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Voyous à capuche et prédateurs financiers...

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Alain de Benoist, cueilli sur Boulevard Voltaire et consacré aux liens étroit existant entre le capitalisme financier et la criminalité...

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Plus dangereux que les voyous à capuche… les prédateurs financiers !

Alors qu’il se rendait à la Défense, notre collaborateur Xavier Raufer s’est un jour égaré du côté de Nanterre. Il demande alors son chemin à quelques voyous à capuche qui le reconnaissent aussitôt, puisque souvent vu à la télévision. Ils admettent le bien-fondé de son travail de criminologue, mais lui assurent que les vrais voyous sont là-bas, au sommet des tours de cette même Défense. Et Xavier Raufer d’avouer : « Le pire, c’est qu’ils ont raison… » Que vous inspire cette anecdote concernant la délinquance des « cols blancs » ?

Les « voyous à capuche » ne s’y trompent pas : ils savent où sont les « caïds ». N’a-t-on pas appris encore tout récemment que, grâce à des accords fiscaux secrets signés depuis 2002 par le Luxembourg, quelque 340 firmes transnationales (et non des moindres : Pepsi, Apple, FedEx, LVMH, AXA, la BNP, le Crédit agricole, la Banque populaire, etc.) ont pratiquement pu échapper à l’impôt, ce qui a fait perdre plusieurs dizaines de milliards d’euros de recettes fiscales aux États sur le territoire desquels elles réalisent leurs bénéfices ? Or, lesdits accords (« tax rulings ») ont été signés avec la bénédiction du nouveau président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui, en tant que Premier ministre du Luxembourg, a ainsi couvert de son autorité une vaste opération de spoliation « légale » des États. « Que dire d’une Europe qui prend le visage de M. Juncker, un homme qui, à la tête du gouvernement luxembourgeois, a organisé le pillage fiscal méthodique de tous les autres pays européens ? » a très justement déclaré Henri Guaino. Et que dire d’Emmanuel Macron qui, en visite à Bruxelles, a tenu à lui réaffirmer toute sa « confiance » ?

Mais ce n’est là que la pointe émergée de l’iceberg. On pourrait tout aussi bien évoquer la façon dont les banques d’affaires ont, après avoir reçu des milliers de milliards de dollars de la part des banques centrales pour faire face à la crise financière de 2008, détourné la plus grande partie de cette manne, théoriquement destinée à faire repartir l’économie réelle, pour l’investir dans des marchés jugés plus rentables et des spéculations douteuses.

Pourquoi en parle-t-on si peu ?

On en parle de temps à autre, mais cette délinquance là ne gêne personne, parce que personne ne la voit. Les requins de la finance ne pourrissent pas la vie des « honnêtes gens » dans la rue, ils ne sont responsables d’aucune « incivilité », ils ne tuent pas pour s’emparer d’un téléphone portable ou pour une cigarette refusée. Ils font simplement à grande échelle ce que les racailles font dans le style besogneux. Ce sont des industriels de la prédation, quand les autres ne sont que de petits artisans. En matière de fraude fiscale, Jérôme Cahuzac et Thomas Thévenoud ont également beaucoup fait parler d’eux, alors qu’à côté des multinationales, ils ne représentent même pas la moitié d’une virgule dans une note de bas de page.

Il semble qu’argent « sale » et argent « propre » coexistent de plus en plus, au point que les pandores ont le plus grand mal à s’y retrouver.

Voyez la banque HSBC (Hongkong and Shanghai Banking Corporation), qui vient d’être inculpée pour des faits de fraude fiscale aggravée, de blanchiment d’argent sale et même d’organisation criminelle, suite à une enquête ouverte en Belgique il y a plusieurs années. C’est en effet l’un des traits caractéristiques de la grande criminalité internationale que profits licites et illicites se mêlent désormais dans une vaste zone grise où les radars ne permettent même plus de piloter à vue.

Le grand public, qui ne réalise pas l’ampleur de cette criminalité transnationale (où la contrefaçon, pour ne citer qu’elle, est en passe de détrôner le trafic de drogue), ne sait pas non plus que la délinquance en col blanc échappe le plus souvent à toute sanction. Les chiffres dont on dispose donnent pourtant le vertige. D’après le FMI, sur un PIB mondial qui se montait en 2006 à 48.144 milliards de dollars (39.000 milliards d’euros), l’argent volé, détourné ou évadé n’a pas représenté moins de 1000 à 2.500 milliards de dollars (800 à 2.000 milliards d’euros). À eux seuls, les échanges internes des multinationales, dont les filiales s’activent pour échapper à l’impôt, représentent de 700 à 1000 milliards de dollars (560 à 800 milliards d’euros) par an. D’autres auteurs estiment que l’argent blanchi dans le monde représente 800 milliards de dollars (650 milliards d’euros) par an. L’économiste Gabriel Zucman évalue de son côté l’argent caché dans les paradis fiscaux à près de 8.000 milliards d’euros, ce qui représente pour les États une perte annuelle d’environ 130 milliards d’euros, dont 17 milliards pour la France. On est loin du casseur de banlieue, pour ne rien dire du Voleur de bicyclette de Vittorio De Sica (1948) ! Nous sommes aujourd’hui à l’époque de la prédation généralisée.

Alain de Benoist, propos recueillis par Nicolas Gauthier (Boulevard Voltaire, 23 novembre)

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