Les éditions Gallimard publient cette semaine un nouveau volume du journal de Jean Clair, intitulé La part de l'ange, qui recouvre les années 2012-2015. Conservateur des musées de France, Jean Clair est l'auteur d'essais sur l'art, comme Considérations sur l’État des Beaux-Arts (Folio, 2015) ou Hubris (Gallimard, 2012) mais est également un critique lucide et parfois féroce de notre société, comme dans son Journal atrabilaire (Folio, 2008) ou dans L'hiver de la culture (Flammarion, 2011).
" La part de l'ange est la part du fût occupée par l’«esprit» volatil d’une distillation. C’était aussi la part de l'oreiller laissée vide pour l’ange qui veille sur le sommeil de l’enfant. C’était, dans les sociétés anciennes, l’offrande aux dieux, les prémices d’une récolte, pour assurer les moissons futures.
Une société moderne exclut le don à des puissances invisibles, génies ou divinités. Le prix y remplace la valeur, y compris pour ce qui est sans prix. Mais c’est se condamner à la stérilité et au désespoir.
Historien de l’art, auteur d'expositions mémorables comme «Mélancolie», l’auteur de ce Journal a été l’observateur du changement : le Musée imaginaire est devenu une salle de ventes. Il s’en explique, parmi d’autres souvenirs, dans un entretien avec Malraux demeuré inédit.
Comment un enfant grandi dans le silence du pays mayennais a-t-il pu finir ses jours sous la Coupole où l’on discute chaque semaine des mots du Dictionnaire? À l’origine de cette trajectoire, qui le laisse aujourd’hui désemparé, une double expérience : la psychanalyse, dont il est très jeune un patient, gardant le silence dont il connaît le prix, puis la découverte de la peinture qui, mieux que la littérature, garde elle aussi le silence.
Pour la première fois, Jean Clair donne comme sous-titre à son texte Journal 2012-2015, comme s’il reconnaissait que ses écrits littéraires parus chez Gallimard, depuis le Court traité des sensations en 2002, jusqu’au Dialogue avec les morts en 2011 et aux Derniers jours en 2013, étaient les pans d’une même œuvre, fascinante à plus d’un titre, qui le met au niveau des grands diaristes, et dont La part de l’ange est le nouveau volume. "