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  • Soulèvements de la Terre, Civitas: dissolution, piège à cons...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Nicolas Lévine, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré à la question de la politisation de la justice notamment au travers des décisions de dissolution d'associations politiques...

     

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    Soulèvements de la Terre, Civitas: dissolution, piège à cons

    Il n’y a que les gens de gauche qui trouvent la France trop à droite. De même, il n’y a que les juristes de gauche qui pensent vraiment qu’on y juge « en droit ». Il est vrai que notre droit est de gauche – ou libéral, ou progressiste. La preuve par le Conseil d’État, lui qui doit statuer sur les demandes de dissolution du ministère de l’Intérieur, mais qui ne semble pas les traiter avec la même équité suivant qu’elles sont de gauche ou de droite. Ainsi les Soulèvements de la Terre seraient-ils indissolubles, alors que les soulèvements de la droite – hier Génération identitaire, demain Civitas ? – seraient quant à eux solubles. Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements tout court vous rendront blanc ou noir.

    En France, on juge globalement « en droit », parce qu’on a quand même des codes, des articles, et que la Justice s’y réfère pour absoudre – j’emploie ce vocabulaire à dessein, car il y a quelque chose de messianique dans cette Justice humaniste, adepte de la dixième chance, enfin uniquement pour certains, avec son idéal de la réinsertion qui sonne comme une rédemption maçonne – ou condamner. Mais la loi est sujette à interprétation, et les juges français – à l’instar des européens – ne se privent pas pour interpréter dans un sens qui leur convient. Lorsque le rappeur noir – par ailleurs caché derrière un pseudonyme, ce qui a pu jouer, je le conçois – Nick Conrad chante : « Je rentre dans les crèches / Je tue des bébés blancs / Attrapez-les vite / Et pendez leurs parents », en fait un clip horrifique, le diffuse et l’assume parfaitement, la loi permet de l’envoyer au trou pour un an et de lui soutirer quarante-cinq mille euros. Ce qui n’a pas été le cas, comme on s’en doute.

    Ce n’est pas rien, de prôner l’assassinat de nourrissons, de leurs parents, et ce en vertu de la couleur de leur peau. En Occident, il n’est rien de plus grave, de pire crime-pensée que le racisme. Conrad aurait donc dû être sévèrement puni. Mais Conrad est Noir ; or, selon le progressisme, le racisme est un système de domination inventé par les Blancs pour dominer les autres races ; l’appel au meurtre lancé, sur une base raciale, par le rappeur-afro-militant ne peut donc pas être tout à fait raciste ; il relève fondamentalement d’un autre ordre : c’est un appel au secours, l’expression d’un juste désir de revanche, la « blanchité » soumise à un examen de conscience, une « métaphore »… C’est là ce que pensent la plupart des journalistes, des universitaires, des écrivains, des comédiennes, des juges, des politiques, des cadres de l’économie nouvelle, en somme les membres des élites, qui recrutent d’ailleurs dans le même milieu, qui pratiquent une endogamie stupéfiante et partagent le même fond culturel et idéologique – en clair, la bourgeoisie, ou plutôt les deux, la petite et la tout court.

    Selon que vous serez correct ou incorrect

    Pour « décrypter le monde », comme disent les journalistes – laissant donc accroire que le monde est « crypté », mais heureusement ils sont là pour le révéler aux simples mortels que nous sommes ! –, ils disposent d’une unique grille de lecture, difficile à nommer – marxisto-raciale ? libérale-diversitaire ? –, avec des « dominés » et des « dominants », des gentils colorés et des méchants blancs. C’est là le « logiciel » de la gauche, pour parler (encore) comme elle – un logiciel directement issu des Lumières, donc, mais revu par deux cinglés, Sartre et Foucault. Si Nick Conrad avait été Blanc et avait chanté « Je rentre dans les crèches / Je tue des bébés noirs / Attrapez-les vite / Et pendez leurs parents », il la prenait, son année en zonzon, et il n’aurait pas non plus échappé à l’amende de quarante-cinq mille euros.

    Pour un raciste de ce genre, on tordrait sans remords les qualifications pénales afin de le tuer socialement et économiquement. Mais en tant qu’homme noir, donc victime atavique, pluriséculaire, victime du fameux système de domination instauré par les Blancs, justement désireux de se libérer de l’esclavage mental, culturel, économique et social dans lequel il vit, Conrad a le droit d’appeler à massacrer des enfants blancs, leurs parents et le revendiquer devant un tribunal. Cela ne coûte en tout cas que six mois et cinq mille euros avec sursis (qui seront du reste annulés en appel). Il en va d’ailleurs des gauchistes comme des « dominés » de naissance : si Clément Méric avait tué Esteban Morillo et non l’inverse, il est certain que le verdict aurait été différent. (Un antifa qui tue un facho, ce n’est pas la même chose qu’un facho qui tue un antifa. Nier cela, ce serait comme comparer nazisme et communisme, alors qu’on sait très bien que le second génocidait pour le bien de l’humanité, ce qui change tout. Les dizaines de millions d’innocentes victimes du communisme étaient heureuses de mourir d’une balle dans la tête, sur un petit sentier de Pologne, de Bohême, du Vietnam, dans un goulag.) Sans doute que, outre une peine bien inférieure à celle reçue par Morillo, Méric aurait été remercié d’avoir, avec ses camarades petits-bourgeois, participé au nettoyage des rues de France, où les fachos font régner la terreur. Mais donc on juge « en droit » ?

    Le bon accueil des Soulèvements de la Terre au Conseil d’État

    L’avocat – l’un des avocats ? – des Soulèvements de la Terre n’a pas fait semblant, lui. Le 11 août sur BFM, le bonhomme, en direct en visio, est lancé par la speakerine. Que pense-t-il de la décision du Conseil d’État qui refuse la dissolution de l’association d’extrême gauche ? Normalement, il devrait dire ceci : « C’est une décision logique. Le juge administratif a, en responsabilité, estimé que les éléments du dossier ne justifiaient pas au final la dissolution de l’association. » Le droit, toujours le droit – et ce qu’il faut de novlangue, d’anglicismes et de scies. Il était tôt ; l’avocat n’était pas ivre, à priori ; et le reste de son intervention manifestait une adhésion totale à l’époque et ses codes. Alors pourquoi a-t-il répondu, le plus posément du monde, la chose suivante : « Le Conseil d’État a déjà puni plusieurs fois le gouvernement pour son inaction climatique. Logiquement, il ne pouvait donc pas dissoudre une association qui a pour but de sauver la planète. Le Conseil d’État a été cohérent. » Hein ? Cohérent en quoi ? Politiquement ? Il ne pouvait vouloir dire que cela. Oui, en effet, le Conseil d’État est, en l’espèce, cohérent politiquement. Mais de quel droit notre plus haute juridiction administrative fait-elle de la politique, ce qui n’est pas du tout sa vocation ? Elle en fait depuis longtemps, certes. C’est par exemple le Conseil d’État qui, via le célèbre arrêt GISTI de 1978, a consacré l’immigration de peuplement – ce sont donc des juges, des fonctionnaires non élus et irresponsables, qui ont réinitialisé le paradigme civilisationnel dans lequel la France se déployait depuis quinze siècles. Nous nous sommes habitués à une inflation jurisprudentielle, systématiquement orientée politiquement, du reste raccord, dans le cas de l’ordre judiciaire, avec le gauchisme et le socialisme hégémoniques à l’École nationale de la magistrature – pour s’en convaincre, en plus des débats et des peines, on peut s’amuser à lire les productions « scientifiques » des élèves de l’école, évidemment tous obsédés par le social, le sexisme, le genre, les violences-faites-aux-femmes, les discriminations, les-violences-policières. Les juridictions administratives ne sont pas en reste qui mettent juridiquement en œuvre, avec le même zèle, le programme progressiste.

    Maman-Gaïa et Migrant-Rédempteur

    Selon ce dernier, il n’est rien de plus important que « l’urgence climatique ». Chaque jour, le JT le répète : « La jeunesse se mobilise pour la planète », « La crise écologique est l’affaire de tous », « Encore une preuve du dérèglement climatique ». Chaque jour un reportage nous montre les conséquences de la hausse du niveau des océans sur l’activité des pêcheurs de Zanzibar. Le climat, c’est limite, juste après l’indétrônable « pouvoir d’achat », qui est lui hors classement, la-première-préoccupation-des-Français. L’« enjeu de civilisation », et même l’enjeu tout court, c’est ça. Fondamentalement ésotérique, la gauche a trouvé dans l’écologie une nouvelle prophétie. Dans son culte dualiste, la protection de Maman-Gaïa va de pair avec celle du Migrant-Rédempteur : un jour, l’homme nouveau métis pourra gambader sur une Planète rendue à la Nature et libérée du Corrupteur-Blanc – cependant, il pourra toujours se rendre dans une clinique pour changer de sexe – pas plus que des autres la gauche n’a peur de cette insurmontable contradiction entre idéalisation puérile et mépris absolu de la nature, une nature bonne en soi, sauf quand elle concerne l’homme. Ce n’est pas « la » jeunesse, mais une certaine, la bourgeoise des métropoles d’Occident, qui manifeste « pour sauver la planète ». Peu importe : c’est la bourgeoisie qui décide du programme. Le climat est donc la grande et unique mission de notre génération et des générations à venir. Y’a-pas-débat. C’est là ce qui autorise l’avocat à avouer aussi benoîtement. En plus, sur BFM, on est entre nous, entre convaincus de l’« urgence climatique » ; on pense dans l’ordre des items proposés par les instituts de sondage ; on sait qu’on ne sera pas contredit sur le fond.

    Et d’ailleurs, la speakerine ne reprend pas l’avocat après sa saillie. La même speakerine, ou l’un de ses clones sévissant sur la pire chaîne de télé de France, qui dégaine sans relâche, quand la causalité y oblige mais que l’idéologie veut absolument le cacher, de chafouins « Vous faites de la politique ». Lola, les « attentats » : il ne faut pas « faire de la politique ». Les droits des minorités, la lutte pour le climat : là tout est politique, même si c’est un politique qui se confond entièrement avec la morale – la gauche est religieuse, disais-je. Il y a en somme, plus que jamais, plus qu’à n’importe quelle époque hormis peut-être les années 30 – et encore ! au moins les idéologies s’y affrontaient, en France le royalisme n’était pas tout à fait mort, c’était infiniment plus fun qu’aujourd’hui où le progressisme domine intégralement les élites, alors qu’elles étaient encore heureusement divisées durant l’entre-deux-guerres – le problème ce n’est pas les élites, il en faut, les nôtres firent d’immenses choses ; le problème c’est qu’elles soient désormais apatrides, que plus rien ne les lie à la France, qu’elles méprisent ses habitants autochtones plus sûrement que les aristocrates snobaient leurs gens en 1788 – il y a plus que jamais, disais-je, l’idéologie.

    Darmanin ou l’art de dissoudre des associations

    L’air satisfait des journalistes, sur BFM et ailleurs, en annonçant la décision du Conseil d’État trahissait le contentement de tout un système. Elle leur permettait en plus, au cœur de l’été, où ils n’ont habituellement que des incendies de forêt, le prix du steak frites en terrasse sur le bassin d’Arcachon et bien sûr les salvateurs conseils pour résister à la canicule – leur monde n’est qu’une suite de messages de prévention – à se mettre sous la dent, de titiller Gérald Darmanin, l’un des meilleurs « clients » de cette Macronie où les personnalités ne brillent guère. Dans l’imaginaire de la gauche – qui est d’abord un imaginaire –, Darmanin occupe la même place que Sarkozy autrefois. Dans sa lutte éternelle contre le nazisme, la gauche voit en lui un énième avatar de la Réaction, l’homme providentiel espéré par les cons qui n’ont rien compris à l’émancipation de l’individu dans un monde enfin débarrassé de ses frontières, évidemment artificielles, et qui empêchent les humains de vivre ensemble, heureux, en paix, ce à quoi ils aspirent évidemment. Darmanin, c’est le drapeau, l’ordre, l’autorité. Que sa dureté, comme celle de Sarkozy, ne soit que de mots, n’y change rien ; non seulement par hypocrisie, qui est chez elle une seconde nature, mais aussi parce que la gauche pense vraiment que « les mots tuent » ; pour elle, ils le font même plus sûrement que ce supposé « réel » qui plaît tant aux réacs et avec lequel la gauche est – même la marxiste, la « scientifique », parfaitement gnostique en vérité, en tout cas basée, comme le libéralisme dont elle procède, sur des postulats complétement faux sur la nature humaine – irrévocablement fâchée.

    Ministère de l’Intérieur au moment où la violence dite du quotidien explose, dix fois humilié dans le dossier des OQTF où les États des pays d’origine des clandestins l’ont baladé, confronté à une fronde systémique des policiers qui voient clair dans son jeu, il y a au moins une chose que Darmanin sait faire, en général : dissoudre des associations. Dans la frêle dynamique de l’oiseuse loi contre le séparatisme, il s’est enfin attaqué à des associations islamistes, parfois déguisées en ONG ; il s’en est pris à quelques figures de la mouvance, à l’instar bien sûr de l’imam Iquioussen – qui l’a bien eu, d’ailleurs, avec le soutien de la justice belge, de la couronne marocaine et, en partie, de notre justice administrative.

    Mais à chaque fois que Darmanin dissout une association islamiste, il se croit obligé de dissoudre également une association patriotique. Le nom de la loi annonçait la couleur, cela dit : outre qu’il vise à cacher le mot islam, le terme « séparatisme » traduit l’idée que nos élites se font des « radicalismes », qu’elles hiérarchisent ; et en vérité, pour un libéral et a fortiori un socialiste et un gauchiste, l’intégriste autochtone est plus dangereux que le salafiste exogène, le type qui veut juste prier en latin que celui qui prépare un massacre de masse, un fascisme imaginaire qu’un fascisme bien réel. Ainsi, Génération identitaire avait été dissoute en même temps que BarakaCity, dans une évidente logique de compensation. Car non seulement la Macronie doit satisfaire son aile gauche, mais elle est de gauche – il faut donc compenser sévère.

    Hyper-tolérance pour l’extrême gauche

    Ces dernières années, d’autres groupuscules identitaires, locaux, ont subi le même sort ; il est vrai que ce fut également le cas de quelques groupes antifas. On observera que le traitement médiatique diffère selon l’objet à dissoudre ; la dissolution d’une assos islamiste, même wahhabite assumée, provoquera une « polémique » ; il n’en ira pas de même de la dissolution d’un groupe de patriotes, dont la disparition sera seulement accompagnée, sur les plateaux, de formules définitives sur le péril fasciste distillées par des experts en extrême droite militant à l’extrême gauche – ce qui est un bon gage d’objectivité. Génération identitaire a été dissoute pour quelques feuilles jetées en l’air au siège marseillais de l’association d’ultragauche SOS Méditerranée, qui encourage des étrangers à violer les lois européennes et les viole elle-même, et des vidéos qui prouvaient que la frontière entre la France et l’Italie était une passoire. L’association refusait la violence. Son agit-prop était propre, et en plus très pro. Elle a été dissoute en cinq minutes. Il y a de cela quelques mois, des membres des Soulèvements de la Terre ont mené et même filmé l’attaque d’une usine de Lafarge, brûlant pour plus de quatre millions d’euros de matériel, affaire d’ailleurs traitée par les services antiterroristes – les journalistes semblent avoir omis ce fait, dont ils n’ont absolument pas parlé. L’association appelle à la violence, au moins contre les biens ; elle mène ou s’agrège à des manifestations interdites, comme celle de Sainte-Soline, où des dizaines de gendarmes ont été blessés ; son caractère séparatiste et même insurrectionnel ne fait aucun doute, tant ce qu’elle dit que ce qu’elle fait justifiait sa dissolution. Le Conseil d’État a en jugé autrement. Que le dossier présenté par le cabinet de Darmanin soit solide ou non, c’est d’abord au tamis idéologique qu’il est passé, et qu’il a logiquement perdu – comme perdent systématiquement toutes les maigres tentatives de durcir le droit des étrangers.

    Pas de civilité pour Civitas

    Compensation, toujours : tandis que le Conseil d’État examinait le dossier des Soulèvements de la Terre, Darmanin a annoncé, pour satisfaire une gauche évidemment indignée par la procédure engagée contre ces sympathiques amoureux de la planète, tous ces Jean-Eudes, Charlotte et Stan sortis d’un cauchemar de Papacito, la dissolution de Civitas. Association catholique, de droite dure, tendance tradi et donc éloignée d’une Église dominée par le gauchisme, Civitas s’est manifestée aux yeux du grand public – et des journalistes, qui ne s’intéressent à rien – lors du vote de l’Assemblée socialiste en faveur du mariage gay. Conséquente – contrairement à tant de catholiques dits de gauche, qui sont surtout de gauche –, l’association s’est opposée et continue de s’opposer farouchement à la PMA et à la GPA, et elle est clairement moins enthousiaste que l’antipape François vis-à-vis de l’immigration de masse extra-européenne. Civitas ne prône pas la violence, ne mène pas d’actions violentes.

    Récemment, lors de quelque colloque, Civitas a invité Pierre Hillard, géopolitologue promu par Égalité et Réconciliation. Durant son intervention – telle qu’elle a été rapportée par une presse évidemment hostile par principe –, Hillard a commenté la naturalisation des Juifs sous la Révolution, a dit voir en elle la matrice de l’immigrationnisme et s’est demandé s’il ne faudrait pas revenir sur ce principe. Niveau antisémitisme, on a fait cent fois pire. Comme tous les auteurs qui gravitent autour de Soral, Hillard a une fâcheuse tendance à analyser toute l’histoire avec le Talmud à la main. Comme le brillant Julien Rochedy l’avait expliqué à un autre essayiste soralien, Youssef Hindi, l’obsession soralienne pour les Juifs est d’abord et surtout bête ; prenant l’exemple de l’origine de la Révolution française, Rochedy opposait les tenants du complot maçonnique à Taine, en somme ceux qui croient en une cause unique et ceux qui savent que, bien sûr, il y a toujours plusieurs causes – et Taine le prouve génialement. Oui, les événements sont toujours multifactoriels ; et j’ajoute que rien, dans la vie des idées, n’arrive par hasard, spontanément, y compris le progressisme, qui correspond en premier lieu, comme l’a démontré Christopher Lasch, à une mutation de la bourgeoisie occidentale, sa sortie du corps social – comme l’aristocratie en était sortie au moment de la Révolution, ce qui l’explique en partie.

    Inviter Hillard est une drôle d’idée ; du reste, on ne voit pas ce qui, dans ses propos, choque tant – il n’a pas dit qu’il fallait déchoir les Juifs de leur nationalité française –, et puis les excès de la liberté sont toujours préférables à ceux de la censure. Aidé comme d’habitude par les mouchards LFI qui traquent sans relâche, avec l’enthousiasme de scouts commissaires politiques, les « dérapages » sur les réseaux sociaux, qui réclament sans cesse la dissolution de mouvements patriotiques quand ce n’est pas carrément celle du RN, Darmanin a immédiatement sauté sur l’affaire. Se débarrasser de l’une des principales associations authentiquement catholiques, d’un opposant constant aux délires transhumanistes et sociétaux : le Iago de Tourcoing ne pouvait laisser passer cette occasion. Sevrée de « polémiques » sur les tampons hygiéniques, les toilettes non-genrées et le changement de sexe à huit ans, la gauche accepte volontiers ce cadeau, qui l’autorise à faire des heures d’antenne et des pages et des pages sur l’intégrisme catholique, si présent, si oppressant, toujours capable de déclencher sur une nouvelle Saint-Barthélemy dans le Marais et à Sevran. Si le dossier contre Civitas est centré sur Hillard, il me semble bien léger ; et je ne vois pas ce qui, dans ses prises de position et actions passées, justifierait la dissolution de l’association ; mais on peut quand même parier que, pour elle, le Conseil d’État ne s’opposera pas.

    Une justice politique

    Chaque semaine, des associations islamistes accueillent – ou tentent d’accueillir – des prédicateurs imperméables aux « valeurs de la République ». Darmanin n’engage pas leur dissolution. Il laisse également tranquille, outre SOS Méditerranée qui accomplit un rôle de passeur, d’associé de trafiquants d’êtres humains, toutes les associations pro-clandestins qui – je le répète, car la chose semble ne choquer que moi – violent et appellent les clandestins à violer les lois et ce, en toute décontraction – imagine-t-on une association, subventionnée en grande partie par de l’argent public, appelant à ne pas payer les impôts ou promouvant la haine raciale ? Quid d’Utopia 56, qui a installé, sous des tentes, des clandestins sur les places de la République et du Palais-Royal, paye les procédures administratives des clandestins et, dans la lignée du GISTI toujours très actif, mène une guérilla juridique de chaque instant contre l’État ?

    Formidablement ambitieux, Darmanin se sert de la dissolution d’association pour nourrir sa com’. Donner aux boomers centristes l’impression de frapper les « radicalismes », ça doit rapporter. C’est son calcul pour 2027. Mais, entre les mains de cet énième Machiavel et sous la pression permanente de la gauche, cette procédure est aussi un outil au service d’une répression idéologique qui s’acharne encore plus durement sur ceux qui veulent sauver leur culture que sur ceux qui veulent la détruire. Et la Justice, sur la même ligne, vient consacrer ce titanesque renversement de civilisation auquel le droit a déjà collaboré de façon décisive. En somme, il s’agit d’une justice politique.

    Nicolas Lévine (Site de la revue Éléments, 21 août 2023)

     

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  • L'élection présidentielle, les maires et les cinq cents signatures...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Nicolas Lévine, cueilli sur le site de la revue Eléments et consacré à la protection que constitue pour le système la quête de cinq cents parrainages d'élus locaux pour les candidats à l'élection présidentielle.

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    Éric Zemmour et les cinq cents

    Ça ne leur suffit pas que des millions de voix ne soient pas représentées dans les chambres et les assemblées, encore faut-il que les candidats putatifs de ce peuple bafoué ne puissent pas se présenter à l’élection présidentielle faute de signatures. C’est le risque qui pesait hier sur la candidature Le Pen, aujourd’hui sur celle de Zemmour. Ces 500 signatures, c’est le pass vaccinal de la République, celui qui ouvre les portes et les referme. La démocratie est morte, vive l’oligarchie !

    Vous vous souvenez du Grand débat ? Alors que la magistrature et les antifas, alliés comme jamais, réduisaient les Gilets jaunes sous les applaudissements des gardiens de la démocratie, des vigies de l’humanisme – je parle bien sûr des journalistes, mais tout le monde aura deviné qui étaient ces héros des temps modernes –, Macron, avec la cape de premier de la classe qu’il porte depuis la première échographie de sa mère, se lançait dans une tournée des salles des fêtes, invitant les maires à venir le questionner afin de sortir de la « crise ». J’ai longuement regardé. C’était dingue. Les journalistes politiques n’en pouvaient plus, ils étaient excités comme un soir de partouze. Ohlala ! qu’il était beau, qu’il était intelligent, comme il tombait bien la veste, comme il était bien peigné, comme il avait – c’est vrai – réponse à tout, Macron ! Au moment où une majorité de Français, selon tous les sondages, continuait de soutenir le mouvement des Gilets jaunes malgré les tombereaux de merde que la plupart des commentateurs jetaient sur ces derniers et les manipulations de toutes sortes dont ils étaient l’objet, ces élus, eux, manifestaient une servilité totale.

    Le Kennedy d’Amiens

    Il est vrai que l’Élysée sélectionnait les élus en question. Les rares maires RN et LFI étaient écartés. Pour le fun et parce que, depuis fort longtemps, le PCF est révolutionnaire comme moi j’aime le RnB, on avait bien choppé deux ou trois vieux communistes à béret pour animer un tout petit peu un exercice qui, en fait, tenait plus de l’autofellation que du « débat ». Dotation, subvention, péréquation : de toute évidence, parmi tous les problèmes soulevés par cette « crise », les maires de France ne voyaient que celui de leurs ressources – donc de leur réélection. Alors que, durant quatre mois, les Gilets jaunes, en plus de très justes revendications sociales, avaient mis sur la table la représentation d’abord, l’immigration, la souveraineté, l’Europe ensuite, les maires, eux, se lamentaient parce que les travaux de la médiathèque Nelson-Mandela et de la piscine Salvador-Allende avaient pris du retard… La déconnection entre représentants nationaux et peuple était acquise – sauf aux yeux des oligarques, bien sûr. Grâce au grand one-man-show du Kennedy d’Amiens, ceux qui ignorent tout de la politique locale, comment elle se fait – entre Rotary et Grand Orient de France –, purent découvrir que les « élus de terrain », les « élus des territoires » (sic) représentaient finalement encore plus mal les citoyens français. Il y eut cinq cents questions posées à Macron, ai-je entendu. Sur cinq cents questions, il y en eut une seule, UNE SEULE sur l’immigration – il faut rendre hommage au maire de Montauban, Brigitte Barèges, qui seule osa et qui fut alors huée par les autres maires présents dans la salle – et qui fut, ensuite, lourdement punie pour cette audace.

    La grève des isoloirs

    La perpétuation du scrutin uninominal majoritaire à deux tours n’a qu’un objectif : exclure de la représentation ceux qui votent mal et, par là même, pourraient brider la marche du Progrès. Dans le peuple, le MODEM ne représente rien : il a pourtant plus de quarante députés. LFI et le RN en ont respectivement dix-sept et… six1. Soit, tous les mots sont aujourd’hui galvaudés ; Macron se dit patriote… Mais je ne vois pas bien comment quelqu’un qui se dit démocrate peut soutenir un système qui admet sans faiblesse qu’un pan considérable de l’électorat ne peut pas être représenté dans nos chambres. La proportionnelle produirait une instabilité ? Sans doute, mais s’il faut choisir entre la stabilité de nos institutions fantoches et la justice, je choisis tous les jours la seconde. Ce n’est évidemment pas le choix des macronistes, des libéraux en général ; êtres moralement très supérieurs, êtres de lumière qui, comme le Skippy des Inconnus, conduisent leurs semblables dans une totale liberté de pensées cosmiques vers un nouvel âge reminiscent, les libéraux se satisfont visiblement très bien d’un régime qui leur assure, de trahison en trahison, sans rien changer à leurs convictions – ce qui est plutôt facile quand on n’en a aucune sinon la volonté de faire carrière, voyez par exemple Gérald Darmanin –, de garder le pouvoir. Sans cesse plus importante, la grève des isoloirs, qui concerne pour l’essentiel les classes populaires, s’explique d’abord ainsi. Ceux qui, à commencer par les politiques, ont chialé après les dernières régionales à cause du minable taux de participation sont au mieux des gros crétins, au pire de gros Tartuffes.

    La quête des signatures

    Ainsi donc, la « démocratie locale » se porterait mieux, nous dit-on. Les dizaines de milliers de maires que notre pays compte seraient de meilleurs porte-parole des « petites gens ». À l’heure où j’écris ces mots, Éric Zemmour ne dispose pas des signatures nécessaires pour entrer officiellement dans la course à la présidence de la République française. Les sondages lui donnent entre 14 et 17 % au premier tour ; ce sont justement et surtout les « petites gens » qui le suivent ; il suffit de ne pas être macroniste, de connaître d’autres « travailleurs » que les nounous ivoiriennes et les Uber maghrébins des « métropoles connectées sur le monde » (sic) pour savoir combien l’homme est populaire dans le peuple. À chaque présidentielle, le RN galère pour trouver ces fameuses cinq cents signatures ; ses difficultés en la matière sont, hélas, un marronnier des campagnes élyséennes. Zemmour fait donc face au même problème, rendu quasi insoluble depuis que François Hollande, entre deux humiliations des Françaises-et-des-Français – ô, Leonarda ! ô, Mistral ! –, a décidé que lesdites signatures seraient rendues publiques. Quel pouvait être le but de cette décision – que personne ne réclamait – sinon de compliquer encore davantage la vie des vraies oppositions et de renforcer le bipartisme, de nous empêcher d’échapper à la légendaire « alternance » entre sociaux-démocrates et démocrates-sociaux, gauche libérale et droite libérale, mondialistes bourgeois et bourgeois mondialistes ?

    Vos papiers, candidat Zemmour !

    Si Éric Zemmour ne pouvait finalement pas se présenter à cette élection, il ne s’agirait pas d’un « déni de démocratie », expression que même une Valérie Pécresse peut éhontément employer. Il s’agirait de l’acte de décès officiel du peu qu’il reste de notre démocratie. Et bien sûr, passée la fausse indignation produite par la subséquente « polémique », on trouverait sans peine des zozos libéraux pour venir défendre, au nom de la « transparence », la porte claquée au nez de celui derrière qui tous les patriotes vraiment désireux de vaincre, de rendre enfin aux élites apatrides qui les méprisent, les moquent, les nazifient la monnaie de leur pièce se rangent aujourd’hui.

    Il en va de ces fichues signatures comme de l’incroyable pass vaccinal : dans l’incapacité d’interdire, le système entend bien « emmerder jusqu’au bout » ceux qui le défient. Cette logique nourrit une colère on ne peut plus légitime. Et c’est cette colère qui est la plus authentiquement démocratique.

    Nicolas Lévine (Site de la revue Éléments, 8 janvier 2022)

     

    Note :

    1. Si l’absence de l’extrême gauche dans les chambres est scandaleuse, elle l’est moins que celle de l’extrême droite dans la mesure où la première est hégémonique dans le champ culturel même si, comme le dit justement Mathieu Bock-Côté, la gauche est tellement habituée à dominer intellectuellement depuis l’après-guerre – et en fait depuis 1789 – qu’il lui suffit d’être contestée pour se sentir assiégée.

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  • Les antifas, milices du mondialisme...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Nicolas Lévine, cueilli sur le site de la revue Éléments et consacré aux antifas, qui ont été lâchés par leurs maîtres sur Eric Zemmour lors de son passage à Nantes le 30 octobre...

     

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    Zemmour face aux antifas, milices du mondialisme

    Les « antifas » ont encore sévi. Cette fois-ci, c’est Éric Zemmour qui en a fait les frais, le samedi 30 octobre, au Zénith de Nantes, où il intervenait. Tout le monde a pu voir les images. Un déchaînement de violences où « des fils et de filles de » ont pu, en toute impunité, faire valoir leur amour du débat. Sociologie d’une jeunesse dorée, rose et bourdieusienne, qui, en dernière analyse, est la gardienne objective d’un système qu’elle contrôle de bout en bout.

    Aucun média, dans la longue liste des organiques, des produits par le système et qui le renforcent jusque dans l’opposition prophylaxique qu’ils manifestent sporadiquement, aucun média, donc, en France, n’est plus calé sur la doctrine du régime progressiste que Le Monde. Sa lecture en est fascinante. Les journalistes, résilients, toujours du côté du manche, défendent les racisés et Greta Thunberg, des experts s’écharpent sur des taxes à « 2,3 ou 2,5 % ? », on y débat avec la même gravité de la précarité menstruelle et de la guerre au Sud-Soudan, et puis bien sûr, on tape à fond sur l’esstrêême droâte, encore plus depuis qu’elle vire zemmourienne. On le fait avec le sérieux qui a fait la réputation du journal, mais sous la plume d’anciens thésards d’extrême gauche reconvertis en Décodeurs avant vingt-cinq ans. C’est le journal du « cercle de la raison », des CSP+ des hypercentres, des élites sécessionnistes, des 20 % de l’électorat français qui adhèrent à Emmanuel Macron. C’est la Pravda du mondialisme, en somme.

    Quand les beaux quartiers font la révolution

    En 2018 se tenait à Paris le procès de Morillo et Dufour, les skins qui avaient frappé et tué le militant antifa Clément Méric. Curieux de voir à quel point la magistrature française allait se payer les fachos meurtriers, nouveaux SA au pays des droits de l’homme, du tampon hygiénique gratuit et des décapitations de professeurs et de curés, j’avais suivi le procès en direct sur le site du Monde. Sur le fil, c’était un festival. Le ou les journalistes responsables du live s’en donnaient à cœur joie dans le racisme de classe. Méric était le fils d’un couple de professeurs « très dignes », qui s’exprimaient clairement, qui n’avaient pas de « haine » – comme la plupart des rescapés du Bataclan qui, en ce moment, montrent à travers leurs témoignages l’influence mortifère du développement personnel, lequel est un sous-produit du libéralisme ; tandis que les parents de Morillo, eux, était de simples artisans, autant dire des ploucs, « mal à l’aise à l’oral », qui avaient inculqué à leur rejeton la-haine-de-l’Autre en lui apprenant à aimer la France – le patriotisme mène inexorablement au fascisme, c’est évident aux yeux du Monde. Les journalistes se délectaient des nombreuses interventions du juge, certaine Xavière Simeoni, qui refusait la thèse de l’unique coup hélas mortel alors que l’un des deux experts l’estimait plausible, qui mouchait à plusieurs reprises Morillo, Dufour et les témoins à décharge.

    La peine ? Onze années de prison pour le premier, sept pour le second. Des racailles qui massacrent pendant cinq minutes ceux qu’elles ont ciblés au hasard en tapant dans la tête afin d’en faire des paraplégiques, qui n’expriment ensuite aucun regret, aucune empathie pour leurs « victimes », ces racailles-là prennent en général moitié moins – les mineurs – et ils sont légion – ont même droit au centre éducatif fermé. On sait pourquoi. Comme on sait que, si les rôles avaient été inversés, si Méric avait tué Morillo, l’antifa, le facho, le verdict eût été différent. La magistrature protège ses enfants. En bons bourdieusiens qu’ils sont pour la plupart, les juges le reconnaîtront.

    Fils à papa, fille à maman

    Je me souviens d’un papier de L’Obs qui racontait les comparutions immédiates de quelques rares « black blocs » interpellés durant Nuit Debout. Au programme, pour l’essentiel, des jets de projectiles divers sur les forces de l’ordre. Ils venaient tous l’un après l’autre à la barre, ces jeunes gens qui se définissaient comme « révolutionnaires ». D’où venaient-ils ? Des « quartiers » ? De la France périphérique ? Oh que non. C’étaient des Hyppolite et des Charlotte, des Adelaïde et des Pierre-Jean. Ils étudiaient à Normale Sup’, à Polytechnique, dans des écoles de journalisme. Et à la barre, ils n’en menaient pas large. Ces fiers anars, qui pratiquent le cassage de gueule comme argument, qui prônent la violence politique sans ambiguïté, étaient parfois au bord des larmes en évoquant leur semestre à achever, la réputation de leur famille, un frein à leur employabilité future. Finalement, ils s’en sortaient très bien sur l’échelle des Gilets jaunes, rarement polytechniciens et fils d’avocats, eux.

    L’antifascisme des classes dominantes

    Ces révolutionnaires des beaux quartiers qui voient tout en termes de pouvoir et de domination, on se demande quel pouvoir et quelle domination ils subissent sinon ceux du réveillon de Noël chez leur « bonne maman » et de leur abonnement Netflix. Très présents en Île-de-France, près des postes occupés par leurs parents, les antifas sont visibles : sites Internet, webzines, fanzines, bars associatifs. Outre qu’ils s’agrègent à nombre de manifestations, ils ont les leurs, qui s’en prennent à un traité capitaliste, une loi « raciste » ou commémorent la Commune, la mort d’un camarade péruvien ou une révolution de trois heures dans une province du Kirghizistan.

    Certes, on compte parmi eux quelques vrais prolétaires, étudiants pauvres ou racisés qui excitent l’imagination de nos normaliens entre deux soirées MD dans un rooftop-squat du 10e arrondissement. Mais le mouvement antifasciste contemporain est bourgeois, une sorte d’école de formation de la bourgeoisie métropolitaine, c’est-à-dire de gauche, qui, à la fois ennuyée et fascinée par son idéalisme, laisse s’y perdre certains éléments de sa jeunesse. Certains, rares, iront élever des chèvres en Ardèche ; la plupart, comme les soixante-huitards dont ils sont les héritiers en pire, profiteront plutôt rapidement, après un rappel à la loi et un conseil de famille, des réseaux de papa et maman pour devenir ce qu’ils n’auront du reste jamais cessé d’être : des bourgeois.

    Les auxiliaires des forces de l’« ordre »

    Ceux qui n’avaient pas encore deviné pourquoi le pouvoir ne brise pas les antifas l’auront enfin compris en observant le mouvement des Gilets jaunes. Dès décembre 2018, par grappe de trente ou cinquante, ils débarquaient dans les cortèges, traquant les militants de l’Action française, les Identitaires parisiens, enfin, tout ce qui ressemblait à un patriote conséquent. Ils passaient plus de temps à faire ce travail d’auxiliaire des Renseignements territoriaux qu’à affronter les forces de l’ordre. Cent témoignages indiquent que la préfecture de police et Beauvau, alors, laissèrent les antifas casser des gueules, casser et brûler du mobilier urbain, des vitrines, des monuments. Objectif de la manœuvre ? Faire peur, derrière son écran, à la bourgeoisie, et dès lors incarner l’ordre face à des agitateurs pour qui les Gilets jaunes des débuts, c’est-à-dire l’immense majorité d’entre eux, les vrais et innombrables Gilets jaunes, étaient beaucoup trop à droite, soit des fachos, soit des imbéciles manipulés par des fachos.

    Heureusement, Hyppolite et ses copains étaient là, prêts à subir la colère de leurs mères énarques et leurs portraits enamourés dans Libération, pour expliquer au peuple que la révolution, c’est un truc d’extrême gauche ou ce n’est pas. J’ai vu de mes yeux des antifas se frayer un chemin en fracassant tout sur leur passage, devant d’épaisses rangées de CRS qui ne bougeaient pas. Pour mieux les attraper ensuite ? Que nenni. Le pouvoir a les noms, les adresses : il n’y a plus qu’à. Il faut quelques jours pour dissoudre Génération identitaire, il faut quatre années pour dissoudre Ligue de défense noire. De toute évidence, le pouvoir n’a aucune envie de dissoudre les groupuscules antifas.

    Contre Zemmour, tout est permis

    Ces derniers viennent de se distinguer lors de la venue d’Éric Zemmour à Nantes. Pour moi qui les observe depuis longtemps, cela n’a rien d’étonnant, et je suis même surpris qu’ils n’aient pas agi plus tôt. En effet, pour eux, le fascisme commence avec le PS – dans lequel ils feront ensuite souvent carrière car c’est le machin qui offre le plus de débouchés. Alors Zemmour, vous imaginez ? C’est le nazisme, c’est même la SS, c’est même carrément le bras droit de Reinhard Heydrich ! Ils menacent de tout casser dans leur fac quand cette dernière invite François Bayrou ; face à l’heureuse chevauchée de Zemmour dans les sondages, au réveil du peuple français qui, grâce au brillant écrivain et journaliste, prend conscience qu’il existe encore en tant que peuple, les antifas sont mobilisés comme jamais. On peut donc s’attendre à ce qu’ils se manifestent régulièrement durant la campagne, cherchant la bagarre avec les fascistes imaginaires, prêts à aller s’indigner ensuite chez Brut, Mediapart, Loopsrider et Quotidien – où iront travailler ceux qui auront été refusés par le PS. Dans une démocratie saine, et plus encore dans la nôtre qui fait de la non-violence un principe sacré, l’épisode de Nantes devrait suffire à provoquer la dissolution des groupuscules participants ou ayant appelé à la manifestation. Mais l’on ne voit que trop bien comment, au contraire, le pouvoir va utiliser les antifas contre Zemmour. « Voyez comme il divise », vont psalmodier les journalistes libertaires ; « Voyez comme il produit de la violence », fulmineront les éditorialistes libéraux. La violence des antifas avait soudé les membres des bourgeoisies des deux rives contre les Gilets jaunes. Leur violence va une nouvelle fois souder l’électorat d’Emmanuel Macron contre les « déplorables » qui suivent Éric Zemmour. Et comme toujours depuis un siècle, en définitive, les gauchistes ne seront rien d’autre que les idiots utiles du capital, qui est bien sûr le principal moteur de la mondialisation.

    Nicolas Lévine (Site de la revue Éléments, 5 novembre 2021)

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