sublime, si la clarté des explosions et l’esthétisme de la mort habitent de façon assez convaincante les écrans, pour meubler des existences qui, au fond, se noient dans un ennui infini. Les catastrophes n’arrivent qu’aux autres, et tant mieux si ce sont des pauvres, des Arabes ou des « terroristes ».

    Une question lancinante hante pourtant toute intelligence, si tant est qu’une telle chose soit possible dans un temps de vacarme frivole et de silence pétrifiant (car toute propagande est médusante) : qu’auraient fait les populations si elles avaient connu les désastres et les souffrances incroyables qui allaient survenir à la suite de leur coup de folie ? Et pas seulement les pertes humaines et matérielles, les dizaines de millions de morts et de blessés , les vies brisées, les familles endeuillées, les villes rasées, les œuvres d’art détruites, les territoires dévastés, mais aussi des habitudes de vie, des relations humaines fondées sur une certaine confiance, une courtoisie et une civilité humblement et tenacement construites pendant des siècles, et soudainement volatilisées comme des obus et des bombes. Que signifièrent alors l’existence humaine, une fois que les hommes furent devenus des instruments de la mort universelle, et que la seule appréhension rendue possible fut la défiance et la violence ?

    Qu’on ne s’y trompe pas : la guerre contemporaine mondiale ne peut être que totale. La mobilisation est sa règle, et ce ne sont pas l’ivresse des soldes et les stupidités télévisuelles qui empêcheront que ne nous reviennent, d’une façon ou d’une autre, les germes de mort que nous auront semés. Car si les missiles ne parviennent pas jusqu’ici, dans cette France qui semble dorénavant oubliée par l’Histoire, hypothèse qui semble pourtant exclue si, comme on le pressent, la dynamique de destruction atteint un point de non retour, il est certain que la civilisation va encore une fois se réduire comme peau de chagrin. Tout phénomène économique, social et politique, voire guerrier, depuis l’avènement universel de la modernité, se traduit autant par une emprise extérieure, sur les corps et les objets, que sur une maîtrise complète des esprits et des cœurs. Mais ce qui est encore pire, c’est, en raison de la logique rationaliste, technoscientifique, et marchande de ce que l’on pourrait appelé l’américanisme – lequel ne se réduit pas à l’Amérique-, tout ce qui, au fond de notre être, rendait le monde intéressant, ouvert, sensible et porté vers le beau, c’est-à-dire vivable, se recroquevillera, de contractera encore une fois, en ce semblant de nature humaine, grotesque, caricatural, qui est une sorte d’hybridation entre le chien de Pavlov et ces robots japonais que les journalistes nous vantent avec gourmandise.

    Le problème n'est donc plus de savoir si nous serons ravalés à quelque chose comme l'esclavage, ou l'état de vassal : nous le sommes déjà, même si les habitudes de consommation et l'abject amour du plaisir vulgaire et des vacances (de la vacance intellectuelle) nous voilent la vérité. Le problème est de savoir, désormais, s'il est encore possible de sauver une parcelle de civilisation, à savoir la possibilité, pour l'individu, de savourer gratuitement le monde, de se délecter de sa beauté, et de se vouer à la vie inimitable et singulière d'un amant du bonheur, qui, comme un véritable amant, ne peut déléguer un bonheur par définition unique. Non seulement parce que le monde risque d'être fort laid après la déflagration mondiale, et que la ruine de la deuxième guerre mondiale risque de paraître bénigne par rapport à celle qui s'annonce, mais aussi parce que les cerveaux et les cœurs, par la vertu et la magie de la barbarie contemporaine, ne sont plus réduits qu'à se porter vers tout ce qui est bas et grossier, directement consommable par des estomacs endurcis par le martèlement stupide et bestial de la publicité et de la propagande. Le meilleur des mondes se profile, c'est-à-dire un univers où nous seront enfin débarrassés, libérés, de la tâche ô combien compliquée d’être vraiment vivants.
     
    Claude Bourrinet (Voxnr, 16 juillet 2012)
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