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  • Feu sur la désinformation... (484) : francocide, le déni médiatique ?

    Vous pouvez découvrir ci-dessous un nouveau numéro de l'émission I-Média sur TV libertés consacrée au décryptage des médias et animée par Jean-Yves Le Gallou et Lucas Chancerelle.

     

                                             

     

    Au sommaire cette semaine :

    L'image de la semaine :  un nouveau francocide après celui de Philippine, cette fois il s’agit de Killian, un jeune boxeur tué par un Algérien à coups de couteau devant une boîte de nuit.

    Dossier du jour : le style médiatique du nouveau gouvernement avec le discours de politique générale et la stratégie bulldozer de Bruno Retailleau contre le politiquement correct.

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    Pastilles de l’info :

    1) Liban/Moyen-Orient : le début de la 3ème guerre mondiale ?
    2) Musk dénonce la possible fraude des élections américaines !
    3) L'affaire des assistants parlementaires du RN
    4) Quotidien, Léon Marchand bon géniteur ?
    5) Un candidat LFI violeur et pédophile

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    Portrait piquant (en partenariat avec l’OJIM) : Yann Barthès , le prince des bobos !

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  • Alain de Benoist : « Il faut s’attendre à une paralysie institutionnelle quasi totale, à de l’instabilité, à de la violence sans doute »...

    Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Alain de Benoist à la revue Monde & Vie, cueilli sur le site de la revue Éléments, dans lequel celui-ci donne sa lecture des résultats des élections législatives.

    Philosophe et essayiste, directeur des revues Nouvelle École et Krisis, Alain de Benoist a récemment publié Le moment populiste (Pierre-Guillaume de Roux, 2017), Contre le libéralisme (Rocher, 2019),  La chape de plomb (La Nouvelle Librairie, 2020),  La place de l'homme dans la nature (La Nouvelle Librairie, 2020), La puissance et la foi - Essais de théologie politique (La Nouvelle Librairie, 2021), L'homme qui n'avait pas de père - Le dossier Jésus (Krisis, 2021), L'exil intérieur (La Nouvelle Librairie, 2022) et, dernièrement, Nous et les autres - L'identité sans fantasme (Rocher, 2023).

     

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    Législatives : « L’incroyable spectacle de centristes faisant élire des communistes ou des fichés S et d’une extrême gauche hystérique appelant à soutenir les fondés de pouvoir du grand capital ! »

    MONDE&VIE. Alain de Benoist, vous êtes chef d’école, mais vous êtes aussi un des meilleurs analystes politiques sur la place de Paris. Avez-vous vécu la soirée électorale du 7 juillet comme une surprise, annonçant éventuellement un grand bouleversement politique, ou bien plutôt avez-vous pris ce scrutin comme un simple effet de tectonique des plaques électorales, au nom de l’impératif antifasciste, toujours de sortie ?

    ALAIN DE BENOIST : J’ai bien sûr été surpris, comme tout le monde. Mais aussi et surtout consterné de voir, dans les réactions qui ont suivi, les affects prendre immédiatement le dessus sur les nécessités de l’analyse scientifique. D’un côté une sorte d’affliction désespérée (« tout est foutu ! »), de l’autre un lâche soulagement assorti de forfanterie (« on a gagné ! »). Or, si l’on regarde les choses d’un peu près, aucune de ces deux réactions ne permettait de comprendre ce qui s’est passé. Ma conclusion personnelle est bien différente. Elle tient plutôt dans les deux constats suivants : le Rassemblement national continue à progresser, et la France est devenue ingouvernable.

    Sur le premier point, les chiffres sont parlants. En 2017 le RN avait seulement 6 députés à l’Assemblée nationale. Aux législatives de 2022, il avait bondi à 89 députés (ce qui avait été considéré, à juste titre, comme un extraordinaire succès). Le 7 juillet dernier, il en a obtenu 143, ce qui est tout le contraire d’un échec (Bardella n’a pas eu tort de parler de « la percée la plus importantes de l’histoire » de son parti) ! Il a également recueilli près de 10 millions de suffrages (en 2022, il n’en avait obtenu que 4,2 millions), contre 7,4 millions pour le Nouveau Front populaire et 6,5 millions pour Ensemble, la coalition électorale du centre macronien. Parler d’un « recul du RN » est, dans ces conditions, parfaitement grotesque.

    Certes, le RN n’est pas parvenu à atteindre la majorité absolue (289 sièges sur 577), contrairement à ce que laissaient prévoir ses excellents résultats (plus de 34 % des voix) obtenu aux dernières élections européennes et au premier tour des législatives, résultats qui s’expliquent avant tout par le sentiment de dépossession des couches populaires toujours plus confrontées aujourd’hui à l’insécurité, à l’immigration, à l’inflation, à la baisse du pouvoir d’achat et à la précarité.

    Cet échec s’explique par les particularités du scrutin majoritaire à deux tours, qui autorise entre les deux tours tout une série de tractations et de marchandages qui ont l’étrange caractéristique de ne pas favoriser les gagnants du premier tout mais la coalition des perdants. Au total, 224 candidats de la gauche et du centre se sont retirés ou désistés dans le seul objectif d’empêcher le RN d’emporter la majorité qui aurait normalement dû lui revenir. On a alors assisté, sous prétexte de « faire barrage à l’extrême droite », et dans un climat d’hystérie entretenu par les grands médias, qui présentaient l’arrivée du RN comme la version moderne de l’Apocalypse, à une série d’alliances contre-nature – Jordan Bardella a parlé d’« alliance du déshonneur » – entre des personnalités et des partis que tout opposait la veille encore, à seule fin de priver le Rassemblement national, arrivé très souvent en tête au premier tour, de la victoire qu’il aurait dû obtenir. Incroyable spectacle des centristes faisant élire des communistes ou des fichés S et d’une extrême gauche hystérique appelant à soutenir les fondés de pouvoir du grand capital !

    Ce sont ces désistements qui expliquent que le RN n’a pu gagner que 93 duels de second tour sur les 353 où il était représenté.

    Ce système profondément antidémocratique, il faut le souligner, est une particularité française : avec les modes de scrutin qui existent en Grande-Bretagne ou en Allemagne, Jordan Bardella, qui a encore battu son record des élections européennes en remportant 37 % des voix, serait aujourd’hui à Matignon !

    On peut comprendre bien sûr la déception de ceux qui, au RN, se voyaient déjà « aux portes du pouvoir ». Mais les portes en question étaient en fait des fourches caudines. Je suis de ceux qui se félicitent que Jordan Bardella n’ait pas eu à assumer la tâche de Premier ministre d’un gouvernement de cohabitation. La cohabitation était un piège très intelligemment tendu par Macron pour amener le président du RN, qui aurait eu à faire face à la fois aux chausse-trappes du chef de l’Etat et aux manœuvres obliques du Conseil constitutionnel, de mesurer son impuissance et d’apparaître comme incapable. La cohabitation revenait à lui confier les clés d’un camion sans roues ni carburant. Pour Macron, c’était le plus sûr moyen d’empêcher le RN de gagner la présidentielle de 2027.

    MONDE&VIE. Peut-on dire qu’Emmanuel Macron, en imposant cette dissolution de l’Assemblée le plus tôt possible après les européennes, a pris de court le RN, qui demeure le premier parti en voix, mais devient le dernier des trois blocs en nombre de sièges. Il paye donc, avec la culture antifasciste, son manque d’ancrage local. Et quoi d’autre ?

    ALAIN DE BENOIST : Le Rassemblement national n’a pas commis de faute majeure, sinon de croire qu’on pouvait vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. On peut en revanche lui reprocher d’avoir trop vite (et trop mal) sélectionné ses candidats, dont un bon quart, sinon un tiers, n’avaient pas les capacités ou le profil. Gilles Pennelle, qui avait été chargé de ce travail, a d’ailleurs remis sa démission. Il est vrai que la dissolution a pris tout le monde de court, à commencer par ceux qui l’avaient réclamée à grands cris sans y croire, et qu’une campagne aussi courte permettait difficilement de trouver en quelques jours les hommes idoines. Quant à l’ancrage local du mouvement, il est bien meilleur qu’à l’époque du Front national, quand Jean-Marie Le Pen s’en désintéressait complètement, mais il est encore très insuffisant. Ces choses-là prennent du temps.

    Le « front républicain » fonctionne encore, mais de moins en moins. La preuve en est que nombre de candidats RN ont perdu sur le fil, avec des écarts de voix très faibles. Avec le temps, la culture « antifasciste » ne pourra plus qu’apparaître que comme un simulacre. Les gens savent bien que ce n’est pas en agitant le spectre des « années noires », en leur parlant du pétainisme ou du petit peintre bavarois, qu’on va résoudre les problèmes qui empoisonnent leur vie quotidienne.

    MONDE&VIE. Quelles leçons pour l’avenir le RN doit-il tirer de sa défaite ?

    ALAIN DE BENOIST : En tout premier lieu, qu’il doit tout faire pour ramener le centre à sa plus simple expression : le « bloc bourgeois » doit être pour lui l’ennemi principal.  Qu’il doit privilégier l’analyse et la formation plutôt que de ne marcher qu’à l’enthousiasme ou à l’indignation. Qu’il doit comprendre que la recomposition politique entamée il y a quinze ans se poursuit, mais qu’on ne peut pas brûler les étapes. Et surtout que la seule faute qui ne lui sera jamais pardonnée serait de décevoir les classes populaires et les classes moyennes qui ont mis et continuent à mettre en lui tous leurs espoirs. Tous les sondages montrent que sur des questions-clés comme l’insécurité, le pouvoir d’achat et l’immigration, 70 % des Français sont d’accord avec lui.

    MONDE&VIE. A quel avenir politique peut prétendre Eric Ciotti après son coup d’état chez les Républicains ?

    ALAIN DE BENOIST : Son avenir politique va maintenant se confondre avec celui du Rassemblement national, mais il peut jouer un rôle de passerelle non négligeable en direction des membres de LR qui n’ont pas encore fait le même choix que lui.

    MONDE&VIE. Que signifie le succès au second tour de Marine Tondelier ? Un simple feu de paille lié aux manœuvres électorales du Nouveau Front populaire ou un retour de l’écologie sur la scène politique ?

    ALAIN DE BENOIST :L’écologie a conquis tous les esprits, mais les écologistes se sont discrédités. Le cas de Marine Tondelier relève pour l’instant de l’anecdote. Comme Sandrine Rousseau, j’ai tendance à voir en elle un personnage plutôt pittoresque, sinon burlesque.

    MONDE&VIE. Malgré les prophéties, le parti présidentiel sauve les meubles et semble désormais inscrit pour longtemps dans le paysage politique français. Qu’en pensez-vous ?

    ALAIN DE BENOIST : Il ne sauve nullement les meubles !  Il va certes s’efforcer de débaucher quelques LR non ciotistes et quelques sociaux-démocrates modérés, mais je doute que cela lui serve à grand-chose. Je le vois plutôt comme le grand perdant. Il avait justifié sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale par un souci de « clarification ». En fait de clarification, il a créé une situation totalement opaque et chaotique. En fait de dissolution, il a d’abord dissous son ancienne majorité, il a dissous le macronisme et il s’est en quelque sorte dissous lui-même.

    Trois grands blocs de taille comparable vont demain coexister à l’Assemblée nationale. Mais aucun ne possède une majorité lui permettant de gouverner. Avec 168 députés, Ensemble est loin de retrouver les 250 députés que possédait Macron dans la précédente législature, pour ne rien dire des 350 députés qu’il avait fait élire en 2017. Le Nouveau Front de gauche, de son côté, avec 182 députés, se situe encore en dessous des 250 macroniens qui siégeaient au Parlement ces derniers mois.

    Par ailleurs, alors que le Rassemblement national, avec ses alliés républicains regroupés autour d’Eric Ciotti, forme un bloc relativement unifié, ses deux concurrents sont tout sauf unis. Ce sont des agrégats hétéroclites, c’est-à-dire des coalitions de circonstance. Nous entrons dans une période d’instabilité, de rivalités incessantes et de discussions permanentes, où les gouvernements successifs risquent de ne pas durer plus longtemps que sous la IVe République, le tout sur fond de guerre en Ukraine et de tensions internationales d’une gravité exceptionnelle. Au parlement, le groupe Renaissance a déjà commencé à se disloquer. Les Républicains vont connaître de nouvelles scissions avant de disparaître définitivement. Le Nouveau Front de gauche se cassera en morceaux à la première occasion.

    Quel que soit le Premier ministre qu’Emmanuel Macron décidera de nommer, il aura le plus grand mal à trouver une majorité pour gouverner (d’autant que les « grandes coalitions » à l’allemande ne sont pas dans la tradition française). Le chef de l’État, dont les proches ont déjà commencé à s’éloigner – à la façon dont les rats quittent un navire en train de couler – a clairement perdu la main. Il a réussi une sorte de coup d’État institutionnel, mais il risque d’emporter la France dans son échec. Il a fait perdre au RN une bonne centaine de circonscriptions, mais il n’est pas arrivé à enrayer sa progression. La dynamique reste nettement du côté du Rassemblement national, qui est aujourd’hui le premier parti de France.

    MONDE&VIE. LFI restera-t-il le parti extrême que ses ennemis veulent qu’il soit ? Ne va-t-il pas plutôt se fondre dans le paysage politique, en devenant une succursale française de la gauche américaine et de son appel à la colère et au désordre ?

    ALAIN DE BENOIST : Je ne le vois pas se fondre dans le paysage politique, ni se rallier à une gauche américaine déjà éminemment représentée par Raphaël Glucksmann. Au soir du second tour, Mélenchon a prononcé un grand discours lyrique d’où il ressortait que LFI avait remporté la victoire. En réalité, LFI est aujourd’hui minoritaire au sein du Nouveau Front de gauche, ce qui n’était pas le cas à l’époque de la NUPES. Mais Jean-Luc Mélenchon, qui est moins mauvais stratège qu’on ne le croit, raisonne visiblement sur long terme. Il n’a sans doute pas tort.

    Le centre étant appelé à s’éroder progressivement, s’il est à la fois attaqué par le RN et par LFI (dont les intérêts coïncident sur ce point), la logique voudrait qu’à la prochaine élection présidentielle, Marine Le Pen (ou Jordan Bardella) se retrouve au second tour face à un homme comme Jean-Luc Mélenchon. Elle aurait toutes chances de sortir vainqueur d’un tel duel, d’autant que la situation du pays se sera encore dégradée, tandis que la frustration et la colère de ses partisans aura continué d’augmenter. D’ici là, il faut s’attendre à une paralysie institutionnelle quasi totale, à de l’instabilité, à de la violence sans doute. La Ve République n’avait encore jamais connu cela. C’est une situation inédite. 

    Alain de Benoist, propos recueillis par Guillaume de Tanoüarn (Monde et Vie, 21 juillet 2024)

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  • Mélenchon et la fin du populisme de gauche...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Denis Collin, cueilli sur La Sociale et consacré au naufrage de Mélenchon et de la France insoumise après leurs prises de position favorables à la mouvance islamiste et au port du voile. Agrégé de philosophie et docteur ès lettres, Denis Collin est l’auteur de nombreux ouvrages consacrés à la philosophie, à la morale et à la pensée politique, dont Introduction à la pensée de Marx (Seuil, 2018) et Après la gauche (Perspective libres, 2018).

     

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    LFI et l'islamisme

    Comparée aux dramatiques problèmes sociaux qui assaillent la majorité des habitants de ce pays, comparée à la réforme de l’assurance-chômage, à la réforme en cours des retraites, et à la liste interminable des mauvais coups de ce gouvernement Macron-Philippe, gouvernement le plus à droite depuis Pétain, la querelle de l’islamophobie pourrait paraître mineure et ne concerner qu’une minorité d’agités des réseaux sociaux comme le disent les commentateurs de Radio-Paris (« Radio Paris ment… »), pardon de France-Inter ou France-Culture (où il y a de moins en moins de culture).

    Pourtant l’appel à manifester le 10 novembre 2019 contre « l’islamophobie » marque symboliquement un tournant qu’on peut dire décisif. On savait depuis longtemps que le NPA, l’UNEF ou les Verts avaient pour l’islamisme les yeux de Chimène. On savait certains secteurs du PCF ou de LFI déjà passablement gangrénés. Mais là un pas a été franchi. Mélenchon et tout le groupe parlementaire LFI appellent à manifester derrière le ban et l’arrière-ban de l’islamisme « Frères Musulmans », le CCIF, les prêcheurs les plus réactionnaires, les plus misogynes, les pires partisans d’un islam oppresseur des femmes comme Nader Abou Anas. Mélenchon, jadis républicain laïque intransigeant (disait-il) est maintenant à la remorque des islamistes – même s’il continue de dire qu’il défend simplement le droit des musulmans de pratiquer leur foi, alors qu’il s’agit de bien autre chose : EELV, NPA, LFI, PCF etc. apportent leur soutien à l’entreprise de soumission des musulmans français à l’organisation factieuse des Frères Musulmans et autres intégristes qui veulent imposer le port du voile à toutes les femmes réputées musulmanes. La France Insoumise est devenue la France Soumise, la France de la soumission.

    Ce lâche abandon, cette capitulation en rase campagne parachève l’effondrement de la « gauche ». Les partisans enragés de la PMA (et de facto de la GPA), les « féminismes 2.0 » sont maintenant à la remarque de ceux qui pendent les homosexuels dans les pays où ils ont le pouvoir, de ceux qui veulent cantonner les femmes à la maison pour satisfaire les besoins de leur mari (faute de quoi elles seront persécutées par les anges) ! Dans ce monde de fous, où tout est mis cul par-dessus tête, le mouvement ouvrier, les travailleurs dépendants et indépendants, les petits artisans et paysans, tout ce qui constitue le « petit peuple » de ce pays est désormais privé de toute représentation politique. Pour le plus grand bonheur de Mme Le Pen qui compte bien tirer les marrons du feu. D’ailleurs certains sondages indiquent que 63% des électeurs de LFI seraient prêts à voter pour Marine Le Pen dans un second tour présidentiel face à Macron, pendant que Mélenchon a perdu toute chance sérieuse dans cette course.

    Jupiter rend fous ceux qu’il veut perdre, disait un proverbe latin qui s’applique à merveille aux chefs de LFI. Il y a des explications plus prosaïques : les municipales approchent, les derniers bastions du PCF et ceux de LFI sont en Seine-Saint-Denis, là où les islamistes détiennent souvent la clé du scrutin. LFI a vendu son droit d’ainesse pour un plat de lentilles électorales qu’elle ne mangera jamais, car les islamistes ne veulent pas être flattés, ils veulent le pouvoir.

    Comment cela est-il possible ? Comment les espoirs nés de la campagne de Mélenchon en 2017 et du résultat formidable du premier tour ont-ils pu être gâchés à ce point ? On peut chercher les fondements théoriques du désastre dans la pensée du « lider maximo » : ses livres L’ère du peuple, Le hareng de Bismarck ou encore De la vertu sont des livres à prétention théorique de la plus grande confusion d’où émerge tout de même l’idée qu’il faut changer de « sujet révolutionnaire » pour remplacer le vieux prolétariat par le « peuple urbanisé ». Cette bouillie « théorique » est parfaitement compatible avec la pensée de cette autre grande spécialiste en bouillie « post-marxiste », Chantal Mouffe, une des grandes inspiratrices de Mélenchon, quoi qu’il s’en défende et prétende n’avoir jamais lu Mouffe. Comme son alter ego Macron, Mélenchon a cultivé sa propre image de « prince philosophe ». Dans le désert intellectuel de ce pays, il a pu donner le change. Mais la réalité a montré qu’il n’était ni prince (au sens de Machiavel) ni philosophe.  Cette faiblesse théorique camouflée par une véritable maestria rhétorique n’est cependant pas l’explication suffisante de la déconfiture de LFI.

    Le programme de LFI, « L’avenir en commun » (AEC), devenu le livre sacré du mouvement, comporte à côté d’excellentes choses, des ambiguïtés et de non-dits et même de franches absurdités. Nous avions cru (un peu naïvement) que les désaccords avec le programme passeraient au second plan face à la dynamique du mouvement dans la campagne de 2017. Cela aurait été possible si LFI était devenue un véritable « intellectuel collectif », c'est-à-dire un parti avec des militants qui discutent de l’orientation, de l’analyse de la situation. Mais Mélenchon s’est opposé avec la plus extrême fermeté à la transformation de LFI en parti. Le mouvement devait rester « gazeux » pour que le leader charismatique, le chef du « parti personnel » (cf. Mauro Calise, Il partito personale. I due corpi del leader.) puisse en garder la maîtrise. Le mouvement gazeux est d’ailleurs en voie de liquidation puisqu’il n’a pas de stratégie pour les municipales (alliances au cas par cas avec des listes « citoyennes ») après avoir subi une sévère raclée aux européennes. On sait cependant que, derrière le parti personnel, il y a des groupes différents qui agissent au sommet, que les élus du 93 ont leurs propres intérêts, que les « héritiers » de Mélenchon se bousculent au portillon.

    Mais le gaz s’évapore. On ne compte plus les groupes de la France Insoumise dissouts dès que leur orientation contredisait les vues (du moment) du chef suprême. Ainsi le groupe Hebert, dissout pour cause de laïcisme. Nombreux sont les dirigeants de LFI qui ont claqué la porte ou ont été exclus sur un tweet du chef : Liem Hoang Ngoc, économiste venu du courant Emmanuelli du PS, François Cocq, pilier du Parti de Gauche, Charlotte Girard, la veuve du « fils » trop tôt disparu, François Delapierre, Georges Kuzmanovic, qui a fondé « République souveraine », Henri Pena-Ruiz, lynché aux journées d’été 2019 par les islamistes de LFI, Thomas Guénolé, sans parler de tous ceux qui se sont éloignés sans rien dire. Le capital de sympathie que le candidat Mélenchon s’était attiré dans certains milieux intellectuels « antilibéraux » est presque entièrement dilapidé.

    Délaissant l’idée un peu gramscienne d’un « bloc de classes » populaire, Mélenchon a adopté avec près d’un demi-siècle de retard toutes les théories gauchistes qui firent florès au lendemain de mai 68. Oubliant que « tout ce qui bouge n’est pas rouge », il se laisse balloter par les courants les plus délirants. Car l’islamisation de LFI se combine avec l’influence des végans en la personne de Bastien Lachaud, un ardent militant de la fermeture des abattoirs et de la « libération animale », avec expéditions nocturnes dans les élevages. On cultive aussi avec passion toutes les innovations sociétales : ainsi Mélenchon a déclaré que la filiation était toujours sociale et seulement sociale et apporté son soutien à Macron dans l’affaire de la « PMA pour toutes ». Il rejoint ainsi les aspirations de son « peuple urbanisé » de petits bourgeois intellectuels de style et de pensée « californiens », puisque c’est en Californie et dans les universités américaines que se sont développées ces inventions et notamment celle de « parent d’intention » qui sous-tend le discours mélenchonien.

    Le soir du premier tour de la présidentielle de 2017, Mélenchon a proclamé lui-même sa propre défaite. Alors que s’ouvrait l’opportunité de la construction d’un nouveau parti populaire, laïque, républicain et social, il s’est suicidé en direct en pleurnichant qu’on lui avait volé sa victoire. Cette explosion en vol du « lider maximo » en a montré les limites et la ligne erratique suive après l’a confirmé. Les législatives devaient être la revanche de LFI et Mélenchon se voyait déjà premier ministre de Macron. Ensuite on a eu un tournant « gauchiste » qui conduit à la situation actuelle avec entre temps les errances européennes et les retrouvailles avec Tsipras au Parlement européen dans le groupe GUE.

    Un ancien de LFI écrivait, il y a plusieurs mois, que « le moment Mélenchon » est passé. Rien de plus vrai.

    Souvenons-nous : « il n’est pas de sauveur suprême, ni Dieu, ni César ni tribun. Producteurs sauvons-nous nous-mêmes, décrétons le salut commun ! »

    Denis Collin (La Sociale, 5 novembre 2019)

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